La coexistence réussie : par le dialogue ou par la force de l’ÉPÉE

Siham Mohammed Al-Kawwaz AL-JASHAM

Enseignante de civilisation et de littérature comparée au College of Arts-Université de Kufa.

Le besoin des êtres humains de cohabiter avec d’autres qui leur sont dif­férents, dans les idées, les attitudes et les principes théoriques et religieux, est devenu fondamental dans la vie sociale. L’Islam, représenté par le Coran, par la Sunna du Prophète Mohamad (SAW) et par la conduite exemplaire de l’Imam Ali, a offert beaucoup de stratégies aux Musulmans pour cohabiter paisiblement avec d’autres êtres humains qui ne partagent pas les mêmes idées, les mêmes idéologies et les mêmes valeurs qu’eux. Cet article se foca­lise sur la personnalité de l’Imam Ali, en posant la question : Comment le plus vaillant des combattants peut-il devenir l’exemple suprême de la paix ? Ce papier expose d’une part les principales stratégies de cohabitation réussie et de l’autre, la base de ce succès : par « word » ou par « sword » (par « le dialogue » ou par « la force de l’épée »). Les correspondances, les sermons et les prononciations de l’Imam Ali dans son ouvrage Nahjû Al-Balagha, seront pris en considération comme base de la discussion.

Pendant longtemps, les nations ont vécu en isolation relative, au point où elles ont réussi à maintenir de manière intégriste leurs croyances, religions et idéologies, par rapport aux autres nations. Cependant, avec les moyens de communication de plus en plus avancés, et à la faveur des migrations de plus en plus fréquentes et amples, les différents groupes ethniques et religieux ont dû traiter avec d’autres – l’autosuffisance, l’indépendance et l’isolation conservatrice ont été compromises voire battues en brèche. Plus que jamais, le besoin de cohabiter et de communiquer avec des êtres humains de persuasions, attitudes et principes religieux différents, est devenu non seulement impératif mais fondamental pour une vie sociale épanouie.

Par les temps récents, l’Islam a été dépeint dans les medias comme étant une religion militante qui prônerait une justice et un expansionnisme vio­lents, dont la mise à mort d’innocents citoyens. Il paraît alors urgent d’ex­poser un contraste concernant des millions d’individus : comment une re­ligion peut-elle être traitée de « violente », « extrémiste » et « fanatique » alors que son principe fondateur est d’inviter à la cohabitation paisible et à la tolérance de l’autre ? Effectivement, le concept de « coexistence humaine et paisible » qui apparaît fréquemment de nos jours dans les contextes poli­tique et social, avait été minutieusement traité il y a plusieurs siècles dans les Discussions Coraniques, le Sunna Prophétique et la conduite personnelle de l’Imam Ali (AS).

En effet, la démarche principale de cet article est de discerner comment l’Islam éclaire ses adeptes afin qu’ils puissent cohabiter avec d’autres êtres humains, différents en pensée et même en idéologie. Cet article se focalise sur la personnalité de l’Imam Ali, le combattant le plus vaillant de toute l’histoire, s’interroge sur les éléments et qualités de son invitation à la co­habitation – celle-ci est-elle basée sur le dialogue, ou sur la force de l’épée ? Les correspondances, les sermons et les prononciations de l’Imam Ali dans son ouvrage Nahjû Al-Balagha, seront pris en considération comme base de la discussion.

 

L’imam Ali et l’Islam : un aperçu rapide

Ali bin Abu Talib (AS) était le cousin et gendre du Prophète Mohamad (SAW)1. C’est au-delà des limites de cet article de faire l’historique des nom­breux mérites et qualités de l’Imam Ali. La personnalité exaltée de l’inté­ressé est telle que même les savants les plus érudits n’arrivent pas à percer les profondeurs de sa grandeur. L’imam Ali, le mandataire et l’héritier du Prophète Mohamad, est né dans la Kaaba, la Maison de Dieu, à la Mecque. Les circonstances miraculeuses de sa naissance nous fournissent une indica­tion précieuse de sa position unique par rapport à Allah (Dieu).

