Par Maître Elie HATEM
Avocat au Barreau de Paris et auprès de la Cour Pénale Internationale
Officier dans l’Ordre du Cèdre, Chevalier dans l’Ordre des Palmes Académiques
Docteur en Droit
Résumé :
La société internationale est dans une situation chaotique en raison des violations continues du droit international public dont l’efficacité et l’existence sont remis en cause. Nous assistons à un rapport de force où le plus fort impose en toute impunité sa loi au plus faible, en profitant de prérogatives et de privilèges politiques, économiques et financiers dont il dispose.
Les sanctions unilatérales illustrent ce contexte, d’autant que ces contre – mesures, donc ces actes de guerre, prises d’une manière illicite, affectent non seulement le ou les pays sanctionnés à titre principal, mais aussi des Etats et des acteurs tiers, victimes d’une manière « secondaire » des effets extra-territoriaux de ces actes.
Ces mesures portent atteinte aux principes et aux normes impératives du droit international public (le jus cogens) : le principe de la souveraineté des Etats, celui de la non – ingérence, de la liberté des échanges commerciaux comprenant celle de la navigation internationale, la remise en cause de la clause de la nation la plus favorisée, la discrimination commerciale ce qui est contraire aux règles du GATT.
Il convient de remédier à cette situation en prenant des mesures adéquates, y compris des représailles qui, même si par nature sont illicites, deviennent licites dans ce cas. Autrement dit : combattre l’illicite par l’illicite, dans ce rapport de force international qui démontre la dérive des institutions internationales qu’il convient de réformer, comme l’avait proposé l’ancien Secrétaire Général des Nations Unies, Boutros Boutros-Ghali, afin de les sauver et de soustraire le droit à l’arbitraire politique.
Summary :
The International society is in a chaotic situation due to ongoing violations of International Public Law whose effectiveness and existence are called into question. We are assisting to a balance of power where the strongest imposes its law on the weakest, taking advantage of its political, economic and financial privileges.
This context is illustrated by the unilateral sanctions which are countermeasures, thus acts of war, taken in an unlawfull way. These measures affect not only the country or the countries sanctioned, but also the third States, victims of the side effects (extra-territorial effects) of these sanctions.
These measures undermine the principles and imperative standards of International Public Law (jus cogens) : the principle of sovereignty of States, the principle of non – interference, the one of freedom of trade including the free navigation, the most favored-nation clause, the non – dicrimination in trade sector according to GATT standards.
This situation needs to be remedied by taking adequate measures, including reprisals, even if these last are illicit by nature. Indeed, they become licit if they are taken againt illicit countermeasures. In other words, we fight unlawful acts by unlawful acts in this struggle that demonstrates the drift of the international institutions that must be reformed as proposed by former Secretary General of the United Nations, Late Boutros Boutros-Ghali, in order to save them and to remove them from political arbitrariness.
Étymologiquement, la sanction est « une approbation à quelque chose, qui consacre son exactitude, sa validité et son caractère durable »[1]. C’est ainsi que, dans certaines monarchies constitutionnelles, la sanction est l’acte par lequel le monarque ou son représentant approuvent une législation adoptée par le parlement. C’est un processus qui entérine et rend exécutoire une disposition légale. Cette dernière sera confirmée par la « sanction » qui apparaît comme la conséquence d’un comportement.
Ce sens positif de « la sanction » explique son usage dans certains domaines juridiques : sanctionner un décret, une loi ou un privilège. Ou encore dans d’autres secteurs qui renvoient à l’idée d’un privilège : on dit qu’un diplôme sanctionne des études scolaires ou universitaires.
Mais il existe une autre source étymologique de ce mot qui lui rend sa signification la plus courante, notamment en droit pénal. Il s’agit de sancio ou sancire, du latin, qui renvoient à l’idée de consacrer et rendre « inviolable » donc irrévocable une décision par un acte religieux[2]. Ainsi, le Code Justinien déclare « sanctum » ce qui est défendu et protégé de l’atteinte des hommes[3] : « proprie dicimus sancta, quae neque profana sunt, sed sanctione quadam confirmata : ut leges santae sunt, sanctione enim quadam subnixae. Quod enim sanctione quadam subnixum est, id sanctum est, etsi deo non sit consecratum »[4].
Par conséquent, selon Emile Benveniste[5], le « sanctus est l’état d’une interdiction dont les hommes sont responsables, d’une prescription appuyée par une loi ». Ainsi donc, la « sanction » s’accompagne d’une notion de vertu. Et, puisqu’elle rentre dans le cadre disciplinaire, elle sert à l’organisation. D’où sa finalité à la fois de mettre un terme à un acte préjudiciable à la société en vue de protéger les personnes et les biens, et de modifier un comportement qui a provoqué et qui risque de continuer à provoquer cet acte. C’est en se donnant comme objectif la préservation de l’ordre social et moral, la réparation du désordre mais aussi de se prémunir et d’empêcher la réitération de l’acte qui a provoqué cette situation que la sanction a pris son caractère répressif : humilier et provoquer la peur chez l’auteur de l’acte qui a provoqué un désordre social.
La sanction deviendra donc une peine infligée à ceux qui ont transgressé une norme de quelque nature qu’elle soit : un comportement fâcheux d’un enfant, enfreignant les règles disciplinaires et de bonne conduite, peut être sanctionné par la privation d’une sortie ou d’un dessert, un adulte qui a commis un acte portant atteinte à l’ordre social encourt un châtiment, etc… Cette mesure répressive doit être prise par une autorité supérieure, reconnue et acceptée comme tel avec un effet dissuasif mais aussi de neutralisation, d’incapacitation et de prévention de nouvelles transgressions.
C’est cette deuxième source étymologique qui a donné le caractère répressif à la « sanction » telle qu’elle a été progressivement adoptée en droit pénal. Sanctionner est devenu le fait de punir[6], en démontrant à une personne qu’elle a transgressé une règle et qu’elle a commis un acte répréhensible. En sanctionnant cette personne, on donne satisfaction à l’opinion publique -la société- car, en réalité, il est plus facile de sanctionner une personne que de remédier à une situation.
Mais pour que la sanction puisse prendre un sens, il faut que les membres de la société comprennent et identifient surtout la loi, qu’ils la reconnaissent et l’acceptent quelque soit sa nature : qu’elle soit naturelle[7] ou l’expression de la volonté populaire.
En accord avec la loi[8], la sanction doit être un moyen et non pas un objectif. Elle est ainsi soutenue par la loi qui structure la vie sociale et qui définit les actes répréhensibles. Par conséquent, la sanction ne peut être prononcée qu’après la reconnaissance de la culpabilité qui nécessite l’existence d’un fait interdit par la loi que l’on peut imputer à son auteur lorsqu’il a le discernement nécessaire pour savoir qu’il a transgressé une norme et causé un préjudice aussi bien à la société qu’à la victime directe de son acte.
L’ensemble de ces considérations relatives à la définition et la délimitation de la notion de sanction au droit pénal ont été transposés en droit international public. La définition que donne Hans Kelsen de la sanction (ou des sanctions en droit international public) en est la meilleure illustration : « la sanction est une réaction à l’illicite. C’est la conséquence principale du comportement illicite »[9].
En effet, le développement du droit international public, depuis la Société des Nations mais surtout depuis la création de l’Organisation des Nations Unies dont la Charte[10] a permis le développement d’un ordre juridique international avec des normes et des principes obligatoires et impératifs, notamment le jus cogens[11], a obligé, du moins théoriquement, les Etats et l’ensemble des acteurs de la société internationale à s’y conformer. Ainsi donc, le caractère obligatoire des règles de droit international public se pose dans les mêmes termes que ceux relatifs au caractère obligatoire du droit en général. La règle de droit international doit donc être respectée et rendue obligatoire, surtout s’il s’agit d’une règle impérative[12].
Comme il a été indiqué dans les développements précédents, en droit interne, la règle[13] est assortie d’une sanction qui a un caractère punitif, prononcée par les autorités judiciaires qui statuent sur les cas et évaluent le degré de la peine en fonction de l’infraction ou du crime commis. En droit international public, l’édiction de la sanction est plus compliquée en raison du caractère obligatoire controversé de la règle de droit. Cela est dû à l’auto-interprétation des règles qui a une importance déterminante à l’égard des normes juridiques qui règlent les aspects les plus délicats des rapports internationaux, notamment les intérêts politiques, économiques et militaires qui sont considérés comme vitaux pour les Etats[14]. A cela s’ajoute la difficulté de l’exécution de la règle puisque, contrairement au droit interne, il n’existe pas de force contraignante dans l’ordre international capable d’exercer les voies d’exécution.
Cette situation inégalitaire résultant des rapports de force et profitant du manque de structures organisées à l’échelon mondial, autrement dit d’un pouvoir supra-national, conduit les Etats et les groupes politiques les plus puissants à imposer des coercitions à caractère politique ou économique, sans passer par un processus institutionnalisé international de prise de sanctions[15], notamment à travers l’appareil onusien appelé à exercer ce rôle d’une manière objective et équitable. Cela porte atteinte à l’efficacité et à l’effectivité du droit international public.
