L’UNIFICATION DE L’EUROPE ET LES RÉALITÉS DÉCEVANTES

Ali RASTBEEN

Juillet 2008

L’OCCIDENT TRAVERSE UNE PERIODE DE CRISE. Cette crise, qui a commencé au début du XXIe siècle au sommet de la pyramide de la puissance mondiale, se transmet progressivement aux marches de celle-ci. À la tête de la Maison Blanche, les néo-conservateurs visaient à l’enrayer. Or, leurs actions agressives et insolentes n’ont fait que la renforcer. Les guerres en Afghanistan et en Irak — dont la seconde a été entreprise en faisant fi de l’Organisation des Nations unies — ont semé la crise au sein même des pays européens alliés des États-Unis.

Le monde a été témoin de la guerre inévitable menée par les États-Unis en Afghanistan dont les conditions étaient réunies depuis 20 ans1. Ces conditions avaient été suscitées par les menées américaines lors de la guerre civile dans ce pays et leur face-à-face indirecte avec Moscou. Or, après le départ des troupes soviéti­ques, il apparaît que ce fut une erreur d’abandonner ce pays entre les mains des Talibans lesquels envisageaient d’étendre leur pouvoir sur l’ensemble de l’Asie cen­trale et occidentale. Ils menaçaient aussi bien l’Asie et l’Afrique que la présence des États-Unis et de l’Europe à l’intérieur et à l’extérieur de la région2.

En Irak, cependant, la situation était différente. Le Président des États-Unis a annoncé sa politique de guerres préventives. Une politique qui permet aux États-Unis, selon leur désir, d’entamer une guerre quand ils veulent et où ils veulent3. Ils ont appliqué cette politique en Irak sans l’aval des Nations unies et contraire­ment à la volonté de nombreux alliés européens et non européens. Londres a suivi Washington et cela indépendamment des oppositions et des manifestations des peuples à travers le monde. Le sentiment d’insécurité internationale s’est greffé à la crise économique alors latente. Avec la guerre en Irak, Washington avait ouvert un chemin qui entraînait ses alliés dans le marécage d’une guerre mondiale. Bagdad était la porte de l’Iran, la Corée du Nord celle de la Chine et Moscou à la portée des deux axes.

La suite des événements a rapidement montré que les États-Unis sont tombés dans un piège qu’ils avaient eux-mêmes tendu. En effet, dans le calcul de leur po­tentiel militaire et économique — sans doute la plus grande puissance du monde — les États-Unis avaient commis la même erreur que l’Allemagne nazie au début du XXe siècle. Ils avaient oublié, dans leurs prévisions, de prendre en compte un fac­teur impossible à prévoir, et qui a fait son apparition au lendemain de la seconde guerre mondiale : la force populaire face à l’agression4. Cependant, les États-Unis avaient observé ce facteur en Chine, en Indonésie, au Viêt-Nam et en dernier lieu en Afghanistan face aux armées occidentales et soviétiques. Toute puissance inter­ventionniste qui fait fi de la force populaire face à l’agression extérieure, commet­tra la même erreur que Washington en Irak. Les néo-conservateurs de la Maison Blanche étaient dupes. Par leur politique « va-t-en guerre », les États-Unis et leurs alliés européens ne sont, non seulement pas parvenus à maîtriser la crise ayant pour origine l’ordre établi dans les relations internationales au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, mais au contraire ils l’ont renforcée.

Des mesures commerciales provisoires à portées locales, la présence d’organisa­tions internationales tel que le Fonds Monétaire International, la Banque Mondiale de Développement, l’Organisation Mondiale du Commerce, les blocs d’armement et la création de crises locales pour absorber les réserves financières de pays dis­posant de ressources naturelles par le biais de vente d’armes ont montré, dans la période actuelle, leur inefficacité à résoudre la grande crise qui se transmet de la métropole du capital vers l’Europe et l’Asie5. Pour résoudre cette crise qui prend un aspect chronique, il faudrait qu’interviennent d’autres acteurs qui se situent à l’ex­térieur de la sphère des capitaux mondiaux. Ceux qui, par expérience, ont compris que la concentration des capitaux dans la métropole et leur croissance permanente ne disposent pas de soutiens nationaux et internationaux tandis que le monde se trouve au seuil d’une importante crise chronique6.

