Steven EKOVICH
The American University of Paris
Trimestre 2010
Le 26 MAI 2010, LE PRÉSIDENT BARACK ObAMA a rendu public son premier rapport sur la stratégie de sécurité nationale des États-Unis d’Amérique (National Security Strategy of the United States of America). Ce document constitue une obligation statutaire envers le Congrès. Régulièrement préparé et publié par la branche exécutive du pouvoir, il présente les grandes lignes des principales préoccupations des États-Unis en matière de sécurité nationale et le type de mesures que l’administration envisage de mettre en œuvre. Cette première présentation de la politique de sécurité nationale du nouveau président a suscité une très forte attente : à quoi allait-elle ressembler ? Dans quelle mesure allait-elle différer de celle de George W. Bush ? Sur la toute première page du document figurent seulement deux pays : l’Afghanistan et le Pakistan. Mais s’ils sont en tête du document, c’est parce qu’ils constituent le sujet d’inquiétude essentiel des États-Unis en matière de sécurité : « Il n’y a aucun doute, il faut aller de l’avant : les États-Unis vont continuer d’assurer la sécurité globale – à travers nos engagements envers nos alliés, partenaires et institutions ; notre objectif de destruction d’Al-Qaïda et de ses membres affiliés en Afghanistan, au Pakistan et partout ailleurs dans le monde ; et notre détermination à dissuader les agressions et empêcher la prolifération des armes les plus dangereuses du monde[1]. »
Un peu plus loin, le Pakistan est évoqué, ainsi que l’Afghanistan, comme la « ligne de front » dans le combat contre Al-Qaïda et les talibans. Ce n’est pas la première fois que les deux pays sont qualifiés ainsi. Le terme est à vrai dire si souvent utilisé qu’il a entraîné la création d’un néologisme de la langue anglaise pour caractériser cette région troublée : Afpak. Rien d’étonnant à ce que l’Afghanistan et le Pakistan occupent une place aussi importante. Lorsque Barak Obama est entré en fonctions dans le Bureau ovale, il s’est tout de suite attelé à honorer sa plus importante promesse de campagne en matière de politique étrangère : recentrer les efforts de guerre sur l’Afghanistan. C’est ce qu’il appelait la « guerre par nécessité », bien avant son élection. Une fois élu président, il a déclaré en mars 2009 : « Je veux que le peuple américain comprenne que nous avons un objectif clair et précis : déstabiliser, démanteler et vaincre Al-Qaïda au Pakistan et en Afghanistan, et empêcher son retour dans ces deux pays à l’avenir. Cet objectif doit être atteint. C’est une cause on ne peut plus juste[2]. »
Le plus lourd défi pour la politique étrangère d’Obama
S’il est un pays qui représente un enjeu crucial pour la politique étrangère états-unienne, c’est bien le Pakistan : cette affirmation est en passe de devenir un lieu commun. Paradoxalement, le Pakistan est aussi souvent présenté comme le plus solide allié de Washington en Asie du Sud-Est – bien que les relations entre les deux pays aient eu des hauts et des bas, voire des moments très tendus[3]. Cette relation est cruciale pour plusieurs raisons. En premier lieu, les groupes terroristes au Pakistan sont considérés comme une menace directe pour la sécurité des États-Unis car ils sont régulièrement liés à des attaques sur le sol états-unien. En second lieu, le Pakistan est considéré comme partie intégrante de l’effort de guerre américain en Afghanistan. Le président Obama insiste sur le fait que le Pakistan joue un rôle central dans la nouvelle stratégie en Afghanistan. Il a affirmé que le problème afghan ne peut pas être résolu indépendamment du problème pakistanais, ce qui implique pour la Maison-Blanche de travailler plus efficacement avec Islamabad. Dès décembre 2008, Obama a annoncé avant même son entrée en fonctions les grandes lignes de sa politique dans un entretien télévisé : « Je veux créer une sorte de partenariat stratégique efficace avec le Pakistan, qui puisse nous permettre, de concert, d’assurer que les groupes terroristes ne construisent pas de sanctuaires bien abrités, nichés dans ces régions frontalières entre le Pakistan et l’Afghanistan.[4] »
En troisième lieu, le Pakistan constitue un élément très important dans le dispositif régional de sécurité, indissociable notamment de l’évolution des relations entre les États-Unis et l’Inde. Le Pakistan étant une puissance nucléaire, plane la menace persistante qu’Islamabad ne soit pas en mesure de contrôler son arsenal nucléaire – qui risquerait de tomber entre les mains de groupes hostiles pas seulement envers les États-Unis, mais aussi envers le gouvernement pakistanais. Et de surcroît, par le passé, le Pakistan n’a pas été en mesure d’éviter la prolifération de la technologie des armes nucléaires vers d’autres pays éloignés hostiles aux États-Unis, tels que la Corée du Nord et la Libye. La menace demeure, bien que le Pakistan ait fait ces dernières années des efforts pour renforcer la confiance internationale dans la sécurisation de son arsenal nucléaire, et en particulier pour éviter la reconstitution du réseau de prolifération dirigé par le savant pakistanais A. Q. Khan. Si les responsables américains ont récemment exprimé leur confiance dans la sécurité de l’arsenal nucléaire du Pakistan, un malaise persiste néanmoins, car les informations détenues par les Américains sur l’arsenal d’Islamabad demeurent trop limitées pour qu’ils se sentent complètement rassurés[5].
La question nucléaire englobe aussi l’équilibre des forces entre le Pakistan et l’Inde. L’administration Obama semble accepter qu’un niveau minimum de dissuasion entre les deux pays soit justifié. Mais la secrétaire d’État Hillary Clinton a cependant manifesté une certaine inquiétude à la veille de la visite à Washington du Premier ministre indien Singh (pour assister au Sommet sur la sécurité nucléaire). Elle a déclaré que « la manière dont l’Inde et le Pakistan ont poursuivi la course aux armements atomiques a bouleversé l’équilibre de la dissuasion nucléaire ». Elle a ajouté que les États-Unis négocieraient intensément avec l’Inde et le Pakistan pour tenter d’aboutir à une limitation de leurs arsenaux nucléaires[6].
Les États-Unis sont aussi préoccupés par le transfert de technologie nucléaire civile à Islamabad. En mai 2010, la Maison-Blanche a annoncé qu’elle allait examiner très attentivement les plans de la Chine destinés à implanter deux centrales nucléaires civiles au Pakistan. Bien que la Chine y ait déjà construit deux réacteurs par le passé, les exportations de matériel nucléaire par Pékin sont maintenant plus réglementées depuis que la Chine a rejoint le Groupe des fournisseurs nucléaires en 2004 (un cartel d’États fournisseurs d’énergie nucléaire, interdisant les exportations aux pays qui ne respectent pas les strictes garanties prescrites par l’Agence internationale pour l’énergie atomique). Des craintes subsistent sur la sécurité du matériel nucléaire au Pakistan. Malgré tout, les dirigeants de la Chine, de l’Inde et du Pakistan ont assisté au sommet sur les armements nucléaires, convoqué à Washington par Barack Obama en avril 2010, et se sont engagés à travailler à la préservation de la sécurité nucléaire afin d’apaiser ces craintes. C’est seulement dans l’avenir que l’on saura si ces engagements s’avèrent crédibles[7].
