La Russie et la  » nouvelle » Asie centrale

Mohammad-Reza Djalili et Thierry Kellner

Mohammad-Reza Djalili est professur à l’Institut universitaire de hautes études internationales de Genève,

Thierry Kellner termine une thèse de doctorat dans ce même institut. Ils publient ensemble

Thierry Kellner
Thierry Kellner

un livre sur la Géopolitique de la nouvelle Asie centrale aux Presses anniversaires de France (date de publication prévue: été 2001)

Janvier 2011

La première préoccupation de la Russie par rapport aux cinq Etats d’ Asie centrale (Kazakhstan, Ouzbékistan, Kirghizstan, Turkménistan et Tadjikistan), qui ont fait partie de l’URSS jusqu’en 1991, semble être avant tout d’ordre sécuritaire. En effet, étant donné la position géographique particulière qu’occupe cette région par rapport au territoire de la Fédération de Russie, Moscou entend tout d’abord protéger sa sécurité. D’un point de vue stratégique, les frontières russes avec les républiques d’Asie centrale forment en quelque sorte, ce que l’on peut appeler le « ventre mou » de la Russie. La vulnérabilité de Moscou sur son flanc sud la rend soucieuse d’éviter toute pénétration stratégique d’une autre puissance dans cette région. La croissance potentielle de l’influence de l’Iran, du Pakistan, de la Turquie, de la Chine et surtout des États-Unis, de l’Europe et de l’OTAN constitue autant de menaces auxquelles la Russie est très attentive [1]. Dans la « conception de sécurité nationale » adoptée en janvier 2000 par la Fédération de Russie, Moscou mentionne comme une menace pesant sur sa sécurité nationale dans la sphère internationale, les tentatives exercées par d’autres États « to oppose the strengthening of Russia as one of the influential centres of a multipolar world, to hinder the exercise of its national interest and to weaken its position in Europe, the Middle East, Transcaucasus, Central Asia, and the Asia Pacific Region »[2]. L’Asie centrale, en tant que région géographique, se situe donc au cœur des préoccupations stratégiques de Moscou qui s’inquiète de l’action d’autres États visant à y affaiblir son influence. L’action des États-Unis et de l’OTAN par l’intermédiaire du « Partenariat pour la Paix » dans cette région semble particulièrement indisposer la Russie. Outre cette crainte fondamentale de la Russie de voir une autre puissance pénétrer l’Asie centrale, Moscou perçoit la propagation de l’islamisme radical dans la région comme une menace essentielle sur sa sécurité prise dans son sens traditionnel, c’est-à-dire d’un point de vue militaire [3]. Les analystes russes s’inquiètent des conséquences possibles que les conflits afghan et tadjik pourraient avoir sur l’Asie centrale. Ils craignent en effet qu’ils ne débordent sur les autres républiques de cette région avant d’atteindre le territoire de la Fédération de Russie qui abrite une forte minorité musulmane au Tatarstan, dans le nord du Caucase et au Bashkortostan [4]. A Moscou, on a développé une version russe de la théorie des dominos selon laquelle la contagion de l’islamisme radical gagnerait le territoire de la Fédération après avoir infecté l’ensemble de l’Asie centrale. Cette crainte de l’islamisme radical, bien que réelle chez certains, fait cependant l’objet de manipulations [5]. Elle est en effet instrumentalisée pour fournir une couverture aux ambitions néo-impériales de Moscou dans la région. Sur le plan militaire, la Russie est intervenue au Tadjikistan dans le cadre de la guerre civile qui s’y est déroulée. Officiellement, Moscou continue d’assurer la protection de la frontière entre ce pays et l’Afghanistan afin d’éviter la contagion du radicalisme islamiste baptisé « wahhabisme » dans la région [6]. Sa présence militaire au Tadjikistan permet également à Moscou de rester physiquement présente en Asie centrale et d’y entretenir son influence.

Du point de vue de nombreux analystes russes, la défense des frontières extérieures de la CEI constitue la première ligne de défense de la Russie elle-même [7]. L’Asie centrale est donc considérée comme un maillon important du périmètre de sécurité russe. C’est pourquoi Moscou a mis l’accent sur la poursuite des liens militaires avec les nouvelles républiques d’Asie centrale. Son succès dans ce domaine est mitigé. Si elle assure une présence militaire au Kazakhstan, au Kirghizstan et au Tadjikistan, l’Ouzbékistan, qui caresse également des ambitions régionales en Asie centrale, a pour sa part refusé l’établissement de bases russes sur son territoire alors que le Turkménistan ne compte que des gardes frontières russes faisant fonctions de conseillers.

En matière de sécurité prise dans sa dimension militaire, la Russie est particulièrement concernée par ses relations avec le Kazakhstan. Aux yeux de Moscou, le territoire kazakh joue un rôle très important dans la défense du territoire russe. Ce pays constitue en effet une zone tampon, une sorte de bouclier stratégique destiné à protéger le territoire russe en cas d’instabilité en Asie centrale mais aussi dans l’éventualité d’une dégradation des relations avec la Chine[8]. Au regard de la défense du territoire russe, la présence militaire de Moscou au Kazakhstan, répond aux besoins de la Russie de maintenir son accès à certaines installations stratégiques (cosmodrome de Baïkonour, système de première alerte de Balkhash et centre d’essai de missiles de Sary Saghan) considérées comme essentielles pour surveiller d’éventuels lancements de missiles provenant du sud ou de la Chine[9]. De nombreux observateurs russes pensent également que l’établissement d’une nouvelle ligne de défense le long de la frontière kazakh [10] est irréalisable étant donné sa longueur et les coûts qu’un tel programme entraînerait pour une économie russe déjà précaire. Cette situation implique donc le maintien d’une coopération militaire étroite avec Astana. C’est pour ces raisons que la Russie a conclu avec le Kazakhstan un traité d’amitié, de coopération et d’assistance mutuelle dont l’article 3 prévoit que les deux États coopéreront pour développer une défense commune. Ce traité a été complété par un accord bilatéral concernant la coopération militaire en mars 1994. Cette volonté russe se heurte cependant à Astana qui ne désire pas tomber sous la coupe de Moscou. La mise en œuvre de ces accords n’a en effet guère progressé [11]. Le Kazakhstan a en fait cherché à diversifier sa coopération militaire avec d’autres pays ou organisations régionales comme l’OTAN pour contrebalancer la pression russe. En matière de sécurité, Astana met l’accent sur la diplomatie multilatérale pour éviter de rester en tête-à-tête avec Moscou [12].

En ce qui concerne les intérêts économiques de la Russie dans la zone, il faut relever le fait que son économie n’est pas dépendante de l’Asie centrale. Au contraire, c’est l’Asie centrale qui est davantage dépendante de ses relations avec la Russie. Dans le domaine stratégique de l’énergie, les productions de la région ne sont pas vitales pour Moscou. En tant que fournisseur, mais aussi marché pour ses productions, et malgré la forte dépendance de cette région vis-à-vis de Moscou avant 1991, seul le Kazakhstan parmi les républiques d’Asie centrale joue encore un rôle dans le commerce extérieur de la Russie. En 1998, les échanges avec Astana représentaient 4,4% des importations de Moscou et 2,7% de ses exportations. Le poids du Kazakhstan dans le commerce extérieur de Moscou n’est donc pas non plus essentiel à l’économie russe. La part des autres États de la zone dans son commerce extérieur est négligeable.