La sonnette d’alarme a été tirée par l’« affaire Enron » à la fin du XXe siècle aux États-Unis7. Or, au lieu de rechercher des solutions radicales et comprendre les failles du système monétaire, toutes les capitales financières du monde ont tenté d’occulter l’affaire et d’y apporter des solutions provisoires. L’effort était concentré à faire oublier à l’opinion publique la vulnérabilité de la structure de l’économie mondiale, en espérant pouvoir y remédier par le biais de l’invasion des territoires des anciennes colonies et de ces régions du monde qualifiées aujourd’hui de « Sud ». Or, cela ne put se réaliser. L’affaire de la crise immobilière aux États-Unis, due à l’incapacité de deux millions de ménages américains à rembourser leurs prêts, a ébranlé d’abord les banques et la bourse américaine avant de se propager rapidement aux banques et aux bourses européennes et asiatiques. Malgré tous les efforts entrepris par les autorités économiques et politiques de l’Occident pour dissimuler la crise et minimiser son impact sur l’économie américaine et sur la métropole financière du monde, les bourses européennes et asiatiques ont subi pendant plusieurs mois les impacts négatifs de cette affaire. Outre les banques américaines, certaines banques anglaises, suisses et françaises ont subi des dommages. A Paris, on a tenté de réduire les déboires subis par la Société Générale à la faute d’un employé. Or l’affaire prit des dimensions plus importantes et éclaboussa les plus hautes autorités de l’établis-sement8.

L’énumération des détails des événements au cours de la dernière décennie au niveau des bourses, des banques et dans la situation des gouvernements américains et européens est trop vaste pour être évoquée dans le cadre de la présente analyse. Le signe le plus récent est l’intérêt porté par les capitaux de la métropole mondiale au secteur de la production alimentaire, intérêt dont les effets sont apparus, très rapidement, par les disettes et les famines et le soulèvement des affamés en Afrique. Cette agression, dont on tente d’occulter l’impact en détournant l’opinion publi­que vers des facteurs tels que le climat ou l’utilisation de produits agricoles à des fins énergétiques, est une nouvelle représentation de la pression exercée par le « Nord » sur le « Sud ». La concentration et le transfert du capital vers les projets fructueux ont réussi à maîtriser la puissance destructrice de la nature. Ceci s’ajoute à la poli­tique du soi-disant soutien de la Banque Mondiale de Développement et du Fonds Monétaire International qui empêche l’ouverture économique des pays du « Sud », en dévalorisant les monnaies, augmentant l’inflation, la pauvreté et le chômage et en aggravant l’endettement de ces pays.

Cependant, si la crise augmente dans le « Sud » et si son exploitation par le « Nord » s’aggrave, à terme et de manière inévitable, ce sont le « Nord » et les métro­poles des capitaux mondiaux qui en subiront — et en subissent déjà — les effets né­fastes. Aujourd’hui, dans les plus grandes capitales occidentales, il est avéré que les régimes politiques en place tentent de reprendre les avantages sociaux qu’ils avaient concédés aux populations pendant la période de la guerre froide. Le « grignotage » de ces avantages a commencé depuis longtemps et le modèle américain du droit de travail et de la sécurité d’emploi a été adopté d’abord par Madame Thatcher en Angleterre avant de trouver des adeptes à Berlin et à Paris9.

Grâce à la bienveillance des États, sous couvert d’équilibre les budgets, les grands capitaux ont augmenté leur part dans les services sociaux, en spoliant des millions de personnes. Des appellations démagogiques telles que les assurances complémen­taires couvrent ces importantes interventions aux échelons nationaux, dont le résul­tat est l’aggravation de l’inflation et la cherté du coût de la vie.