C’est ainsi que les sanctions extra-territoriales prises par certains Etats à l’encontre d’autres, en fonction de leurs propres intérêts politiques et/ou économiques ou en fonction des valeurs inhérentes à leurs sociétés en sont l’illustration. Il convient donc d’en élucider l’étendue et les limites (I) afin de tenter de pallier cette situation, en cherchant un moyen de réduire le chaos et l’insécurité juridique qu’elles provoquent sur la scène internationale (II).
I- L’ETENDUE ET LES LIMITES DES SANCTIONS EXTRA-TERRITORIALES :
En vertu du principe de la souveraineté, il est parfaitement loyal qu’un Etat puisse prendre des mesures sanctionnant, d’une part, sur son territoire, tout acte portant atteinte à son ordre public interne voire à l’ordre public international[16] et, d’autre part, les actes commis par ses nationaux à l’extérieur de son territoire, pour ces mêmes motifs, auxquels s’ajoutent des impératifs de sauvegarde de ses propres intérêts nationaux.
Néanmoins, si ces mesures législatives touchent des étrangers dont le domicile ou le siège social (pour les personnes morales) se trouve à l’extérieur du territoire du pays qui édicte ces normes, ces dernières porteront atteinte à l’ordre public international. Elles deviennent des mesures illicites donc condamnables et doivent conduire la société internationale, à travers ses organes légitimes, à prendre des sanctions à l’encontre de l’Etat ou des Etats qui les ont adoptées[17].
Il convient donc d’examiner la nature et l’étendue de ces mesures (A) afin de vérifier dans quelle mesures elles portent atteinte à l’ordre public international (B).
A- L’étendue des sanctions à effet extra-territorial :
L’Etat est l’acteur principal des relations internationales[18] et donc l’élément fondateur du droit international public qui est, en effet, le produit de la volonté des Etats. Ces derniers se définissent comme étant des collectivités organisées et indépendantes, constituées par des groupes humains dotés d’une structure, quelque soit leur nombre ou leur homogénéité. Autrement dit, ces groupes sont soumis à un pouvoir politique et des institutions appelés « appareil gouvernemental ». Cet appareil définit à lui seul l’Etat et se confond d’ailleurs avec lui. Par conséquent, il devra exercer un pouvoir effectif[19] sur la population qui doit l’accepter et lui obéir, en toute indépendance.
Elément factuel, l’indépendance se traduit juridiquement par le concept de la « souveraineté » qui est un attribut reconnu par le droit international public à toute personne morale ayant la qualité d’Etat ; ce dernier ne devant pas être soumis à une autorité supérieure ou étrangère. La souveraineté permet aux Etats de sauvegarder leur liberté qui est synonyme d’indépendance. Cela a été consacré par la Charte des Nations Unies dans son article 2[20].
En vertu du principe de la souveraineté, chaque Etat est libre d’adopter ses propres normes qui correspondent aux besoins et aux valeurs[21] de sa collectivité et, par conséquent, édicter des sanctions à l’encontre de toute personne qui les transgresse.
Ces normes sont applicables à toute personne qui se trouve sur son territoire, quelque soit sa nationalité, même si, en pratique, cela conduit à des absurdités : des jeunes Français de vingt ans qui consomment une boisson alcoolique sur le territoire américain pour célébrer une fête peuvent se retrouver en garde à vue et éventuellement condamnés et emprisonnés car il est interdit aux jeunes de moins de 21 ans de consommer de l’alcool dans ce pays. Il en sera de même si ces derniers se trouvent dans cette situation dans des pays qui interdisent la consommation des boissons alcooliques d’une manière absolue (Arabie saoudite, Iran, Afghanistan, etc..) ; un conducteur français qui heurte un animal sacré dans un pays étranger qui sacralise certains animaux risque des sanctions allant jusqu’à l’emprisonnement ; un étranger qui ignore l’interdiction de fumer dans les lieux publics peut se voir infliger une amende en France s’il enfreigne, même sans le savoir, cette interdiction, etc.
Les normes nationales peuvent, par ailleurs, avoir aussi une application extra-territoriale, sans porter atteinte au principe de la souveraineté, en fonction de facteurs de rattachements relatifs à la nationalité des personnes qui commettent des actes sanctionnés par leur loi nationale ou celle des victimes d’actes délictuels ou criminels. C’est ainsi que le droit pénal français sanctionne toute personne de nationalité française si elle commet un délit ou un crime à l’étranger, répréhensible par la loi française. Cette personne peut être jugée dans le pays où elle a commis le délit ou le crime, selon les lois applicables aux faits commis. Mais elle peut tout à fait être poursuivie et jugée par les tribunaux du pays dont elle détient la nationalité, selon les propres lois de cet Etat (en l’occurrence la France), surtout si elle ne l’a pas été dans le pays où elle a commis l’acte répréhensible[22]. Ou encore, la loi pénale française permet la poursuite d’un étranger qui a commis un acte répréhensible dont la victime est de nationalité française.
Par ailleurs, la compétence territoriale permet à certains Etats de sanctionner des faits survenus à l’étranger s’ils ont un effet sur leur territoire national, ce qui est le cas pour certaines lois pénales adoptées aux Etats – Unis d’Amérique ou au Canada.
De même, compte tenu de l’internationalisation des phénomènes et de l’accumulation des réglementations dans les relations économiques, le droit international privé permet à certaines normes nationales d’avoir une application extra-territoriale, sans affecter la souveraineté de l’Etat qui les « importe », en fonction de la répartition des compétences entre les Etats. Il s’agit, dans ce cas, d’une mise en œuvre extra-territoriale d’une norme territoriale par les juridictions : un juge d’un tribunal d’un Etat (A) peut être amené à appliquer la loi d’un Etat (B) à une situation ou à un acte survenu sur le territoire de ce dernier (l’Etat B). Ou encore, il peut y avoir une mise en œuvre extra-territoriale d’une norme extra-territoriale lorsqu’un tribunal étranger d’un Etat (A) applique une norme d’un Etat (B) à des faits ou à une situation survenue sur le territoire d’un Etat (C), en se fondant sur la nationalité des parties (ressortissants de l’Etat B). De même, un Etat peut procéder à une application extra-territoriale de son droit (en matière de droit international privé) en appliquant ses normes à des faits situés en dehors de son territoire. Cette situation est identique à celle applicable en droit pénal[23].
Ainsi donc, les éléments d’extra-territorialité peuvent être décelés dans trois situations : celle de la mise en œuvre extra-territoriale d’une norme territoriale, celle de la mise en œuvre extra-territoriale d’une norme extra-territoriale ou celle de la mise en application extraterritoriale directe d’une norme.
Quand on parle de l’application extra-territoriale des normes juridiques, on se réfère en général à toute une série de situations différentes les unes des autres ; des situations qui ont en commun le fait qu’un Etat prétend appréhender, à travers son ordre juridique, des éléments en dehors de son territoire[24]. Il convient donc de faire la distinction entre l’imputation extra-territoriale et l’application extra-territoriale des normes, d’une part, et l’édiction des normes par les appareils normatifs des Etats avec un effet extra-territorial, d’autre part. Ce dernier processus porte porte atteinte au principe de la souveraineté des Etats et génère une insécurité juridique susceptible de provoquer de graves problèmes économiques et des tensions politiques. Il s’agit de l’élaboration de lois ayant pour objectif de mettre sous sanction un Etat étranger pour des raisons politiques ou économiques, dans la mesure où ces lois s’appliquent par ricochet à des personnes qui n’ont pas un rattachement direct avec l’Etat qui a édicté ces normes. C’est le cas, par exemple, des sanctions américaines extra-territoriales qui ont été adoptées en 1996 (lois Helms- Burton), visant à sanctionner les transactions commerciales avec Cuba, la Libye et l’Iran ; ou encore des récentes sanctions américaines visant ce dernier pays après la sortie américaine du traité sur le nucléaire iranien. Ces lois s’appliquent à toutes les « personnes américaines » (US persons)[25] mais aussi à toute entité qui fait usage de la monnaie américaine (le dollar) ou qui est amenée à avoir une quelconque relation d’affaires avec les Etats Unis[26]. Elles entraînent des sanctions lourdes aux entreprises.
L’étendue de ces sanctions ne paraît pas si excessive eu égard au principe de la souveraineté interne des Etats, compte tenu du facteur de rattachement des personnes visées par ces sanctions, à l’exception de l’extension de ces sanctions dites « primaires » aux personnes étrangères, non résidentes aux Etats – Unis, qui effectuent des transactions en dollar ou qui sont sur le marché financier réglementé par des lois américaines.