Dans le domaine économique depuis l’indépendance des nouvelles républiques, Moscou a vu son influence s’amenuiser non seulement du fait de l’entrée en scène de concurrents puissants en Asie centrale mais aussi de sa propre négligence. La Russie a en effet orienté sa politique sur l’aspect militaire des relations plutôt que sur l’essor des liens économiques alors qu’elle
jouissait dans ce domaine d’avantages dont elle aurait pu tirer profit. Si la Russie demeure un partenaire non négligeable pour les États de la zone, son importance dans le commerce extérieur des républiques centrasiatiques tend cependant à décroître progressivement comme le montrent les tableaux ci-dessous.

L’érosion de la position russe en Asie centrale dans le domaine économique devrait sans doute se poursuivre. En effet, comme l’a montré la crise financière de l’été 1998, les républiques centrasiatiques demeurent encore sensibles à la conjoncture économique russe. Les leçons qu’elles ont tirées de cette crise les invitent à accroître leurs efforts pour réduire davantage la part de Moscou dans leurs échanges afin d’échapper aux turbulences potentielles qui pourraient affecter l’économie de la Russie.

De manière générale, Moscou n’a pas les moyens de rivaliser dans le domaine économique avec les pays occidentaux ou le Japon. Un ordre de grandeur suffit à rappeler la supériorité écrasante dont ces derniers disposent dans ce domaine : en 1998, le PNB de la Russie représentait 5% du PNB américain [15]. Difficile de rivaliser dans ces conditions. Dans le domaine des investissements, la Russie ne peut pas offrir d’alternative aux capitaux occidentaux. En outre, Moscou manque également des technologies modernes dont les républiques d’Asie centrale ont besoin pour la production de biens de consommation courante ou pour l’extraction de leurs hydrocarbures. Aux yeux de la Russie, le Kazakhstan demeure néanmoins un fournisseur important pour certaines entreprises russes dépendantes de ses productions minérales (chrome, zinc, manganèse, titane, plomb, uranium, bauxite,…). Cette dépendance ne doit cependant pas être trop exagérée. Dans le domaine des communications, l’indépendance du Kazakhstan gêne également Moscou. En effet, les principales routes reliant la Russie d’Europe aux régions orientales du pays traversent le territoire du Kazakhstan. La ligne principale du transsibérien parcourt également environ 100 km au Kazakhstan, alors que les deux autres lignes de ce chemin de fer entre la Russie d’Europe et la Sibérie, situées plus au sud encore, traversent respectivement 700 km et 1200 km de territoire kazakh. En somme, le trafic entre les parties occidentales et orientales de la Russie dépend du Kazakhstan. La même constatation vaut également pour la transmission de l’électricité entre ces deux parties

du territoire russe. C’est donc davantage le Kazakhstan que l’Asie centrale dans sa totalité qui intéresse Moscou en termes de sécurité économique [16].

Si l’économie russe ne dépend pas véritablement de l’Asie centrale en terme de sécurité, on peut toutefois noter que les perspectives d’exploitation des richesses du bassin de la Caspienne, -c’est-à-dire celles du Kazakhstan, de l’Azerbaïdjan et du Turkménistan-, pourraient néanmoins l’affecter. En effet, les productions de la Caspienne pourraient entrer en concurrence avec celles de la Russie sur le marché international de l’énergie [17]. Cette perspective inquiète Moscou dont 40 à 45% des recettes en devises proviennent de ses exportations de pétrole et de gaz. Bien qu’il faille encore attendre beaucoup de temps avant que cette situation ne se concrétise, la Russie ne peut toutefois pas se désintéresser de ce problème. C’est pourquoi elle a pesé de tout son poids depuis le milieu des années 1990 pour s’assurer que les productions de la Caspienne seront transportées à travers son territoire, ce qui lui permettra non seulement de les contrôler et donc d’assurer le maintien de son influence sur la région mais aussi d’en tirer des revenus importants sous forme de droits de transit. Ce choix russe consistant à insister pour que les pipelines de désenclavement des productions de la Caspienne passent par son territoire et les pressions concomitantes exercées par la Russie pour atteindre cet objectif ont entraîné des réactions hostiles des États de la région qui ont essayé, avec le soutien de Washington et d’Ankara, de trouver des solutions, -avec pour le moment des résultats mitigés-, pour échapper à l’influence de Moscou. En ce qui concerne la mise en valeur des richesses de la Caspienne, la politique de la Russie a oscillé entre l’accent mis sur ses intérêts stratégiques et la volonté de ses compagnies pétrolières de participer aux projets de développement des hydrocarbures. Les choix du ministère russe des Affaires étrangères ont été principalement guidés par une analyse stratégique traditionnelle dont l’objectif était de conserver à la Russie sa sphère d’influence dans la région et de la protéger contre les empiétements des autres acteurs, -principalement des États-Unis et de la Turquie-, alors que le ministère russe de l’énergie, lié aux compagnies pétrolières et gazières de la Fédération soutenues par les dirigeants des provinces russes bordant la mer Caspienne, a plutôt favorisé la participation de la Russie au développement du potentiel caspien pour des raisons économiques[18]. Les options contradictoires de ces deux coalitions d’intérêts au sein du pouvoir russe se sont heurtées à de nombreuses reprises [19]. Cet éclatement des intérêts au sein des différents ministères russes expliquent le caractère erratique de la politique de Moscou à l’égard de la zone. Comme le soulignait un auteur, contrairement à ses homologues européens ou américain, le ministère russe des Affaires étrangères n’a jamais complètement soutenu ses compagnies pétrolières dans la région de la Caspienne [20]. C’est en partie pour cette raison que les compagnies américaines et britanniques sont aujourd’hui les principaux acteurs dans cette zone, les compagnies russes arrivant seulement en troisième position [21]. Ainsi en Azerbaïdjan, les sociétés russes ne sont parties qu’à 6 des 19 contrats signés par Socar entre 1994 et 1999 pour le développement conjoints des secteurs offshore du pays[22]. Quant à la question des voies de désenclavement pour les productions de la Caspienne, elle n’est toujours pas réglée définitivement comme nous le verrons.

Au regard de l’Asie centrale, en dehors des menaces liées à la conception traditionnelle de la sécurité que nous avons évoquées, Moscou est également confrontée à de nouveaux risques dont certains ne sont que des risques potentiels alors que d’autres sont bien réels [23]. Sans entrer dans le détail, on citera pêle-mêle, les répercussions potentielles d’un conflit entre populations russes et kazakhs au Kazakhstan ou l’afflux de réfugiés en cas de déstabilisation de la zone. En ce qui concerne les risques déjà actualisés, on peut citer l’essor du trafic de la drogue en provenance de l’Afghanistan à travers l’Asie centrale et du crime organisé qui

l’accompagne ainsi que la dégradation de l’environnement avec répercussions transfrontalières, notamment en mer Caspienne.