Ce que l’unification de l’Europe a apporté pour les populations de la zone « euro » au moment de l’unification de la monnaie, a été une augmentation effré­née des prix qui, au détriment des populations, a épanoui les marchés, situation qui dure encore aujourd’hui. Cependant, les salaires ont stagné ou sont restés à peu près inchangés. Les conflits entre les gouvernements et les salariés autour des ques­tions telles que l’âge de la retraite et les modifications du droit de travail s’étendent rapidement. Avec l’ouverture des frontières sur l’Europe de l’Est et l’afflux de forces de travail en provenance de ces pays, les pressions sur les syndicats et les salariés autochtones ont été augmentées!0. Le nombre d’immigrés au chômage, dans les quartiers peuplés de migrants est en nette progression. Ces travailleurs, constituent de par leur chômage un facteur d’insécurité dans les banlieues urbaines. Pour les travailleurs ordinaires ou ceux spécialisés, il est également difficile de trouver un emploi en Europe, compte tenu de l’évolution technologique dans ces pays et le transfert des industries de fabrication des besoins de consommation vers les pays de l’Asie du Sud-Est, la Chine et l’Inde, où les frais de production sont beaucoup moins importants, de l’ordre d’un cinquième. En Europe, en raison de l’incapacité de rivaliser avec des produits en provenance de l’Asie, la production de nombreux articles tend à disparaître.

Le transfert des grands capitaux européens et américains en Asie, même dans les secteurs électroniques et informatiques a diminué les capacités concurrentielles de l’Europe. Dans tous les secteurs industriels auparavant entre les mains de l’Allema­gne, la Suède, la France, l’Angleterre, la Tchécoslovaquie et l’Italie, ces mêmes pays sont devenus aujourd’hui importateurs de produits fabriqués à Taiwan, en Chine, en Inde, au Japon, en Malaisie, en Corée du Sud… Et que devient le potentiel humain spécialisé de l’Europe ? Il émigre en grande partie vers les États-Unis et le Canada (« brain drain ») tandis que certains travaillent dans les secteurs industriels transférés en Asie. Une des préoccupations majeures des États est celle de la situa­tion des jeunes qui arrivent sur le marché de l’emploiii.

Dans le contexte actuel de l’Europe, la gauche a perdu de son efficacité et de sa présence. Les syndicats ouvriers qui, pendant deux siècles, ont agi sous une ban­nière idéologique, ne jouent désormais qu’un rôle passif face aux politiques des gouvernants. Il semble qu’ils attendent un événement qui doit avoir lieu sans savoir ni quand, ni comment.

Les autorités gouvernementales, à leur tête le Président de la République, jouent le rôle d’intermédiaires dans des projets stratégiques entre les arsenaux, les grosses transactions d’armes, les grandes industries et la technologie nucléaire (qui, depuis quelques années, a trouvé son propre marketing) avec des pays tiers. Les voyages de Jacques Chirac à Pékin, le voyage de Nicolas Sarkozy dans la région du Golfe Persique, pour la vente d’avions militaires, la construction de centrales nucléaires, etc. sont copiés sur le système américain de marketing. A Londres et à Berlin, les tenants du pouvoir jouent des rôles similaires.

Dans un tel contexte et sous l’égide de Washington, l’Union européenne suit une ligne sinueuse. Selon un proverbe : si le maçon place la première pierre de tra­vers, le mur montera en biais jusqu’au ciel. Les initiatives du groupe Benelux qui s’était réuni pour assurer la survie des pays européens au lendemain de la Seconde Guerre mondiale avec l’aide du « plan Marshall » avaient attiré l’attention d’autres pays. Très rapidement, le Benelux devint l’axe de la création du marché commun européen.