Ceux sont surtout les sanctions dites « secondaires » qui portent atteinte à l’indépendance diplomatique et économique des Etats tiers, donc à la souveraineté de ces derniers. Ces sanctions s’appliquent à tous les acteurs non -américains qui opèrent en dehors du territoire américain, s’ils ne respectent pas les règles de boycott édictées par les Etats – Unis contre un Etat tiers, objet de ces sanctions, ce qui touche les entreprises, les grands groupes, les PME ainsi que les établissements financiers[27] qui ne sont pas établis sur le territoire américain et qui n’ont pas la nationalité de ce pays. Ces entités se voient obligées, par le truchement de cette législation, d’abandonner des marchés, d’interrompre d’autres, d’engager des dépenses colossales[28] en vue de développer des services de conformité afin de déterminer le degré de rattachement avec les Etats – Unis[29]. Sinon, elles encourent des pénalités financières voire des représailles sur les actifs qu’elles détiennent ou sur les activités qu’elles mènent aux Etats – Unis à l’instar des sociétés françaises suivantes[30] : Technip[31] qui a été condamné à payer 338 millions de dollars, lors de sa négociation avec le Département de la justice (DoJ) et les autorités de bourse américains à l’issue de poursuites entamées contre lui pour fait de corruption au Nigéria, TOTAL qui a été condamnée à verser 300 millions de dollars d’amende en 2013 dans ce dossier en marge d’une autre affaire pour laquelle elle a été poursuivie pour corruption lors de la signature de deux contrats gaziers en Iran en 1997[32], ALSTOM qui avait écopé une amende de 772 millions de dollars, en 2014, pour des faits de corruption dont il a été accusé d’avoir commis en Afrique, la banque BNP Paribas qui a été condamnée à payer 8,9 milliards de dollars d’amende, en 2014, pour avoir violé des embargos visant le Soudan, Cuba et l’Iran pour le compte de ressortissants de ces pays et qui a également été condamnée, en 2018, à payer une autre amende de 90 millions de dollars pour avoir participé à une conspiration entre de grandes banques mondiales pour fausser les cours sur le marché des devises[33], le Crédit Agricole qui a été condamné à une amende de 787,3 millions de dollars pour avoir effectué des transactions en dollars entre 2003 et 2008 au nom d’entités soudanaise, iranienne, cubaine et birmane frappées alors par des sanctions unilatérales américaines[34], la Société Générale qui a été condamnée à deux amendes en 2018 pour des faits de corruption que la justice américaine lui reprocha, commis en Libye, ainsi que sur des manipulation du taux Libor[35], etc…
Ainsi donc, l’effet extra-territorial de lois nationales élaborées dans un objectif de sanctionner un Etat tiers ou des situations contraires à l’ordre public interne de l’Etat qui les édicte[36] porte atteinte à l’indépendance des Etats tiers. Ces lois traduisent la mise du droit au service d’objectifs politiques[37] et d’intérêts économiques, entraînant un rapport de force sur la scène internationale.
Selon cette logique adoptée par le législateur américain justifiant les sanctions prises à l’encontre de l’Iran, ce dernier, voire la Russie ou la Chine, qui sont en voie de construire une alliance internationale, pourraient se faire prévaloir de sanctions primaires et secondaires, prises par leurs propres systèmes législatifs, à l’encontre des Etats – Unis en invoquant un acte internationalement illicite commis par ce pays : son soutien au terrorisme de l’Etat islamique, en tenant compte des aveux du Président actuel américain, Monsieur Donald Trump, qui avait accusé, durant sa campagne électorale, l’administration de son prédécesseur, Monsieur Barack Obama, d’avoir créé et soutenu cette organisation terroriste. Il dénonça ouvertement Madame Hilary Cliton en affirmant qu’elle est « la co-fondatrice de l’organisation de l’Etat islamique »[38]. Par ailleurs, cette dernière avait, de son côté, reconnu ce fait, dans son livre « Hard Choices » (Choix difficiles), en révélant que cette organisation terroriste a été créée et soutenue par l’Administration américaine dans l’objectif de procéder à un nouveau partage de la région du Moyen-Orient et que cette initiative a été coordonnée entre Washington et la confrérie des Frères Musulmans : « nous étions d’accord avec les Frères Musulmans en Egypte pour annoncer l’Etat islamique dans le Sinaa et de le remettre entre les mains du Hamas avec une partie à Israël pour le protéger, adjoindre Halayeb et Challatine au Soudan et ouvrir les frontières libyennes du côté de Salloum » (…) « nous avons infiltré la guerre en Irak, en Libye et en Syrie et tout allait pour le mieux. Puis, tout à coup, une révolution eût lieu en Eypte et tout a changé en 72 heures»….
Ces éventuelles sanctions prises par l’Iran, la Russie et la Chine contres les Etats – Unis d’Amérique pourront avoir des effets extra-territoriaux, affectant toute entité qui est en relation économique ou financière avec ce pays sanctionné.
De même et selon cette même logique, la Chine peut, de son côté, avoir recours d’une manière unilatérale à des sanctions, en représailles à celles prises par les Etats – Unis à l’encontre de la société Huawei. Ces sanctions pourraient aussi affecter les entreprises mondiales commerçant avec l’Amérique et ayant des intérêts économiques avec la Chine. Ou encore, les Etats arabes producteurs de pétrole peuvent adopter des lois avec des effets extra-territoriaux (aussi bien primaires que secondaires) en imposant un boycott contre Israël ; ce dernier ayant commis des actes internationalement illicites et étant visé par des plaintes pour crimes de guerre et des crimes contre l’Humanité par devant la Cour Pénale Internationale. D’autres pays peuvent également adopter des sanctions unilatérales internationales avec une étendue et des effets extra-territoriaux relatifs à certaines situations qui contreviennent aux valeurs prônées par leurs sociétés internes respectives, etc.
La multiplication de ces mesures, dans un rapport de force international, conduit inéluctablement la société internationale vers le chaos et porte atteinte à l’ordre juridique international.
B- Les atteintes à l’ordre juridique international par les sanctions extra-territoriales :
Depuis la nuit des temps, les sociétés humaines se livrent à des hostilités, des combats, des conquêtes, des invasions, des razzias etc. à l’issue desquelles les vainqueurs, les plus forts, dominent les entités vaincues et exercent sur elles leur hégémonie. Dans ce rapport de force qui caractérise les guerres, tous les moyens étaient légitimes pour faire céder l’ennemi.
De l’Antiquité au Moyen-Age, ces techniques de guerre étaient similaires voire identiques. Parallèlement aux mécanismes traditionnels d’attaques, on assistait au développement de tactiques en vue d’exercer une pression sur l’adversaire pour l’obliger à capituler : état de siège, blocus, embargos, etc…
Il a fallu attendre le XVIIème siècle pour que la guerre soit proscrite et pour voir émerger progressivement les prémices d’un droit international, à l’issue de la guerre de Trente ans (1618 – 1648) qui avait causé la mort de plus de deux millions de soldats sur le continent européen. On doit essentiellement la genèse de cette matière à Hugo Grotius qui s’est fondé sur le droit naturel[39] pour en formuler les principes[40].
A la même époque, en 1648, deux traités de Paix signés à Osnabrück et Münster, connus sous le nom de Traités de Westphalie[41], ont introduit les concepts directeurs du droit international public en déclarant la guerre hors la loi[42] et en établissant le principe de la non – ingérence dans les affaires d’autrui, un corollaire à la reconnaissance de l’inviolabilité des souverainetés nationales.
Progressivement, un ordre juridique international a vu le jour avec un ensemble de règles adoptées par les Etats. Et, dans la mesure où ces derniers ont participé à la mise en place de ces normes où y ont adhéré librement, ces règles sont devenues obligatoires, en s’imposant à eux, selon l’adage pacta sunt servanda.
L’ensemble de ces règles qui régissent l’ordre public international provient donc des traités aussi bien bilatéraux que multilatéraux auxquels participent les Etats ou y adhèrent selon les modalités prévues à cet effet par ces textes[43]. Cela est consacré par les dispositions de l’article 26 de la Convention de Vienne de 1969 : « Tout traité en vigueur lie les parties et doit être exécuté par elles de bonne foi ». Parmi ces traités, figurent ceux qui régissent la liberté des échanges commerciaux internationaux protégés par l’Organisation Mondiale du Commerce (l’OMC).
Parallèlement, la « communauté internationale » est soumise à d’autres règles impératives auxquelles même les traités ne peuvent y déroger. Il s’agit des normes jus cogens.
Parmi ces principes jus cogens, figure en premier celui de la souveraineté inaliénable des Etats et ses corollaires : l’égalité souveraine des Etats ainsi que la non-ingérence dans les affaires internes des pays. Ceci est consacré par la Charte des Nations Unies[44] qui proscrit la guerre ainsi que les contre-mesures auxquelles se livraient jadis les pays.
En reconnaissant l’égalité juridique des Etats, la Charte des Nations Unies confirme la libre jouissance, par les Etats, des droits inhérents à leur pleine souveraineté, le devoir de respecter la personnalité juridique, l’indépendance et donc la souveraineté des autres Etats, en ne s’immisçant pas dans leur droit de choisir et de développer librement leurs propres systèmes politiques, juridiques, économiques, sociaux et culturels. Chaque Etat est ainsi libre et souverain de légiférer sur toute question qui s’inscrit dans son espace politique, économique et territorial, de décider de la nature de son régime, de ses institutions politiques, de sa politique étrangère, etc… Toute mesure prise avec pour objectif d’exercer une pression sur l’exercice de ces prérogatives constitue une violation du principe de la souveraineté. Cela découle aussi d’un autre principe reconnu aussi bien par la Société des Nations[45] que par la Charte des Nations Unies : celui de l’auto-détermination et de la liberté des peuples à disposer d’eux-mêmes[46].
