LA PERSPECTIVE IRANIENNE DE LA QUESTION NUCLÉAIRE

Houshang HASSAN-YARI

Janvier 2008

De sa conception jusqu’aujourd’hui, le programme nucléaire iranien est teinté par des décisions politiques qui l’éloignent de ses aspects techniques et légaux. L’histoire du programme de l’énergie nucléaire de l’Iran a ses racines dans le rapport stratégique américano-iranien de l’ère prérévolutionnaire. À cette époque, la politique des États-Unis dans le Golfe Persique et l’Asie occidentale dépendait en grande partie de Mohammad Reza Pahlavi, le Chah de l’Iran (1941-1979) ; il jouait le rôle de rempart principal de l’Amérique dans la politique de l’endiguement de l’Union Soviétique dans la région.1 Cette association avec Washington devrait ren­forcer la pouvoir économique2 et militaire de l’Iran comme force dominante dans la région. En 1972, le Président Richard Nixon a annoncé la politique américaine sur la sécurité dans la région de Golfe Persique en identifiant l’Iran et l’Arabie Saoudite comme les deux piliers de cette politique.3 Il s’est engagé à permettre à l’Iran d’ache­ter toutes armes conventionnelles américaines dont il avait besoin. Ceci a mené à l’achat massif de plusieurs milliards de dollars d’armements par l’Iran au début des années 70.4 De plus, il y avait une entente tacite entre les États-Unis, l’Iran et Israël sur la suprématie militaire de ce dernier dans le Moyen-Orient proprement dit tandis que l’Iran dominerait l’Asie occidentale.5 Les différentes administrations américaines ont conclu que permettre à l’Iran de dominer le Golfe Persique com­bleraient le vide de pouvoir créé par le retrait britannique de la région vers le début des années 1970.6

Les origines du programme nucléaire iranien

En 1957, les États-Unis et l’Iran ont signé un accord de coopération nucléaire civile dans le cadre du programme américain d’Atoms for Peace. En décembre 1972, le gouvernement iranien a annoncé son intention de se doter des centrales nucléai­res pour la production de l’électricité dans les dix prochaines années. L’Iran a signé le Traité de non-prolifération nucléaire le 1er juillet 1968 et l’a ratifié le 2 février 1970. Le 15 mai 1974, l’accord de garanties TNP entre l’Iran et l’AIEA sera mise en œuvre.

Poussé par les États-Unis, le Chah a été déterminé à transformer l’Iran en État moderne et la puissance dominante au Moyen-Orient.7 Pour accéder à ce statut il fallait également embrasser de nouvelles innovations scientifiques et technologiques et les employer pour répondre aux objectifs stratégiques du Chah. Le Chah avait réalisé que pour la modernisation de l’Iran il avait besoin d’une source fiable d’éner­gie et accès à l’approvisionnement suffisant d’électricité pour le développement du­rable de son pays. La technologie nucléaire, bien qu’à ses débuts, était célébrée par l’Occident comme source fiable d’énergie. À cette époque, beaucoup en Occident ont vu les avantages potentiels de l’énergie nucléaire comme source infinie d’appro­visionnement en électricité. Par conséquent, en 1974 le régime royal a lancé un des programmes les plus ambitieux de la production de l’énergie nucléaire du monde et a projeté la capacité de la production de 23.000 mégawatt d’ici 1994.8

La connivence occidentale dans le programme nucléaire de l’Iran était profonde car les Occidentaux étaient les principaux bénéficiaires de l’abondance des pétro­dollars de l’Iran. Ils ont joué un rôle significatif en incitant l’Iran sur la nécessité d’embrasser l’énergie nucléaire. Les États-Unis et leurs alliés en Europe de l’Ouest ont joué un rôle critique dans la fourniture à l’Iran de la capacité de la technologie nucléaire avancée et le savoir-faire technique et en l’aidant dans le développement de son programme d’énergie nucléaire. Les États-Unis, la France, l’Espagne, l’Al­lemagne, le Royaume-Uni, l’Australie, le Danemark, l’Inde et l’Argentine ont aidé l’Iran dans son programme nucléaire en lui fournissant des réacteurs nucléaires et concluant des accords sur l’approvisionnement et association dans l’enrichissement du carburant. Les États-Unis ont même offert d’aider à former les ingénieurs nucléai­res iraniens à ses meilleures universités : M.I.T., Harvard et Cambridge.9 Une partie de motifs occidentaux pour aider l’Iran avec son programme d’énergie nucléaire a dû faire avec la nécessité d’aider l’Iran à réduire sa consommation domestique du pétrole. Des autres ont dû faire avec le besoin des industries occidentales de gagner des revenus pour accroître leurs économies. Les fabricants nucléaires principaux des pays industrialisés, confrontés à une diminution des ventes à la maison étaient désireux de se tourner vers les marchés d’exportation inexploités et plus lucratifs des pays en voie de développement.10 Et avec l’Iran gagnant des milliards de dollars des revenus du pétrole, grâce à l’augmentation des prix de l’OPEP et en raison de l’embargo arabe contre les pays occidentaux pro-israéliens pendant la Guerre d’Oc­tobre 1973, l’Iran est ainsi devenu un marché alléchant pour l’exportation d’énergie nucléaire. Ainsi, l’intérêt de l’Iran pour l’énergie nucléaire a été précipité par trois événements principaux : les développements sur les marchés de l’énergie du monde en 1973-74, l’existence des pressions externes sur l’Iran de dépenser ses pétrodollars en Occident et les soucis d’une réduction de ressources pétrolières.