Or, dans les conditions du monde bipolaire, l’Occident réclamait la direction des États-Unis pour satisfaire deux types de besoins. L’Occident était lié à ses ter­ritoires conquis avant la guerre. La vague d’indépendantisme en Asie, Afrique et Amérique du Sud a provoqué les guerres, les rivalités et les recherches de solutions pouvant dompter cette vague. Dans ce contexte, le principal rival des Européens était leur protecteur américain, grand vainqueur intact de la seconde guerre mon­diale. Les États-Unis sont intervenus en Asie du Sud-Est, au Moyen-Orient et en Afrique, prenant la direction et la succession de l’Europei3. Pour empêcher l’ex­tension du communisme, une fois encore à l’initiative des États-Unis, fut créé le pacte de l’OTAN, destiné à devenir une ligne de démarcation entre l’Est et l’Ouest. Ce pacte devint rapidement le symbole de la puissance commune américaine et européenne face au bloc de l’Est, avec des pays satellites au Moyen et à l’Extrême-Orient. Dans son conflit avec la direction de l’OTAN, la France de De Gaulle s’éloigna de l’État-major de l’OTAN. Cet état-major qui se trouvait à Paris fut transféré à Bruxelles. Des années plus tard, la France se réconcilia avec l’OTAN mais on n’a pas su à quel prix.

Face à l’OTAN, Moscou érigea le pacte de Varsovie, justifiant ainsi l’état de la paix armée et de la course aux armements entre l’Est et l’Ouest. Les pays objets de cet alignement de forces, se réunirent à la conférence de Bandung à l’initiative de Nehru, du Dr Sukarno et de quelques dirigeants africains indépendantistes et annoncèrent la création du front du Tiers-Monde ou des pays opposés aux pactes militaires.

L’Allemagne de l’Ouest, occupée par les États-Unis et devenue alliée écono­mique de ces derniers, reconstruisit rapidement son pays et retrouva son ancienne situation dans l’économie mondiale, tout en préparant le terrain au rapprochement avec la France en vue de créer la nouvelle Europe. Cependant, la place de l’An­gleterre resta ambiguë. L’Angleterre qui se considère comme un pays européen, a réussi jusqu’à maintenant, grâce à des liens européens et américains, à rester un membre important de l’Union européenne sans pour autant être complètement absorbée par l’Union. L’exemple type consiste dans sa position envers la monnaie unique. Un autre exemple de sa politique réside dans sa collaboration avec les États-Unis pour attaquer l’Irak, alors que l’Europe n’a pas participé à la guerre. Le Premier Ministre social-démocrate britannique épaula George Bush dans l’invasion de l’Irak. Cependant, dans les politiques fondamentales et stratégiques de l’Eu­rope, l’Angleterre agit en parfaite coordination avec les autres membres de l’Union. La coopération entre quatre puissances occidentales dans la victoire sans effusion de sang sur Moscou, la destruction du mur de Berlin et la réunification des deux Allemagnes ont été les événements les plus importants de la fin du XXe siècle. L’Occident a cependant utilisé cette victoire dans un esprit conservateur. Le bloc de l’Est a disparu, le pacte de Varsovie s’est désintégré sans que l’OTAN ne subisse aucun dégât. De surcroît, par le biais de l’OTAN et des relations bilatérales, l’Eu­rope institutionnelle a pénétré dans les pays de l’Europe de l’Est et a avancé même dans les territoires russes du XIXe siècle.

Ce mouvement, dirigé vers le passé, se poursuit encore énergiquement. Si l’Or­ganisation des Nations unies avait eu pour mandat d’aménager l’Europe de l’Est et les républiques asiatiques de l’Union soviétique, sans doute des solutions rai­sonnables auraient pu être trouvées pour résoudre les problèmes de ces pays. Les dirigeants de la France, de l’Allemagne et de l’Angleterre et à leur tête les États-Unis ne se comportaient plus comme tuteurs de la Géorgie, de l’Ukraine et de la Tchétchénie.

