L’Algérie face aux nouvelles reconfigurations géopolitiques : opportunités et défis

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Brahim Oumansour

Analyste en géopolitique et chercheur associé à l’IRIS et au CERMAM


L’Algérie est dotée d’un fort potentiel géostratégique, humain et économique, qui devrait lui permettre de devenir un acteur régional incontournable. Sa superficie (2,382 millions de km²) en fait le pays le plus vaste du pourtour méditerranéen et le plus grand pays d’Afrique. Situé au carrefour de trois continents, Afrique, Asie et Europe, le pays regorge de ressources énergétiques et des minerais, qui lui procurent des atouts géostratégiques indéniables. En revanche, la diplomatie algérienne se heurte à des crises internes et externes qui risquent de compromettre ses ambitions régionales.

Il faut replacer le rebond diplomatique d’Alger dans un contexte régional et international difficile, qui connaît une évolution considérable, marquée par l’instabilité, la montée de la menace terroriste et l’escalade de tensions interétatiques. Cette analyse vise ainsi à évaluer le poids et la visée diplomatique de l’Algérie et disséquer ses atouts géostratégiques et les défis auxquels le pays doit faire face.

Algeria is endowed with a strong geostrategic, human and economic potential, which should enable it to become a key regional player. Its surface area (2.382 million km²) makes it the largest country around the Mediterranean and the largest country in Africa. Located at the crossroads of three continents, Africa, Asia and Europe, the country abounds in energy resources and minerals, which give it undeniable geostrategic advantages. On the other hand, Algerian diplomacy is facing internal and external crises that risk compromising its regional ambitions.

The diplomatic rebound of Algiers must be placed in a difficult regional and international context, which is undergoing considerable change, marked by instability, the rise of the terrorist threat and the escalation of inter-state tensions. This analysis thus aims to evaluate the weight and the diplomatic aim of Algeria and to dissect its geostrategic assets and the challenges which the country must face.


depuis la chute d’Abdelaziz Bouteflika, l’Algérie tente de restaurer son rôle de puissance régionale. Alger compte sur plusieurs atouts : sa dimension territoriale gigantesque, qui regorge de ressources naturelles comprenant le gaz et le pétrole et des minerais comme le fer et le phosphate. Elle détient une armée puissante : classée deuxième en Afrique, après l’Égypte, elle est dotée de moyens modernes et d’armes de pointe. Sa population constitue une richesse considérable avec 43 millions de personnes, dont près des deux tiers ont moins de 30 ans.

Pourtant, le pays peine à sortir de sa dépendance économique et de ses crises chroniques, qui le fragilisent. La volonté d’Alger de revenir sur le plan régional se heurte à un contexte difficile marqué par l’instabilité régionale et une profonde reconfiguration géopolitique accompagnées de crises multiples, qui représentent des opportunités et des défis que le pays doit relever. Il importe d’analyser sa stratégie et sa capacité d’adaptation pour mieux répondre aux nouveaux défis et aux nouvelles menaces.

Sahara occidental et l’évolution du rapport de force entre Alger et Rabat

Le conflit du Sahara occidental constitue un facteur majeur de tensions entre l’Algérie et le Maroc sur fond de la concurrence pour le leadership de la région. Le regain des affrontements entre l’armée marocaine et le Front Polisario depuis fin 2020 a fait volé en éclat le cessez-le-feu de 1991, conduisant à une escalade sans précédent des tensions entre Alger – qui soutient le mouvement indépendantiste – et Rabat. Ces tensions, accompagnées d’une passe d’armes verbale et d’incidents diplomatiques, ont accéléré l’escalade qui a atteint son paroxysme par la décision d’Alger de rompre les relations diplomatiques avec le voisin le 24 août 2021 et de fermer son espace aérien – les frontières terrestres sont fermées depuis 1994.

Les autorités algériennes accusaient le Makhzen de provocation à la suite des déclarations du diplomate marocain à l’ONU, Omar Hilale, lors d’une réunion des non-alignés les 13 et 14 juillet 2021 à New York, évoquant dans une note le « droit à l’autodétermination » du « peuple kabyle ». En visite au Maroc entre les 11 et 12 août 2021, le ministre israélien des Affaires étrangères, Yaïr Labid, a exprimé des « inquiétudes au sujet du rôle joué par l’Algérie dans la région » et « son rapprochement avec l’Iran ».

De telles déclarations ont ravivé les tensions entre le Maroc et l’Algérie qui rétorque, à son tour, en accusant son voisin d’avoir apporté son soutien au Mouvement pour l’autodétermination de la Kabylie (MAK) et le mouvement islamiste Rachad, classés tous les deux comme organisations terroristes par les autorités algériennes. Les révélations de l’affaire d’espionnage Pegasus, du nom du logiciel développé par une société israélienne que Rabat aurait utilisé pour espionner de hauts responsables algériens, n’ont fait qu’envenimé davantage les relations entre les deux voisins.

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