Les événements sur les marchés de l’énergie du monde en 1973-74 ont ren­forcé le cas parmi les pays occidentaux sur les mérites de l’énergie nucléaire comme source alternative d’énergie pour les besoins domestiques. La décision des membres de l’OPEP de quadrupler le prix du pétrole a précipité les appels par des intéressés et des personnes définissant la politique énergétique dans les pays occidentaux sur le besoin d’utiliser des sources alternatives d’énergie telles que le charbon et l’éner­gie nucléaire. L’augmentation du prix de pétrole de $3 par baril environ à $12 par baril en raison de l’embargo arabe a sévèrement affecté les économies des pays occidentaux qui appuyaient Israël11 les plongeant dans la stagflation. Désormais, la stratégie politique des nations occidentales consistait à réduire leur dépendance au pétrole importé. Cela a encouragé beaucoup à considérer l’énergie nucléaire comme source alternative attrayante. Le consensus global parmi des puissances principales était que le prix du pétrole continuerait à monter tandis que le coût d’énergie nu­cléaire stabiliserait ou même diminuerait.

Le régime de Pahlavi a aussi cru en consensus global et estimations des coûts d’énergie nucléaire. Le Chah pensait qu’au lieu de bruler le pétrole dans les centrales électriques thermiques pour produire de l’électricité, l’Iran devrait exporter le pé­trole brut afin d’augmenter ses réserves en devise étrangère pour ses programmes de développements et produire l’électricité à partir des centrales électriques nucléaires à un coût inférieur.12 Le régime de Pahlavi croyait que le prix du pétrole continuerait à monter tandis que le prix de l’énergie nucléaire avait comparativement stabilisé. L’Iran a également pensé que le développement de l’énergie nucléaire soulignerait des efforts globaux de trouver et développer un produit de remplacement alternatif pour des combustibles fossiles, de ce fait préservant son pétrole pour un usage plus important dans les industries chimiques et pétrochimiques. Le Chah avait un vif intérêt pour le développement de ces industries en tant qu’élément major de son programme de modernisation.

Submergé dans la nouvelle richesse trouvée de ses ventes de pétrole, l’Iran a été pressé par l’Ouest de réutiliser son capital pour acheter les marchandises et les services occidentaux. Bijan Mossavar-Rahmani précise que l’Iran a jugé qu’il était sous une pression substantielle pour ‘recycler’ de nouveau ses pétrodollars récem­ment accrus dans l’économie des pays occidentaux. La pression a porté fruit et a eu comme conséquence la dépense par l’Iran des milliards de dollars dans l’achat des pays occidentaux des marchandises et des services comme les réacteurs nucléaires.13 En 1975, les États-Unis et l’Iran ont signé un accord qui a engagé l’Iran pour ache­ter environ 15 milliards de dollars de marchandises et services américains au cours des cinq prochaines années ; c’était le plus important accord de son genre signé par deux pays.14 Les États-Unis étaient clairement désireux et heureux de faire affaires avec l’Iran et d’accepter son argent pour aider son industrie nucléaire en difficulté et son économie nationale. Confronté à une balance des paiements en régression et ventes de la technologie nucléaire en baisse à la maison, les gouvernements déten­teurs et fournisseurs de cette technologie l’ont promue en Iran comme générateur du revenu. Il va sans dire qu’un des objectifs de cette entreprise a été de garder leurs industries nucléaires domestiques à flot.

De plus, la crainte du déclin brusque des ressources pétrolières iraniennes dans les décennies à venir a également joué un rôle significatif dans la décision du Chah pour embrasser l’énergie atomique. Dans les années 70, la production de pétrole de l’Iran est allée de 3 millions de barils par jour en 1973 à un record étonnant de 6 millions de barils par jour en 1978, une augmentation de 100 pour cent. La sagesse conventionnelle parmi des experts en matière d’énergie dans les années 70 était que l’Iran aura de la difficulté pour maintenir des exportations de pétrole à grande échelle après les années 80. Étant donné que la production industrielle en Iran a augmenté de manière significative à une moyenne de 11.3 pour cent par an de 1963 à 1972, il était entendu que l’industrialisation soutenue fasse augmenter la consommation nationale en énergie. C’était l’une des raisons pour lesquelles le Chah a commencé à poursuivre la quête de l’énergie nucléaire en premier lieu.15

C’était l’administration de Gerald Ford qui a recommandé à l’Iran la construc­tion d’une capacité d’énergie nucléaire importante comme mesure préventive contre un futur déclin dans les ressources du pétrole de l’Iran.16 Elle était d’avis qu’un tel investissement dans l’énergie nucléaire libérerait l’Iran en lui procurant les moyens d’exporter son pétrole vers les États-Unis et gagner des revenus nécessaires pour son développement. Un texte de stratégie déclassé, daté 1975, a déclaré que l’Iran devrait «se préparer contre le temps – environ 15 ans à avenir – quand on s’attend à ce que sa production de pétrole diminue brusquement.» Le gouvernement amé­ricain a convaincu le Chah que l’investissement dans l’énergie nucléaire libérera le pétrole qui aurait été autrement destiné pour la consommation locale. Ceci aurait permis au gouvernement iranien d’augmenter ses revenus en devises étrangères en bénéficiant de l’augmentation du prix de pétrole brut. Le Chah a été convaincu par des arguments américains annoncés en mars 1974, selon lesquels le « pétrole est un matériau noble, bien trop valeureux pour brûler… Nous envisageons produire, aussitôt que possible, 23 000 mégawatts d’électricité en utilisant des installations nucléaires. » Ceci est naturellement compréhensible étant donné que l’appétit des États-Unis pour le pétrole était et reste toujours insatiable : plus de pétrole libéré par un allié mieux sera pour des consommateurs américains et leur économie.