Outre cet ensemble de questions liées à la sécurité, on retiendra que la contiguïté géographique, la présence d’une diaspora russe importante en Asie centrale, -surtout au Kazakhstan et au Kirghizstan, ainsi que l’héritage impérial sont autant de facteurs qui invitent la Russie à ne pas se désintéresser de cette zone. Paradoxalement, au moment de l’effondrement de l’URSS, Moscou n’a guère prêté d’attention à sa périphérie centrasiatique. Le premier projet de regroupement entre États issus de l’ex-URSS ne visait en fait que les républiques slaves, démontrant ainsi la préférence des nouveaux gouvernants russes pour une union avec ceux qu’ils considéraient comme historiquement et ethniquement proches. Les gouvernants russes qui orientaient prioritairement la politique extérieure de la Fédération de Russie en direction de l’Occident à l’époque, considéraient en fait l’Asie centrale comme un fardeau qui pourrait freiner le redressement économique mais aussi l’ancrage européen de la Russie. Ils se méfiaient également des élites conservatrices de la région qui risquaient de collaborer avec les nostalgiques de l’URSS en Russie même. Les premiers moments de la politique extérieure de la Fédération ont donc été marqués par le désintérêt et la négligence vis-à-vis d’un espace que les Russes considéraient d’ailleurs comme essentiellement arriéré et culturellement étranger. La période de la « Perestroïka » n’avait guère contribué à transformer l’image négative qui s’attachait à la région. Au contraire, les scandales qui ont éclaboussé l’Asie centrale à cette époque avaient encore renforcé les préjugés existants[24]. Il n’est donc guère étonnant que dans un premier temps, les gouvernants russes aient été tentés de prendre leur distance par rapport à une zone considérée comme semi-féodale, conservatrice et corrompue. Contrairement à Moscou, au moment de l’effondrement de l’URSS, les républiques centrasiatiques, désemparées, vont privilégier le maintien de liens avec l’ancienne métropole. La dépendance des républiques dans le domaine économique les pousse dans cette direction. Conscient du problème que constitue la forte minorité russe présente sur le territoire de la nouvelle république kazakhe, le président Nazarbaev sera le plus ardent défenseur du maintien de l’Union puis d’une intégration au sein de la Communauté des États indépendants [25]. Alors que dans la période qui suit l’indépendance de la région, le gouvernement russe erre à la recherche d’une politique à l’égard de l’Asie centrale, des voix s’élèvent rapidement en Russie pour demander une réévaluation de la politique étrangère à l’égard de l’ancienne périphérie en général. Les débats entre « atlantistes » et « eurasianistes », renvoyant aux polémiques de la Russie du XIXème siècle entre « slavophiles » et « occidentalistes », se développent ainsi dès les mois de mars et d’avril 1992. Si on suit le point de vue de S. Gretsky, la distinction souvent opérée dans l’analyse occidentale entre ces deux courants ne doit d’ailleurs pas être exagérée. Les deux camps considèrent la Russie comme un État eurasiatique et partagent ce que l’auteur nomme une « mentalité impériale » à l’égard des nouveaux États nés de l’effondrement de l’URSS [26]. Les deux camps vont d’ailleurs rapidement atteindre un consensus et adopter une approche plus interventionniste à leur égard. Le 15 mai 1992, le Traité de Tachkent fournit un cadre organisant la coopération russo-centrasiatique en matière de défense. Le Turkménistan refuse cependant d’y adhérer. Ce traité symbolise l’intérêt des militaires russes à préserver un espace commun de défense relativement stable pour répondre aux inquiétudes stratégiques de la Russie. Les ambitions russes dans le domaine de la défense commune se heurteront, nous l’avons vu, à la crainte des dirigeants d’Asie centrale de voir la Russie dominer les forces armées communes de la CEI mais aussi aux ambitions de l’Ouzbékistan qui souhaite mettre sur pied ses propres forces militaires avant toute intégration avec d’autres États. En 1994, un auteur notait cependant que les États d’Asie centrale, principalement l’Ouzbékistan et le Kazakhstan, demeuraient les meilleurs soutiens au renforcement de la CEI mais sur un pied plus équitable [27]. Si les élites

d’Asie centrale se sont faites l’avocat de la formation d’une sorte de Commonwealth la première année de l’indépendance, elles n’entendaient cependant pas abandonner leur souveraineté politique au profit d’une réintégration [28]. Ce qui les intéressait en priorité, c’était le maintien du soutien économique et militaire de Moscou[29]. Le problème pour les dirigeants d’Asie centrale était de savoir comment utiliser la puissance russe à leur propre profit tout en évitant de retomber sous l’hégémonie de la Russie. La recherche de cet équilibre explique sans doute les fluctuations dans les relations entre Moscou et les nouvelles républiques. Dans les années qui ont suivi l’indépendance, on a en effet assisté à des phases de rapprochement mais aussi d’éloignement entre les États d’Asie centrale et leur ancienne métropole. Pour certains analystes, la politique étrangère de la Russie à l’égard des États de l’ex-URSS a pour sa part oscillé entre une tentation isolationniste latente et une attitude néo­impériale visant à rétablir sa prédominance dans la zone[30]. L’influence contradictoire de ces deux tendances, ainsi que la compétition entre différents groupes d’intérêts et lobbies en Russie, expliqueraient le caractère erratique de sa politique étrangère. Cependant, influencé par les développements tragiques de la situation au Tadjikistan et soumis à la pression des cercles militaires, le gouvernement russe va s’orienter de manière croissante pour le rétablissement de l’influence de la Russie en Asie centrale[31]. Le conflit tadjik fournit à Moscou l’occasion d’envoyer ses troupes en décembre 1992 dans l’ancienne république soviétique pour y maintenir la paix et pour surveiller la frontière avec l’Afghanistan[32]. En hiver 2001, les troupes russes stationnent toujours sur le territoire tadjik.