Le nouveau visage de la politique américaine au Pakistan
La manière dont l’administration actuelle aborde les fondements des relations entre les États-Unis et le Pakistan conduit à se demander dans quelle mesure l’approche d’Obama diffère de celle de son prédécesseur. À ce stade de son mandat, il est maintenant possible d’avancer les premières évaluations de la politique étrangère d’Obama. C’est le fait même de son élection qui, en soi, a représenté le premier impact positif sur les relations des États-Unis avec le reste du monde. Globalement, l’image de Washington s’est améliorée, et c’est là une dimension importante en matière diplomatique. C’est probablement la raison pour laquelle Obama a reçu le prix Nobel de la paix, déclarant lui-même qu’il ne le méritait pas. Mais sur ce point précis, dans quelle mesure le nouveau président a-t-il fait évoluer la perception des États-Unis par les Pakistanais ? Ces derniers ont manifesté une bienveillance particulière envers Obama dont n’avaient jamais bénéficié les autres nouveaux entrants dans le Bureau ovale. La mère de Barack Obama avait travaillé au Pakistan pendant cinq ans (1987-1992) sur un projet pour la Banque asiatique de développement. Quand Obama était étudiant, il avait des amis pakistanais, et même un colocataire pakistanais lorsqu’il vivait à New York. C’est par l’intermédiaire de l’un de ses amis qu’il a séjourné à Karachi pendant quelques semaines en 1981. Cette expérience directe a créé ce que Obama qualifie de « lien affectif personnel » avec le Pakistan[8].
Mais actuellement, selon le plus récent sondage du Pew Global Attitudes Project, Barack Obama obtient tout juste 8 % d’opinions favorables. Cela témoigne d’un déclin de sa popularité depuis qu’il a prêté serment, et cela révèle l’érosion générale de son image dans le monde musulman. Par comparaison, G. W. Bush en obtenait 7 % en 2008. Selon un résumé de l’enquête, « plus d’un an après le discours historique de Barack Obama au Caire [en juin 2009], dans lequel il a présenté sa vision réparatrice des relations avec le monde musulman, ce dernier manifeste une lassitude et un désenchantement grandissants envers le président américain et sa politique internationale ». Dans les sept pays à majorité musulmane qui ont fait l’objet de l’enquête d’opinion, la cote de popularité d’Obama s’est effondrée entre 2009 et 2010. « Dans le monde musulman – à l’exception de l’Indonésie où le président a vécu plusieurs années lorsqu’il était enfant -, les niveaux de confiance et d’approbation observés en 2009 ont sensiblement chuté », poursuit le rapport.
S’agissant de la perception des États-Unis en général et pas uniquement de son président, seuls 17 % des Pakistanais avaient une opinion favorable sur les États-Unis, et 18 % une opinion favorable sur le peuple américain. Seuls 19 % des Pakistanais pensent que les États-Unis prennent leurs intérêts en considération. Tous ces résultats sont plus faibles que durant la plupart des années de la présidence de G. W. Bush. Le Pakistan est aussi le seul pays dans lequel une majorité des habitants (58 %) sont favorables à l’acquisition de l’arme nucléaire par l’Iran. Partout ailleurs dans les grands pays musulmans, l’opinion publique n’y est pas favorable. En 2010, une large majorité de Pakistanais (65 %) déclaraient que les troupes américaines devraient se retirer d’Afghanistan. Seulement 7 % pensaient qu’elles devraient rester. De nombreuses anecdotes viennent illustrer les résultats de cette enquête. Se promenant dans les rues de Gujrunwala, où la mère d’Obama a souvent séjourné, le journaliste ddAljazeera Alan Fisher a recueilli des commentaires très acerbes. Un homme lui a rétorqué que, « en ce qui concerne Obama, c’est seulement la façade qui a changé, les politiques sont les mêmes. C’est juste la continuation de ce que faisait Bush ». Un autre habitant lui a dit : « Je suis un homme musulman, et il est contre moi[9]. » Ces décalages entre les opinions américaine et pakistanaise pourraient devenir une source de friction entre les deux pays dans le futur.
Il est vrai que les discours d’Obama ont été favorablement accueillis, notamment celui du Caire. Mais les avantages que la diplomatie américaine peut en tirer demeurent incertains. Il a adopté une approche plus ouverte, voire indulgente -trop au goût de ses opposants – envers les adversaires des États-Unis. Il a manifesté des gestes d’apaisement et sa manière d’appréhender le monde a été très appréciée, surtout par contraste avec la présidence Bush. Incontestablement, Barack Obama fait preuve d’un grand talent dans l’usage des symboles, certainement essentiels en matière de diplomatie. On peut par exemple remarquer un important changement dans l’abandon des expressions « terrorisme islamique » ou « extrémisme islamique », au profit du terme désormais officiel d’« extrémisme violent », afin d’éviter toute assimilation entre religion et terrorisme. Mais, aux yeux des détracteurs du président, refuser d’établir le lien avec une forme d’islam radical est une manière de nier l’évidence et « s’inscrit dans le refus absurde et embarrassant de l’administration Obama d’admettre qui sont réellement ceux, là-bas, qui cherchent à tuer des Américains, et pourquoi ». L’ennemi, disent-ils, doit être clairement défini[10]. Pour autant, il faut rendre justice à G .W. Bush sur ce point, il a toujours régulièrement insisté sur le fait que les États-Unis n’étaient pas en guerre contre l’islam. Mais l’administration Obama va plus loin et évite d’utiliser le mot « guerre », comme dans l’expression « guerre au terrorisme ». Le but recherché est de ne pas accorder le moindre crédit à la notion de « guerre sainte », dont se réclament les actions violentes des talibans et d’Al-Qaïda. Obama veut proclamer clairement que de telles actions violentes ne sont que des actes criminels condamnables[11].
Obama fait l’objet de critiques persistantes – ce qui est normal en démocratie. On lui reproche de mener une politique étrangère trop chargée de symboles, mais assez peu substantielle en termes de changements concrets de politique. Mais son approche pourrait aussi être envisagée d’une façon plus positive, comme une tentative de redéfinir la trajectoire à long terme des relations extérieures des États-Unis et de préparer le terrain pour des changements à venir. Il est vrai que le président possède un penchant, très talentueux, à concevoir l’ensemble complexe des problèmes régionaux et internationaux. C’est louable. Mais en cherchant à agir sur toutes les dimensions à la fois, il risque d’aboutir à une certaine paralysie. Autrement dit, en essayant d’en faire trop à la fois, il ne parvient pas à avancer concrètement sur certains dossiers précis. Obama fait l’objet de critiques sur le plan intérieur dans des termes assez similaires – essayer d’en faire trop, trop vite, pour en arriver à un maigre résultat, tout en perturbant l’opinion publique. Par conséquent, certains qualifient l’approche d’Obama de hubris.
Mais la question est ici de savoir comment cette approche globale d’Obama s’articule à son traitement du dossier pakistanais. Dans quelle mesure sa politique diffère-t-elle de celle de ses prédécesseurs ? Quelles sont les continuités et les discontinuités ?
intérêts américains et sensibilités pakistanaises
Dès le début de la campagne pour l’investiture du Parti démocrate, lors d’un débat en août 2007, la question du Pakistan a été abordée. Le candidat Obama a déclaré que, s’il était nécessaire d’aller dénicher et extirper les terroristes, il enverrait des forces au Pakistan sans demander au pays son approbation. Ses adversaires pour la nomination ont très vivement réagi à ses propos. Utilisant des termes qu’il allait reprendre plus tard durant la campagne, Obama a déclaré : « Si nous avons des renseignements fiables sur des dirigeants d’Al-Qaïda passibles de poursuites, y compris Oussama Ben Laden, et que le président Musharraf ne peut pas agir, alors nous, nous devrions agir… C’est une question de bon sens. » Il faut remarquer que, si les autres candidats à l’investiture démocrate ont bondi sur Obama en raison de ses propos, ce n’est pas parce qu’il annonçait un changement de politique, mais parce qu’ils soutenaient que certaines actions politiques devaient demeurer diplomatiquement discrètes. Hillary Clinton a fustigé le jeune sénateur pour sa naïveté : « Vous pouvez avoir des grandes idées, mais souvenez-vous, vous ne devriez pas toujours dire tout ce que vous pensez si vous vous présentez à la présidence, parce que cela a des conséquences dans le monde entier. » Le sénateur Joe Biden (futur vice-président), lui aussi candidat aux primaires, a aussi pris part au débat en rappelant que la stratégie imprudemment annoncée par Obama était déjà la politique mise en œuvre par les États-Unis : « C’est déjà la politique menée par les États-Unis, et depuis quatre ans : s’il y avait des informations justifiant des poursuites, nous irions au Pakistan. » Pendant la campagne, le sénateur Obama a aussi soutenu la politique de Bush de frappes aériennes par drones au Pakistan. Une fois président, non seulement il a poursuivi cette politique, mais il a augmenté le nombre de frappes. Il n’y a donc là aucun changement radical dans la doctrine[12].