Un article publié dans le New York Times, en 1975, Iran Has Plans for When the Oil Runs Out, souligne le soutien occidental d’un programme iranien d’énergie nucléaire. L’article fait part de la profondeur de la participation occidentale dans le programme nucléaire iranien avec peu de soucis pour un prétendu programme ira­nien d’armes nucléaires. L’article commence par une affirmation : « Conscient du fait que ses réserves en pétrole de 60 milliard-barils seront un jour épuisées, l’Iran a dépensé un milliard de ses pétrodollars dans une source énergétique alternative qui est l’énergie nucléaire. »17 Le New York Temps continue : « Des accordes ont été conclus avec la France, la République Fédérale d’Allemagne et la semaine dernière avec les États-Unis. » Ces développements ont, entre d’autres, démontré le souci du Chah et de l’Occidental du déclin anticipé du pétrole iranien, sa capacité de générer du revenu et son aptitude de sécuriser sa future prospérité. En 1974, l’Iran a prêté 1 milliard de dollars à la Commission de l’énergie nucléaire française pour la construction des installations d’enrichissement d’uranium qui appartenaient au Consortium Eurodif. En retour, 10% des actions du Consortium ont été trans­férées à l’Iran. La même année, un accord fut signé entre l’Iran et la France sur la construction de cinq centrales nucléaires qui seront alimentées par l’uranium enrichi en France, chacune engendrant 1 000 mégawatts d’électricité. En 1974 encore, un autre accord était signé entre l’Iran et la compagnie Framatome fran­çaise sur la construction de deux centrales nucléaires à Bandar Abbas chacune de 900 mégawatts. L’année faste, c’est aussi en 1974 que l’Iran et la société Kraftwerk Union (KWU), une filiale de Siemens, de l’Allemagne ont signé un accord pour la construction de deux centrales de 1 293 mégawatts chaque à Bouchehr. Les travaux ont commencé à Bouchehr en 1975, la même année où l’Iran et les États-Unis ont signé un accord pour la construction de huit centrales nucléaires d’une valeur de 6.4 milliards de dollars. Enfin, en 1977 l’Iran et la France concluent un accord pour la construction de deux centrales nucléaires à Darkhoin (Ahwaz) dont chacune pro­duirait 900 mégawatts. L’Iran a payé deux milliards de dollars à la partie française.

Donc, la nucléarisation du secteur énergétique de l’Iran était un choix stratégi­que pour le Chah dont le règne sera écourté par la révolution islamique en 1979. Il ne verra pas le fruit de sa quête d’une société moderne fondée sur l’énergie nucléaire et développée par les pétrodollars.

De plus, outre les raisons mentionnées ci-dessus, il y a l’élément supplémentaire de grand prestige lié à l’énergie nucléaire.18 La construction et l’exploitation des centrales électriques nucléaires est une immense réussite technique et scientifique. On peut prétendre que l’ingéniosité liée à posséder et à actionner une centrale nu­cléaire et la maîtrise de la science atomique accorde à un pays un certain niveau de maturité dans la sophistication technologique et dans les étapes de la modernisation qui est souvent associée aux économies industrialisées du monde. La maîtrise de la science atomique entre parfaitement bien dans le plan grandiose de Mohammad Réza Pahlavi de transformer l’Iran en État moderne et puissance régionale.

À l’époque, beaucoup de gens n’ont pas douté que l’Iran pourrait s’accaparer du savoir-faire de produire les armes atomiques comme un résultat direct de la maîtrise du cycle complet de programme d’énergie nucléaire ; il paraît que per­sonne n’a semblé s’inquiéter de cette éventualité, particulièrement l’administration américaine. Comme le contexte des tensions géopolitiques Est-Ouest dominait les relations interétatiques à cette époque de Guerre Froide, le maintien d’une alliance positive et les relations stratégiques avec l’Iran ont été jugées plus importantes que toute autre considération aux États-Unis. Et puisque Téhéran était un allié dévoué de Washington la question de l’Iran devenir nucléaire ne s’était jamais posée. Henry Kissinger, le Secrétaire d’État du président Ford a remarqué la nonchalance des États-Unis sur la possibilité d’un Iran nucléaire en affirmant, en 2005, que « je ne pense pas que la question de la prolifération soit soulevée. »19

Révolution islamique et question nucléaire

Le changement de régime qui a suivi la victoire de la révolution de 1979 s’est traduit par l’arrêt de la coopération nucléaire irano-américaine. Le régime révolu­tionnaire a hérité l’Organisation iranienne de l’énergie atomique (OIEA) avec plus de 20 000 employés, une dette importante et une question fondamentale à répon­dre : que faire avec cette organisation dont la responsabilité principale consistait à la supervision de la réalisation des programmes nucléaires en Iran à la lumière du projet de la construction de 23 centrales nucléaires ? Même si l’existence de l’OIEA n’a jamais été remise en question sous le gouvernement provisoire (GP) de Mahdi Bazargan, il fallait mettre de l’ordre dans son budget et ses actions. Il a été décidé de réduire la taille de l’OIEA et contrôler ses dépenses. L’Organisation avait décidé de construire 23 centrales pour produire 23 000 mégawatts d’électricité sans coor­dination avec le Ministère de l’Énergie qui avait la responsabilité d’édifier un réseau de distribution de la même électricité !20

Un autre problème que l’OIEA devrait confronter émanait des groupes verts qui, à l’instar des écologistes européens du début des années 80, s’opposaient aux installations nucléaires en général et au programme nucléaire iranien en particu­lier. Ces groupes s’interrogeaient sur la pertinence de développer un programme nucléaire dans un des plus grands pays producteurs du pétrole. Le fait étonnant est l’explication identique à celle du Chah que les dirigeants révolutionnaires ont four­nie pour justifier la continuation de ce programme : le besoin d’exporter le pétrole pour développer le pays à l’aide des pétrodollars. A cela il faut ajouter l’insuffisance de la production et la distribution d’électricité que les habitants des régions chaudes du pays décrient avec les interruptions fréquentes du courant au cours des mois d’été.

Un troisième problème était lié aux rivalités internes et questions politiques. Le Parti communiste Toudeh était très actif au sein de l’Organisation à côté de l’Orga­nisation des Moudjahidin du Peuple (OMP/MEK) qui y avait des assises profon­des. En plus, il existait des membres des Associations islamiques dans l’OIEA. Ce mélange hétéroclite avait créé un climat explosif qui rendait impossible toute acti­vité normale dans une organisation sensible au sein d’une société révolutionnaire en guerre avec l’Irak.