L’Imam Ali fut le premier homme qui a témoigné en faveur de l’Islam, il lui est accrédité en outre, comme étant le Musulman le plus proche du Prophète Mohamad. C’était un cousin de ce dernier et ils ont été élevés dans le même voisinage. L’Imam Ali était près de trente ans le cadet du Prophète Mohamad, et connaît l’honneur de recevoir son éducation morale directement de celui-ci. Lorsque l’Imam Ali avait environ dix ans, il témoi­gna de l’avènement de l’Islam. Etant dans le proche entourage du Prophète Mohamad, il eut l’opportunité d’apprécier et de soutenir la Mission Divine de ce dernier. Donc, il était le troisième Musulman, après le Prophète Mohamad et Khadija, l’épouse de celui-ci. La foi vigoureuse que portait l’Imam Ali pour l’Islam, associée à sa disposition à se sacrifier sans hésitation pour la promotion de sa croyance, était exemplaire, inégalée et inégalable.

Imam Ali : homme d’épée

L’Imam Ali était connu pour sa bravoure. En effet, puisque les oppo­sants de l’Islam, c’est-à-dire les adorateurs d’idoles de la Mecque et les Juifs de Médine ont imposé plusieurs guerres cruelles à la petite communauté islamique florissante, les musulmans devaient protéger leur religion et leur identité. Dans ces circonstances difficiles et éprouvantes, le courage de l’Imam Ali était décisif.

La Bataille de Badr à elle toute seule fournit un exemple adéquat du cou­rage, de la bravoure et de l’adresse inégalable d’Ali au combat. C’est à peine une exagération que de dire que lui seul était l’auteur de la victoire rem­portée dans cette bataille où environ mille guerriers quraish de la Mecque ont défié 313 musulmans peu équipés. L’Imam Ali a mis à mort plusieurs guerriers arabes célèbres, provoquant une vague de peur et d’hésitation dans les rangs de l’ennemi, et emportant la première victoire de l’Islam.

Dans la Bataille d’Uhud, l’Imam Ali fut l’un des quatre soldats fidèles et courageux qui restèrent aux côtés du Prophète Mohamad afin de le protéger. L’Imam Ali a tué 28 guerriers arabes célèbres et a reçu seize blessures. Le Prophète lui-même fut blessé, et c’est grâce à Ali qu’il a échappé à la mort. Par la suite, le Prophète déclara aux Musulmans que l’Ange Gabriel avait été présent sur le champ de la bataille et fit ainsi l’éloge d’Ali : « Il n’y a pas de jeune plus vaillant que Ali, et il n’y a pas de meilleure épée que Dhulfiqar ! » (Le nom attribué à l’épée double célèbred’Ali)2. C’était aussi l’Imam Ali qui fut à même de démolir le moral de l’ennemi et d’assurer la victoire pour les Musulmans à la Bataille de Trench. Lors de ce combat, le guerrier arabe Amr ibn Abdul-Wud de haute réputation défia les Musulmans au corps-à-corps.

Seul l’Imam Ali eut la volonté de combattre Amr dont la présence seule décourageait les autres Musulmans ; et Ali l’a battu.

Lorsque les Musulmans marchèrent contre le clan des Juifs en rébellion qui tenait la forteresse de Khayber, l’armée musulmane commandée par un autre officier a connu la défaite sur deux jours successifs. Le Prophète donna l’étendard de l’Islam à l’Imam Ali et expédia l’armée sous sa commande. Ali combattit et tua le puissant et redoutable guerrier Mehrab, ainsi que d’autres Juifs bien équipés et célèbres. Il brisa aussi, tout seul, l’entrée de la forteresse et en jeta la porte dans la douve, permettant ainsi à l’armée musulmane de prendre la forteresse. Lorsque l’Imam Ali rentra victorieusement, le Prophète l’embrassa et fit copieusement ses éloges dont les paroles suivantes : « …Ali tu seras le plus proche de moi lors du Jour du dernier jugement ; tu seras à côté de moi à la Fontaine de Kawthar ; ton sang est mon sang, ta chair est ma chair, ton amitié est mon amitié, et ton inimitié est mon inimitié ; une guerre contre toi est une guerre contre moi ! »3.