En conséquence voire en corollaire, la non-intervention ou non-ingérence dans les affaires internes des Etats constitue un principe fondamental du droit international public, consacré par la Charte des Nations Unies[47], en vertu duquel il est reconnu à chaque Etat le droit d’exercer exclusivement ses compétences, relevant de son domaine national, sans contrainte extérieure. Selon ce principe, chaque Etat doit respecter la souveraineté interne des autres Etats.
Tels sont les principes du droit international public auxquels portent atteinte les lois prises par certains Etats en vue de sanctionner d’autres Etats avec un effet extra-territorial, affectant ainsi l’ordre juridique international[48].
Il faut voir dans ces législations[49] prises avec comme objectif de sanctionner un Etat ou de lutter contre des actes manifestement illicites ou reconnus pour tel par la plupart des Etats de la planète comme la lutte contre la corruption, l’évasion fiscale, le trafic de stupéfiants, la traite d’être humains, etc.. une entorse à la souveraineté des Etats tiers et au principe de l’égalité des Etats, dans la mesure où l’Etat qui édicte ces sanctions s’érige comme moralisateur de la société internationale, en empiétant sur les prérogatives des Nations Unies[50]à qui incombe le rôle et le devoir de contrôler les situations et, par conséquent, prendre des mesures (des sanctions[51]) pour remédier à l’illicite au niveau international.
Dans sa résolution 67/170 du 20 mars 2013, l’Assemblée générale des Nations Unies a condamné ces mesures de prise de sanctions unilatérales, en considérant dans son préambule que ces « mesures et lois coercitives unilatérales sont contraires au droit international, au droit international humanitaire, à la Charte des Nations Unies et aux normes et principes régissant les relations pacifiques entre Etats ».
Dans son paragraphe 4, cette résolution indique que l’Assemblée s’élève «fermement contre le caractère extra – territorial des mesures coercitives unilatérales qui, de surcroît, menacent la souveraineté des Etats et, à cet effet, engage tous les Etats Membres à ne pas les reconnaître, à ne pas les appliquer et à prendre des mesures d’ordre administratif ou législatif, selon le cas, pour faire échec à leur application et à leurs incidences extraterritoriales ».
Après avoir rappelé et réaffirmé les principes en vertu desquels ces mesures sont illicites[52], cette résolution condamne, dans son paragraphe 5, « le maintien en vigueur et l’exécution de mesures coercitives unilatérales par certaines puissances et dénonce ces mesures, ainsi que toutes leurs incidences extraterritoriales, comme étant des moyens d’exercer des pressions politiques ou économiques sur des pays, en particulier les pays en développement, dans le dessein de les empêcher d’exercer leur droit de choisir, en toute liberté, leurs propres systèmes politiques ou économiques et sociaux, et en raison de leurs incidences néfastes sur la réalisation de tous les droits de l’homme de groupes importants de leur population, en particulier les enfants, les femmes, les personnes âgées et les personnes handicapées ».
Enfin, cette résolution qui souligne le caractère illicite de ces mesures qui mettent en cause les principes du droit international public appelle les Etats membres « qui ont pris de telles mesures à respecter les principes du droit international, la Charte, les déclarations issues des conférences des Nations Unies et des conférences mondiales ainsi que les résolutions pertinentes, et de s’acquitter des obligations et responsabilités que leur imposent les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme auxquels ils sont parties en abrogeant ces mesures le plus tôt possible »[53].
Cela nous permet de conclure que les sanctions prises d’une manière unilatérale par des Etats à l’encontre d’autres acteurs internationaux, sans passer par le mécanisme onusien, affectant de surcroît des tiers d’une manière secondaire, violent les principes rappelés par l’Assemblée générale des Nations Unies dans sa résolution précitée. Ces mesures portent doublement atteinte à l’Etat sanctionné et à la communauté internationale et, par conséquent, à l’ordre juridique international[54]. Cette attitude conduit les autres acteurs, qui se considèrent victimes de cette situation, à réagir d’une manière unilatérale, individuelle ou collective, pour pallier l’impuissance des Nations Unies à rétablir l’ordre juridique international affecté par ces mesures.
II- LES REACTIONS FACE AUX SANCTIONS A EFFET EXTRA-TERRITORIAL :
Il existe des moyens unilatéraux, multilatéraux voire collectifs pour réagir à toute mesure qui affecte l’ordre juridique international : les atteintes au principe de la souveraineté, de la non – ingérence, du libre échange commercial, etc.. Il convient d’en énumérer quelques – unes et d’en examiner la licéité eu égard aux principes du droit international public (A). Néanmoins, le mécanisme onusien ainsi que les institutions de l’Organisation mondiale, appelées à être renforcées, doivent demeurer le principal recours et l’unique autorité responsable du rétablissement de l’ordre juridique international. Pour cela, il convient de leur donner les moyens aussi bien normatifs que coercitifs pour le faire (B).
A- Les réactions multilatérales et collectives :
Comme il a été démontré dans les développements précédents, les contre – mesures ou la prise de sanctions d’une manière unilatérale par un ou plusieurs pays à l’encontre d’un Etat pour des considérations d’ordre politique ou économique portent atteinte à l’ordre public international[55] car ce processus viole les principes précités du droit international public[56]. Il en est de même lorsque ces mesures sont prises contre un Etat ou contre une personne morale pour sanctionner un acte ou un comportement jugés comme « illicites » par l’Etat ou l’ensemble des Etats qui prennent ces mesures[57], surtout si ces dernières ont des effets extra-territoriaux affectant les relations économiques et commerciales internationales, ce qui viole notamment les principes et les traités de l’Organisation Mondiale du Commerce[58] et provoque le chaos dans la mesure où les Etats et les victimes de ces actes sont tentés de riposter par le biais de représailles.
Ainsi donc, la réaction automatique et logique aux contre – mesures se fait par des représailles prises par l’Etat victime auquel peuvent s’associer d’autres Etats ou acteurs, victimes des effets secondaires de ces actes. Cette réaction aura pour objet d’exercer des pressions conduisant l’Etat, auteur des contre – mesures, à revenir sur les mesures prises par son appareil législatif. Il s’agit donc d’un rapport de force qui s’exercera entre l’auteur des contre – mesures et les victimes de ces actes[59].
Le droit international public rend licite toute mesure de représailles[60], même si cette dernière est par nature illicite, lorsqu’elle est exercée en riposte à des contre – mesures qui affectent l’ordre juridique et l’ordre public internationaux[61] et qui sont, de ce fait, illicites.
Néanmoins, ces représailles ne doivent, en aucun cas, contrevenir aux dispositions de l’alinéa 1er de l’article 33 de la Charte des Nations Unies[62] qui consacre l’objectif principal de l’Organisation mondiale : celui du non recours à la force dans les relations internationales.
Par conséquent et afin de faire preuve d’un respect de ces dispositions, il convient d’exercer ces représailles en respectant la procédure suggérée par la Commission du Droit International des Nations Unies qui, depuis 1959, tente de trouver une solution aux contre – mesures et à leurs effets[63].
De même, cette réaction à l’illicite que constituent ces représailles devra être justifiée, sur le fond, en mettant en exergue qu’elle a été entamée en réponse à l’illicite dans le respect du principe de proportionnalité. Cependant, il est matériellement difficile de respecter ce principe dans la mesure où chaque Etat se fait prévaloir d’éléments et d’interprétation de situations en sa faveur, d’où la formule « nemo judex in causa sua ».
En tout état de cause, les représailles prises d’une manière unilatérale par l’Etat victime de contre – mesures mais aussi d’une manière multilatérale par un ensemble d’Etats ou encore d’une manière collective par la communauté internationale, en raison des effets secondaires extra-territoriaux que ces contre – mesures provoquent, doivent respecter les conditions de forme et de fond édictées par la Commission de Droit International[64] qui, après avoir rappelé les principes généraux du droit pouvant déterminer les caratères du fait internationalement illicite[65] provoqué par un Etat ou un groupe d’Etats[66], a prévu les modalités de mise en cause de la responsabilité de ces derniers et, de ce fait, celles des contre – mesures (ou représailles) qui peuvent être prises en vue de faire cesser l’illicite et réparer l’ensemble des préjudices que les contre – mesures principales ont provoqué d’une manière directe ou indirecte à l’ensemble des Etats et des acteurs de la scène internationale.
Par ailleurs, la Commission de Droit International a prévu, dans ce texte, les modalités de réparation du préjudice que subit l’Etat ou l’ensemble des Etats du fait des contre – mesures avec effet extra – territorial, allant de la restitution, à l’indemnisation et la satisfaction[67].
S’agissant des modalités auxquelles les Etats, victimes d’une manière directe ou indirecte de contre – mesures, doivent se conformer, elles consistent à démontrer une violation ou une série de violations des normes impératives (jus cogens) par l’auteur des contre – mesures. Les Etats tiers, victimes d’effets secondaires des contre – mesures, peuvent donc se faire prévaloir des dispositions des articles 40, 41 et 48 dudit texte de la Commission[68]. Il convient, ensuite et par prudence, de respecter les conditions de forme prévues par ce texte en notifiant la décision de recours à des représailles à l’Etat responsable des contre – mesures qui ont provoqué un trouble à l’ordre public international et faire preuve d’une volonté de négociation préalable avec lui.