La situation était particulièrement survoltée dans la centrale nucléaire de Bouchehr où les compagnies subsidiaires de Siemens avaient abandonné le travail parce que l’OIEA avait échoué dans ses paiements à cause des problèmes budgétai­res de l’Organisation d’une part et les sentiments antiallemands de l’autre. Devant la montée des protestations contre la poursuite du travail, le GP a ordonné une étu­de de faisabilité qui couvrirait six points : 1. La sécurité de la centrale à la lumière des failles dans l’étude originale sur le choix du site dans une région fréquemment touchée par les tremblements de terre21; 2. La difficulté d’approvisionnement en combustible (fuel cycle) et la dépendance à plusieurs pays pour alimenter les instal­lations : 3. Les questions de sécurité liées à l’enfouissement des déchets nucléaires ; 4. L’absence d’un réseau de distribution pour évacuer les 2 400 mégawatts d’élec­tricité que la centrale devrait produire ; 5. Le fardeau fiscal très important engendré par le design particulier de la centrale pour la sécuriser contre tout tremblement de terre ; 6. Les considérations écologiques et le risque de contamination de l’environ­nement national et international.

A la conclusion de ce débat, comme le progrès du travail à la centrale de Bouchehr était 60% et à celle de Darkhoin (Ahwaz) n’était que 10%, le GP et le Conseil Révolutionnaire ont décidé d’arrêter le projet de Darkhoin et continué la construction de Bouchehr. Il a été également décidé à payer les arriérées accumulées à la compagnie allemande. Cette décision a été prise quand les compagnies alleman­des avaient déjà arrêté le travail et porté la question de non-paiement de leur dû devant une cour.

Donc, contrairement à la croyance générale qui accuse le GP et l’Iran d’être responsable de l’arrêt des activités de Bouchehr, c’étaient les compagnies contrac­tantes qui, pour des raisons financières d’abord et politiques par la suite, ont décidé d’arrêter le travail sur la centrale. Le processus d’enrichissement d’uranium pour les installations iraniennes tel qu’il existait avant la Révolution ne pouvait pas conti­nuer dans le climat politique de l’après-1979.

Avant la Révolution, tout le cycle d’enrichissement était entièrement fait l’ex­térieur de l’Iran. Le cycle est un processus fort complexe qui regroupait l’ensemble des opérations industrielles suivantes : extraction de l’uranium des mines ; fabri­cation du combustible ; utilisation dans le réacteur; retraitement du combustible déchargé du réacteur; traitement et stockage des déchets.22 Pour faire ce travail il y avait des ententes de coopération vraiment internationale avec la participation de la Namibie, l’Afrique du Sud, le Royaume-Uni, la France, l’Allemagne de l’Ouest et même l’Union Soviétique qui s’occupait de la préparation des assemblages de combustible. La dernière étape, la consommation de l’uranium 235, le ‘chargement de cœur de la centrale nucléaire’, s’effectuait par la compagnie KWU qui alimentait le réacteur.

L’arrêt des activités liées au programme nucléaire iranien a continué jusqu’à l’ar­rivée au pouvoir du Premier ministre Mir-Hossein Mousavi (1981-1989). Ce dé­veloppement a coïncidé avec une accalmie relative sur la scène nationale provoquée par la guerre avec l’Irak. Le régime iranien a décidé d’injecter plus de ressources financières dans l’effort nucléaire. Le revirement de Téhéran et son changement de cap sur la question nucléaire était en grande partie suscitée par l’existence d’un pro­gramme nucléaire en Irak, ennemi de l’Iran. La mutation dans la réorientation de la démarche nucléaire iranienne était donc pour des raisons politiques et stratégiques, les dictats du realpolitik, et non pas des considérations de besoin en énergie. 23

Le concours de plusieurs facteurs nationaux, régionaux et internationaux a mené le gouvernement iranien à revoir son programme nucléaire, malgré la réclamation répétée des administrations américaines successives à l’effet que l’Iran masque ses ambitions d’armes nucléaires par un programme d’énergie nucléaire. Bien que les déclarations contradictoires des autorités iraniennes au sujet de leur programme nucléaire ont pu éveiller des soupçons américaines, il reste que le raisonnement de l’Iran pour la reprise de son programme d’énergie nucléaire est néanmoins plus compliqué et nuancé. De façon générale, les facteurs domestiques (tels le besoin d’électricité, des soucis environnementaux et de santé) et considérations régionales et internationales sont importants comme éléments justificateurs de la relance du programme nucléaire de l’Iran en 1983.

Contexte régional et international

La guerre Irak-Iran (1980-1988) a eu un effet dévastateur sur la nation iranien­ne. Elle a laissé une cicatrice psychologique profonde sur la conscience sociale de la République islamique de l’Iran. La guerre des villes a été suivie de l’utilisation par l’Irak des armes chimiques contre les forces iraniennes dans l’indifférence presque totale de la communauté internationale. Ce développement a considérablement affecté le regard des Iraniens sur le droit international et au sujet de la sécurité na­tionale. Ces actes ont solidifié la méfiance du leadership iranien à l’égard des règles internationales et du droit des conflits armés. Ils les ont menés à reconsidérer des avantages de la technologie non conventionnelle qui a été précédemment déclarée «non nécessaire et non-islamique» par le Guide suprême. À part des expressions verbales périodiques, la communauté internationale a fait très peu pour juger la responsabilité de l’Irak dans son utilisation des armes chimiques.24 L’Iran a réalisé qu’il ne pourrait pas compter sur les autres pour sa sécurité. Ali-Akbar Hashemi-Rafsanjani a mis cette question au clair en octobre 1988 lorsqu’il a déclaré: «Les armes chimiques et biologiques sont les bombes atomiques de l’homme pauvre et peuvent facilement être produites. Nous devrions au moins les considérer pour notre défense. Bien que l’utilisation de telles armes soit inhumaine, la guerre nous a enseigné que les lois internationales sont seulement des bouts de papier. En ce qui concerne les armes chimique, bactériologique et radiologiques, il a été rendu très clair pendant la guerre [Iran-Irak] que ces armes sont très décisives. Il a également été clair que les enseignements moraux du monde ne sont pas très efficaces quand la guerre atteint une étape sérieuse et le monde ne respecte pas ses propres résolutions et ne ferme pas ses yeux aux violations et à toutes agressions qui sont commises sur le champ de bataille. Nous devrions considérer l’utilisation offensive et défensive des armes chimiques, bactériologiques et radiologiques. Dorénavant vous devriez saisir l’occasion et exécuter cette tache.25