Il est évident que l’Imam Ali était un guerrier et un maréchal de premier ordre. L’étude de sa vie démontre que son épée était le seul secours dont bénéficiait l’Islam pendant ses premières luttes et guerres d’auto-défense. Il faut noter que dire de l’homme qu’il était le plus courageux et le plus vaillant guerrier que l’Histoire puisse citer, ne veut pas signifier qu’il était cruel et sanguinaire, au contraire qu’il était presque toujours gentil, sympathique, sensible et chaleureux. Ce sont là les qualités de quelqu’un qui est pieux et craint Dieu. Il appréciait de la même manière les riches, les pauvres, les édu-qués et les gens simples. Ceci démontre que l’Imam Ali avait une personna­lité chargée de caractéristiques opposées de sorte qu’il était difficile de croire qu’une telle combinaison pouvait se manifester chez un seul être humain.

Imam Ali : homme de parole

En plus des qualités mentionnées ci-dessus, l’Imam Ali était philosophe, moraliste et un grand professeur de principes religieux et de théologie. On le connaissait aussi comme quelqu’un d’amusant et d’invincible en débat. En ce qui concerne ses connaissances, le Prophète Mohamad (SAW) disait d’Ali (AS) : « C’est moi la Cité des connaissances, et Ali en est la Porte ! ». « En vérité le Saint Coran est révélé sur cinq niveaux dont aucun n’a un sens manifeste et caché, et en toute vérité Ali Ibn Abi Talib est initié dans tous les sens manifestes et cachés ! »4.

Son vaste champ de connaissances incluait la biologie, la médecine, l’as­tronomie, l’origine de l’univers, la philologie, la jurisprudence islamique, les mathématiques, la rhétorique, et encore. Il a effectué des contributions majeures pour le développement de la grammaire de la Langue arabe. Son ouvrage « Nahjû Balagha » (le summum de l’éloquence) qui avait été com­pilé par Sayed Razi, contenait beaucoup de sermons, de lettres et de dictons dont l’étendue des sujets arrive très près du Coran pour ce qui concerne l’éloquence, les orientations et les connaissances. Ibn Abil Hadid maintenait que : « L’éloquence d’Ali est telle qu’il est le champion des fins orateurs. Les prononciations d’Ali sont en-dessous des paroles du créateur mais au-dessus des paroles de tous les créés ; c’est de lui que le monde a appris l’art ora­toire. Chaque fois que je relis le Nahjû Balagha, de nouvelles appréciations remontent dans mon esprit, avec la conclusion que même si je le relis régu­lièrement pendant toute ma vie, je ne saurais le comprendre pleinement ».

L’ouvrage en question n’est pas seulement bénéfique aux musulmans mais aussi à toute l’humanité. Son code d’administration tel qu’exposé dans le Nahjû Balagha a été cité aux Etats-Unis par le secrétaire général de l’ONU en l’an 2002, lors de la réunion concernant le Fonds pour le développement arabe. Il a conseillé aux dirigeants et aux fonctionnaires gouvernementaux, d’en suivre les principes comme modèles de gouvernance5.

 

La coexistence dans la politique de l’Imam Ali

Il a été observé que, bien que le concept de coexistence pacifique ait été récemment exploité dans le répertoire social et politique, l’on peut clai­rement discerner dans le discours coranique, la Sunna et la conduite de l’Imam Ali. Alikhani (2011) énumère un nombre de stratégies offertes par l’Islam à ses adeptes afin que ceux-ci puissent vivre en paix avec d’autres êtres-humains qui ne partagent pas leurs pensées ni leur idéologie. Ces stra­tégies peuvent être vues comme une approche moderne de l’interaction des musulmans avec d’autres peuples. Cela est certainement suffisant pour tous musulmans et non musulmans de savoir que le Prophète Mohamad lui-même avait prévu que les adeptes de religions différentes coexistent paisiblement tout en honorant leurs propres rites sans être harcelés par qui que ce soit6.