La tendance au rétablissement d’une sphère d’influence en Asie centrale va être accélérée par la perception croissante au sein des élites que la réduction de la présence russe en Asie centrale profite à d’autres États au détriment des intérêts de Moscou et par la méfiance grandissante au sein des cercles dirigeants à l’égard des intentions des Occidentaux. La politique russe devient plus menaçante à l’égard des républiques de l’ex-URSS au cours des années 1993-1994. La Russie va s’octroyer le droit d’intervenir dans les nouvelles républiques au nom de la protection des minorités russes. A partir de novembre 1993, à travers sa nouvelle doctrine militaire, Moscou s’attribue la responsabilité de protéger les frontières extérieures de la CEI. Un article de 1994 signé par Andranik Migranian, alors membre du Conseil présidentiel de B. Eltsine, considère que l’espace de l’ex-URSS que Moscou baptise désormais « étranger proche » (blizhnee zarubezh’e) est vital pour la Russie [33]. Le remplacement du ministre des Affaires étrangères A. Kozyrev par E. Primakov en 1995 symbolise l’attitude plus autoritaire de Moscou à l’égard de la région. La politique russe se heurte néanmoins à la résistance des États d’Asie centrale. Si en 1991, ils étaient favorables au maintien des liens avec Moscou, dès le milieu des années 1990, la situation a changé. Les élites aux pouvoirs ne sont plus désireuses de retomber sous la coupe de la Russie. L’Ouzbékistan et le Turkménistan vont favoriser l’autonomie alors que le Kazakhstan et le Kirghizstan vont s’efforcer de diversifier leurs relations extérieures. Du fait de l’aide russe, le Tadjikistan, confronté à la guerre civile va demeurer pour sa part plus dépendant à l’égard de Moscou. Le retour de la Russie en Asie centrale ne s’est pas concrétisé, au contraire, les Républiques d’Asie centrale ont résisté à la pression parfois très forte de Moscou à leur égard et ont réussi à diversifier leurs relations extérieures, transformant la Russie en un acteur parmi d’autres sur la scène régionale. Le projet de Communauté des États indépendants imaginé par Moscou comme un instrument destiné à favoriser son influence sur la zone est lui-même un échec [34]. De même, l’union douanière créée en 1994 entre la Russie et la Biélorussie, élargie en 1995 au Kazakhstan, en 1996 au Kirghizstan et en 1998 au Tadjikistan n’a pas véritablement conduit à une plus grande intégration [35]. Du fait de sa perte de contrôle et d’influence dans la région de la Caspienne, Moscou connaît cependant depuis le début de l’année 2000 un regain d’intérêt pour l’Asie centrale [36]. En Russie, on a en effet l’impression

d’avoir été privé de ses zones d’influence traditionnelles par le jeu de la politique occidentale et américaine en particulier. Un groupe d’experts russes du Conseil de politique étrangère et de défense relevaient dans une étude de la Fondation Carnegie que la plupart des élites russes considèrent « la politique américaine envers la CEI, y compris dans la région de la mer Caspienne et dans le Caucase, comme fondamentalement anti-russe »[37].

Pour répondre à ce défi posé par les orientations de la politique américaine dans un espace géographique que Moscou considère comme vital, la Russie a pris une série de mesures durant la première moitié de l’année 2000. C’est ainsi que la nouvelle doctrine guidant la politique étrangère de la Russie sous la présidence de V. Poutine a été rendue publique le 10 juillet 2000 par Igor Ivanov[38]. Elle complète les doctrines militaire[39] et stratégique[40] adoptées au cours du premier semestre 2000 et remplace la « doctrine Kozyrev » édictée le 23 avril 1993. Cette nouvelle doctrine, dont le ton révèle une orientation anti-américaine, a cependant été qualifiée de « pragmatique » par le président russe. Son objectif est d’aider à résoudre les problèmes internes de la Russie. Les commentateurs ont toutefois relevé la contradiction entre le caractère « pragmatique » de la doctrine mis en avant par le président russe et la lutte contre l’hégémonisme américain qui apparaît dans les trois documents rendus publics au cours de l’année 2000[41]. L’équilibre entre les deux objectifs sera sans doute délicat à instituer. De manière générale, la nouvelle doctrine engage la Russie dans une sorte de retrait géopolitique. Elle devrait ouvrir une période de « recueillement », pour reprendre l’expression appliquée à la politique française à la suite de la défaite de 1870, où la priorité devrait être donnée à la protection des intérêts de la Russie, non de ses intérêts fantasmés, mais de ses intérêts concrets. Cette orientation générale ne semble pas exclure dans l’esprit de ses initiateurs le fait que Moscou entende néanmoins conserver une zone d’influence où elle disposerait d’alliés sûrs. Un des objectifs essentiels définis dans la nouvelle doctrine est ainsi l’établissement d’une ceinture d’États amis, d’une sorte de glacis de protection autour de la Russie. Cette « aire d’importance vitale » pour Moscou couvre en fait le territoire de l’ex-Union soviétique[42]. Les relations entre Moscou et les États de la CEI demeurent une des priorités essentielles de la politique extérieure de la Russie telle que définie par le document. Dans le cadre de la CEI, la doctrine révèle cependant une conception où l’intégration politique ne semble plus être l’idée fixe défendue par le Kremlin. Elle mentionne en effet l’idée d’une intégration « à vitesses et niveaux différents » au sein de la CEI. Une telle conception ouvre en théorie la voie au pragmatisme. La nouvelle doctrine énonce par ailleurs que les « relations pratiques [de la Russie] avec chacun de ces États [de la CEI] doivent se baser sur leur volonté réciproque de coopérer, de leur disponibilité de prendre en considération les intérêts de la Fédération de Russie, y compris pour ce qui est la garantie des droits des compatriotes russes ». Ici, les choses deviennent plus complexes, les « intérêts de la Russie » pourraient ne pas coïncider avec ceux des États de la CEI. Quelles seront alors les réactions de Moscou ?

Quoiqu’il en soit, au regard de l’Asie centrale, Moscou a adopté au cours de l’année 2000 une ligne d’action consistant à offrir sa protection militaire en échange d’une alliance géopolitique. C’est en tout cas le sens des nouvelles relations qui se sont tissées avec l’Ouzbékistan depuis le début de l’année 2000. Alors que Tachkent était le plus réfractaire des États de la région à l’égard des aspirations de Moscou en Asie centrale, le président Islam Karimov a entamé un rapprochement avec la Russie dès le mois de janvier 2000. En mars, Tachkent, tout comme Bichkek et Douchanbé, a accepté d’accroître sa coopération bilatérale avec Moscou dans le domaine de la défense aérienne commune [43]. La visite du président russe en Ouzbékistan en mai de la même année a rapproché semble-t-il davantage encore les positions. Bien qu’il faille rester prudent quant aux arrière-pensées du Président Karimov, ce dernier aurait néanmoins déclaré reconnaître que la Russie avait des intérêts en Asie centrale et qu’elle continuerait à en

avoir dans le futur. Parallèlement à cette déclaration, il aurait critiqué l’attitude d’Ankara visant à prendre la place de Moscou comme « frère aîné » de Tachkent [44]. L’attitude ambigue de l’Ouzbékistan dans ses relations avec Moscou reflète le dilemme auquel il est confronté. A ses ambitions régionales en Asie centrale, s’oppose la nécessité de ne pas contrecarrer trop directement Moscou pour éviter ses foudres. Tachkent entend également bénéficier de l’aide russe en cas de problème non seulement face à une menace externe, -en l’occurrence les talibans-, mais aussi interne, à savoir une opposition politique qui pourrait inquiéter le pouvoir de I. Karimov. Ces considérations poussent donc le Président ouzbek à accepter, jusqu’à un certain point, le regain d’intérêt de Moscou dans la région. Plutôt que de s’opposer aux visées russes, I. Karimov préfère sans doute les accompagner pour mieux les limiter.