Une fois élu président, Obama a réitéré ses précédentes déclarations : l’armée américaine poursuivrait sans faille les extrémistes à l’intérieur des frontières pakistanaises, mais, a-t-il ajouté, « après avoir consulté le gouvernement pakistanais ». Les contraintes de l’exercice du pouvoir ont une fois encore modulé la rhétorique de campagne, et peut-être aussi un certain manque d’expérience. Lors de l’émission télévisée très populaire sur CBS, « Face the Nation », en mars 2009 (le second mois de sa présidence), Obama a déclaré qu’il ne manquait pas de respect pour le « gouvernement souverain » pakistanais. Mais il a affirmé que les États-Unis devaient obtenir de ce gouvernement une attitude « plus responsable ». « Cela va être dur, a-t-il ajouté. Je ne me fais pas d’illusions[13]. »
De récents comptes rendus dans la presse américaine révèlent l’évolution de la politique vers des incursions à l’intérieur du Pakistan. La formule « consultations avec le gouvernement pakistanais » revêt maintenant des nuances assez significatives, liées peut-être à des accords secrets entre Washington et Islamabad.
Fondamentalement, le dilemme terrible consiste à trouver un équilibre entre l’urgence américaine d’agir et le respect de la souveraineté pakistanaise, après la découverte d’une cible de très haute importance. Si les services secrets localisent une telle cible, il y aura une nécessité pressante d’agir rapidement, sans prendre le temps d’en passer par des consultations potentiellement longues et peut-être conflictuelles avec Islamabad.
Le Washington Post a révélé dans son édition du 29 mai 2010 que la CIA a l’autorité de désigner et frapper des cibles au Pakistan sans approbation du plus haut niveau de la Maison-Blanche. Mais de telles frappes unilatérales à l’intérieur du Pakistan ne peuvent être exécutées que « si des renseignements fiables ont été décelés sur les dirigeants d’Al-Qaïda, tels que Oussama ben Laden et Ayman al-Zawahiri, ou le chef taliban Mohammad Omar ». Selon ce même article, l’armée américaine envisage des options de frappe unilatérale au Pakistan dans l’hypothèse où une attaque réussie sur le sol américain proviendrait des zones tribales du pays. Ces options de représailles sont examinées à la suite des enquêtes qui ont permis de mettre en lumière des liens entre Faisal Shahzad, le poseur de bombe de Times Square, et des groupes de talibans pakistanais. Après la tentative d’attentat de Times Square, la secrétaire d’État Hillary Clinton a déclaré dans un entretien télévisé que, « si par malheur une attaque de ce genre réussissait et qu’on puisse établir qu’elle provient du Pakistan, cela entraînerait de très graves conséquences ». Mais cette nouvelle option politique a été entourée de précautions destinées à ménager autant que possible les sensibilités des Pakistanais. Une action américaine ne serait envisagée que dans des circonstances extrêmes, comme une attaque catastrophique, et ne se solderait pas par une « réponse punitive de grande envergure » mais plutôt par des attaques ciblées contre des groupes militants particuliers. Cela pourrait inclure des incursions sur le territoire pakistanais de petites unités de forces spéciales américaines. Selon un haut responsable américain, cité dans le même article, un raid de représailles de ce genre doit être très prudent afin de préserver les relations qui ont été établies avec l’armée pakistanaise. Le président Obama a dépêché son conseiller national pour la Sécurité, James L. Jones, et le directeur de la CIA, Leon Panetta, à Islamabad après le fiasco de Times Square afin de délivrer un message similaire au président Zardari et au général Kayani[14].
La guerre de l’ombre
Un reportage publié dans le New York Times du 24 mai 2010 révèle que le général Petraeus, le commandant en chef des forces américaines au Moyen-Orient et désormais en charge de l’Afghanistan, a ordonné une large extension de l’activité militaire clandestine, ayant pour objectif de démanteler les groupes extrémistes et de contrer les menaces en Iran, Arabie Saoudite, Somalie et autres pays de la région. On peut raisonnablement supposer que le Pakistan fait partie des « autres pays de la région ». Quoi qu’il en soit, ce n’est un secret pour personne que cette stratégie est déjà mise en œuvre. En 2004, le Pentagone a autorisé des frappes offensives dans plus de douze pays, qui ont été menées par des troupes d’opérations spéciales en Syrie, au Pakistan et en Somalie. Ainsi, alors que l’administration Bush avait approuvé certaines activités militaires clandestines, le nouvel objectif consiste à systématiser ces efforts et les inscrire dans le long terme.
À en croire la plupart des commentaires des médias américains, on ne sait pas si ces incursions ont été menées ou non avec l’accord (secret, tacite ou explicite) du gouvernement pakistanais – ou certains de ses éléments. Toujours selon le même article, une directive secrète, intitulée « Joint Unconventional Warfare Task Force Execute Order », autorise l’envoi de troupes d’opérations spéciales américaines dans des pays hostiles ou alliés dans le but de réunir des informations et d’établir des liens avec les forces locales. Toujours selon le The New York Times, il semble que les objectifs de cette directive soient d’établir des réseaux qui puissent « pénétrer, perturber, mettre en échec et détruire » Al-Qaïda et d’autres groupes militants, ainsi que « préparer l’environnement » pour de futures attaques par des forces militaires américaines ou locales. Il faut cependant remarquer que cette directive ne semble pas autoriser de frappes offensives dans un pays nommé en particulier. Il n’en reste pas moins que l’administration Obama a considérablement augmenté le nombre de frappes de drones sur les cibles des talibans pakistanais dans les régions frontalières. Sous l’administration Bush, on en a compté seulement 5 en 2007 et 36 en 2008. Durant la première année de la présidence Obama, elles ont plus que doublé – 83 frappes – et leur fréquence n’a pas diminué à ce jour[15]. De source sûre, de nombreux chefs militaires, dont le général Petraeus, sont favorables à une interprétation extensive du rôle de l’armée américaine dans le monde. Ils soutiennent que des troupes doivent mener des opérations au-delà de l’Irak et de l’Afghanistan afin de mieux combattre les groupes extrémistes[16]. Cette vision ne contredit pas la conception d’Obama en matière de politique étrangère et de défense, qui s’inscrit dans un grand projet englobant ensemble des dimensions locales, régionales et internationales, et incluant tous les instruments de pouvoir américain.
Un article du 4 juin 2010 du Washington Post explique que, sous couvert d’une approche diplomatique conciliante et au-delà des zones de combat d’Afghanistan et d’Irak, l’administration Obama a considérablement étendu une guerre américaine en grande partie secrète contre Al-Qaïda et d’autres groupes radicaux – d’après des sources de responsables militaires et civils haut placés. D’ailleurs, le président a demandé une augmentation de 5,7 % du budget des opérations spéciales pour l’année 2011. Le renforcement du déploiement d’opérations spéciales est présenté dans l’article comme la « face sombre » de National Security Strategy of the United States of America, que l’administration Obama vient de publier[17]. Dans le passé, si l’on se souvient de l’utilisation de la CIA par le président Eisenhower (entre autres présidents), de telles opérations présentent l’avantage de masquer au public l’usage de la force[18].
Les deux journalistes du Washington Post poursuivent : « Pour un président démocrate comme Obama, critiqué des deux côtés du spectre politique pour être trop ou pas assez agressif, les attaques non officielles de drones au Pakistan menées par la CIA, ainsi que les raids américains unilatéraux en Somalie et les opérations conjointes au Yémen lui permettent de se protéger politiquement. » Les deux auteurs remarquent ironiquement qu’une telle rhétorique ne diffère pas tellement de l’engagement de Bush à « porter la bataille chez l’ennemi… et affronter les pires menaces là où elles émergent[19] ».