Ainsi donc, les Etats lésés par des contre – mesures peuvent prendre, d’une manière multilatérale voire collective, toute mesure pour bloquer les effets extra-territoriaux des mesures prises par l’Etat ou les Etats, auteurs de ces contre – mesures, et protéger leurs opérateurs sur la scène internationale en adoptant notamment et de leur côté des mesures pour empêcher toute coopération ou échange d’informations entre leurs administrations et celles de ou des Etats auteurs des lois à effet extra-territorial voire même, comme le suggère le rapport Gauvain[69], prévoir des sanctions à l’encontre de toute transmission d’informations relatives à des personnes physiques ou morales aux autorités judiciaires ou administratives étrangères, en particulier à celles qui ont élaboré ces lois. Ce rapport suggère la « modernisation » de la loi française de 1968, dite « loi de blocage », et l’adoption d’un autre texte législatif en vue de protéger les entreprises françaises contre « la transmission par les hébergeurs de leurs données numériques non personnelles aux autorités judiciaires étrangères : une extension du RGPD aux données des personnes morales, qui permettra de sanctionner les hébergeurs de données numériques qui transmettraient aux autorités étrangères des données non personnelles relatives à des personnes morales françaises en dehors des canaux de l’entraide administrative ou judiciaire ».
On peut illustrer la prise de représailles à des contre – mesures à effet extra-territorial en rappelant le règlement européen dit également « de blocage », inspiré de la loi française de 1968[70]. Ce règlement a été adopté en 1996 par l’Union européenne à l’occasion des lois Helms – Burton et D’Armato – Kennedy[71] en vue d’assurer la protection de l’ordre juridique ainsi que les intérêts des Etats membres de cette institution, en neutralisant et en bloquant les effets extraterritoriaux, au sein de l’Union, des contre – mesures prises par les Etats – Unis d’Amérique. Ce règlement annulait l’effet extraterritorial de toute décision judiciaire, sentence arbitrale, acte ou disposition adoptée en vertu de celles – ci, en lien avec lesdites lois américaines, au sein de l’Union[72].
En même temps, ce règlement prévoyait des mesures de représailles et appelait les Etats membres de l’Union à adopter des législations internes sanctionnant aussi bien les personnes physiques que morales en cas d’infraction aux dispositions prévues par ce texte[73].
C’est ainsi que cette mesure de représailles prise par ce texte européen a touché les intérêts américains à l’occasion de l’affaire relative à la banque BAWAG, en Autriche. Cette banque, rachetée par un fonds américains, a été menacée de poursuites pénales.
Il est évident que l’ensemble de ces mesures juridiques restent théoriques surtout si l’auteur des contre – mesures profite de sa position dominante sur la scène internationale, à l’instar des Etats – Unis d’Amérique. Cela a d’ailleurs conduit les acteurs de la société internationale à envisager des mesures plus concrètes pour limiter les effets préjudiciables des lois extraterritoriales, à l’instar de la proposition faite par la Haute représentante de l’Union européenne pour les affaires étrangères aux Nations unies, Madame Frederica Mogerini qui a proposé la mise en place d’une plate-forme comptable autonome permettant d’inscrire en recettes les exportations de produits iraniens (pétrole, produits agricoles) en ouvrant des capacités d’exportation à des entreprises de pays tiers vers l’Iran, sans effectuer des échanges financiers[74].
Mais l’ensemble de ces mesures juridiques voire extra-juridiques[75] font état de la fragilité de l’ordre juridique international et conduisent de nouveau la société internationale vers le chaos., d’autant que même la doctrine a fini par admettre la riposte à l’illicite par l’illicite, provoquant une surenchère de mesures adoptées par les Etats, mettant en difficulté les juridictions internes appelées à se prononcer sur les violations réciproques de ces textes.
Il convient, par conséquent, de réfléchir aux moyens de rétablir l’ordre juridique international, en renforçant les organes internationaux de contrôle et de régulation de la société internationale, en les mettant à l’abri des influences politiques et en leur assurant des garanties afin qu’ils puissent exercer, en toute indépendance, liberté et objectivité, leurs prérogatives.
B- Le recours aux instances internationales et le rétablissement de l’ordre juridique international :
Tout acte illicite ainsi que toute situation qui cause un préjudice doivent être résorbés afin de rétablir l’ordre et de réparer le dommage causé. Il incombe à des organes neutres, statuant en toute impartialité et dotés de moyens permettant l’exécution de leurs décisions, d’accomplir cette tâche : de constater l’illégalité et de déterminer les responsabilités pour pouvoir prononcer une éventuelle condamnation.
Ainsi donc, dans le cas de contre – mesures affectant de surcroît des acteurs tiers (par rapport aux mesures initiales), il convient de faire constater cette situation par des organes internationaux habilités à le faire en toute objectivité et impartialité la violation de normes et de principes du droit international public, notamment par des embargos économiques[76] avec des effets extra-territoriaux qui ont le caractère de véritables sanctions « secondaires », allant jusqu’à la condamnation d’acteurs par des juridictions internes. Ces organes sont appelés à dire le droit et à réparer les préjudices provoqués par ces situations et par ces prises d’actes, y compris les condamnations prononcées par des juridictions internes en violation des dispositions et des principes du droit international public.
Le recours au Conseil de sécurité des Nations Unies, à cet effet, est obsolète en raison de la composition de cet organe de cinq membres permanents dotés d’un droit de veto exercé systématiquement par un ou plusieurs d’entre eux, donnant un caractère politique aux décisions de cette instance dont certaines résolutions ne ne sont d’ailleurs jamais respectées par les Etats lorsque ces derniers jouissent de privilèges politiques en raison de leur proximité de l’un des cinq membres permanents.
Sans multiplier les exemples à ce sujet, nous nous limiterons, à titre illustratif, à citer les résolutions du Conseil prises à l’encontre d’Israël. Ces résolutions n’ont jamais été respectées par cette entité : résolution 236 (11 juin 1967), résolution 237 (14 juin 1967), résolution 242 ( 22 novembre 1967), résolution 250 (27 avril 1968), résolution 251 (2 mai 1968), résolution 252 (21 mai 1968), résolution 267 (3 juillet 1969), résolution 340 (25 octobre 1973), résolution 446 (22 mars 1979), résolution 468 (8 mai 1980), résolution 487 (19 juin 1981), résolution 592 ( 8 décembre 1986), résolution 605 (22 décembre 1987), résolution 607 (5 janvier 1988), résolution 608 (14 janvier 1988), résolution 636 (6 juillet 1989), résolution 641 (30 août 1989), résolution 672 (12 octobre 1990), résolution 673 (24 octobre 1990), résolution 681 (20 décembre 1990), résolution 694 (24 mai 1991), résolution 799 (18 décembre 1992), résolution 904 (18 mars 1994), résolution 1322 (7 octobre 2000), résolution 1397 (12 mars 2002), résolution 1402 (30 mars 2002), résolution 1405 (19 avril 2002), résolution 1435 (24 septembre 2002), résolution 1515 (19 novembre 2003), résolution 1544 (19 mai 2004), résolution 1850 (16 décembre 2008), résolution 1860 (8 janvier 2009), résolution 2334 (23 décembre 2016), etc…
Il est donc plus opportun d’avoir recours à l’Organisation mondiale du commerce (l’OMC) par le biais d’une plainte[77]. L’OMC dispose d’un système de règlement des différends[78] qui statue selon les règles, les procédure[79]s et les pratiques établies dans le cadre de l’Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT) de 1947[80].
En effet et comme il a été démontré dans les développements précédents[81], les contre – mesures adoptées par un Etat ou un groupe d’Etats affectent, d’une manière secondaire, les relations économiques et financières de l’Etat qui a fait l’objet de ces mesures avec des Etats ou des acteurs tiers, mettant en cause la clause de la nation la plus favorisée. Cela porte atteinte à la liberté de transit, de navigation et à celle des échanges commerciaux, et constitue une discrimination commerciale, en violation des règles du GATT, mises en œuvres par l’OMC, ce qui justifie le recours à ce processus par devant l’Organe de règlement (l’ORD) selon les règles précitées.
Cette démarche avait d’ailleurs été adopté par la Communauté Economique Européenne lors d’un recours effectué par devant l’OMC, à l’occasion de l’adoption de la loi Helms-Burton par les Etats – Unis, en 1996[82], parallèlement à l’adoption du « règlement de blocage »[83] par cette instance. Mais cette procédure n’avait pas abouti car le Président américain, Bill Clinton, avait décidé de suspendre les sanctions secondaires, entraînant la caducité de ce recours.
Même si l’OMC est réticent à statuer sur des questions qui relèvent plus de l’opportunisme politique, notamment eu égard à la « réserve de sécurité nationale et de protection des intérêts essentiels de sécurité » prévue à l’article XXI du GATT[84] qui pourrait être soulevée par l’Etat ou le groupe d’Etats qui ont procédé à la prise de contre – mesures à effets secondaires (ou extra-territoriaux), afin de donner une base légale à leurs mesures, il n’en demeure pas moins que l’OMC serait amenée à examiner la conformité de cette disposition aux principes jus cogens violés par ces contre – mesures[85], à l’occasion de la procédure entamée devant elle.