Les États-Unis tentent de mondialiser l’OTAN pour atteindre leurs propres objectifs et l’Europe les suit. En Afghanistan, les États-Unis agissent de manière indépendante, tandis que les Européens sont placés sous le commandement de l’OTAN. Des bases de l’OTAN ou des pays membres de cette organisation ont été créées dans l’Asie centrale. Il est clair que le commandement de l’OTAN relève des États-Unisi5. Outre les pays de l’Europe de l’Est, l’Azerbaïdjan, l’Ukraine et la Géorgie sont prêts à s’adhérer à l’OTANi6. Ce pacte militaire qui avait été créé pour contenir le communisme et empêcher d’autres révolutions de voir le jour, a perdu aujourd’hui sa raison d’être après la dissolution du pacte de Varsovie, de la désintégration de l’Union soviétique et l’adhésion de la Russie à la communauté des pays adeptes de la liberté du commerce et de la concurrence du marché, à moins qu’on admette que le monde s’est rendu à la politique de domination militaire des États-Unis et de quelques pays européens. Ce qui signifierait l’officialisation d’une discrimination mondiale mise en œuvre depuis des années avec le soutien des qua­tre puissances occidentales à l’exemple de ce qui se passe dans les territoires occupés de la Palestine.

Un autre exemple a été le projet mis en œuvre par l’Allemagne, la France et l’Angleterre, grâce à l’entremise des États-Unis à propos de la péninsule balkanique et en l’occurrence de la fédération yougoslave : une grave erreur pour l’avenir de l’Europe. La désintégration d’un pays qui aurait pu être l’exemple d’un système fédératif, un pays qui, à l’apogée de la puissance du bloc de l’Est avait pris ses dis­tances de Moscou, devenu entre l’Est et l’Ouest le symbole d’une troisième force, ne méritait pas une telle récompense de la part des dirigeants occidentaux. L’OTAN y a montré son véritable visage. L’Occident qui s’opposait aux intégristes islami­ques y a ouvert la voie à leur présence sous couvert de défendre les musulmans de Bosnie-Herzégovine. Sans que la désintégration ait atteint son terme, les adeptes de la balkanisation ont semé les graines des futurs extrémismes.

Peut-être, dans leurs archives de la seconde guerre mondiale, les Allemands ne disposaient-ils pas de rapports encourageants sur la résistance de Mihailovic, et de ses compagnons. Mais le retour à des prétentions conservatrices du siècle précédent, qui n’auraient pas dû se répéter — surtout avec une sauvagerie telle qu’elle fut perpé­trée en Irak — a terni le visage de l’Europe. Attiser les haines ethniques et religieuses, en se prétendant intermédiaires, attaquer par des armes destinées à une « guerre propre » les infrastructures créées pendant plus de 50 ans par un peuple — composé d’ethnies éparpillées, souvenir des empereurs autrichiens et ottomans — ne consti­tuent pas des images plaisantes aux yeux de l’opinion mondiale. C’est pourquoi on a tenté de poursuivre le projet de la désintégration de la Yougoslavie dans un complot de silence et de secret. La résistance locale fut également réprimée par le tribunal international pour « crimes contre l’humanité ». La désintégration de la patrie de Tito n’est pas terminée mais le terme de balkanisation pour des pays qui attendent le même destin que la Yougoslavie est entré dans le langage diplomatique.

Le destin de la Yougoslavie, marqué par la campagne militaire de l’OTAN, éclai­re l’horizon des politiques futures dans l’Europe de l’Est. Avec le soutien financier et militaire des États-Unis et compte tenu des dégâts provoqués par 25 ans de do­mination des partis communistes, une droite populiste y a pris le pouvoir, avec une vue haineuse à l’égard des affaires intérieures et internationales, ce qui constitue une source de crises sociales menaçant l’Europe de l’Est dans son ensemble. La coordi­nation entre ces dirigeants et la politique conservatrice de l’Europe ne permet pas de mettre à nu cette réalité. Au contraire, cette situation a encouragé les métropoles du pouvoir en Europe à exploiter les conditions apparues en vue de faire avancer leur politique.