Ainsi, on n’observe pas vraiment de changement fondamental dans la politique américaine d’incursions au Pakistan, mais seulement des modifications dont le but est de prendre en compte les sensibilités d’Islamabad, bien que les nuances supposées caractériser cette nouvelle approche ne semblent pas satisfaisantes aux yeux de nombreux Pakistanais.
Style ou substance ?
L’évolution de la politique d’Obama envers le Pakistan dessine une ligne floue entre le style et la substance, qui se manifeste notamment par la multiplication des visites de haut niveau au Pakistan dans le cadre d’un « dialogue stratégique » renouvelé. Les partisans de l’approche d’Obama mentionnent régulièrement cette diplomatie personnelle de haut niveau comme une des facettes de ce qu’on qualifié d’approche de whole of government[20]‘. Cela se traduit par des visites du conseiller national de Sécurité, Jim Jones, de la secrétaire d’État, Hillary Clinton, du chef d’état-major des armées, l’amiral Mike Mullen, du général David Petraeus et du général Stanley McChrystal, et de nombreux autres membres haut placés de l’administration et du Congrès. Bien entendu, c’est la création d’un poste de représentant spécial pour l’Afghanistan et le Pakistan, auquel est nommé le très expérimenté ambassadeur Richard Holbrooke, qui caractérise le changement le plus perceptible sur le plan diplomatique[21]. L’objectif est de rassurer Islamabad sur l’engagement à long terme de Washington tant au Pakistan qu’en Afghanistan, envisagés comme des partenaires et pas seulement des instruments de la politique américaine. Il s’agit ici d’effacer le sentiment bien installé chez les Pakistanais d’« avoir été abandonnés par les États-Unis après le retrait soviétique d’Afghanistan », comme l’a fait remarquer le ministre des Affaires étrangères, Mehmood Shah Qureshi, au Council on Foreign Relations le 7 octobre 2009[22]. Donc, tout dialogue stratégique devrait idéalement s’inscrire sur le long terme. Par le passé, les relations américano-pakistanaises ont été ponctuées par des engagements positifs durant les crises. Le général Anthony C. Zinni, émissaire de George W. Bush au Moyen-Orient, parlant de la profonde et vieille antipathie entre le Pakistan et l’Inde, déclarait : « Aucune des deux parties ne comprend où l’autre trace la ligne rouge, et c’est cela qui est le plus dangereux. Nous avons joué un rôle d’intermédiaire trois fois maintenant [pour aider à désamorcer de très sérieuses crises en 1990, 1999 et 2002] quand il y a eu une réelle menace de guerre. Mais nous nous sommes toujours interposés à la dernière minute pour éviter la catastrophe. Je pense vraiment qu’il faut que cela change. Nous sommes le seul pays du monde qui est en mesure de jouer un rôle de médiateur entre les deux parties, d’établir des communications, et je pense que nous devons nous engager[23]. »
L’administration Obama tente un dialogue stratégique soutenu qui a comme objectif de convaincre l’armée et les services secrets pakistanais qu’ils auront voix au chapitre quant au futur de l’Afghanistan, sans recourir à des intermédiaires douteux comme les talibans. Comme le général Zinni le faisait remarquer, un tel dialogue doit inclure des gestes visant à atténuer la rivalité et la suspicion entre l’Inde et le Pakistan, nourries d’intenses dissensions. Newsweek rapporte une analyse d’un haut responsable américain : « Le but essentiel est que le Pakistan fasse partie de la stratégie régionale. Les Pakistanais ont besoin d’être assurés qu’ils auront à leurs frontières un Afghanistan stable qui ne les menacera pas. La critique interne était que le Pakistan était considéré par les Américains comme une simple rampe de lancement. C’est pourquoi nous avons fourni des assurances que le retrait d’Afghanistan planifié pour 2011 ne signifie pas que nous allons partir[24]. »
Bien entendu, la persuasion a été facilitée par le comportement des talibans eux-mêmes, lorsqu’ils ont presque atteint la capitale et menacé l’État pakistanais, se mettant l’opinion à dos en imposant une version très dure de la loi islamique appuyée par une violence odieuse – brutale, cruelle et même sadique. Comme l’exprime Shirin R. Tahir-Kheli, qui a grandi à Peshawar et travaillé plus tard au Conseil de sécurité américain dans trois administrations républicaines, le Pakistan doit « regarder la réalité en face : son existence même est menacée par les extrémistes qui ont détourné la religion à laquelle ils prétendent être fidèles – et l’ont transformée en un macabre théâtre monstrueux, illégitime et impie[25] ». Pour le général Jones, conseiller pour la Sécurité nationale, cette prise de conscience est déjà à l’œuvre, « la population soutient massivement l’action de l’armée pakistanaise. Kayani s’en rend bien compte. Bien plus que par le passé, l’armée pakistanaise affiche un élan appuyé par la population ». Un sondage interne pakistanais communiqué à Newsweek montre que trois quarts des Pakistanais considèrent maintenant que les talibans représentent une menace, alors que le pourcentage ne dépassait pas 30 % durant les années de pouvoir de Pervez Musharaff[26].
Le résultat diplomatique, si l’on considère favorablement l’administration Obama, s’est soldé par un renforcement sans précédent de la coopération de la part du gouvernement d’Islamabad, qui s’était montré hésitant par le passé, et par des progrès dans le rapprochement entre l’armée et le gouvernement pakistanais. Dans le domaine militaire, un bon nombre de chefs talibans recherchés par les deux gouvernements ont été soit tués, soit arrêtés. L’auteur de l’article de Newsweek poursuit : « Les talibans pakistanais qui courent encore et qui, il y a encore un an, jouissaient quasiment d’un statut intouchable sont maintenant des hommes traqués, y compris les hommes du dangereux réseau Haqqani au Waziristan. Et la tactique « enclume et marteau » en Afghanistan – le marteau étant l’offensive de l’OTAN à Marja, et l’enclume l’action des forces pakistanaises de l’autre côté de la frontière – pourrait finalement s’avérer payante après bientôt une décennie de perte de terrain au profit des talibans, qui ont bénéficié pendant des années de la possibilité de se regrouper dans leurs sanctuaires sécurisés des régions tribales montagneuses du Pakistan[27]. » On ne sait cependant pas si les chefs talibans visés, trouvés et tués n’étaient pas plutôt des victimes de sombres luttes intestines entre différentes factions tant en Afghanistan qu’au Pakistan. Lisa Curtis, de la Heritage Foundation, explique que, « compte tenu de la longue histoire du soutien apporté par le Pakistan aux groupes extrémistes combattant en Afghanistan et en Inde, il est trop tôt pour déterminer si les plus récentes arrestations signifient un revirement durable par rapport aux politiques antérieures, ou simplement un changement tactique pour faire preuve de force dans la région[28] ».
Doubles jeux
De tels soupçons sont alimentés par de récents éléments : non seulement l’armée pakistanaise n’a pas poursuivi le réseau Haqqani, mais elle l’a plutôt soutenu ! L’ISI instrumentalisait manifestement ce réseau en vue d’influencer l’issue militaire et politique en Afghanistan[29]. Un rapport publié en juin 2010 par la London School of Economics, dirigé par un chercheur de l’université de Harvard, suggère qu’il ne s’agit pas là d’un exemple isolé de manœuvres de coulisses indirectes de la part d’Islamabad. L’auteur de ce travail montre qu’il existe une relation clandestine étroite et suivie entre les insurgés afghans et la direction des services secrets pakistanais (ISI)[30]. Le prestige international des deux universités fournit un rempart solide contre les dénis véhéments du gouvernement pakistanais. Et il faut rappeler que Harvard est YAlma Mater de Barack Obama. Le rapport a fait la une des plus grands journaux pakistanais le 14 juin 2010 (The Times, The News, Dawn et The Nation) avec la réfutation du gouvernement.