Par ailleurs, il convient de sensibiliser l’Assemblée générale de l’ONU afin de saisir la Cour de Justice Internationale (CJI) en application des dispositions de l’article 96 de la Charte des Nations Unies[86], même si cette démarche exige des concertations politiques entre les Etats membres de l’Organisation mondiale. Le mérite de cette initiative est de faire constater l’illégalité des contre – mesures et de leurs conséquences sur les Etats et les acteurs de la scène internationale car les avis de la CJI ne sont pas contraignants.
Enfin et après épuisement de ces démarches, une autre procédure pourrait être envisageable : celle du recours devant le Comité des Droits de l’Homme de l’Organisation des Nations Unies, par voie de réclamation, en application des dispositions de l’article 41 du Pacte international relatif aux droits civiques et politiques[87]. Cette initiative a le mérite de forcer les Nations Unies à réagir et à se prononcer à l’égard de l’illicite, voire même à procéder à sa condamnation morale.
Le recours à ce processus peut se faire par l’Etat lésé principalement par les contre – mesures mais aussi par un ensemble d’Etats mettant en exergue la violation des normes impératives du droit international public.
Il est certain que l’ensemble de ces propositions en vue d’entreprendre des démarches juridiques et judiciaires demeurent théoriques. La pratique internationale démontre l’emprise politique sur les instances et les organes internationaux qui semblent paralysés et donc inutiles. La loi de la jungle s’applique dans la société internationale. Le plus fort impose sa loi au plus faible, en ayant recours à des manœuvres illégales et en exerçant un chantage sur l’ensemble des acteurs de la société internationale. L’attitude des Etats – Unis d’Amérique en est l’illustration, en ayant recours à une série de contre – mesures à effets extra-territoriaux en violation des principes précités[88].
Profitant de sa position dominante au niveau économique et financier[89] et de son emprise politique sur des organes et instances internationales tel que le Conseil de sécurité des Nations unies, de l’OTAN, etc…, ce pays prend en otage l’ensemble de la société internationale et procède à un véritable acte de guerre politique et économique, affectant aussi bien les Etats ou entités sanctionnées, d’une manière directe, que les autres Etats et acteurs internationaux, d’une manière secondaire. Les mesures unilatérales prises par ce pays ne peuvent d’ailleurs pas emprunter la terminologie de « sanctions » eu égard à l’objectif et la finalité des sanctions[90]. D’ailleurs, il ne suffit pas à ces dernières d’être légales mais elles doivent avoir un objectif légitime, en accord avec celui des Nations unies et des principes du droit international public, ce que les Etats – Unis violent constamment.
Et pourtant, il y a trois décennies, à l’issue de l’effondrement de l’ex-Union soviétique et de l’invasion du Koweït par l’Irak, l’ancien Président américain, Georges W. Bush, avait annoncé un « nouvel ordre mondial » fondé sur le droit et la fin de la loi de la jungle dans un discours célèbre prononcé le 6 mars 1991 devant le Congrès américain : « (…) Nous nous trouvons aujourd’hui à un moment exceptionnel et extraordinaire. La crise dans le Golfe persique, malgré sa gravité, offre une occasion rare pour s’orienter vers une période historique de coopération. De cette période difficile (…) une nouvelle ère, moins menacée par la terreur, plus forte dans la recherche de la justice et plus sûre dans la quête de la paix. Une ère où tous les pays du monde, qu’ils soient à l’Est ou à l’Ouest, au Nord ou au Sud, peuvent prospérer et vivre en harmonie. Une centaine de générations a cherché cette voie insaisissable qui mène à la paix, tandis qu’un millier de guerres a fait rage à travers l’histoire de l’Homme. Aujourd’hui, ce nouveau monde cherche à naître. Un monde tout à fait différent de celui que nous avons connu. Un monde où la primauté du droit remplace la loi de la jungle. Un monde où les Etats reconnaissent la responsabilité commune de garantir la liberté et la justice. Un monde où les forts respectent les droits des plus faibles ». Malgré l’arrogance dont le Président Bush fait preuve, dans ce discours, en faisant ériger son pays comme le « gendarme du monde » en lui attribuant la prérogative de régler les situations internationales, cette démarche est moins choquante que le comportement actuel des Etas-Unis puisqu’elle reste fondée sur le droit : « (…) Les autres dirigeants d’Europe, ceux du Golfe et d’autres parties du monde comprennent que la façon dont nous résoudrons cette crise aujourd’hui pourrait façonner l’avenir des générations futures. L4épreuve à laquelle nous faisons face est importante, comme le sont les enjeux. Il s’agit du premier assaut contre le nouveau monde que nous recherchons, le premier test de notre détermination. Si nous n’avions pas réagi de manière décisive à cette première provocation, si nous n’avions pas continué à faire preuve de fermeté, ce serait un signal donné aux tyrans actuels et potentiels du monde entier. Les Etats – Unis et le monde doivent défendre leurs intérêts communs vitaux. Et ils le feront. Les Etats – Unis et le monde doivent soutenir la primauté du droit. Et ils le feront ». En effet, cela démontre, comme Athènes dans l’Antiquité, que les Etats – Unis d’Amérique de protecteurs sont devenus des dominateurs, en ne rendant plus de comptes aux instances internationales.
Il est donc opportun et nécessaire de faire cesser ce désordre international, notamment la condamnation d’acteurs par des juridictions internes de certains Etats[91], en procédant aux voies de recours précités[92] dont l’inefficacité aura toutefois le mérite de faire état de la dérive des institutions internationales supra-étatiques et leur soumission à l’arbitraire politique, conduisant la société internationale de plus en plus vers le chaos et faisant preuve de l’inefficacité du droit international public. Cela pourra et devra conduire vers une réflexion sur la réforme de ces institutions, leur permettant de veiller d’une manière plus efficace, objective et impartiale, à l’application du droit.
Quelques années avant son décès, l’ancien Secrétaire général des Nations unies, Boutros Boutros – Ghali, souleva l’ensemble de ces difficultés auxquelles il a été affronté lors de l’exercice de son mandat, notamment lors des prises de sanctions à l’encontre de l’Irak[93], mais aussi en menant une réflexion à ce sujet, en tenant compte des bouleversements politiques internationaux.
L’ancien chef de l’exécutif onusien a subi la pression politique de Washington lors de son mandat, notamment à l’issue du massacre de la ville de Qana dans le sud-Liban, en 1996, où il s’était permis de condamner ce crime perpétré par l’armée israélienne, à la fois verbalement et par écrit. Le Secrétaire d’Etat américain, Madeleine Albright mena alors une campagne contre lui, empêchant sa re – élection à la tête des Nations unies. Avec son humour habituel, il répondit à ses manœuvres en soulignant que les Américains voulaient de lui « un secrétaire et non pas un Général ».
En effet, depuis son éviction des Nations unies, cette instance a perdu toute sa crédibilité, son efficacité et donc sa considération.
Il convient, dans un premier temps, de penser au changement de son siège de New York, sujet aux interférences et écoutes des services de sécurité du pays hôte qui est de surcroît membre permanent du Conseil de sécurité.
Dotée d’une structure étatique et d’une personnalité juridique morale, les Nations Unies avec plus de 37.000 personnes qu’elles emploient devraient opter pour un siège sur une île proclamée autonome et dotée d’un statut international inviolable[94].
Par ailleurs, il conviendrait de réformer les principales institutions de l’ONU à commencer par le Conseil de sécurité en supprimant le statut de membres permanents et le droit de veto dont ces derniers disposent, en accordant une valeur juridique aux résolutions de l’Assemblée générale, équivalente à celles du Conseil.
Il convient aussi de procéder à une réforme du statut de la Cour Internationale de Justice, en dotant ses décisions d’une valeur exécutoire en violation desquelles le Conseil de sécurité sera amené à prendre des mesures contraignantes à l’encontre de l’acteur condamné.
De même et parallèlement, les les prérogatives de la Cour Pénale Internationale doivent être renforcées, nonobstant l’adhésion des Etats à son statut, en lui permettant, eu égard aux principes et normes impératifs du droit international public, d’accomplir sa mission, en dehors du champ juridique que lui a octroyé le traité de Rome[95], en vue de statuer sur les délits et les crimes internationalement reconnus[96], ce qui fera émerger un droit pénal international palliant la compétence universelle de certaines juridictions nationales.
Enfin et compte tenu des changements
politiques survenus sur la scène internationale, de l’évolution de la société
internationale avec l’émergence des organisations non – gouvernementales
soucieuses de protéger les intérêts des groupes sociaux en dehors de la sphère
politique, il conviendrait de permettre à ces acteurs non -étatiques d’avoir
une place et d’exercer un pouvoir au sein de l’Assemblée générale de
l’Organisation mondiale. Cette esquisse suggérée par l’ancien Secrétaire
générale de cette institution mérite une réflexion et un engagement
international en vue de sauver les institutions internationales de cette dérive
et de soustraire le droit international à l’arbitraire politique.
[1] « Sanction et socialisation », Erick PRAIRAT, chapitre 1.
[2] Dictionnaire Gaffiot, Hachette, 1934, p. 1388.
[3] Code Justinien, « Imperatoris Ivstiniani Opera », Digestae, liber, I, 8.8.