Il est malheureux que la communauté internationale n’ait pas sanctionné l’Irak pour violer les règles de la guerre ; faisant ainsi elle n’aurait pas peut-être contraint l’Iran à considérer l’option d’usage des armes de destruction massive (ADM) et de ce fait de ne pas remettre en question la paix et la stabilité dans le Moyen-Orient. Même la Cour Internationale a connu, dans un avis, que les règles de la loi et les traités internationaux limitant des armements et établissant des règles spécifiques de la guerre font tous partie d’un ensemble et ont comme objectif un monde plus sécuritaire, plus stable et plus paisible.26 Cependant, la communauté internationale n’est pas venue à l’aide de l’Iran quand il a été attaqué par les mêmes armes qu’elle-même avait interdites.

Pendant les huit ans de guerre avec l’Irak, l’Iran a été internationalement isolé. Comme la plupart de ses armements avaient été achetées des États-Unis sous le ré­gime royal et maintenant confronté à un embargo international sur les armes, l’Iran n’a pas pu acheter des armements et des pièces de rechange dont il avait besoin pour ses efforts de guerre. Pour rendre la situation encore plus difficile, l’Occident, incluant l’Union Soviétique, et les Etats arabes ont soutenu Saddam Hussein en lui fournissant l’argent et l’équipement militaire pour faire la guerre à l’Iran. De plus, le Conseil de sécurité des Nations Unies (CSNU) était du côté irakien et a essayé d’imposer un règlement en sa faveur dans la tentative de mettre fin aux hostilités. Sans oublier l’impact dévastateur de l’usage des armes chimiques par l’Irak contre les combattants iraniens, la destruction de l’Airbus de sa ligne aérienne et les instal­lations pétrolières off-shore de l’Iran par la Marine américaine le régime islamique n’a eu d’autres choix que d’accepter la résolution 598 du CSNU qui imposait un cessez-le-feu favorable à l’Irak. La vaste majorité des Iraniens, de tendances confon­dues, se sentaient humiliés et ont cru qu’une grande injustice a été fait à eux par les grandes puissances. Ce sentiment est encore dominant en Iran et continue à ce jour. C’était dans ce contexte régional de forte tension que la dissuasion de l’Irak est devenue une des principales raisons pour la renaissance du programme nucléaire de l’Iran au milieu des années 80.27

Après la guerre, la classe dirigeante iranienne s’est rendue compte de la nécessité de se doter d’une base nationale de recherche et de développement scientifique en vue de réduire sa dépendance envers des armements étrangers. Pour cette raison, une initiative a été lancée pour développer une base domestique dans les domaines de science et de génie. Une des leçons retenues par les dirigeants iraniens de la guer­re avec l’Irak est que dans tout conflit futur l’Iran ne peut pas compter sur l’appui des autres nations, d’où le besoin absolu d’autosuffisance dans le domaine militaire. De plus, la recherche par l’Iran de la technologie et de la capacité des ADM a été précipitée par le fait que Saddam Hussein jugeait indispensable les ADM pour pré­server lui-même des menaces extérieures et internes d’une part, et sa prétention de jouer un rôle important au le Moyen-Orient.28 En conséquence, le leadership de la RII a réalisé qu’en dernière analyse, l’Iran ne pouvait que compter sur ses propres ressources pour sa défense. Cela a conduit certains analystes de conclure que le régime islamique s’est mis à acquérir une capacité indépendante pour produire des ADM en raison de la guerre avec l’Irak.29

Un autre facteur important affectant la décision de l’Iran pour maîtriser entière­ment la technologie atomique était lié à l’environnement géopolitique de la région et les menaces existentielles auxquelles il devrait faire face. Il n’y a pas de doute que la région stratégique de l’Iran est dangereuse. La plupart des pays voisins de l’Iran sont instables ou avec des capacités nucléaires. Depuis l’ère du Chah, le leadership islamique avait toujours été craintif des ambitions militaires de l’Irak, notamment de ses ADM, et les menaces qu’elles posaient à sa sécurité. La guerre de huit ans entre les deux pays a renforcé cette angoisse surtout que l’Irak n’a pas hésité à utili­ser les armes chimiques contre l’Iran. L’Iran avait toujours été conscient que l’Irak travaillait sur un programme d’armes nucléaires. L’Iran est bien servi par Israël qui a bombardé le réacteur nucléaire d’Osirak en 1981.

Cependant, ce qui a vraiment fait peur au gouvernement iranien était la révéla­tion de la Commission Spéciale des Nations Unies (UNSCOM) sur le programme clandestin irakien des armes de destruction massive qui avait également une com­posante nucléaire. L’Iran a cru que bien que les inspecteurs de l’AIEA pourraient démanteler les programmes nucléaires irakiens, la base scientifique et les connais­sances techniques étaient toujours là et pourraient ne jamais être détruites quoi­que l’ONU fasse. L’Iran croyait que c’était une question de temps pour Saddam Hussein de reconstituer son programme des ADM étant donné que les sanctions de l’ONU ne peuvent pas rester en vigueur pou toujours. Il paraissait que les soupçons de l’Iran n’étaient pas loin de la vérité, car Saddam Hussein aurait confié à ses pro­ches qu’il ait projeté de reprendre ses programmes après que les sanctions aient été soulevées.30 En fait, Saddam Hussein a établi un Comité Supérieur pour surveiller et cacher le programme des ADM de l’Irak en dépit du fait que la résolution 687 du CSNU a exigé que l’Irak soit désarmé.31

