Ali RASTBEEN , Président de l’Académie de Géopolitique de Paris :
En tant qu’important acteur international, la France a été proche des événements qui se sont déroulés au Moyen-Orient et n’a pas pu échapper aux conséquences du printemps arabe, du terrorisme et de la crise des refugiés. Par conséquent, à l’heure actuelle la France est extrêmement sollicitée par le Moyen-Orient.
À l’époque des colonialismes européens, l’empire britannique à la différence de la France, dirigeait ses propres colonies au Moyen-Orient par le biais de rois, de cheikhs et de princes locaux, tandis que la France régissait les siens directement de Paris. La stratégie britannique a permis que ses dirigeants locaux placés jadis restent toujours au pouvoir alors que ceux placés par la France ont disparu.
La France a été occupée à gérer ses colonies en Afrique du Nord au détriment de celles du Moyen-Orient.
L’attrait économique actuel du Moyen-Orient conduit la France à améliorer sa position dans cette région. Son influence diplomatique dans le monde arabe a dépassé celle de la Grande-Bretagne et, dans certains cas, a rivalisé avec celle des Etats-Unis.Si les récentes révolutions du printemps arabe, ont écarté la France, alors que la présence des Etats-Unis en tant que successeur de la Grande-Bretagne a été beaucoup plus notable.
Le refus de Paris de participer aux côtés de Washington à l’occupation de l’Irak en 2003, a préservé sa diplomatie moyen-orientale, contrairement à la Grande-Bretagne et aux Etats-Unis. Ceci avait crédibilisé l’influence française au Moyen-Orient. Cependant, la politique étrangère française a toujours été perturbée par ses relations privilégiées avec Israël. La France, a toujours entretenu des relations particulières avec Israël et a été son principal fournisseur d’armes. Israël doit le développement de ses armes nucléaires à la technologie française, alors que la France n’a pas traité de la même façon les pays arabes.
Les pétromonarchies du Golfe persique, à la tête desquelles se trouve l’Arabie saoudite passent actuellement des commandes commerciales de plus en plus importantes à la France. De même des contrats de ventes de Rafales conclus avec l’Egypte sur le compte de l’Arabie Saoudite. Les autorités saoudiennes et françaises ont effectuée des études préliminaires à la construction de deux centrales nucléaires.
La présence du président de la République française à la réunion extraordinaire du Conseil de coopération des États arabes à Riad, a conduit Paris à soutenir l’agression de l’Arabie saoudite contre le Yémen, et a transformé l’Arabie saoudite en associé privilégié de la France.
L’Organisation des Nations Unies a inscrit le nom de l’Arabie saoudite sur la liste noire des Etats qui violent les droits des enfants au Yémen. La coalition saoudienne mène, selon une stratégie délibérée, la moitié de ses frappes contre les écoles et les hôpitaux, là où les civils sont concentrés.
Le secrétaire général de l’ONU a affirmé que la décision de retirer le nom de la coalition saoudienne de cette liste noire a été prise à cause de la menace de certains pays arabes de couper leurs aides aux programmes de cette instance. Ban Kimoon a déclaré : « qu’il est inadmissible que certains pays membres fassent des pressions pour faire retirer cette coalition de la liste noire ».
La consolidation de l’alliance de l’Arabie Saoudite et des États arabes du Golfe Persique avec la France est la conséquence d’une grande déception ressentie contre Washington, dans des questions relatives aux droits de l’Homme : au réveil des arabes et à l’accord nucléaire avec l’Iran.
La France consolide volontairement ses relations avec ces Etats, dont certains soutiennent le terrorisme en fournissant des munitions et des armes, sans tenir compte des principes et des valeurs de la République en ce qui concerne les droits de l’Homme qui représentent la pierre angulaire de l’identité française.
Il est à noter que la France est signataire de l’accord sur la non-utilisation des bombes à fragmentation, mais reste silencieuse face à l’accusation déliée par les organisations des droits de l’Homme contre l’Arabie saoudite et ses alliés d’utiliser des bombes à fragmentation au Yémen. En même temps, l’amélioration des relations politiques et économiques entre la France et l’Arabie saoudite signifiait en quelque sorte, une revanche à l’égard des Etats-Unis , qui ont refusé d’accompagner la France dans la guerre contre la Syrie.
L’ancienne secrétaire d’État et candidate démocrate à la Maison Blanche, après la fusillade meurtrière d’Orlando, a déclaré, que « Le Qatar, le Koweït et l’Arabie saoudite ne doivent pas permettre à leurs citoyens de financer les organisations terroristes ».
Suite aux attaques terroristes du 13 novembre à Paris, la politique française a connu une inflexion, qui s’est traduite par les attaques aériennes contre les bases militaire de l’organisation islamique, l’installation du porte-avions Charles de Gaulle dans la région et enfin la coopération avec les militaires russes.
Ces opérations ont impliqué la France qui restait jusque-là à l’abri des bouleversements au Moyen-Orient. Elle a fini par déclarer la guerre aux organisations terroristes et à réclamer la constitution d’une alliance générale entre Washington, Moscou et Paris.
Le renforcement de la puissance de l’Iran au Moyen-Orient préoccupe la France qui a opté pour des politiques très spécifiques en vue de préserver ses intérêts en s’opposant fermement au programme nucléaire iranien. Le soutien de l’Iran en matière nucléaire signifiait la perte de marché pour la France en matière d’armements. En effet, les pétromonarchies arabes sont des opposants farouches aux politiques iraniennes. Par ailleurs, l’échec occidental quant à une rapide victoire en Syrie et la conclusion des accords iraniens ont poussé la France à ne pas sous-estimer la puissance iranienne.
La France possède un poids économique, diplomatique, politique et militaire. Elle est l’un des cinq membres permanents du Conseil de sécurité. C’est une puissance nucléaire qui appartient aux cercles restreints où se prennent les décisions qui influent sur le monde : le Conseil de sécurité, le G8, le G20, les cinq membres permanents du Conseil de sécurité, l’Union européenne, l’OTAN, l’OCDE, le Conseil des gouverneurs de l’AIEA, elle dispose d’un réseau diplomatique qui reste le deuxième au monde.
Aujourd’hui la France fait face à des défis considérables, tel que l’augmentation du chômage, les bouleversements liés aux réformes de la loi travail , la crise des refugiés, et enfin surtout le terrorisme. Aujourd’hui notre monde fait face à un terrorisme sournois qui se sert de la foi et de la religion afin de commettre la violence et l’horreur. Si la France est une cible des terroristes, c’est en conséquence de son engagement dans une véritable guerre contre le terrorisme.
C’est pourquoi il est du devoir des institutions parlementaires nationales et européennes d’établir une commission d’enquête pour identifier les pays qui forment, financent, arment, soutiennent et achètent le pétrole vendu par les terroristes, et de mettre en place un embargo sur la vente d’armes et sur l’achat de pétrole, aux Etats potentiellement concernés ou qui peuvent l’être.
Je demande solennellement que cette commission d’enquête soit mise en place de toute urgence eu regard à l’importance de la menace terroriste. C’est uniquement grâce à une action collective, qu’il sera possible de mettre fin à ce danger qui menace l’humanité toute entière.Notre devoir est de combattre ce phénomène expansionniste qui se nourrit de la haine. Pour ce faire, la communauté internationale doit veiller à rétablir les piliers de respect mutuel entre les communautés, et reconstruire les pays déchirés en traitant les crises identitaires, et en installant des valeurs universelles, celles des droits de l’Homme.