[4] On désigne proprement comme « sancta » les choses qui ne sont ni « sacrées » ni profanes, mais qui sont confirmées par une certaine « sanction », comme par exemple les lois sont sancatae ; ce qui est soumis à une sanction, cela est sanctum, quique non consacré aux dieux. Ibid.
[5] Emile BENVENISTE, in « Vocabulaire des institutions européennes », Tome II, Editions de Minuit, 1969, page 189.
[6] En réalité, le terme « sanction » n’était pas juridiquement approprié jusqu’à très récemment. Le lexique pénal faisait référence à la peine et à la répression avant d’adopter la terminologie « sanction ».
[7] Les principaux actes répréhensibles par nature sont le meurtre, le viol, le vol sous toutes ses formes.
[8] Nulla poena sine lege.
[9] V. Hans Kelsen, The Law of the United Nations : A Critical Analysis of its Fundamental Problems, New York, Praeger, 1950, p. 706 ; ainsi que idem, Allgemeine Theorie der Normen, Vienne, Manz, 1979, p. 115.
[10] La Charte des Nations Unies.
[11] Des normes impératives.
[12] Les règles impératives (ou jus cogens) sont celles qui ordonnent ou interdisent une conduite sans que le sujet puisse s’y soustraire tandis que les lois supplétives, qui sont aussi obligatoires, peuvent être écartées par les sujets de droit. Elles viennent, en fait, suppléer l’absence de volonté exprimée et s’appliquer, par défaut, aux situations juridiques. Voir à cet égard : The Fundamental Rules of the International Legal Order : Jus Cogens and Obligations Erga Omnes, Leiden, Martinus Nijhoff, 2006.
[13] S’agissant essentiellement de la règle en droit pénal.
[14] En réalité, les Etats et les groupes politiques dominants laissent la règle de droit imprécise afin de sauvegarder au mieux leurs intérêts et pour ne pouvoir infliger que des sanctions politiques et morales.
[15] La prise de mesures non coercitives en application des dispositions de l’article 41 de la Charte des Nations Unis. Voir infra.
[16] Sanctions pour violation de normes ou de principes du droit international public. Cette ou ces violations doivent constituer des actes manifestement illicites au regard du droit international. Voir à cet égard : Jochen Frowein, « Reactions By Not Directly Affected States to Breaches of Public International Law », Recueil des cours de l’Academie de droit international de La Haye, vol. 248, 1994;Kay Hailbronner, « Sanctions and Third Parties and the Concept of International Public Order », Archiv des Völkerrechts, vol. 30, 1992; Thorsten Stein, « International Measures Against Terrorism and the Sanctions By and Against Third States », Archiv des Völkerrechts, vol. 30, 1992; Michael Akehurst, « Reprisals by Third States », British Year Book of International Law, vol. 44, 1970.
[17] « The Classification of Obligations and the Multilateral Dimension of the Relations of International Responsibility », European Journal of International Law, vol. 13, 2002
[18] La société internationale est constituée d’entités dotées de la personnalité juridique : les Etats, les organisations internationales (organisations gouvernementales) et les organisations non-gouvernementales qui ont connu un grand essor ces dernières années. Or, les organisations internationales sont le fruit de traités internationaux établis par les Etats. C’est la raison pour laquelle ces derniers demeurent au centre du droit international public car ils fondent, eux-mêmes, les autres acteurs auxquels ils s’associent dans ce qu’on appelle « la communauté internationale ».
[19] Pour être effectif, ce pouvoir devra être librement choisi ou accepté par la population (non nécessairement par le biais de l’élection) et exercé par ses gouvernants, sans être soumis à une quelconque autorité étrangère à elle.
[20] L’article 2 de ladite Charte dispose :
« L’Organisation des Nations Unies et ses Membres, dans la poursuite des buts énoncés à l’Article 1, doivent agir conformément aux principes suivants :
1. L’Organisation est fondée sur le principe de l’égalité souveraine de tous ses Membres.
2. Les Membres de l’Organisation, afin d’assurer à tous la jouissance des droits et avantages résultant de leur qualité de Membre, doivent remplir de bonne foi les obligations qu’ils ont assumées aux termes de la
présente Charte.
3. Les Membres de l’Organisation règlent leurs différends internationaux par des moyens pacifiques, de
telle manière que la paix et la sécurité internationale ainsi que la justice ne soient pas mises en danger.
4. Les Membres de l’Organisation s’abstiennent, dans leurs relations internationales, de recourir à la menace ou à l’emploi de la force, soit contre l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique de tout État, soit de toute autre manière incompatible avec les buts des Nations Unies.
5. Les Membres de l’Organisation donnent à celle-ci pleine assistance dans toute action entreprise par elle conformément aux dispositions de la présente Charte et s’abstiennent de prêter assistance à un État contre lequel l’Organisation entreprend une action préventive ou coercitive.
6. L’Organisation fait en sorte que les États qui ne sont pas Membres des Nations Unies agissent
conformément à ces principes dans la mesure nécessaire au maintien de la paix et de la sécurité
internationales.
7. Aucune disposition de la présente Charte n’autorise les Nations Unies à intervenir dans des affaires qui relèvent essentiellement de la compétence nationale d’un État ni n’oblige les Membres à soumettre des affaires de ce genre à une procédure de règlement aux termes de la présente Charte; toutefois, ce principe ne porte en rien atteinte à l’application des mesures de coercition prévues au Chapitre VII. »
[21] Ces valeurs varient d’une société à une autre. Elles peuvent être laïques, religieuses, morales, etc… Ainsi, certaines sociétés interdisent d’une manière absolue la consommation d’alcool sous peine de sanctions, dans les lieux publics, soit pour des motifs religieux ou moraux : en Arabie saoudite, aux Etats – Unis d’Amérique, en Iran… D’autres sociétés imposent le port du voile aux femmes (pays à législation islamique) tandis que d’autres sociétés et Etats sanctionnent le port du voile par les femmes dans les lieux publics (Turquie kémaliste, France…).
[22] Elle ne peut pas néanmoins être jugée, pour les mêmes faits, par deux juridictions (celle du pays où les faits ont été commis et par celles du pays dont elle détient la nationalité) en vertu du principe non bis in idem. Cependant, ce principe n’est pas universellement appliqué. Certains pays affligent une double peine pour des mêmes faits, d’où la nécessité d’imposer ce principe comme norme jus cogens.
[23] Voir B. STERN, ibid.
[24] Voir à ce sujet les travaux de Madame le Professeur Brigitte STERN sur l’extraterritorialité des normes, notamment :Stern Brigitte. L’extra-territorialité « revisitée » : où il est question des affaires Alvarez-Machain, Pâte de Bois et de quelques autres…. In: Annuaire français de droit international, volume 38, 1992. pp. 239-313; www.persee.fr/doc/afdi_0066-3085_1992_num_381_3072.
[25] Les citoyens américains, les étrangers qui résident d’une manière permanente aux Etats – Unis, à toute entité organisée selon les lois américaines, à toute personne ou entité présente sur le territoire américain.
[26] Voir infra « les sanctions secondaires ».
[27] Selon la législation américaine, toute banque qui ouvre un compte aux Etats -Unis est soumise à la réglementation de ce pays.
[28] Parfois, le budget de ces dépenses équivaut au montant de l’amende qui pourrait être infligée aux entreprises qui contreviennent à cette législation à effet extra-territorial.
[29] La détermination du facteur de rattachement des entreprises étrangères avec les Etats – Unis est très large : il suffit qu’une entreprise affectue une transaction en dollar ou qu’elles utilisent une technologie américaine pour justifier la compétence extra-territoriale des juridictions américaines et courir le risque d’une condamnation.
[30] Les sociétés françaises ne sont évidemment pas les seules concernées. Une pléthore de sociétés européennes et étrangères ont été également condamnées à verser des milliards de dollars au Trésor américain à l’issue de condamnations par la justice en raison de la compétence extra-territoriale de cette dernière. Plus d’une vingtaine de milliards d’amendes de la part de sociétés européennes.
[31] Groupe de services pétroliers français.
[32] TOTAL avait été soupçonné d’avoir versé des pots-de-vin à un acteur du secteur public pétrolier iranien en marge de l’accord gazier South Pars et pour la signature d’un contrat en 1995 pour l’exploitation des champs pétroliers iraniens de Siri A et E., d’une valeur de 2 milliards de dollars. TOTAL avait finalement transigé dans cette affaire en versant la somme de 398 millions de dollars à la justice américaine.
[33] Selon les accusations du DoJ américain.
[34] Selon l’accusation de 4 régulateurs américains. Les opérations, d’un montant total dépassant 32 milliards de dollars, auraient permis à ces entités d’accéder illégalement au système financier américain.
[35] Cette banque a été obligée de verser 1,34 milliards de dollars à titre d’amende.