La capacité nucléaire des autres puissances régionales a également contribué à la révision par l’Iran de ses intérêts stratégiques. Israël a été connu comme puissance nucléaire non déclarée qui a choisi de maintenir une politique nucléaire ambiguë. L’hostilité persiste entre les deux pays car il n’existe pas de confiance entre eux. L’Inde et le Pakistan sont également deux autres pays nucléaires connus qui ont des relations bilatérales difficiles. Pourtant, la dissuasion nucléaire a gardé une détente inconfortable entre eux. Il est à noter que tous ces États se trouvent dans le voisina­ge immédiat de l’Iran. Ainsi, confronté à l’encerclement des puissances nucléaires, la stratégie de l’Iran est compréhensible. Une étude par le US Council on Foreign Relations a conclu qu’à cause de son histoire et son voisinage turbulent, les ambi­tions nucléaires de l’Iran ne constituent pas des calculs stratégiques irrationnels.32

L’ambition nucléaire de l’Iran est-elle ainsi une nouvelle politique pour équi­librer la supériorité des forces conventionnelles des États-Unis et gêner leur libre circulation dans le Moyen-Orient? L’Iran a-t-il pris des leçons de la Corée du Nord où la présence des armes nucléaires a forcé le gouvernement américain à chercher une solution diplomatique par opposition à une invasion qui a scellé le sort de Saddam Hussein? Ou y a-t-il encore des raisons beaucoup plus profondes ? Si on est d’appliquer cette logique dans le contexte iranien, alors il y a un argument plausible à faire en faveur de l’Iran: il a un besoin légitime de force de dissuasion nucléaire principalement contre les États-Unis et puis contre Israël. Les États-Unis ont fait face à une situation semblable vers la fin des années 40 quand ils ont utilisé les armes nucléaires comme force de dissuasion contre une force conventionnelle soviétique supérieure. Le Pakistan fait plus ou moins la même chose aujourd’hui contre son voisin beaucoup puissant, Inde, alors que ce dernier le fait contre son voisin plus puissant, la Chine.

Quelle sortie de la tension ?

L’Iran est aujourd’hui encerclé par les troupes américaines présentes sur ses frontières orientales et occidentales, en Irak et en Afghanistan, sur ses frontières méridionales par l’entremise des États arabes dans le Golfe Persique, les Émirats Arabes Unis, le Qatar, le Bahrayn, le Kuweit et l’Arabie Saoudite, et sur ses frontiè­res nordiques en Asie centrale.33 De plus, la présence de la Turquie dans l’OTAN et les bombes nucléaires des Etats-Unis installées sur le sol turc est une autre source d’insécurité pour l’Iran. Par conséquent, pour l’Iran, son encerclement par un État hostile et les pays potentiellement hostiles (alliés des États-Unis dans la région) est une grande source de souci.34 Cet encerclement a créé en Iran le soupçon sur les vraies intentions de Washington. Le soupçon de Téhéran a été encore intensifié quand l’administration de George W. Bush a identifié l’Iran en tant que membre de l’axe du mal, avec l’Irak et la Corée du Nord, en 2002.

Le recours à la doctrine d’attaque préventive par les États-Unis pour renverser Saddam Hussein en 2003, a suggérée au leadership iranien que Washington est prêt, dans certains cas, à employer sa force conventionnelle pour empêcher la proli­fération des armes de destruction massive. Les appels pour le changement de régime en Iran par les hauts fonctionnaires de l’administration américaine ont également intensifié le soupçon du gouvernement islamique.35 Par conséquent, l’Iran croit que les États-Unis commettraient l’agression contre le régime islamique à moins que le coût de cette agression ne soit trop élevé à supporter. Et certains en Iran croient que les armes nucléaires, ou au moins la capacité pour les construire, décourageront les États-Unis de lancer une telle attaque.

Également important, l’attitude prudente d’administration Bush à l’endroit de la Corée du Nord a démontré la valeur des armes nucléaires en retenant les États-Unis. Pour les intransigeants de l’Iran, les armes nucléaires serviraient de force de dissuasion contre les États-Unis et s’assureraient que la République islamique ne serait pas intimidée par eux.36 À cet effet, l’environnement régional de l’Iran a aggravé son appréhension l’amenant ainsi à multiplier d’efforts pour hausser sa pos­ture défensive qui inclut la possibilité d’un intérêt pour les armes nucléaires. Ainsi, l’Iran a commencé à rétablir plusieurs des politiques et des programmes du Chah dans les secteurs de la défense et de la sécurité nationales.

Le leadership islamique est amené maintenant à partager la même vision de menaces existentielles contre l’Iran que le régime du Chah avant sa chute en 1979. La différence entre les deux situations est que l’Union Soviétique est substituée avec les États-Unis. En outre, des relations avec Israël sont caractérisées avec soupçon et hostilité mutuels. De même les relations avec le Pakistan – un allié américain avec un régime islamique sunnite – sont également chargées de l’antagonisme réci­proque. Par conséquent, le voisinage de l’Iran est dangereux et complexe, ajoutant encore plus de suspicions chez certains observateurs de la scène iranienne dans le besoin de Téhéran d’armes nucléaires. Gawdat Bahgat Bahgat résume bien l’état de la question en écrivant : « L’Iran est situé dans un voisinage dangereux. Ses rela­tions avec certains [de ses] voisins n’ont pas été amicales : Téhéran a eu des conflits territoriaux, sectaires et idéologiques avec plusieurs d’entre eux. Pendant plus de deux décennies les Etats-Unis ont employé une variété de sanctions économique et diplomatiques pour affaiblir et déstabiliser le régime iranien et depuis le début du 21e siècle des troupes américaines ont été déployées dans les pays autour de l’Iran. Les relations avec Israël, la seule puissance nucléaire dans le Moyen-Orient, sont caractérisées par hostilité. Téhéran ne reconnaît pas l’Etat d’Israël et Tel Aviv insiste pour maintenir et défendre son monopole nucléaire et son droit de frapper les ins­tallations nucléaires en Iran. »37