Après la mort du Prophète Mohamad (SAW), l’Imam Ali a continué à protéger l’Islam, d’une part, d’être embrouillé dans des écarts de conduite, et de l’autre , à empêcher le public d’adopter des normes et coutumes ja-hilliyah. Il a aussi continué à aider l’élite gouvernante, grâce à ses propres qualités religieuses, morales et intellectuelles, en leur proposant des solutions sages aux problèmes et questions rencontrés. Durant le court laps de temps qu’il était le leader politique du vaste empire islamique de l’époque, il se considérait à égalité avec tout autre citoyen vis-à-vis de la justice sociale qu’il était administrativement chargé d’appliquer. Il était aussi conscient que les gouverneurs qu’il nommait devaient se comporter de manière parfaitement islamique, de sorte à ne pas provoquer des pressions socio-économiques sur le peuple. Ainsi l’on peut affirmer que les belles qualités de l’Etat islamique idéal étaient incarnées dans l’administration que l’Imam Ali avait établie sur la base de la foi en Dieu et de la crainte de Dieu. En fait il limogeait tout gouverneur corrompu ou détourné de l’empire islamique et comman­dait l’honnêteté, l’intégrité, la responsabilité et la compassion, de la part des fonctionnaires gouvernementaux7.

En maintenant le pas avec la doctrine coranique, Imam Ali appliquait attentivement le concept de l’engagement de soi dans la citoyenneté pour y avoir droit. Sur cette base, l’Imam Ali a souligné les aspects suivants :

 

L’unité de la création, et la diversité des religions

Lorsque l’Imam Ali a nommé Malik Ashter au poste de gouverneur de l’Egypte, il lui a intimé par écrit comment s’occuper des personnalités fortu­nées, des différentes classes moyennes et pauvres, d’autre part des différentes situations qui pourraient s’y développer. Dans le dit écrit, il s’est focalisé sur le concept de la coexistence, conseillant : « Souviens-toi, Malik, que parmi tes sujets tu trouveras deux catégories distinctes : ceux qui ont la même religion que toi – ils sont tes frères, et ceux qui sont d’autres persuasions religieuses — ce sont des êtres humains comme toi »8.

Pour lui, tous les citoyens dans une société doivent être compris dans deux groupes : le premier comporte les frères religieux du dirigeant prin­cipal, le second consiste en « non musulmans » soit des semblables du di­rigeant principal, par rapport à la Création. L’Imam Ali voulait que le fait d’être humain suffise pour tout individu de jouir des droits de l’homme et du citoyen ; l’Imam écrit que ce principe ne doit être écarté en aucun cas, car il s’agit du respect des droits essentiels et fondamentaux inaliénables durant la vie de tout homme.

Ce discours de l’Imam serait compatible avec le concept coranique de coexistence paisible bâti sur le point de vue que les êtres humains sont uni­formes sous un seul Dieu qui les a créés d’origine commune, tel exposé dans le verset suivant : « Être humain, sois conscient de tes devoirs envers ton Seigneur, Qui t’a créé d’une seule âme, et de là aussi Ta partenaire, et de votre paire ceux éparpillés Sur la Terre, beaucoup d’hommes et de
femmes »9.

Ce verset se réfère à l’unité des êtres humains fondée sur la Création par Dieu ou leur origine commune. Cela veut aussi dire que les êtres humains doivent reconnaître les différences et vivre avec.

Un autre verset souligne l’origine commune des êtres humains et consi­dère la diversité humaine comme une base pour la compréhension mutuelle et la coexistence paisible : « Ôpeuple, Nous vous avons créés d’un mâle et d’une femelle (Adam, et Eve), Nous vous avons créés en communautés et tribus diffé­rentes afin que vous puissiez vous connaître »10.

Ce verset indique que tous les êtres humains proviennent d’une seule communauté (Umma), et que Dieu les avait créés à partir d’un seul homme et d’une seule femme, en les répartissant tous dans des groupes divers, afin qu’ils puissent apprendre à se connaître. Ceci implique que la diversité hu­maine devrait mettre en exergue la reconnaissance plutôt que la confron­tation avec l’autre. Selon l’exégète, ce verset commande les musulmans à construire des ponts de compréhension et de coopération avec la commu­nauté terrestre, afin d’établir une vie sociale globale juste.

C’est important de noter, tout comme le revendique Alikhani (2011 : 463), que lorsque l’Imam Ali parlait des non musulmans, il n’a pas seulement parlé de leurs droits et d’une coexistence paisible, car ces éléments peuvent être assurés à travers des lois. Il a, cependant, parlé d’approche compatissante envers tout être humain, car le fait qu’un être soit humain lui suffit pour qu’il l’aime et pour qu’il effectue un rapprochement digne et respectable.

