Mot d'introduction Par Ali RASTBEEN De la Géopolitique du terrorisme

Mot d’introduction Par Ali RASTBEEN De la Géopolitique du terrorisme

Première table ronde
Modérateur : Ali RASTBEEN, Président de l’Académie de Géopolitique de Paris
Colloque; La Géopolitique du Terrorisme
Actes du colloque
Le jeudi 11 décembre 2014
Assemblée Nationale

Le terrorisme n’est pas un phénomène nouveau, c’est un phénomène commun à toutes les sociétés humaines et à toutes les époques. Mais il est aujourd’hui renforcé par la mondialisation qui lui a offert tous les outils technologiques nécessaires pour se répandre.

Depuis les premiers détournements d’avion par des militants palestiniens jusqu’aux attentats du 11 septembre 2001, le monde arabo musulman est pointé du doigt comme la principale source du terrorisme contemporain.

Le retour à l’islam radical est un phénomène moderne qui s’étend de l’Indonésie à la Tchétchénie. Cependant, si l’islamisme a un visage diversifié selon les pays, il est néanmoins né dans les années 70 comme conséquence à un désespoir lié à l’échec du développement pour tous, car l’islamisme n’est pas seulement une réaction contre la modernisation des sociétés musulmanes, il est aussi un produit de cette modernisation, avec ses échecs.

Le Moyen-Orient a connu ces dernières années une série d’événements qui ont modifié la donne régionale : la révolution iranienne de 1979, la crise économique des pays arabes de 1982-1986, le problème irrésolu entre palestiniens et israéliens, la fragmentation du système régional arabe, l’affaiblissement de la légitimité des régimes en place, l’écrasement de la société civile par les Etats et l’aggravation des échanges inégaux entre le monde arabe et les pays industriels.

L’islamisme s’est donc développé dans une période de désillusion pour apparaître comme un ultime recours, une recherche obsessionnelle d’identité, une tendance à référer toute action à une histoire originelle autochtone et mythifiée.Ses partisans les plus fanatiques rappellent alors le radicalisme désespéré des anarchistes du siècle dernier en Europe.

Ce type de terrorisme est aggravé par la pauvreté, le chômage et l’injustice. D’autant plus que sur le plan culturel, cette mondialisation tend à imposer la culture occidentale et à marginaliser les autres cultures traditionnelles, ce qui engendre une humiliation favorisant les poussées de l’intégrisme qui ne trouvent aucun autre moyen pour contester que la violence et le terrorisme.

De plus, l’échec des cadres pachtouns de l’armée et des services pakistanais, à contrôler la situation en Afghanistan et au Cachemire ; la politique étrangère américaine qui a abandonné les groupes mercenaires islamistes à partir des années 1990 en Afghanistan, et qui est accusée d’utiliser de manière constante les fondamentalistes musulmans à des fins stratégiques pour actionner les nombreux renversements d’alliance, quand seul prévaut l’obsession de la Guerre du pétrole.

Cette politique est accusée de mépriser les musulmans en formant, équipant et soutenant la puissance économique et stratégique de l’Etat d’Israël.

La nature de certains pays arabes d’une part une pensée extrémiste qui puise ses sources dans la diversité conceptuelle des différentes communautés musulmanes et de l’autre, les liens d’allégeance entre les dirigeants musulmans autocrates et l’Occident, au détriment de la défense des intérêts de leurs peuples.

La politique étrangère de certains pays arabes comme celle de l’Arabie Saoudites incapables de contrôler l’intégrisme sunnite qu’ils encouragent depuis les années 80.

La politique du Qatar qui est devenu l’une des plateformes des mouvements terroristes radicaux rivalisant aujourd’hui avec l’Arabie Saoudite dans l’exportation de l’extrémisme.

En effet, le Qatar et l’Arabie Saoudite ont fortement financé et alimenté l’armement des extrémistes de Syrie, ouvrant la voie à l’émergence de Daech. Tous deux soutiennent les talibans afghans, en appuyant les terroristes extrémistes, ils ont contribué à la transformation de la Libye vers son statut d’Etat en échec.

Ainsi, tous ces Etats auraient joué aux apprentis sorciers, en couvant des groupes radicaux qui ont fini par se retourner contre eux.

