Parlons mondialisation

Recensions

Eddy Fougier, Parlons mondialisation, Paris, La Documentation Française, coll. « Entrez dans l’actu », 2017, 93 p.

Eddy Fougier politologue, consultant indépendant et chargé d’enseignement à Sciences Po Aix-en-Provence et Audencia Business School, se propose dans cet ouvrage à vocation pédagogique de ne rien nous cacher du phénomène bien connu de la mondialisation : délocalisations des entreprises, migrations massives, paradis fiscaux, américanisation culturelle, désuétude du cadre national et populaire, connections communautaristes, etc. La définition que l’auteur reprend est la suivante : « l’ensemble des phénomènes, dans tous les domaines de la vie en société concourant à l’accroissement des interdépendances entre les acteurs et qui tend à construire un système de dimension planétaire » (P. Claquin et alli), ce qui obère, en suggérant que l’interdépendance est égale, le rôle des puissances globales manipulant tel ou tel aspect du processus. En réalité, Eddy Fougier se charge, au sein de cette collection très pédagogique de la documentation française, de s’attaquer à l’élément dit anxiogène que véhicule la mondialisation. En la resituant dans une perspective historique longue par la comparaison avec la révolution industrielle et au choc psychologique qu’elle aurait créé, par exemple ; en normalisant également, par sa complexité, le décalage entre l’élite experte, mobile et nomade et « le reste de la population » ; en confirmant que l’Union européenne est bien l’échelon régional de la mondialisation, etc. L’auteur n’hésite pas cependant à indiquer que la poursuite du processus ne va pas de soi et que ce dont elle s’était passé jusqu’à maintenant, rien moins que l’adhésion des peuples et l’attraction sur la pensée, deviennent peut-être une condition sine qua non de sa continuation. Reste, malgré tout, une gêne pour le lecteur lorsqu’il aura feuilleté la dernière page : si la volonté d’orientation de l’ouvrage apparaît légère, elle est intelligente. Elle suggère le facteur de prospérité, l’échelle adéquate à la résolution de nombreux problèmes grâce à une gouvernance globale surmontant l’échec du multilatéralisme. Elle dissimule un peu le facteur fortement américain de la globalisation. Mais surtout, négativement, elle discrédite tous ceux qui s’y opposent en les présentant comme ceux qui « rejettent toute ouverture économique, culturelle et/ou politique » et de « convictions xénophobes », ce que l’on peut traduire en réalité par le refus des migrations massives et incontrôlées, du multiculturalisme et du dépassement du cadre national comme expression de la communauté la plus vaste acceptée par les peuples. La conclusion est tout à fait symptomatique de ce qu’il y a une bonne critique de la mondialisation, qui est celle de la gauche, les alter mondialistes, mais dont le défi, le dilemme, est que la correspondance sociale de ses partisans hyper-connectés avec le phénomène la conduit à se suicider culturellement et politiquement : « Dans ce contexte, (la gauche) doit, soit accepter la mondialisation au risque de se renier, soit privilégier une voie de transformation sociale au risque de conduire à une impasse ». La conséquence électorale de ce choix matérialiste et relativiste s’étale sous nos yeux depuis quelques années, le choix politique de la gauche dit de gouvernement est celui de la catégorie sociale aisée des centres de grande ville, l’élite boboisée, des multiples communautarismes, ceux que leur revenus autorisent à être libertariens, etc., c’est-à-dire les plus en cohérence avec le projet de déracinement culturel et civilisationnel qu’est la mondialisation.

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