Considérons ses paroles : « Malik ! Tu dois élaborer dans ton esprit certaines qualités : la gentillesse, la compassion, et l’amour, envers tous tes sujets. Tu ne dois pas te comporter envers eux, comme un monstre affamé et vorace dont l’épanouissement exige de les dévorer

Ne pas penser avoir absolument raison

Alikhani12 verse de la lumière sur le fait que : « …c’est naturel que toute personne ou religion considère que ses propres perception et foi relèvent d’une raison absolue — ceci peut aussi être vrai de l’Islam ». Le verset suivant stipule clairement que : « La Religion devant Allah est l’Islam (soumission à Sa vo­lonté). Les adeptes du Saint Ouvrage ne peuvent en dévier, sauf en invoquant la jalousie l’un de l’autre, dès qu’ils avaient pris connaissance. Mais tout individu qui renie le Signe d’Allah, verra celui-ci le rappeler rapidement à l’ordre et à en répondre »13. Cependant, lorsqu’il s’agit d’interaction avec des non-musul­mans, alors aucune discussion ne peut être bâtie sur la base que l’une des parties a absolument raison pendant que l’autre partie a absolument tort. Le Coran a ordonné au Prophète Mohamad (SAW) d’aviser les infidèles que : « Entre Nous et Vous, un côté est guidé, l’autre est mal orienté »14.

Le Prophète Mohamad (SAW) savait qu’il se situait sur le côté guidé correctement, mais il se devait de permettre un dialogue utile15.

Alors qu’il démarrait son expédition vers la Bataille de Jamal, l’Imam Ali a écrit une lettre au peuple de Kufa en les informant : « Quoiqu’il en soit, j’invite au Nom d’Allah ceux qui sont touchés par cette lettre, à venir voir pour eux-mêmes si j’ai droit ou si j’ai tort. S’ils me trouvent sur le chemin de la vérité et de la justice, ils pourront m’aider, or s’ils trouvent que j’ai tort, ils pourront me raisonner »16.

Être disposé à la réconciliation

Le point de vue de l’Imam Ali, en matière de paix et de tolérance, est dé­montré par l’intérêt qu’il porte à l’importance d’être enclin à la réconciliation. Dans sa lettre à Malik, l’Imam Ali a conseillé à ce dernier d’exploiter totale­ment toutes les chances pour faire la paix au Nom d’ Allah. « Si ton ennemi t’invite à conclure un Traité de paix qui plairait à Allah, alors ne refuse jamais une telle offre qui apporte du repos et du confort à tes armées et qui soulagera ton angoisse et tes inquiétudes, et apportera prospérité et plénitude à ton peuple »17.

Mulamiri18 dit que bien que l’Imam Ali fût un guerrier de premier ordre, il n’aimait toutefois pas du tout la guerre, car celle-ci avait une influence maléfique sur les êtres humains, qu’ils soient frères de religion et/ou frères de création. Donc il rappelait à Malik de se distancer autant que possible de la guerre, notamment pour empêcher que les hommes s’entretuent et ne versent malencontreusement du sang.

Pour l’Imam Ali, il ne suffisait pas d’arrêter la guerre, il s’efforçait d’éta­blir durablement la paix, même en respectant les différences de religions ou d’idéologies. Il observe que même lorsqu’il n’y a pas de terrain ou d’intérêt en commun qui pourrait unir les êtres humains (ce qui correspond à une situation assez périlleuse), on peut établir des pactes et traités qui rappro­chent les différentes religions et croyances autour d’un centre en commun qui permettrait à la civilisation humaine de s’épanouir autant que possible. C’est d’ailleurs là, la raison pour laquelle il condamnait les manquements aux traités conclus, même si ceux-ci n’arrangeaient pas une partie ou l’autre. Dans ce cas-là, il estimait que le bon Musulman pourrait accepter de subir les pertes, de continuer à honorer l’accord (même avec son ennemi) tout en recherchant à renégocier19. Penchons-nous sur sa parole : « Veillez à ne jamais manquer à votre promesse vis-à-vis un ennemi, même que tu lui aies offert ta protection ou ton soutien, ne jamais revenir sur tes paroles, et ne viole jamais les termes d’un traité»20.