Selon cette étude, « le Pakistan semble jouer un double jeu d’une ampleur stupéfiante » en Afghanistan. L’auteur du rapport a conduit des entretiens entre février et mai 2010 avec neuf dirigeants des insurgés et un intermédiaire taliban de haut niveau. Il a aussi mené des entretiens avec dix anciens responsables talibans de haut niveau, vingt-deux chefs tribaux afghans, des politiciens et des observateurs, treize diplomates étrangers, experts et responsables de la sécurité. Selon des chefs talibans, le puissant rôle de l’ISI est « aussi clair que le soleil dans le ciel ». Mais pour les Pakistanais, « la partie la plus terrible de l’enquête, selon le quotidien Dawn, a été réservée au président Asif Ali Zardari, alléguant qu’il a assuré de hauts responsables talibans emprisonnés de son soutien car ils étaient « des nôtres » ». Le quotidien ajoute « qu’il a, semble-t-il, autorisé certains d’entre eux à sortir de prison[31] ». Le gouvernement Zardari a rejeté les affirmations de l’enquête, les qualifiant de « malveillantes et sans fondements » et « absolument fausses[32] ». Mais, comme l’explique le professeur Rajan Menon dans un éditorial du Los Angeles Times, même si les autorités pakistanaises ont réagi avec colère à cette étude, « le rapport ne fait qu’affirmer une vérité notoire bien connue chez les spécialistes universitaires de l’Afghanistan et les journalistes ayant une solide expérience dans ce pays[33] ».
Ces accusations ont été corroborées par les révélations de l’ancien patron des services de renseignements afghans, Amrullah Saleh, un témoin de poids qui a démissionné peu auparavant en juin et qui était très apprécié des Américains. « L’ISI fait partie du paysage de destruction de l’Afghanistan, cela ne fait pas de doute », soutient cet ancien responsable, particulièrement bien informé sur ce genre de choses. « Donc ce serait une perte de temps de chercher à fournir les preuves de son implication. Ce sont des acteurs de cette guerre à part entière[34] », se lamente-t-il. La démission de Saleh, ainsi que celle du ministre afghan de l’Intérieur Hanif Atmar sont perçues comme une concession de Kaboul à Islamabad. « Les deux responsables, qui avaient les faveurs de Washington, étaient considérés par le Pakistan comme des obstacles majeurs à sa vision d’un règlement afghan dans lequel des combattants talibans purs et durs seraient partie prenante d’une résolution du conflit, bien que les circonstances de leurs démissions ne laissent pas apparaître de lien avec le Pakistan[35]. »
Il est trop tôt pour dire si le dialogue stratégique proposé par Obama débouchera sur un échange durable générateur de confiance et respect mutuels. Si les conclusions de la LSE s’avèrent justes, alors le nouveau « dialogue stratégique » entre le Pakistan et les États-Unis devra combler le fossé entre les mots et les actes afin de restaurer la confiance. Compte tenu des récentes révélations sur ce fossé, on peut se demander si la main tendue par le président américain a été loyalement saisie. L’administration Obama a lancé un défi à Islamabad, face à son manque d’empressement à contrer le terrorisme dans la région. Dans un éditorial du quotidien pakistanais, The News, le secrétaire à la Défense Robert Gates a laissé entendre que le Pakistan devrait en faire plus dans la lutte contre le terrorisme et qu’il est contre-productif de chercher à distinguer les différents groupes terroristes. L’amiral Dennis Blair, US Director of National Intelligence (directeur national des renseignements), a repris ces critiques dans son témoignage devant le Congrès le 2 février 2010, en déclarant : « Le Pakistan est convaincu que les groupes extrémistes lui sont stratégi-quement utiles pour contrer l’Inde : or cela entrave la lutte contre le terrorisme et aide Al-Qaïda à maintenir son sanctuaire[36]. »
Ce genre de déclaration émanant des hauts responsables laisse penser que la patience de l’administration Obama a ses limites. Quoi qu’il en soit, le président continue d’envoyer des messages ambivalents. D’un côté, son directeur de la CIA, Léon Panetta, pense qu’il n’est pas possible de négocier avec les dirigeants talibans, que ces derniers et leurs alliés ont « peu de raisons d’envisager un compromis de partage du pouvoir en Afghanistan », et que, « à moins qu’ils ne soient convaincus que les États-Unis vont gagner et qu’ils seront vaincus, je pense qu’il est très difficile de procéder à une politique de réconciliation ». D’un autre côté, le président déclare : « Je pense qu’il est trop tôt pour se prononcer. Nous devons considérer ces efforts avec scepticisme, tout en restant ouverts[37]. »
Réorientation de l’assistance militaire
C’est la nature de l’aide accordée au Pakistan qui constitue le réel changement de politique entre Bush et Obama. George W. Bush avait déjà levé les sanctions qui avaient été prises contre Islamabad après que le pays s’était doté de l’arme nucléaire. L’administration Bush a repris l’aide au Pakistan après le 11-Septembre, comptant en retour sur ses efforts dans la « guerre contre le terrorisme ». Après les attaques du 11 septembre aux États-Unis, Musharraf a entrepris de restaurer la très mauvaise réputation de son pays auprès des Américains, « affrontant une large panoplie de critiques, y compris de la part des sceptiques au sein de sa propre armée, qui se souviennent que Washington s’était éloignée du Pakistan par le passé, après la première guerre américano-afghane[38] ». Le changement opéré par Musharraf dans la posture stratégique du Pakistan lui a permis d’obtenir une aide d’environs 12 milliards de dollars, prioritairement destinée à la l’armée et à la sécurité, jusqu’à la prise de fonctions d’Obama[39]. À titre de mesure de soutien supplémentaire, Bush avait aussi désigné formellement le Pakistan comme major non-NATO ally (allié majeur hors OTAN) en juin 2004, ce qui lui permettait, entre autres choses, d’acquérir une partie de la technologie militaire américaine la plus en pointe.
Le président Obama a poursuivi l’aide militaire au Pakistan, mais il l’a considérablement réorientée. L’assistance militaire est de plus en plus dirigée vers la contre-insurrection. Il ne s’agit pas seulement de financer des programmes, mais de fournir un entraînement ainsi que la technologie de pointe la mieux adaptée pour faire face à l’insurrection et au terrorisme. La nouvelle stratégie implique des efforts concrets pour renforcer la coopération entre Américains et Pakistanais dans la lutte antiterroriste. Cela suppose un partage élargi des informations, notamment lors de missions des drones, de nouveaux moyens de surveillance, et de la technologie d’interception de communications utilisée par la US National Security Agency. Des fusion centers ont aussi été créés dans les zones frontalières troublées au Pakistan, où des dispositifs de renseignements des deux pays travaillent ensemble. Les fusion centers n’ont pas seulement pour fonction de découvrir des informations utiles sur les réseaux terroristes, mais aussi de construire une relation de confiance entre responsables militaires et officiers de renseignements américains et pakistanais. De tels centres sont présentés comme un moyen pour les deux pays de se surveiller mutuellement, bien qu’ils puissent être aussi perçus comme un instrument pour créer une dépendance des Pakistanais envers la haute technologie américaine en matière de collecte de renseignements[40]. En bref, comme cela a été annoncé dans le document de février 2010 du Department of State américain, Afghanistan and Pakistan Regional Stabilization Strategy : « En respectant l’engagement du président Obama à renforcer la capacité du Pakistan à cibler les groupes extrémistes qui menacent nos pays, nous allons poursuivre et concentrer notre assistance en matière de sécurité, avec pour objectif d’aider le Pakistan dans ses efforts pour éliminer les sanctuaires des terroristes qui menacent le Pakistan, l’Afghanistan, la région, et le monde[41]. »
On s’inquiète cependant qu’une trop grosse partie de l’aide militaire ne soit détournée vers le Cachemire. Dans un entretien à la BBC, l’ancien président Musharraf a admis qu’il s’était en effet livré à ce type de détournement[42]. Dès lors, l’aide actuelle au Pakistan est conditionnée à l’efficacité des Pakistanais dans leur lutte contre les extrémistes dans la zone frontalière avec l’Afghanistan[43].