Pire encore, la présente situation pose de nouveaux défis à l’Iran. Le manque de progrès global vers le désarmement crédible des ADM, l’absence des assurances de sécurité fiables, la réaffirmation des armes nucléaires ou le refus d’écarter leur uti­lisation par l’OTAN, les Etats-Unis et la Russie, entre autres, ont créé l’inquiétude parmi les Etats qui ne possèdent pas d’armes nucléaires, en particulier ceux qui sont hostiles envers Washington. Ajouter à cela est la nouvelle doctrine militaire américaine qui adopte une nouvelle triade de possibilités. Elle combine des frappes nucléaires et conventionnelles et même l’utilisation prévue des armes nucléaires contre un Etat non nucléaire.38 A part de tout cela, d’autres facteurs tels l’existence des voisins nucléaires, notamment Israël, le Pakistan et l’Inde, ont, peut-être, fait l’Iran à repenser son calcul stratégique. Il est défendable, ce tous les facteurs men­tionnés ci-dessus faits l’Iran se rendent compte qu’il ne peut pas mais arriver à la conclusion qu’il doit y avoir un certain avantage stratégique pour lui en considérant un programme d’armes nucléaires. Il n’est guère certain que malgré tous les fac­teurs mentionnés ci-dessus, l’Iran arrive à la conclusion qu’il doit y avoir un certain avantage stratégique pour lui de considérer un programme d’armement nucléaire. Il est également plus qu’incertain que l’Iran cherche le savoir-faire technique pour produire des armes nucléaires dans un délai court si la situation devrait le rendre impératif. Ainsi, il est fort douteux de croire que l’histoire récente et son voisinage troublé préoccupe l’Iran à tel point qu’il ne voit d’autres issues qu’acquérir la tech­nologie d’armes nucléaires pour sa survie.

Jusqu’à maintenant, aucune évidence n’existe pour suggérer que l’Iran poursuive strictement un programme d’armes nucléaires. Plutôt, ce qui existe sont les tenta­tives de l’Iran à maîtriser le plein spectre de la science atomique, y compris tout le cycle de l’enrichissement d’uranium et la production du carburant nucléaire.

Le problème de l’Iran sur la question nucléaire est causé par son inhabilité d’ex­pliquer clairement son programme à la communauté internationale d’une part, et l’incapacité des Etats-Unis de séparer sa politique annoncée de changement régime de la question technique et légale de l’atome de l’autre. Tout laisse à croire que l’ultime ligne rouge de la RII est la survie du régime ; si celle-ci est sérieusement menacée, Téhéran reculerait et ferait des concessions majeures dans certains domai­nes. Mais, cela ne le fera pas un délinquant du droit international.

* Professeur au Collège militaire royal du Canada -Kingston, Ontario, Canada.

Cet article a été préparé avec le concours de Tolu FAYODA- Etudes sur la conduite de la guerre Collège militaire royal du Canada – Kingston, Ontario, Canada

Notes

  1. Chris Quillen. « Iran’s Nuclear Policy: Past, Present, and Possible Future. » Middle East Review of InternationalAffairs, 6, No. 2, June 2006.
  2. Patrick Clawson & Michael Rubin, Eternal Iran: Continuity and Chaos, New York City, Palgrave Macmillan, 2005, p. 83. Le Chah a parlé de ses grandes ambitions de vouloir faire de l’Iran une grande puissance par l’entremise de la poursuite des investissements étrangers de profil élevé. Par exemple, il a acheté 25% des actions de l’aciérie allemande Krupp.
  3. Roger M. Savory, « Religious Dogma and the Economic and Political Imperatives of Iranian Foreign Policy, » in Miron Rezun, ed, Iran at the Crossroads: Global Relations in a Turbulent Decade, San Francisco, Westview Press Inc., 1990, 53.
  4. Le Chah a entamé un des achats d’armes conventionnelles le plus cher et le plus vaste jamais fait par un pays en voie de développement. En 1972, il a placé une commande de 2 milliards de dollars pour l’achat des avions de combattant, des hélicoptères et des transporteurs C-130 Hercules américains. Ceux-ci ont été poursuivis par l’achat des avions de chasse les plus avancés F-14 Tomcats, des avions de commande et de surveillance d’AWACS, les destroyers de la classe Spruance, les missiles Phoenix et Maverick et un système de surveillance électronique IBEX à coût de $500 millions. Il a également commandé 2 000 chars britanniques Chieftain et d’autre matériel militaire d’Israël. De 1973 à 1978, les compagnies américaines ont livré plus de 8 milliards de dollars d’armes à l’Iran, soit environ un tiers des 34 milliards de dollars de la commande totale. Pour plus d’information voir Patrick Clawson & Michael Rubin, cit., p.83. LIIran a également acheté 200 hélicoptères américains produits en Italie et des centaines de véhicules blindés. Voir C.D. Carr, « The United States-Iranian Relationship 1948-1978: A Study in Reverse Influence, » in Hossein Amirsadegh, eds, The Security of the Persian Gulf, , London, Croom Helm, 1981, p. 75.
  5. Miron Rezun, « The Pariah Syndrome: The Complexities of the Iranian Predicament, » in Miron Rezun, eds, cit., P. 12.
  6. C.D. Carr, « The United States-Iranian Relationship 1948-1978: A Study in Reverse
    Influence, » in Hossein Amirsadegh, eds, The Security of the Persian Gulf, London, Croom Helm,1981, p. 74.
  1. Patrick Clawson & Michael Rubin, Op. Cit. p.78.
  2. Bijan Mossavar-Rahmani. « Iran’s Nuclear Power Programme revisited. » Energy Policy,

September 1980, p. 189.

  1. John Kifner. « Iranian Program Debated at M.I.T.: Training of Atom Scientist Called Dangerous by Some and Blessing by Others. » New York Times, 27 avril 1975, p.16.
  2. Bijan Mossavar-Rahmani, Energy Policy in Iran: Domestic Choices and International Implications, New York, Pergamon Press, 1981, p. 17.
  3. ‘The Price of Oil-in Context’, CBC News Website. 2006. http://www.cbc.ca/news/
    background/oil/ (consulté le 20 septembre 2006). Quelques mois après la guerre

israélo-arabe en octobre 1973 le prix du pétrole a passé de $3 à $12 de baril.

  1. Bijan Mossavar-Rahmani. « Iran’s Nuclear Power Programme revisited. » Energy Policy,

Op.cit., p. 191.