En soulignant le respect à manifester envers les traités, l’Imam Ali sou­tient l’ultime importance des pactes et traités dans l’Islam, surtout les ac­cords sociaux et politiques. Considérons le verset :

« Honore le convenu d’Allah, et dès lors que tu es convenu de quoique ce soit, ne brise jamais ton serment confirmé »21.

Cela vaut la peine de mentionner que l’établissement de la société isla­mique à Médine suivant l’arrivée du Prophète Mohamad (SAW) était basé sur les traités qui avaient été signés entre le Prophète Mohamad (PBUH) et les non-Musulmans, ainsi bien que les minorités religieuses, et cette dé­marche fut progressivement généralisée dans toute l’Arabie Saoudite22.

 

Le rôle du dialogue

Le concept du dialogue a été profondément enraciné dans le discours co­ranique, puisqu’il s’agit là d’un principe important pour l’Islam et les autres religions. « Allez tous les deux au Pharaon, car il a véritablement transgressé toutes les limites. Mais parlez-lui doucement, car il pourrait s’en offusquer ou craindre (Allah) »23.

Dans le Coran il est aussi stipulé que la démarche devait être conduite de la meilleure manière possible et fondée sur la bonne argumentation. « Invitez (tous) au Chemin du Seigneur, en employant des prêcheries sages et belles ; et argumentez des meilleures et plus gracieuses manières »24.

L’Imam Ali attachait une grande importance au dialogue avec les en­nemis, comme méthode stratégique pour résoudre les différends. Sa cor­respondance avec Muâwiyah demeure un bon exemple de dialogue qui a duré jusqu’à la bataille même de Saffin. Le dialogue de l’Imam Ali avec les Kharijites, ses opposants les plus acharnés, reste célèbre : l’Imam leur disait fréquemment qu’il était disposé à négocier avec eux pour résoudre les am­biguïtés. Chaque fois que la négociation s’effondrait ou se bloquait, l’Imam Ali patientait pour d’autres opportunités. Enfin, selon l’Imam Ali, le dialo­gue est le seul chemin légitime pour atteindre la coexistence paisible dans les sociétés humaines, et pour résoudre les problèmes sociaux et politiques25.

 

Bibliographie

Le Coran glorieux Nahjû Balagha (Internet )

Akhtar, S. Imam Ali Bin Abu Talib A.S.: His Life, Achievement, and Merits (Internet) Alikhani, A. (2011) Strategies for Peaceful Coexistence in Islam. Dans ‘^International Conference on

Social and Economic Development. Vol.10, 461- 468. Bohrani, A. (2008) Miraculous Words of Ali -« Nahjul al Balagha ». Dans le journal Daily News,

Karachi, Pakistan.

Takim, L.: Holy Peace or Holy War : Tolerance and Coexistence in the Islamic Traditions. (Internet) Takim, L. The QuranicPropheticModelof Peaceful Coexistence andEthical Conduct. (Internet).

 

Notes

  1. Ndt : AS (Paix soit sur lui) et (SAW) Que la Paix et la bénédiction de Dieu soient sur lui.
  2. Akhtar, 4-5.
  3. Cité dans Akhtar,
  4. Al-Bukhari () et Al-Suyuti ().
  5. Akhtar : 9.
  6. Alikhani, 2007.
  7. Fakhr-Ruhani, cité en Al-Milani, 2010, p.594.
  8. Imam Ali,1093.
  9. Sourate Al-Nissaâ : 1.
  1. Sourate Al-Hujurat : 13.
  2. Imam Ali, 1092. 12.2011 : 463.
  1. Sourate Al-Ûmran : 19.
  2. Sa’aba : 24.
  3. Alikhani, 2011 : 463.
  4. Imam Ali,1134.
  5. Imam Ali, 1122. 18.2011 : 487.
  1. Alikhani, 2011 :462.
  2. Imam Ali, 1122.
  3. Sourate Al-Nahl : verset 91.
  4. Alikhani, 2011 :462.
  5. Sourate Taha 43-44.
  6. Al-Nahl : 125.
  7. Alikhani, 2011 : 464 ; et Mulamiri, 2011 : 487.

 

 

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