Aide directe au peuple pakistanais
L’aide apportée au Pakistan a surtout changé dans la mesure où l’assistance dirigée vers la société civile a considérablement augmenté. À partir du Enhanced Partnership with Pakistan Act de 2009 (connu aussi sous le nom de loi Kerry-Lugar), les États-Unis vont tripler l’aide non militaire au Pakistan, pour atteindre 1,5 milliard de dollars par an. Ce budget est affecté au programme de réforme économique du pays, à la consolidation de la croissance et de la stabilité économiques. L’assistance sera dirigée vers l’agriculture, l’éducation, la santé, la réduction de la pauvreté et l’énergie. Cette nouvelle loi autorise la construction d’écoles, de routes et d’hôpitaux ; l’aide aux agriculteurs pour améliorer leurs récoltes et les acheminer sur les marchés ; la modernisation de l’infrastructure énergétique ; et le renforcement de la démocratie au Pakistan. Et, pour bien montrer qu’il s’agit d’un engagement à long terme, qui s’inscrit dans le « nouveau dialogue stratégique », cette aide doit s’étendre sur dix ans. Le président Obama a précisé dans son discours à l’Académie militaire de West Point le 1er décembre 2009 : « Le peuple pakistanais doit savoir que l’Amérique demeurera un ardent défenseur de la sécurité et de la prospérité du Pakistan, bien après la fin des combats, afin que le considérable potentiel de son peuple puisse s’épanouir[44]. » Il faut remarquer que les États-Unis sont le plus gros donateur bilatéral aux Pakistanais. Mais la nouvelle approche encourage davantage de contacts entre les populations américaine et pakistanaise – ainsi que la mobilisation de la diaspora pakistanaise aux États-Unis, dans l’espoir de renforcer son activité philanthropique, sa bonne volonté et sa compétence[45].
L’objectif de cette aide civile est de mettre en place un dispositif qui ne se réduise pas à sa dimension militaire, mais qui, plus largement, ambitionne de soutenir le gouvernement démocratique mis en place par le président Zardari. L’un des arguments majeurs de la campagne d’Obama était que les États-Unis avaient commis l’erreur d’avoir « mis tous nos œufs dans le même panier », en soutenant le général Musharraf. Quand Obama est entré en fonctions, il n’a pas été confronté à ce problème car Musharraf avait déjà quitté le pouvoir – forcé d’abandonner ses fonctions car menacé de destitution, après des années de protestations politiques émanant de juristes, nombreux membres de la société civile et partis politiques pakistanais. Et bien que George Bush ait appuyé Musharraf en échange de son aide contre les extrémistes dans la guerre en Afghanistan, les Américains ont cessé de le soutenir à la fin de son mandat, préférant miser sur les élections démocratiques qui ont porté au pouvoir le veuf de Benazir Bhutto. L’équipe Bush était cependant favorable à un « atterrissage en douceur », une sortie honorable pour l’ancien président. Mais il ne faut pas oublier qu’aux États-Unis le soutien à Musharraf était bipartisan. Des membres influents du Parti démocrate pensaient aussi que le général constituait un rempart nécessaire contre les forces qui menaçaient de déstabiliser le Pakistan.
Désormais, une partie importante de l’aide américaine consiste à renforcer le récent gouvernement de Zardari, en consolidant notamment les institutions civiles.
Il s’agit en particulier de ressusciter littéralement le système éducatif. Le budget de l’éducation au Pakistan a tellement décliné qu’il est devenu le plus faible de tous les pays de la planète, ce qui a entraîné l’effondrement du système public d’éducation, qui a été naguère l’un des meilleurs des pays en développement. Cette carence en matière d’éducation a entraîné un développement d’écoles islamiques financées par l’Arabie Saoudite, les madrasa. Si beaucoup de ces écoles coraniques n’incitent pas à la violence et remplissent de louables fonctions éducatives, un certain nombre d’entre elles ont cependant servi de bases de recrutement pour les terroristes. Un vif débat agite le milieu éducatif pour évaluer l’ampleur de ces écoles religieuses radicales et leur degré d’incitation au terrorisme. Un autre objectif consiste à scolariser les 50 % d’enfants pakistanais qui ne vont actuellement pas à l’école, afin d’améliorer les chances du Pakistan d’entrer dans la compétition de la nouvelle économie internationale postmoderne[46].
Néanmoins, une certaine inquiétude demeure : la plus grosse partie de cette nouvelle injection d’assistance risque de ne pas parvenir au cœur de la société civile et de ne pas apporter d’aide concrète et visible dans la vie du peuple pakistanais. Un ancien membre du Conseil national de sécurité américain fait remarquer que, « au Pakistan, le modèle américain de distribution d’assistance est bien mal en point. Si l’on retire 40 % pour les entrepreneurs américains et un autre large pourcentage pour les entrepreneurs pakistanais, c’est une somme minuscule qui est en réalité distribuée[47] ». Bien sûr, comme toujours, en raison de la corruption, une substantielle partie de l’aide risque de se retrouver dans des comptes bancaires en dehors du pays. C’est pourquoi le président de la Commission américaine du Sénat pour les affaires étrangères, le sénateur John Kerry, et son homologue républicain, Richard Lugar, ont envoyé une lettre au Département d’État le 5 mars 2010, faisant état de la préoccupation des sénateurs, soucieux que les fonds alloués soient correctement affectés aux besoins appropriés et ne fassent pas l’objet d’un détournement[48]. Les Américains ne veulent pas seulement avoir la garantie que l’argent profitera bien à la population, mais ils ne veulent surtout pas que les Pakistanais ordinaires aient l’impression qu’ils enrichissent leurs élites à leurs dépens. La divulgation de cette lettre a provoqué une réaction irritée au Pakistan. Là encore, les Américains ont été accusés de manquer de respect à la souveraineté du pays en raison de leurs « exigences draconiennes[49] ». Pourtant, tous les dirigeants pakistanais n’ont pas désapprouvé les sénateurs. L’ancien ministre des Affaires étrangères Riaz Khodar a approuvé la teneur de cette lettre, déclarant que lui aussi était inquiet d’un possible détournement de l’aide à Islamabad, notamment parce que « certaines personnes dans ce pays sont des orfèvres en matière de corruption[50] ».
En outre, une autre condition posée par Washington depuis de nombreuses années embarrasse les relations entre Islamabad et Téhéran. Il s’agit du projet de gazoduc provenant d’Iran. Richard Holbrooke, l’envoyé spécial américain au Pakistan et en Afghanistan, a averti le Pakistan que l’accord de gazoduc récemment signé pourrait entraîner de nouvelles sanctions envers les deux pays. Les États-Unis ont constamment découragé les autres pays de commercer avec l’Iran en raison de son refus de suspendre son enrichissement d’uranium. Mais l’annonce du contrat de construction du gazoduc iranien a placé Washington dans une situation très inconfortable. D’une part, il existe déjà des sanctions prises par le Congrès envers les entreprises qui commercent avec l’Iran au-delà de 20 millions de dollars, et de nouvelles sanctions vont être mises en place à la suite de la récente résolution du Conseil de sécurité contre l’Iran. D’autre part, si la nouvelle orientation de la politique américaine consiste à envoyer plus d’aide directe à la société civile pakistanaise afin d’améliorer la vie des populations (y compris l’aide au développement du secteur énergétique), il est problématique de sembler entraver un projet qui permettrait de remédier à une sévère crise énergétique. Les coupures d’électricité au Pakistan provoquent de constantes pannes d’électricité qui n’affectent pas seulement l’économie, mais rendent la vie quotidienne difficilement supportable quand la température monte. Et bien sûr le Pakistan est un partenaire vital dans le combat de Washington contre Al-Qaïda et les talibans[51].
Une migraine internationale ?