  1. « Iran Will Spend $15 Billion In U.S. Over Five Years. » New York Times, 5 mars 1975, p. 1.
  2. Participant à une conférence de presse conjointe au Département d’État avec le ministre des Finances iranien, secrétaire d’État des États-Unis Henry Kissinger dit, «c’est le plus grand accord de cette sorte qui a été signée par deux pays quelconques. »
  3. Patrick Clawson & Michael Rubin. EternalIran: Continuity and Chaos. (New York City: Palgrave Macmillan, 2005) p. 79.
  4. Fereidun Fesharaki, ‘Revolution and Energy Policy in Iran: International and Domestic Implication, in Hossein Amirsadeghi eds, The Security of the Persian Gulf, London, Croom Helm, 1981, p. 256. Une analyse des réserves du pétrole iranien, diffusée en janvier 1978, a conclu que les réserves prouvées de l’Iran étaient alors 65 milliards de barils.
  5. ‘Iran Has Plans For When the Oil Runs Out’, New York Times, 9 mars 1975, E3.
  6. Lewis A. Dunn, ‘Persian Gulf Nuclearization: Prospect and Implications,’ in Hossein Amirsadegh eds, The Security of the Persian Gulf, Londres, Croom Helm, 1981, p. 85.
  7. Dafnar Linzer. « Past Arguments Don’t Square With Current Iranian Policy », The Washington Post, Sunday, 27 mars 2005, A15.
  8. Cette partie de notre texte est tirée d’une entrevue, ‘Les non-dits de l’arrêt des programmes nucléaires de l’Iran’, que Fereidoun Sahabi, le directeur de l’OIEA après la Révolution et sous le GP, a accordé au journal Etemad-Melli (Roozna), le 27 Chahrivar 1386 (18septembre 2007).
  9. Selon Fereidoun Sahabi, dans la construction d’une centrale nucléaire environ 50% du temps sont consacrés à l’étude de l’emplacement des installations. Pour Bouchehr, il fallait trois ans d’étude. Or, le Chah avait un ami hollandais, un officier retraité, à qui il a confié la tâche de trouver un endroit convenable à Bouchehr. Ce dernier a mis deux jours, 12 heures de vol, pour recommander Bouchehr et le Port de Ganaveh (dans la province de Bouchehr). La raison fondamentale pour ces choix était la proximité du Golfe Persique qui accommodait la livraison des pièces et du combustible par la voie maritime. Le choix de du site, comme celui de la personne qui l’a proposé, était politique et arbitraire, fait sans la consultation avec l’AIEA. Un des farouches opposants à la centrale de Bouchehr était Ali-Asghar Soltaniyeh, l’actuel représentant de l’Iran à l’AIEA.
  10. Pour une presentation du cycle complet de l’enrichissement voir: http://www.cea.fr/jeunes/ themes/l_energie_nucleaire/le_cycle_du_combustible
  11. Il y avait seulement une courte interruption (1979-1982) dans son programme avant que le gouvernement islamique ait été forcé de reconsidérer son option nucléaire.
  12. Geoffrey Kemp, « U.S. and Iran, The Nuclear Dilemma: Next Steps » http://www.
    nixoncenter.org/publications/monographs/USandIran.pdf (accédé le 20 juillet 2006)
  13. Cité dans Anthony H. Cordesman, IransMilitary Forces in Transition: Conventional
    Threats and Weapons of Mass Destruction Westport, CT: Praeger, 1999, 234, et Rodney
    W. Jones and Mark G. McDonough, Tracking Nuclear Proliferation: A Guide in Maps

and Charts, Washington, DC: Carnegie Endowment for International Peace, 1998 http://www.ceip.org/programs/npp/iran.htm.

  1. Thomas Graham Jr. Commonsense on Weapons of Mass Destruction, Seattle, the University of

Washington Press, 2004, p. 48.

  1. Wyn Q. Bowen and Joanna Kidd, « The Iranian Nuclear Challenge », p. 264, International Affairs, 80, no. 2, mars 2004, pp. 257-276.
  2. Malfrid Braut-Hegghammer, « Rebel without a Cause: Explaining Iraq’s Response to Resolution 1441 », in P.Katzenstein, ed, The Culture of National Security, Norms, Identify in WorldPolitics, New York, Colombia University Press, p. 20.
  3. Kamran Taremi, « Beyond the Axis of Evil: Ballistic Missile in Iran’s Military Thinking », Security Dialogue, 2005, vol., 36, no 1, p. 98.
  4. Malfrid Braut-Hegghammer, cit., P. 21.
  5. Zbigniew Brzezinski et Robert M. Gates, « Iran: Time for a New Approach », New York, Council on Foreign Relations, 2004, p. 19.
  6. Gawdat Bahgat, « Nuclear Proliferation in the Middle East: Iran and Israel », Contemporary Security Policy, 26, no. 1, avril 2005, p. 30.
  7. Hans M. Kristensen. « U.S. Nuclear Weapons in Europe. » Pg. 5 Bulletin of Atomic Scientists, 60, No. 6, pp. 76-77, November/December 2004.
  8. Gawdat Bahgat, « Nuclear Proliferation in the Middle East: Iran and Israel », Pg. 30 Contemporary Security Policy, 26, No. 1 (April 2005), pp. 25-43
  9. Chahram Chubin, « Does Iran Want Nuclear Weapon? », Survival, 37, no. 1, printemps 1995, p. 91.
  10. Gawdat Bahgat, « Nuclear Proliferation in the Middle East: Iran and Israel », Contemporary Security Policy, 26, n° 1, avril 2005, p. 31.
  11. United States 2002 Nuclear Posture Review. Ce document a non seulement renforcé le rôle central des armes nucléaires dans la planification militaire des Etats-Unis pour un avenir prévisible, il a explicitement confirmé que Washington est préparé d’utiliser les armes nucléaires contre les Etats non-nucléaires.

http://www.globalsecurity.org/wmd/library/policy/dod/npr.htm (accédé le 20 août 2006)

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