Pour assurer le rétablissement de son influence sur la région, les dirigeants russes jouent pour leur part sur le sentiment d’insécurité présent en Asie centrale, ils instrumentalisent la menace islamiste et se posent en garants de la stabilité de la région [45]. La situation afghane, de même que les incursions d’éléments islamistes durant l’été 1999 et à nouveau dans la même saison en 2000 au Kirghizstan et en Ouzbékistan, ont favorisé cette stratégie russe. L’Afghanistan des talibans est présenté par Moscou comme un centre du terrorisme international et une menace sérieuse pour la région. Le porte-parole du Kremlin, Sergei Yastrzhembsky, a ainsi déclaré, sans toutefois apporter de preuve, qu’un accord avait été conclu à Mazar-i-Sharif entre les talibans, le président tchétchène Aslan Maskhadov, le terroriste internationalement recherché Usama bin Laden et Djuma Namangani, dirigeant du Mouvement islamique d’Ouzbékistan (IMU)[46]. Cette version, démentie par le président tchétchène, permet à Moscou de rappeler opportunément aux États d’Asie centrale, spécialement à l’Ouzbékistan, la menace que fait peser l’Afghanistan sur leur sécurité. Suivant la même ligne, au printemps 2000, la Russie a menacé de bombarder le territoire afghan. Parallèlement, elle en a profité pour renforcer sa présence militaire au Tadjikistan. Les victoires militaires des talibans à l’automne 2000, en accroissant le sentiment de menace en Asie centrale, ont également permis à Moscou de mettre à nouveau l’accent sur la coopération militaire avec les républiques centrasiatiques lors du sommet de Bichkek réuni en octobre 2000[47]. Aux yeux de Moscou, la menace islamiste doit lui permettre de regagner le terrain perdu en Asie centrale grâce à la coopération militaire renforcée avec les États de la zone[48]. Au-delà d’une protection contre cette menace islamiste plus imaginaire que réelle, Moscou offre plus fondamentalement son soutien aux régimes autoritaires d’Asie centrale dans leur lutte contre la « menace islamique » présente sur leur territoire[49], « menace islamique » servant en fait d’alibi, -comme en Ouzbékistan- pour boucler l’espace politique et interdire toute opposition au régime en place. Face aux critiques croissantes de l’Occident en matière de droits de l’Homme et de déficit démocratique, Moscou offre en fait à ces régimes autoritaires une garantie quant à leur survie. La décision d’établir un centre de lutte anti-terroriste à Bichkek, adoptée lors du sommet de Douchanbé réunissant les cinq États du groupe de Shanghai, pourrait fournir une base supplémentaire à la collaboration russo-centrasiatique dans ce domaine[50]. De manière générale, en matière de sécurité, il est clair que Moscou dispose d’avantages sur Washington. Comme le remarquait un diplomate américain, « imaginez que l’on demande au Congrès d’envoyer des troupes en Asie centrale pour aider à garantir la sécurité dans la vallée du Ferghana ou à la frontière de l’Afghanistan ? »[51]. Grâce à sa politique, Moscou semble avoir engrangé un certain nombre de succès ces derniers temps. Mais ces efforts se heurtent néanmoins aux réticences plus ou moins affichées des dirigeants d’Asie centrale. S’ils sont en fait désireux de bénéficier du soutien politique et militaire de Moscou, ils se méfient en même temps des arrière-pensées de la Russie. Ainsi, malgré ses demandes d’aide militaire russe, Islam Karimov a rejeté à plusieurs reprises l’idée d’une présence de troupes de Moscou sur le territoire de la république[52]. Les discussions

entre le président ouzbek et les talibans à l’automne 2000 sont également la preuve de son pragmatisme mais aussi de sa méfiance à l’égard des ambitions russes. Le chef de l’État ouzbek voudrait en fait trouver une sorte de modus vivendi avec Kaboul afin que les talibans limitent leur soutien à l’opposition islamiste ouzbek, mais aussi pour empêcher Moscou de réinvestir la zone au nom de la lutte contre le radicalisme islamique[53]. Le président ouzbek se méfie également de l’assistance que Moscou et aussi Téhéran pourraient apporter à Ahmad Shah Massoud -qui est d’origine tadjike-. Il craint en effet de voir se renforcer un nationalisme tadjik qui pourrait contester à l’Ouzbékistan la possession des villes de Samarcande et de Boukhara. Enfin, le président Karimov n’entend de toute façon pas laisser la Russie occuper la place qu’il s’est réservée en Asie centrale. De manière générale, les dirigeants centrasiatiques ne sont pas prêts à hypothéquer leur indépendance et leur liberté d’action pour prix du soutien russe. Dans une perspective à plus long terme, le retour de la Russie en Asie centrale se heurte également à d’autres facteurs. En temps qu’ancienne puissance coloniale, elle jouit d’une image mitigée en Asie centrale. L’héritage de la période soviétique, en termes de pollution et de dégradation de l’environnement, est par exemple un élément qui joue en sa défaveur. De même, son soutien à des régimes autoritaires pourrait à terme entraîner l’hostilité de franges des populations locales. Avec l’ouverture sur le monde et le développement des moyens de communications modernes, les habitants d’Asie centrale sont de plus en plus influencés par d’autres modèles que celui qu’offre la Russie. Étant donné la profonde crise que traverse la Russie elle-même, on peut d’ailleurs se poser la question de savoir si Moscou offre véritablement un modèle capable de séduire les populations centrasiatiques. Les regards en Asie centrale ne se tournent désormais plus uniquement vers la métropole russe. Un des instruments privilégiés pour la perpétuation de l’influence de la Russie, à savoir l’utilisation de la langue russe, tend du reste à s’effacer lentement au profit de l’anglais. Les élites d’Asie centrale préfèrent aujourd’hui envoyer leurs enfants se former aux États-Unis ou en Angleterre plutôt qu’en Russie. On peut enfin s’interroger sur la capacité et les moyens dont dispose Moscou pour assurer la pérennisation de son influence dans la région. Il est clair que dans le domaine économique, ses moyens sont limités. La Russie a beaucoup moins à offrir que les pays occidentaux.

L’évolution de la situation en Russie influencera cependant dans une large mesure les orientations politiques des pays de l’Asie centrale. Si Moscou ne dispose certes pas des moyens d’assurer sa mainmise totale sur la région, elle conserve cependant encore des atouts dont le premier est la faiblesse relative des États de la région par rapport à elle. L’argument de sécurité sur lequel joue Moscou pour maintenir son influence n’est d’ailleurs pas totalement dénué de fondements. Le Tadjikistan par exemple dépend d’elle pour assurer la surveillance de ses frontières avec l’Afghanistan. On peut se poser la même question à propos du Turkménistan. De même, des pays comme le Kirghizstan ou le Kazakhstan peuvent être tenté de recourir à Moscou si la pression de Pékin se fait un jour trop forte. Par ailleurs, le Kazakhstan est pour sa part fragilisé par la présence d’une forte minorité de russophone vivant à l’Est et au Nord du pays. Cette fragilité impose la prudence au Kazakhstan dans ses relations avec Moscou. Seul l’Ouzbékistan, pourrait avoir les moyens de contrebalancer Moscou dans une certaine mesure. Brzezinski a fort justement résumé la situation de la Russie au regard de l’Asie centrale. Pour lui en effet, « Russia will be too weak to reimpose its imperial domination but too powerfull to be excluded »(54).