Le Pakistan contient tous les ingrédients « qui vous donnent une migraine internationale », commentait l’ancienne secrétaire d’État Madeleine Albright lors d’une récente réunion au Council on Foreign Relations. L’auteur, qui rapporte sa remarque ironique, note que « Albright se fait l’écho du sentiment général à Washington : avec ses armes nucléaires, le terrorisme, la pauvreté, la corruption, une économie chancelante, un gouvernement faible, une situation géostratégique critique, le Pakistan est une préoccupation majeure pour l’administration Obama[52] ». Frederick Kempe, le président de l’Atlantic Council, explique de manière plus prosaïque : « Il n’existe probablement aucune relation bilatérale dans le monde qui rivalise avec celle des États-Unis et du Pakistan en termes de mélange explosif entre importance stratégique et instabilité périlleuse[53]. » Les objectifs partagés par les deux pays ne s’équilibrent pas toujours facilement avec ceux qui les opposent. S’ils combattent tous deux le terrorisme, ils conçoivent cette lutte en termes différents. Les États-Unis cherchent à sortir d’un Afghanistan stabilisé. Le Pakistan veut sécuriser son propre territoire et protéger ses intérêts dans le cadre de relations tendues avec l’Inde. Mais les stratégies d’Islamabad sont minées par une insuffisante transition démocratique et une économie chancelante. Washington souhaiterait voir un Pakistan stable, démocratique et prospère, travaillant activement à contrer toute forme de terrorisme. Obama tente d’y parvenir mais la tâche est de taille et susceptible d’échouer. Seule peut-être une métaphore permettrait de résumer les relations entre ces deux alliés obligés. Le professeur Rifaat Hussain de la Quaid-i-Azam University à Islamabad (qui a été précédemment en poste à l’ambassade du Pakistan à Washington) la formule ainsi : « Beaucoup de gens ici pensent que le Pakistan et les États-Unis ne peuvent pas être des partenaires stratégiques, qu’il s’agit seulement d’un mariage de raison. Ils partagent le même lit mais ont des rêves différents[54] . »
[1]National Security Strategy of the United States of America 2010. En ligne : http://www. whitehouse.gov/sites/default/files/rss_viewer/national_security_strategy.pdf.
[2]« A new strategy for Afghanistan and Pakistan », The White House Blog, 27 mars 2009. En ligne : http://www.whitehouse.gov/blog/09/03/27/a-new-strategy-for-afghanistan-and-pakistan/.
[3]Voir par exemple Mary Ann WEAVER, Pakistan: Deep inside the World’s Most Frightening State, Farrar, Straus et Giroux, New York, nouvelle édition 2010. Voir la préface de cette récente édition en édition de poche.
[4]Voir la transcription du Point de presse du 7 décembre 2008, sur : http://www.msnbc.msn.
com/id/28097635.
[5]Pour un résumé détaillé des inquiétudes de Washington, voir Paul K. KERR et Mary Beth NIKITIN, Pakistans Nuclear Weapons: Proliferation and Security Issues, Congressional Research Service, 23 février 2010. Disponible sur : http://www.fas.org/sgp/crs/nuke/RL34248.pdf
[6]« Remarks on nuclear non-proliferation at the University of Louisville as part of the McConnell Center’s Spring lecture series », 9 avril 2010. Disponible sur : U.S. Department of State, Diplomacy in Action, http://www.state.gov/secretary/rm/2010/04/139958.htm.
[7]« US studying China-Pakistan nuclear deal », Agence France-Presse, 11 mai 2010.
[8]OBAMA mentionne certains de ces points dans son autobiographie, Dreams fromMy Father. Les récits de la visite d’Obama au Pakistan sont disponibles sur de nombreux sites Internet. On en trouve un bon résumé sur : Laurence JARVIK, http://laurencejarvikonline.blogspot. com/2010/05/president-obamas-pakistan-connections.html ; ses réflexions sur son lien affectif personnel sont citées dans Alan FISHER, « Obama’s Pakistan dilemma », Aljazeera.net, 19 janvier 2010, disponible sur : http://english.aljazeera.net/focus/2010/01/2010118114743559218. html.
[9]Les résultats de l’enquête Pew Global Attitudes Project sont disponibles sur : http://pewglobal. org/2010/06/17/obama-more-popular-abroad-than-at-home/. Le sondage complet, 176 pages, est accessible sur ce site : « Muslims, Americans down on Obama’s foreign policy », 17 juin 2010. Le résumé est dans « Muslims, Americans down on Obama’s foreign policy », 17 juin 2010, Foreign Policy, sur : http://thecable.foreignpolicy.com/posts/2010/06/17/muslims_americans_ down_on_obama_s_foreign_policy. Les anecdotes se trouvent dans FISHER, op. cit.
[10]Voir par exemple la critique substantielle de Charles KRAUTHAMMER, « Terror and candor in describing the Islamist ideology behind it », The Washington Post, 2 juillet 2010. Sur http://www.washingtonpost.com/wp-dyn/content/article/2010/07/01/AR2010070104542. html.
[11]Une étude réalisée en 2008 par la Rand Corporation, un think tank de renom, suggérait ce changement de terminologie dans le cadre de ses recommandations aux futurs responsables politiques. Seth G. JONES and Martin C. LIBICKI, How Terrorist Groups End: Lessons for Countering al Qaida, Rand, 2008. Disponible en ligne sur : http://www.rand.org/pubs/ monographs/2008/RAND_MG741-1.pdf.
[12]« Presidential hopefuls attack Obama’s remarks about Pakistan », sur CNN.com politics, 8 août 2007. Disponible sur : http://edition.cnn.com/2007/POLITICS/08/07/obama. pakistan/index.html.
[13]« Obama: U.S. prepared to pursue targets in Pakistan », CNN politics.com, 29 mars 2009. Disponible en ligne : http://edition.cnn.com/2009/POLITICS/03/29/obama.pakistan/index. html.
[14]Greg MILLER, « Options studied for a possible Pakistan strike », The Washington Post, 29 mai 2010. Disponible sur : http://www.washingtonpost.com/wp-dyn/content/ article/2010/05/28/AR2010052804854.html?hpid=topnews&sid=ST2010052801870.
[15]Michael O’HANLON et Ian S. LIVINGSTON, « Pakistani index: Tracking variables of reconstruction & security in Pakistan », Brookings Institution, 10 février 2010, http://www. brookings.edu/foreign-policy/pakistan-index.aspx.
[16]Mark MAZZETTI, « U.S. is said to expand secret actions in Mideast », The New York Times, 24 mai 2010.
[17]KarenDEYOUNG et Greg JAFFE, « U.S. « secret war » expands globally as special operations forces take larger role », The Washington Post, 4 juin 2010. Sur : http://www.washingtonpost.com/ wp-dyn/content/article/2010/06/03/AR2010060304965.html?hpid%3Dtopnews&sub=AR.
[18]Voir par exemple Stephen E. AMBROSE et Douglas G. BRINKLEY, Rise to Globalism: American Foreign Policy since 1938, Penguin Books, 8e édition révisée, 1997 ; ou Stephen E. AMBROSE, Eisenhower: Soldier andPresident, Simon & Schuster, 1990.
[19]KarenDEYOUNG et Greg JAFFE, op. cit.
[20]Fareed ZAKARIA, « A victory for Obama: From an unlikely quarter – Pakistan », Newsweek, 12 mars 2010. En ligne sur : http://www.newsweek.com/2010/03/11/a-victory-for-obama.html . Voir aussi Spencer ACKERMAN, « The Obama Doctrine, Revisited », The American Prospect, 7 avril 2010, en ligne sur : http://www.prospect.org/cs/articles?article=the_ obama_doctrine_revisited.
En réponse aux thèses de Zakaria, voir Peter FEAVER, « What Fareed Zakaria gets right -and wrong – on Obama’s Pakistan policy », Shadow Government, en ligne sur : Foreign Policy, 15 mars 2010. http://shadow.foreignpolicy.com/posts/2010/03/15/what_areed_zakaria_gets_ right-and%20wrong_on_obama_s_pakistan_policy.
Feaver fait remarquer que presque tout ce que Zakaria attribue à Obama faisait déjà partie de la politique menée par George W. Bush.
