Téléchargez l’article au format PDF
Résumé : Les Balkans n’ont pas cessé, depuis la fin de la Grande guerre, de constituer l’un des théâtres d’expression et de manifestation de la ligne de fracture géopolitique Est-Ouest, attestée, persistante, qui traverse l’Europe. Le déclenchement de la Guerre de Yougoslavie en 1991marqua le retour de la guerre conventionnelle sur le continent européen, le démantèlement de la Yougoslavie, et aussi le retour de la barbarie avec de nombreux crimes de guerre. La Seconde guerre de Yougoslavie et la proclamation unilatérale par le camp occidental de l’indépendance du petit territoire du Kosovo, considéré depuis toujours par les Serbes comme le berceau historique de leur culture et de leur nation, sera vécue par eux comme un authentique arrachement, et par les Russes comme une humiliation de premier ordre. Mais dès les années 2000, la diplomatie et le renseignement russes ont mis en place une véritable politique de résistance stratégique et militaire sans concession pour empêcher toute nouvelle avancée de l’OTAN vers l’Est. De plus, la Chine a, de son côté, massivement investi dans les infrastructures de transport ou dans les mines, en Serbie notamment, prenant ainsi pied dans la région dans le cadre de son projet de Nouvelles Routes de
la Soie. Nous assistons aujourd’hui à une course de vitesse engagée entre Ouest (États-Unis, UE) et Est (Russie, Chine) en vue d’acquérir l’adhésion des territoires balkaniques, longtemps laissés aux marges du « grand jeu » et désormais considérées comme centraux. L’expression « Balkans » est géographiquement équivoque, et voit s’affronter et se concurrencer plusieurs acceptions diver gentes. Le sentiment de marginalisation qu’éprouvent et partagent aujourd’hui les populations de ces territoires balkaniques tient sans doute pour une large part de cette occupation politique et militaire inscrite dans la durée, doublée d’une authentique politique de sujétion et d’humiliation menée par les empires occupants. Il faut tenir compte de ces héritages anciens et douloureux si l’on souhaite discerner les voies possibles de l’avenir des Balkans.