Pour des raisons géographiques, historiques, culturelles, ethniques et stratégiques, la Russie va utiliser les moyens dont elle dispose pour essayer de protéger ses intérêts dans la région. Le profil bas adopté par les dirigeants centrasiatiques depuis l’élection de V. Poutine démontre que les capacités russes sont perçues dans la région comme suffisamment solides pour que les républiques d’Asie centrale évitent de provoquer Moscou trop directement et qu’au contraire elles essayent d’entretenir les meilleures relations possibles avec l’ancienne Métropole.                            

[I]       BLUM, D.W., « Domestic Politics and Russia’s Caspian Policy », Post-Soviet Affairs, vol.
14, n°2, 1998, pp. 137-164.

[2] Voir les exemples cités in PEUCH, J.-C., « Caspian Sea Oil : The Role of Private Corporation », The Fletcher Forum of World Affairs, vol. 22, n°2, Summer/Fall 1998, p. 30.

[3] PEUCH, J.-C., « Caspian Sea Oil : The Role of Private Corporation », op. cit., p. 29.

[4] NANAY, J., « The Industry’s race for the Caspian Oil Reserves », in Caspian Energy Resources. Implications for the Arab Gulf, Abu Dhabi, The Emirates Center for Strategic Studies and Research, Reading, Ithaca Press, 2000, p. 114.

[5] BECKER, A.S., « Russia and Caspian Oil : Moscow Loses Control », Post-Soviet Affairs, vol. 16, n°2, 2000, p. 102.

[6] Voir LUBIN, N., « New Threats in Central Asia and the Caucasus. An Old story with a New Twist », in Russia, The Caucasus and Central Asia. The 21st Century Security Environment, op. cit., pp. 205-225 et ZVIAGELSKAIA, I.D., NAUMKIN, V.V., « Non-Traditional Threats, Challenges and Risks in the Former Soviet South », in Russia, The Caucasus and Central Asia. The 21st Century Security Environment, op. cit., pp. 226-247.

[7] SHASHENKOV, M., « Russia in Central Asia : Emerging Security Links », in From the Gulf to Central Asia. Players in the New Great Game, edited by Anoushiravan Ehteshami, Exeter, University of Exeter Press, 1994, p. 170.

[8] Voir OLCOTT, M. Brill, The Kazakhs, op. cit., p. 268 et sv. et KAGEDAN, A., « La Communauté des États Indépendants: toujours en quête de son identité », Commentaire, n°28, Service canadien du renseignement de sécurité, mars 1993 (www.csis-scrs.gc.ca/fra/comment/com28f.html).

[9] « Russia’s Policy Toward Central Asia » by Sergei Gretsky, Review by Muriel Atkin, Central Asia Monitor, On-Line Supplement, n° 1, 1998.

[10] RASHID, A., The Resurgence of Central Asia. Islam or Nationalism?, Karachi, Oxford University Press, London, Zed Books, 1994, p. 228.

[II] OLCOTT, M., Brill, « Central Asia’s catapult to Independence », Foreign Affairs, vol. 71,
n°3, Summer 1992, pp. 108-131.

[12] DAWISHA, K., « The Imperial Impulse : Russia and the ‘Near Abroad' » in KLARE, M.T., CHANDRANI, Y., World Security. Challenges for a New Century, Third Edition, New York, St Martin Press, 1998, p. 88.

[13] KORTUNOV, A., « Russia and the ‘Near Abroad’: Looking for a Model Relationship », in U.S.-Russian Partnership: Meeting the New Millennium, op. cit.

[14] GRETSKY, S., Russia’s Policy Toward Central Asia, op. cit.

[15] Voir ALLISON, R., « Le maintien de la paix dans les États successeurs de l’Union sovietique », Cahiers de Chaillot, n°18, Institut d’Etudes de Sécurite, Union de l’Europe Occidentale, Paris, Novembre 1994.

[16] « MIGRANIAN, A. , » Near Abroad is vital to Russia », CDPSP, vol. 46, n°7, 1994, p. 4.

[17] Voir de TINGUY, A., « Russie-Asie centrale : la fin d’un ‘étranger proche' », La revue internationale et stratégique, n°36, Hiver 1999/2000, pp. 117-127.

[18] « CIS Customs Union : Stillborn in its Fifth Year », Jamestown Monitor, vol. 6, n°103,

May 25, 2000.

[19] CUTLER, R., « Russia slouches towards Central Asia », Analyst (Biweekly Briefing), April 12, 2000 (www.cacianalyst.org).

[20] BONNET, F., « Les experts russes redéfinissent les relations stratégiques avec Washington », le Monde, 4-5 juin 2000.

[21] Extraits in CDPSP, vol. 52, n°28, August 9, 2000, pp. 7-8 et CDPSP, vol. 52, n°29,

August 16, 2000, pp. 6-7.

[22] Texte in « Russia’s Military Doctrine », Arms Control Today, vol. 30, n°4, May 2000, pp. 29-38. Analyse in BLANK, S., Threats to Russian Security. The view from Moscow, Carlisle, Strategic Studies Institutes, US Army War College, July 2000, 51p.

[23] Texte in « Russia’s National Security Concept », op. cit., pp. 15-20.

[24] STEPANOV, G., YUSIN, M., « New Foreign Policy Concept is Finally Presented »,

CDPSP, vol. 52, n°28, August 9, 2000, p. 8; PUSHKOV, A., « The Evolution of Our Foreign Policy Concept from Early Yeltsin to Early Putin », CDPSP, vol. 52, n°29, August 16, 2000, pp. 7-8 et KARAGANOV, S., « Une politique étrangère nouvelle » in le courrier des pays de l’Est, n°1005, mai 2000, pp. 64-66.

[25] TORBAKOV, I., « Putin’s Russia Defines its Foreign Policy Agenda », Eurasianet, July

28, 2000.

[26] « Russia tightening up the Joint Air Defense System », Jamestown Monitor, vol. 6, n°52,

March 14, 2000.

[27] « Putin in Uzbekistan : Back to Elder Brother-Junior Brother Relations ? », Jamestown

Monitor, vol. 6, n°101, May 23, 2000

[28] Outre le rappel incessant de la menace islamiste, Moscou utiliserait des moyens plus radicaux pour appuyer sa rhétorique. Ahmed Rashid signale qu’au cours de l’été 2000, les militaires russes surveillant la frontière entre l’Afghanistan et le Tadjikistan ne se seraient pas

opposés à la pénétration des combattants du Mouvement islamique d’Ouzbékistan (IMU) sur le territoire tadjik d’où ils auraient lancé leur offensive contre le Kirghizstan et l’Ouzbékistan. Cette action délibérée était selon lui destinée à aggraver la tension en Asie centrale afin de rendre le recours à Moscou plus nécessaire encore. Voir RASHID, A., « Islamic Movement of Uzbekistan’s Incursion assists the Taliban », Analyst (Biweekly Briefing), September 13, 2000 (www.cacianalyst.org); également « Central Asia insurgency update », Jamestown Monitor, vol. 6, n°166, September 8, 2000.

