Les enjeux des relations entre l’Arabie saoudite, la Syrie et le Yémen

Le huitième intervenant, Mr. Fayçal Jalloul, écrivain et journaliste libanais, sur « Les enjeux des relations entre l’Arabie saoudite, la Syrie et le Yémen »
Partie 13; Actes du colloque : Où va l’Arabie saoudite?
Le 10 mars 2016
Assemblée nationale :
Académie de géopolitique de Paris

Mr. Jalloul dit : Il y a un an, l’Arabie Saoudite a formé une alliance militaire pour se lancer dans une guerre sans merci contre le Yémen. Justifiée au nom du soi-disant maintien de la « légitimité yéménite » démocratique, la poursuite de cette guerre est conditionnée par le retour au pouvoir à Sanaa du président Abed Rabbo Mansour Hadi et de son gouvernement dit « légal ». Les Saoudiens prétendent agir au nom des principes inscrits dans l’Accord du Golfe unanimement soutenu sur le plan international, y compris par la Russie.

En Syrie, l’Arabie Saoudite mène presque la même politique. Elle finance, forme et envoie des combattants dans ce pays et prend en charge un certain nombre de mouvements d’opposition armés afin de changer le régime syrien et de mettre en place un régime démocratique. Dans un cas comme dans l’autre, les guerres menées par l’Arabie saoudite soulèvent toujours la même question : pourquoi un régime monarchique se bat-il pour la démocratie partout ailleurs mais jamais chez lui ? En réalité, les raisons de l’engagement militaire de l’Arabie saoudite dans ces pays sont avant tout de nature géopolitique, historique et communautaire.

On peut en effet expliquer la guerre de l’Arabie saoudite contre le Yémen et la Syrie par la conflictualité traditionnelle entre républiques et monarchies. Cette dualité de régime est un héritage du colonialisme : les Français ont construits les régimes républicains, les Britanniques les Etats monarchiques, et l’antagonisme entre ces deux systèmes a perduré jusqu’à nos jours. La fin de la Guerre froide a rendu possible une guerre de l’Arabie saoudite lancée contre ces deux pays, désormais dépourvu de la protection de l’Union soviétique, jusqu’alors garante du maintien de l’équilibre régional et interarabe. Les Etats-Unis, après l’échec de la guerre en Afghanistan et en Irak, annoncèrent leur intention de quitter le Moyen-Orient. Ce tournant majeur dans la stratégie américaine s’est accompagné du déclenchement des Printemps arabes et a offert à l’Arabie saoudite une occasion rêvée pour en finir avec ses rivaux yéménite et syrien.

L’Arabie Saoudite espère gagner la guerre au Yémen et en Syrie pour pouvoir remodeler tout l’espace régional, signer la paix avec Israël aux conditions de l’Etat juif et mettre ainsi fin à l’influence iranienne dans la région, en grande partie alimentée par la colère anti-israélienne. Au Yémen, le régime saoudien espère aussi assurer l’exportation du pétrole à l’étranger sous un régime sûr et fédéral, et mettre la main sur le détroit de Bâb el Mandeb. Il entend également protéger sa rive de la Mer rouge et, peut-être, annexer la région stratégique du Hadramaout. Il n’en reste pas moins que la guerre menée par les Saoudiens dans ces deux pays se déroule très mal et qu’en cas d’échec, le prix à payer sera très cher, et ira peut-être jusqu’à la perte du trône de leur Royaume.

 

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