[21]Sur les difficultés à mettre en œuvre ses missions, voir le résumé très utile de Shuja NAWA, Pakistan in the Danger Zone: A Tenuous U.S. — Pakistan Relationship, The Atlantic Council, juin 2010, p. 11-13. En ligne sur : http://www.acus.org/publication/pakistan-danger-zone.
[22]Cité in Laura ROZEN, « Obama’s Pakistan Problem », Politico, 8 octobre 2009. Disponible sur : http://www.politico.com/blogs/laurarozen/1009/Obamas_Pakistan_problem.html.
[23]Cité in WEAVER, op. cit., p. 265.
[24]Cité in Michael HIRSH, « Obama’s Pakistan Successes », Newsweek Web Exclusive, 23 février 2010. Disponible sur : http://www.newsweek.com/id/234041.
[25]Shirin R. TAHIR-KHELI, « Obama’s Pakistan Policy », The Daily Beast, 23 octobre 2009, en ligne.
[26]On trouvera la citation du général Jones et les résultats du sondage dans HIRSH, op. cit.
[27]Ibid.
[28]Lisa CURTIS, « Taliban reconciliation: Obama Administration must be clear and firm », Backgrounder, The Heritage Foundation, 11 mars 2010, n° 2384, p. 4, en ligne sur : www. heritage.org/Research/Asiaandthe Pacific/bg2384.cfm. Pour un autre point de vue sceptique, voir Miles AMOORE, « Pakistan puppet masters guide the Taliban killers », The Sunday Times, 13 juin 2010. En ligne sur : http://www.timesonline.co.uk/tol/news/world/afghanistan/ article7149089.ece. Ainsi que Matthew ROSENBURG, « Arrests Force Taliban Flight », The Wall Street Journal, 11 mars 2010. http://online.wsj.com/article/SB1000142405274870370 1004575113741711001292.htm. Pour une liste précise de ceux qui ont été tués et arrêtés, voir Katherine TIEDEMANN, « A guide to recent militant arrests and deaths in Afghanistan and Pakistan », Foreign Policy, 8 mars 2010. En ligne sur : http://afpak.foreignpolicy.com/ posts/2010/03/08/a_guide_to_recent_militant_arrests_and_deaths_in_afghanistan_and_ pakistan.
[29]Jane PERLEZ, Eric SCHMITT et Carlotta GALL, « Pakistan is said to pursue a foothold in Afghanistan », The New York Times, 24 juin 2010. En ligne sur : http://www.nytimes. com/2010/06/25/world/asia/25islamabad.html.
[30]Matt WALDMANN, « The sun in the sky: The relationship between Pakistan’s ISI and Afghan insurgents », Crisis states Discussion Papers, Crisis States Research Centre, juin 2010. En ligne sur : http://www.crisisstates.com/download/dp/DP%2018.pdf.
[31]« ISI accused of funding, training Afghan Taliban », Dawn, 14 juin 2010, p. 1.
[32]« Report termed malicious », Dawn, 14 juin 2010, p. 1.
[33]Rajan MENON, « Pakistan’s dual policy on Taliban », The Los Angeles Times, 30 juin 2010. En ligne sur : http://articles.latimes.com/2010/jun/30/opinion/la-oe-menon-afpak-20100630. Rajan Menon est professeur de relations internationales à Lehigh University et de science politique au City College of New York/City University of New York.
[34]Michael HIRSH, « Obama’s Pakistan Successes », Newsweek Web Exclusive, 23 février 2010. Disponible sur : http://www.newsweek.com/id/234041.
[35]PERLEZ, SCHMITT et GALL, op. cit.
[36]Cité in Lisa CURTIS, op. cit.
[37]Scott SHANE, « Pakistan’s Plan on Afghan Peace Leaves U.S. Wary » The New York Times, 27 juin 2010. En ligne sur : http://www.nytimes.com/2010/06/28/world/asia/28taliban. html?ref=scott_shane.
[38]WEAVER, op. cit., p. 248.
[39]Voir le tableau 1, « Overt U.S. aid and military reimbursements to Pakistan, FY2002-FY2008 », in K. Alan KRONSTADT, Pakistan-U.S. Relations, Congressional Research Service: CRS Report for Congress, 6 février 2009, p. 94. Voir dans le même rapport le chapitre « U.S. aid and congressional action », p. 84-94. Disponible en ligne sur : http://www.fas.org/sgp/crs/ row/RL33498.pdf.
[40]Greg MILLER, op. cit.
[41]Afghanistan and Pakistan Regional Stabilization Strategy, Office of the Special Representative for Afghanistan and Pakistan, United States Department of State, mise à jour février 2010, p. 29. www.state.gov/documents/organization/135728.pdf.
[42]« Musharraf admits US aid diverted » BBC News, 14 septembre 2009. http://news.bbc. co.uk/2/hi/south_asia/8254360.stm.
[43]Afghanistan and Pakistan Regional stabilization strategy, op. cit.
[44]La transcription du discours est disponible sur de nombreux sites Internet. Voir par exemple le site de la Maison-Blanche : « Remarks by the president in address to the nation on the way forward in Afghanistan and Pakistan », http://www.whitehouse.gov/the-press-office/ remarks-president-address-nation-way-forward-afghanistan-and-pakistan.
[45]Sur la diaspora pakistanaise aux États-Unis, voir Adil NAJAM, Portrait of a Giving Community: Philanthropy by the Pakistani-American Diaspora, Harvard University Press, 2006.
[46]Voir Tahir ANDRABI, Jishnu DAS, Asim Ijaz KHWAJA et Tristan ZAJONC, « Religious school enrolment in Pakistan: A look at the data » Comparative Education Review, août 2006, vol. 50, n° 3 ; K. Alan KRONSTADT, « Education Reform in Pakistan », CRS Report for Congress, décembre 2004, en ligne sur : http://www.fas.org/man/crs/RS22009. pdf ; et Riaz Ahmed SHAIKH, « Developing Extremist-Madrasah Education in Pakistan », in D. M NAULT (éd.), Development in Asia Interdisciplinary, Post-neoliberal, and Transnational Perspectives, Brown Walker Press, 2008.
[47]Shiri R. TAHIR-KHELI, op. cit.
[48]Lettre Kerry-Lugar disponible sur :
http://www.boston.com/news/politics/politicalintelligence/03-05-10%20JK%20RL%20 to%20Lew%20re%20Pakistan%20FY%2010.pdf.
[49]Les différents arguments et le débat sur ce point sont bien résumés dans : Jeremy PAGE et Zaid HUSSAIN, « Barack Obama’s Pakistan policy in disarray after opposition to $7.5bn aid conditions » The Times, 14 octobre 2009. En ligne sur : http://www.timesonline.co.uk/tol/ news/world/asia/article6873616.ece. Voir aussi l’excellente discussion de ce contentieux dans
NAWA, op. cit.
[50]« US should be more even-handed in South Asia », Dawn, 15 juin 2010, en ligne sur : http://www.dawn.com/wps/wcm/connect/dawn-content-library/dawn/the-newspaper/local/ us-should-be-more-evenhanded-in-south-asia-560.
On trouvera le débat dans les quotidiens pakistanais des 11, 12, et 13 juin 2010. Par exemple, « Kerry’s warning », The News, 13 juin 2010, p. 7.
[51]Sebastian ABBOTT, « US envoy cautions Pakistan over Iran gas deal », AAssociated Press, 20 juin 2010. Voir aussi : « US cautions Pakistan over pipeline deal with Iran », Agence France-Presse.
[52]Jayshree BAJORA, « Obama’s Pakistan Challenge », Analysis Brief, Council on Foreign Relations, 2 janvier 2009. En ligne sur : http://www.cfr.org/publication/18114/obamas_ pakistan_challenge.html.
[53]Frederick KEMPE, « Foreward », in Pakistan in the Danger Zone, op. cit.
[54]Cité dans Pamela CONSTABLE, « Pakistani Government, Military Wary of U.S. Overtures », The Washington Post, 25 janvier 2010, http://www.washingtonpost.com/wpyn/ content/article/2010/01/24/AR2010012402890.html.