La France et la Palestine

Bruno GUIGUE, Haut fonctionnaire d’Etat français, essayiste et politologue, professeur de philosophie dans l’enseignement secondaire et chargé de cours en relations internationales à l’Université de La Réunion. Il est l’auteur de cinq ouvrages, dont « Aux origines du conflit israélo-arabe, L’invisible remords de l’Occident, L’Harmattan, 2002 », et d’une centaine d’articles.

Même si elle prolonge celle de la présidence précédente, la politique proche-orientale de François Hollande accentue les traits d’un parti-pris pro-israélien jamais vu depuis la IVème République. Emboîtant le pas à un prédécesseur qui jeta aux orties les derniers oripeaux du gaullisme, le nouveau président a poussé le reniement des meilleures traditions diplomatiques de la France jusqu’au point de non-retour. Même Nicolas Sarkozy, lorsqu’il était président de la République, s’était abstenu d’effectuer en Israël une « visite d’Etat ». François Hollande l’a fait en novembre 2013.
Ruinant l’édifice diplomatique bâti par le Quai d’Orsay depuis un demi-siècle, et sans doute inspiré par son illustre prédécesseur socialiste, Guy Mollet, le président actuel a renoué les fils de l’alliance franco-israélienne. Lors des affrontements de Gaza, en novembre 2012 et en juillet 2014, le ministre français des affaires étrangères a accusé la résistance palestinienne d’avoir provoqué Israël. Entre l’occupant et l’occupé, la diplomatie française ne cherche même plus à préserver un équilibre en trompe-l’œil.
Or cet engagement politique au côté d’Israël, parfaitement explicite, se paie du sacrifice délibéré de la Palestine. La France a beau verser 400 millions d’euros en 5 ans à l’Autorité palestinienne, cet effort financier ne saurait constituer une politique.
-Sur le plan extérieur, non seulement la France s’aligne sur les positions israéliennes en cas de conflit, mais elle refuse toujours de reconnaître l’Etat de Palestine. Purement verbales, ses déclarations hostiles à la colonisation demeurent des vœux pieux qui ne trompent personne. Enfin, l’inscription du Hamas sur la liste des organisations terroristes fournit un alibi commode au déni de légitimité opposé à la résistance palestinienne. La solution « à deux Etats » dont se réclame la diplomatie française ressemble, à cet égard, à une incantation stérile.

-Sur le plan intérieur, les déclarations officielles assimilant antisémitisme et antisionisme, l’interdiction de rassemblements en faveur de la Palestine dans certaines villes, la pénalisation de la campagne pacifique Boycott-Désinvestissement-Sanctions, les propos équivoques du président français lors de la cérémonie en hommage à Stéphane Hessel ont créé un climat délétère.
On mesure quelle régression historique représente cet emballement pro-israélien de la politique française. Car, jusqu’au quinquennat de Jacques Chirac inclus, Paris sut maintenir le cap d’une promotion du droit international qui lui servait de fil conducteur. Et la nation qui se veut la « patrie des droits de l’homme » ne venait guère apporter sa caution morale à un Etat dont la politique consiste à les ignorer.

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