[29] KARASIK, T., « Russian Threat to Strike Afghanistan Tests Central Asian Partners », Analyst (Biweekly Briefing), June 21, 2000 (www.cacianalyst.org).

[30] « Central Asia, Russia plan to build joint military operation to fight militant Islamic movements », Associated Press, October 11, 2000. Ce sommet a réuni la Russie, le Kazakhstan, le Kirghizstan, le Tadjikistan, la Biélorussie et l’Arménie. L’Ouzbékistan était absent, signe de la méfiance de Tachkent à l’égard des intentions de Moscou mais aussi de son pragmatisme face aux victoires militaires des talibans.

[31] PANNIER, B., « Assessing Rising Tension », RFE/RL, June 8, 2000.

[32] LAMBROSCHINI, S., « Central Asia : Russia Sanctioning Anti-Islamic Crackdown », RFE/RL, August 2, 2000.

[33] Voir infra.

[34] FITCHETT, J., « A Resurgent Russian Influence Grips Former Soviet Central Asia »,

Herald Tribune, August 9, 2000.

[35] « Putin in Uzbekistan : Back to Elder Brother-Junior Brother Relations ? », op. cit. et « Aid to Uzbekistan Promised », CDPSP, vol. 52, n°35, September 27, 2000, p. 18.

[37] BRZEZINSKI, Z. , The grand chessboard : American primacy and its geostrategic imperatives, op. cit., p. 148.

38] Voir BAKSHI, J., « Russian Policy Towards Central Asia. Part II », Strategic Analysis, vol. XXII, n°11, February 1999.

[2] Voir « Russia’s National Security Concept », Arms Control Today, vol. 30, n°1, January/February 2000, p. 17.

[3] Pour Walt, la « sécurité » est concernée par la menace, l’utilisation et le contrôle de la force militaire. Voir WALT, S. M., « The Renaissance of Security Studies », International Studies Quaterly, vol. 35, n°2, June 1991, p. 212. La dimension militaire traditionnelle de la sécurité, continue aujourd’hui de faire partie des premières préoccupations de Moscou. Dans la « conception de sécurité nationale » adoptée en janvier 2000 par la Fédération de Russie, il est en effet rappelé que la force militaire et la violence demeurent un aspect substantiel des relations internationales. Voir « Russia’s National Security Concept », op. cit., p. 15.

[4] La « conception de sécurité nationale » considère ainsi comme une menace fondamentale sur la Russie dans la sphère internationale, « l’éclatement ou l’escalade de conflits aux frontières de la Fédération ou aux frontières extérieures des États membres de la CEI ». Cette disposition démontre que les frontières extérieures des États de la CEI continuent à être perçues par la Russie comme faisant partie de son périmètre de sécurité. Le conflit afghan et ses répercussions sont visées par cette disposition. Voir « Russia’s National Security Concept », op. cit., p. 16.

[5] ATKIN, M., « The Rhetoric of Islamophobia », Central Asia and the Caucasus. Journal of Social and Political Studies, n°1, 2000, pp. 123-132.

[6] Concernant le « wahhabisme » en Asie centrale, voir GABORIEAU, M, « Wahhabisme : une seule étiquette pour des mouvements divers », la Lettre d’Asie centrale, n°2, Automne 1994, pp. 1-2; FATHI, H., « Le wahhabisme : une seule étiquette pour des mouvements divers », la Lettre d’Asie centrale, n°2, Automne 1994, pp. 2-3; ZARCONE, T., « Indéfinissable wahhabisme », la Lettre d’Asie centrale, n°2, Automne 1994, pp. 6-7.

[7] TROFIMENKO, H., Russian National Interests and the Current Crisis in Russia, Aldershot, Ashgate, 1999, p. 81.

[8] Voir ROY, A., « The Military and Political Security Landscape in Russia and the South », in Russia, The Caucasus and Central Asia. The 21st Century Security Environment, op. cit.,

  1. 27-60.

[9] Détails in ZAGORSKI, A., « Traditional Russian Security Interests in the Caucasus and Central Asia » in Russia, The Caucasus and Central Asia. The 21st Century Security Environment, op. cit., p. 69.

[10] Pour des raisons historiques et géographiques, la délimitation de la frontière entre la Russie et le Kazakhstan pose elle-même des problèmes importants. Voir PAIN, E.A., « Contagious Ethnic Conflicst and Border Disputes Along Russia’s Southern Flank », in Russia, The Caucasus and Central Asia. The 21st Century Security Environment, op. cit., pp. 187­188.

[11] Détails in ZAGORSKI, A., « Traditional Russian Security Interests in the Caucasus and Central Asia » in Russia, The Caucasus and Central Asia. The 21st Century Security Environment, op. cit., pp. 70-71.

[12] Voir ELEUKENOV, D., « Perspectives on Security in Kazakhstan », in Crossroads and conflict. Security and Foreign Policy in the Caucasus and Central Asia, edited by Gary K. Bertsch, Cassady Craft, Scott A. Jones and Michael Beck, New York/London, Routledge,

2000, pp. 240-255.

[13] IMF, Direction of Trade Statistics Yearbook, Washington DC, 1999.

[14] IMF, Direction of Trade Statistics Yearbook, Washington DC, 1999.

[15] GRAHAM, T.E., « Russia’s Foreign Policy » in Où va la Russie, Proceedings, Symposium de l’Institut Royal Supérieur de Défense, Bruxelles, 1 mars 2000, p. 42.

[16] Traditionnellement, la sécurité économique d’un État est mesurée par son degré de dépendance à l’égard des importations stratégiques de matières premières, d’énergie et de produits alimentaires ainsi que par la vulnérabilité de ses communications avec le monde extérieur et le maintien d’un volume adéquat d’exportations. D’après, ZUBAREVICH, N., FEDOROV, Y., « Russian-Southern Economic Interaction », in Russia, The Caucasus and Central Asia. The 21st Century Security Environment, op. cit., p. 119.

[17] Voir l’étude de ce problème in ZUBAREVICH, N., FEDOROV, Y., « Russian-Southern Economic Interaction », in Russia, The Caucasus and Central Asia. The 21st Century Security Environment, op. cit., pp. 132-138.

[18] BLUM, D.W., « Domestic Politics and Russia’s Caspian Policy », Post-Soviet Affairs, vol. 14, n°2, 1998, pp. 137-164.

[19] Voir les exemples cités in PEUCH, J.-C., « Caspian Sea Oil : The Role of Private Corporation », The Fletcher Forum of World Affairs, vol. 22, n°2, Summer/Fall 1998, p. 30.

[20] PEUCH, J.-C., « Caspian Sea Oil : The Role of Private Corporation », op. cit., p. 29.

[21] NANAY, J., « The Industry’s race for the Caspian Oil Reserves », in Caspian Energy Resources. Implications for the Arab Gulf, Abu Dhabi, The Emirates Center for Strategic Studies and Research, Reading, Ithaca Press, 2000, p. 114.

[22] BECKER, A.S., « Russia and Caspian Oil : Moscow Loses Control », Post-Soviet Affairs, vol. 16, n°2, 2000, p. 102.