En d’autres termes, si Ben Laden a été engagé par les Etats Unis et son allié saoudien pour battre l’Union Soviétique, il a fini par « se retourner contre ses protecteurs », avec l’objectif, de provoquer une rupture historique entre le Monde Musulman et l’Occident.

Tous ces bouleversements ont donné naissance à des groupes fondamentalistes tel qu’Al-Qaïda dans la péninsule arabique et dans le Maghreb islamique au Mali et en Algérie, BokoHaram au Niger, Al-Shabab en Somalie, les Talibans en Afghanistan et au Pakistan, Ansar al-Charia en Libye et en Tunisie, Jamatee Eslami en Indonésie, Abou Sayyaf aux Philippines, Ansar din au Mali, Ansar Bitalmoghadas en Égypte, et enfin Daesh en Irak et en Syrie.

Contrairement aux autres groupes terroristes qui considèrent l’Occident comme étant l’ennemi de l’Islam et des musulmans, Daesh demande la soumission de toutes les personnalités et de tous les pays musulmans ou non musulmans du monde à son califat autoproclamé.

En outre Daesh défie les frontières établies, fixe des régions particulières qui lui permettent d’établir son contrôle et renforcer ses soutiens financiers et logistiques. C’est ainsi qu’en Irak et en Syrie, profitant de l’anarchie existante, il a effectué des avancées remarquables.

Ensuite, grâce à son efficacité à occuper les réseaux sociaux, il a réussi à défier la plupart des pays du monde. Daesh est équipé de chars, d’avions et de missiles. Il détient 8 puits de pétrole en exploitation, des banques et des administrations, il a réussi récemment à mettre la main sur 40 kilos d’uranium dérobé à l’Université de Moussoul. Il a constitué un gouvernement qui ne recule devant aucune forme de violence face à tout opposant à son idéologie.

Devant ce danger soudain qui menace l’équilibre du monde, aujourd’hui, les États-Unis tentent finalement de créer une coalition en réunissant plus de 40 pays contre Daesh.

A ce propos, il convient de signaler que si les États-Unis sont habiles dans la création et la direction des coalitions, les pays arabes le sont dans l’adhésion aux coalitions et dans la participation aux combats menés par d’autres et qui ne sont pas l’intérêt des arabes. Aujourd’hui encore, ils ont adhéré à la coalition réunie par les États-Unis en vue de combattre un groupe originellement soutenu par eux-mêmes.

De ce qui précède, l’Occident ou en tout cas l’Europe doit mettre un terme à la démagogie et l’extension du mouvement salafiste dans le monde.

La défense des droits fondamentaux de l’homme doit prendre un caractère universel, afin qu’aucune différence ne démarque l’homme occidental de l’homme musulman.

Les pays musulmans doivent organiser des conférences scientifiques, des séminaires, des voyages d’échanges, sensibiliser les structures culturelles de la société civile, les écoles, les universités, les mosquées et les associations sur le danger de l’extrémisme, afin que les savants des différentes communautés puissent débattre des pensées fondamentalistes et qu’un point de vue de l’Islam moderne s’affirme, conformément aux droits de l’homme, aux droits des citoyens et aux libertés démocratiques.

Dans ce domaine, des pays comme l’Iran, le Maroc et la Malaisie peuvent prendre l’initiative.

L’Occident et le monde musulman doivent abandonner ensemble la théorie de l’affrontement des civilisations et celle de la fin de l’histoire de l’Occident, pour se tourner vers le dialogue entre les civilisations, les cultures et les religions afin de mieux connaître leurs fondements et leurs différences pour mieux les accepter et faciliter le vivre ensemble. L’Occident doit passer à une volonté de dialogue et de collaboration sans faille.

Et, enfin, il revient aux peuples de la région, de mener un combat permanent pour acquérir les libertés politiques, dans le strict respect des droits de l’homme. Afin d’opter pour des politiques de détente dans le monde et dans la région et de désamorcer la montée des affrontements entre les différents courants religieux.

Dans le cas contraire, nous risquerions dans un avenir proche, d’être témoins de conflits interreligieux, avec son cortège d’horribles massacres.

Nous espérons que, dans le cadre de ce colloque sur cette question importante d’actualité, les personnalités, les diplomates, les universitaires, les spécialistes réunis aujourd’hui, grâce à leur participation et leurs échanges d’idées, nous éclaireront davantage sur ce sujet.

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