Les restrictions grandissantes des droits démocratiques dans les pays européens et, parallèlement, l’extension du parapluie de l’OTAN sur de nouveaux pays en étendant ses frontières vers l’Asie centrale, l’Ouest et le Moyen-Orient sont des facteurs que l’Occident tente d’utiliser afin de surmonter la crise structurelle qui le ronge. Il serait donc judicieux de se référer à l’histoire de la première moitié du XXème siècle et d’examiner à la lumière des critères historiques, les conséquences de ces genres de solution.

La plus grande contrainte que l’Occident doive subir est la domination absolue des néo-conservateurs sur l’ordre mondial. Cette difficulté ne peut être résolue qu’à travers un substitut mondial conscient des dangers qui menacent de près la paix mondiale. Un substitut qui pense à l’être humain, au lieu de s’intéresser unique­ment au pouvoir, et capable de freiner l’ouragan qui s’approche.

* Président de l’Institut International d’Etudes Stratégiques de Paris, directeur éditorial de la revue Géostratégiques. Auteur de plusieurs articles et publications portant sur la géostratégie et la géopolitique internationale, spécialiste de l’Iran et des questions stratégiques et énergétiques au Moyen-Orient.

Notes

  1. Kacem Fazelly, « La politique des Etats-Unis en Afghanistan », Géostratégiques, N° 9, octobre 2005.
  2. Christophe Reveillard, Emmanuel Dreyfus, Penser et construire l’Europe, Armand Colin, 2007
  3. Notre article, « La diplomatie bonapartiste de Bush et l’avenir du monde», Géostratégiques, avril 2005.
  1. Alain Franchon et Daniel Vernet, l’Amérique messianique : les guerres des néo-conservateurs, Seuil, Paris, 2004, p. 26.
  2. Agnès Bertrand, Laurence Kalafatides, OMC, le pouvoir invisible, Paris, Fayard, 2003
  3. Franck Petiteville, La Politique internationale de l’Union européenne, Les Presses de Sciences Po, Paris, 2006.
  1. En décembre 2001, Enron une des plus grandes entreprise américaines cotée en bourse, fit faillite en raison des pertes occasionnées par ses opérations spéculatives sur le marché de l’électricité ; elles avaient été masquées en bénéfices via des manipulations comptables. Cette faillite entraîna dans son sillage celle d’Arthur Andersen, qui auditait les comptes d’Enron.
  2. Le Figaro, 25 janvier 2008.
  3. Bruno Odeon, « Schrôder, si tu fais ton Thatcher, résistances à la fuite en avant sociale-libérale », L’Humanité, 2 mai 2003.
  1. Elisabeth du Réau, (dir), Frontières et sécurité de l’Europe, Paris, l’Harmattan, 2008.
  2. C. Réveillard (dir.), « L’idée d’Europe. Pour un retour au réel », Conflits actuels n° 19 2007-1.
  1. Jean Carpentier (dir), Histoire de l’Europe, Paris : Seuil, 1992 et C. Réveillard, Les premières tentatives de construction d’une Europe fédérale, F-X de Guibert, Paris, 2001.
  2. Mario Dehove, « L’Union européenne, une puissance toujours virtuelle », in B. Didiot, S. Cordellier (dir.), L’état du monde 2005, La découverte.
  3. Hall Gardner, « Vers  »les Communautés régionales de sécurité » : L’Otan, l’Onu et la résolution 1948 de Vandenberg », Géostratégiques, N° 14, avril 2006.
  4. Gérard Chaliand, L’Amérique en Guerre, Irak-Afghanistan, Paris : Edition du Rocher, 2007.
  1. Philippe Torres, « Point des situations dans le Caucase et en Asie centrale : Rivalités, menaces et avancées démocratiques dans des espaces post-soviétiques », Géostratégiques, N° 12, avril 2006.

 

 

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