[23] Voir LUBIN, N., « New Threats in Central Asia and the Caucasus. An Old story with a New Twist », in   Russia, The Caucasus and Central Asia. The 21st Century Security

Environment, op. cit., pp. 205-225 et ZVIAGELSKAIA, I.D., NAUMKIN, V.V., « Non-

Traditional Threats, Challenges and Risks in the Former Soviet South », in Russia, The Caucasus and Central Asia. The 21st Century Security Environment, op. cit., pp. 226-247

[24] SHASHENKOV, M., « Russia in Central Asia : Emerging Security Links », in From the Gulf to Central Asia. Players in the New Great Game, edited by Anoushiravan Ehteshami, Exeter, University of Exeter Press, 1994, p. 170.

[25] Voir OLCOTT, M. Brill, The Kazakhs, op. cit., p. 268 et sv. et KAGEDAN, A., « La

Communauté des États Indépendants: toujours en quête de son identité », Commentaire, n°28, Service canadien du renseignement de sécurité, mars 1993 (www.csis-scrs.gc.ca/fra/comment/com28f.html).

[26] « Russia’s Policy Toward Central Asia » by Sergei Gretsky, Review by Muriel Atkin, Central Asia Monitor, On-Line Supplement, n° 1, 1998.

[27] RASHID, A., The Resurgence of Central Asia. Islam or Nationalism?, Karachi, Oxford University Press, London, Zed Books, 1994, p. 228.

[28] OLCOTT, M., Brill, « Central Asia’s catapult to Independence », Foreign Affairs, vol. 71, n°3, Summer 1992, pp. 108-131.

[29] DAWISHA, K., « The Imperial Impulse : Russia and the ‘Near Abroad' » in KLARE, M.T., CHANDRANI, Y., World Security. Challenges for a New Century, Third Edition, New York, St Martin Press, 1998, p. 88.

[30] KORTUNOV, A., « Russia and the ‘Near Abroad’: Looking for a Model Relationship », in U.S.-Russian Partnership: Meeting the New Millennium, op. cit.

[31] GRETSKY, S., Russia’s Policy Toward Central Asia, op. cit.

[32] Voir ALLISON, R., « Le maintien de la paix dans les États successeurs de l’Union sovietique », Cahiers de Chaillot, n°18, Institut d’Etudes de Sécurite, Union de l’Europe Occidentale, Paris, Novembre 1994.

[33] « MIGRANIAN, A. , » Near Abroad is vital to Russia », CDPSP, vol. 46, n°7, 1994, p. 4.

[34] Voir de TINGUY, A., « Russie-Asie centrale : la fin d’un ‘étranger proche' », La revue internationale et stratégique, n°36, Hiver 1999/2000, pp. 117-127.

[35] « CIS Customs Union : Stillborn in its Fifth Year », Jamestown Monitor, vol. 6, n°103,

May 25, 2000.

[36] CUTLER, R., « Russia slouches towards Central Asia », Analyst (Biweekly Briefing), April 12, 2000 (www.cacianalyst.org).

[37] BONNET, F., « Les experts russes redéfinissent les relations stratégiques avec Washington », le Monde, 4-5 juin 2000.

[38] Extraits in CDPSP, vol. 52, n°28, August 9, 2000, pp. 7-8 et CDPSP, vol. 52, n°29, August 16, 2000, pp. 6-7.

[39] Texte in « Russia’s Military Doctrine », Arms Control Today, vol. 30, n°4, May 2000, pp. 29-38. Analyse in BLANK, S., Threats to Russian Security. The view from Moscow, Carlisle, Strategic Studies Institutes, US Army War College, July 2000, 51p.

[40] Texte in « Russia’s National Security Concept », op. cit., pp. 15-20.

[41] STEPANOV, G., YUSIN, M., « New Foreign Policy Concept is Finally Presented », CDPSP, vol. 52, n°28, August 9, 2000, p. 8; PUSHKOV, A., « The Evolution of Our Foreign Policy Concept from Early Yeltsin to Early Putin », CDPSP, vol. 52, n°29, August 16, 2000, pp. 7-8 et KARAGANOV, S., « Une politique étrangère nouvelle » in le courrier des pays de l’Est, n°1005, mai 2000, pp. 64-66.

[42] TORBAKOV, I., « Putin’s Russia Defines its Foreign Policy Agenda », Eurasianet, July

28, 2000.

[43] « Russia tightening up the Joint Air Defense System », Jamestown Monitor, vol. 6, n°52,

March 14, 2000.

[44] « Putin in Uzbekistan : Back to Elder Brother-Junior Brother Relations ? », Jamestown

Monitor, vol. 6, n°101, May 23, 2000

[45] Outre le rappel incessant de la menace islamiste, Moscou utiliserait des moyens plus radicaux pour appuyer sa rhétorique. Ahmed Rashid signale qu’au cours de l’été 2000, les militaires russes surveillant la frontière entre l’Afghanistan et le Tadjikistan ne se seraient pas opposés à la pénétration des combattants du Mouvement islamique d’Ouzbékistan (IMU) sur le territoire tadjik d’où ils auraient lancé leur offensive contre le Kirghizstan et l’Ouzbékistan. Cette action délibérée était selon lui destinée à aggraver la tension en Asie centrale afin de rendre le recours à Moscou plus nécessaire encore. Voir RASHID, A., « Islamic Movement of Uzbekistan’s Incursion assists the Taliban », Analyst (Biweekly Briefing), September 13, 2000 (www.cacianalyst.org); également « Central Asia insurgency update », Jamestown Monitor, vol. 6, n°166, September 8, 2000.

[46] KARASIK, T., « Russian Threat to Strike Afghanistan Tests Central Asian Partners », Analyst (Biweekly Briefing), June 21, 2000 (www.cacianalyst.org).

[47] « Central Asia, Russia plan to build joint military operation to fight militant Islamic movements », Associated Press, October 11, 2000. Ce sommet a réuni la Russie, le Kazakhstan, le Kirghizstan, le Tadjikistan, la Biélorussie et l’Arménie. L’Ouzbékistan était absent, signe de la méfiance de Tachkent à l’égard des intentions de Moscou mais aussi de son pragmatisme face aux victoires militaires des talibans.

[48] PANNIER, B., « Assessing Rising Tension », RFE/RL, June 8, 2000.

[49] LAMBROSCHINI, S., « Central Asia : Russia Sanctioning Anti-Islamic Crackdown », RFE/RL, August 2, 2000.

[50] Voir infra.

[51] FITCHETT, J., « A Resurgent Russian Influence Grips Former Soviet Central Asia »,

Herald Tribune, August 9, 2000.

[52] « Putin in Uzbekistan : Back to Elder Brother-Junior Brother Relations ? », op. cit. et « Aid to Uzbekistan Promised », CDPSP, vol. 52, n°35, September 27, 2000, p. 18.

[53] Voir « The Taliban’s Success and the Impact on Central Asia », Eurasianet, October 11, 2000 et « Central Asia’s Shifting Sands », Stratfor, October 10, 2000 (www.stratfor.com) .

[54] BRZEZINSKI, Z. , The grand chessboard : American primacy and its geostrategic imperatives, op. cit., p. 148.

 

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