[36] Sanctions commerciales à l’encontre d’un Etat jugé coupable par l’Etat qui édicte ces sanctions de violation du droit international public par un éventuel soutien explicite à des organisations terroristes. Sanctions à l’égard d’entreprises considérées comme favorisant la corruption ou le trafic de stupéfiants, etc…
[37] L’objectif des Etats – Unis est d’ordre politique. Il a été dévoilé par le Président américain Donald TRUMP qui a motivé sa sortie du traité sur le nucléaire iranien par une volonté d’«exercer une pression financière sur le régime iranien en vue d’une solution globale et durable à toutes les menaces exercées par ce pays : développement et prolifération balistique, agressions régionales, soutien aux groupes terroristes, activités pernicieuses des membres des Gardiens de la révolution et de ses auxiliaires ». Il est évident que ces motifs invoqués par les Etats – Unis pour justifier ces contre – mesures sont subjectifs. Ils sont le résultat d’une analyse politique dépourvue de toute preuve.
[38] «C’est le Barak Obama et son administration qui sont les fondateurs de l’Etat islamique. Obama est le créateur de l’Etat Islamique, d’accord? C’est lui qui l’a fondé! » (…) « Daech fait honneur à Obama« , déclaration de Monsieur Donald Trump rapportée notamment par le journal Chicago Tribune. Par ailleurs, dans un entretien accordé à la chaîne CBS, Monsieur Trump indiquait que c’était « la politique insensée d’Hillary Clinton qui avait conduit à l’apparition du groupe terroriste Etat islamique« .
[39] Le droit naturel est l’ensemble des règles idéales, régissant la conduite de l’espèce humaine, auquel le droit positif doit être soumis. Pour Grotius, le droit naturel doit se déduire de la nature de l’Homme. Avant lui, les philosophes grecs (Aristote, Platon ainsi que les Stoïciens) considéraient le droit naturel comme le principe supérieur de justice, inscrit dans la nature des choses et conforme au bon ordre de la nature et de la Cité. Enfin, pour Saint Thomas d’Aquin, le droit naturel est inspiré par Dieu.
[40] L’un de ces principes est celui de l’extraterritorialité de l’espace maritime qui peut être utilisé librement par toutes les nations à des fins de navigation commerciale.
[41] Les traités de Westphalie ont aussi instauré un ordre international où le multilatérisme a vu le jour, fondé sur l’équilibre des puissances et la soumission des Etats à des règles communes définies par eux. Dans ce contexte, le système de la sécurité collective a vu le jour.Par conséquent, l’agression de l’un des membres appartenant à ce système constituait une agression contre l’ensemble et appelait alors une réponse collective, notamment par le recours à la force.
[42] Il a cependant fallu attendre le XXème siècle pour voir le recours à la force sera prohibé par l’article 2 alinéa 4 de la Charte des Nations unies, à l’exception de la légitime défense exercée à titre provisoire, jusqu’à ce que le Conseil de sécurité prenne les mesures nécessaires. Ce principe a été confirmé, à maintes reprises et d’une manière explicite, par de très nombreuses résolutions qui ont pour objectif d’éviter les conflits ouverts par l’usage de règles préventives. Le Conseil de Sécurité est donc devenu l’unique organe, dans l’ordre international, qui peut autoriser voire ordonner l’usage de la force en vertu des dispositions du Chapitre VII de la Charte mais aussi d’ordonner des sanctions à l’encontre des Etats, des entités voire des personnes qui commettent des actes internationalement illicites.
[43] La ratification des traités par les Etats les intègre dans leur ordre juridique interne et les rend obligatoires à l’égard de leurs collectivités. Ainsi, l’article 55 de la Constitution française de 1958 donne aux « traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés (…), dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son application par l’autre partie ». Le droit positif français a élargi l’application de cette disposition de la Constitution au droit dérivé, en admettant que l’adhésion de la France à certains traités, à l’instar de ceux de l’Union européenne, a pour conséquence de se soumettre aux règles édictées par les instances mises en place par ces traités et ayant une fonction de légiférer (la Commission ou le Parlement européen en ce qui concerne les organes de l’Union européenne et le Conseil de sécurité en ce qui concerne ceux des Nations Unies).
[44] Voir les dispositions de cet article, supra.
[45] Il a été proclamé par le Président américain Woodrow Wilson, à la fin de la Première guerre mondiale, dans ses fameux quatorze points.
[46] Voir à cet égard l’alinéa 2 du Préambule de la Charte des Nations Unies qui, en énumérant les objectifs de l’Organisation mondiale, dispose : « « Développer entre les nations des relations amicales fondées sur le respect du principe de l’égalité de droits des peuples et de leur droit à disposer d’eux-mêmes, et prendre toutes autres mesures propres à consolider la paix du monde ».
De même, l’article 55 de la Charte, inséré dans le Chapitre IX relatif à la coopération économique et sociale internationale ajoute : « En vue de créer les conditions de stabilité et de bien-être nécessaires pour assurer entre les nations des relations pacifiques et amicales fondées sur le respect du principe de l’égalité des droits des peuples et de leur droit à disposer d’eux-mêmes, les Nations Unies favoriseront :
Le relèvement des niveaux de vie, le plein emploi et des conditions de progrès et de développement dans l’ordre économique et social;
La solution des problèmes internationaux dans les domaines économique, social, de la santé publique et autres problèmes connexes, et la coopération internationale dans les domaines de la culture intellectuelle et de l’éducation;
Le respect universel et effectif des droits de l’homme et des libertés fondamentales pour tous, sans distinction de race, de sexe, de langue ou de religion. »
[47] Voir article 2 alinéa 7, ibid. « Aucune disposition de la présente Charte n’autorise les Nations Unies à intervenir dans des affaires qui relèvent essentiellement de la compétence nationale d’un État ni n’oblige les Membres à soumettre des affaires de ce genre à une procédure de règlement aux termes de la présente Charte; toutefois, ce principe ne porte en rien atteinte à l’application des mesures de coercition prévues au Chapitre VII ».
[48] Voir notamment à ce sujet le rapport de la Commission de Droit International sur les travaux de sa trente et unième session », Annuaire CDI 1979, t. II(2).
[49] S’agissant en particulier des lois de sanctions secondaires, voir supra.
[50] Voir infra.
[51] Il s’agit en réalité de « sanctions » même si cette expression n’est pas utilisée dans la Charte des Nations Unies qui parle à ce sujet de « mesures non -coercitives ». Voir supra.
[52] Voir le Préambule de cette résolution mais aussi et surtout le paragraphe 8 dans lequel cette résolution réaffirme « le droit de tous les peuples à disposer d’eux-mêmes, en vertu duquel ils déterminent librement leur statut politique et organisent librement leur développement économique, social et culturel ».
[53] Paragraphe 7 de ladite résolution A/RES/67/170 du 20 mars 2013.
[54] Voir Linos-Alexandre Sicilianos, Les réactions décentralisées à l’illicite : des contre-mesures à la légitime défense,Paris, LGDJ, 1990 ; Ian Brownlie, « International Law at the Fiftieth Anniversary of the United Nations », Recueil des cours de l’Académie de droit international de La Haye, vol. 255, 1995,p. 220 ; Prosper Weil, « Le droit international en quête de son identité : cours général de droit international public » Recueil des cours de l’Académie de droit international de La Haye, vol. 237 ; Jerzy Makarczyk (dir.), Theory of International Law at the Threshold of the 21st Century: Essays in Honour of Krzysztof Skubiszewski, La Haye, Kluwer, 1996 ; Pierre-Marie Dupuy, « Responsabilité et légalité », in Societe Français pour le Droit International (dir.), La responsabilité dans le système international, Paris, Pedone, 1991.
[55] Le jus cogens : « Il existe un ordre public international au sein de la société des Etats comme il existe un ordre public interne à l’intérieure d’une même collectivité étatique. Les traités que les Etats passent entre eux ne peuvent pas déroger à ces règles principales ». G . SCELLE, Cours de Droit International Public, page 640. Cette affirmation coïncide avec les dispositions de l’article 103 de la Charte des Nations Unies.
[56] Voir supra. Il convient de rappeler à ce sujet les dispositions de la résolution 2625 de l’Assemblée Générale des Nations unies du 24 octobre 1970 relative aux relations amicales et la coopération entre les Etats qui dispose que les Etas ont le devoir de « s‘abstenir, dans les relations internationales, d’user de contraintes d’ordre militaire, politique, économique ou autre, dirigée contre l’indépendance politique ou l’intégrité territoriale de tout Etat ». De même, l’article 41 de la Charte des Nations Unies indique à ce sujet qu’ « aucun Etat ni groupe d’Etats n’a le droit d’intervenir, directement ou indirectement pour quelque raison que ce soit, dans les affaires intérieures ou extérieures d’un autre Etat.
En conséquence, non seulement l’intervention armée, mais aussi toute autre forme d’ingérence ou toute menace dirigées contre la personnalité d’un Etat ou contre ses éléments politiques, économiques et culturels, sont contraires au droit international. Aucun Etat ne peut appliquer ni encourager l’usage de mesures économiques, politiques ou de toute nature pour contraindre un autre Etat à subordonner l’exercice de sses droits souverains et pour obtenir de lui des avantages de quelque ordre que ce soit. »
[57] Des sanctions visant des Etats ou des personnes morales pour avoir eu un comportement en violation de traités internationaux ou, tout simplement, pour avoir commis un acte considéré par l’Etat ou un ensemble des Etats comme étant « illicite ».
[58] A l’instar des sanctions américaines à l’encontre d’Alstom qui a été condamnée à 770 millions d’Euros pour avoir contrevenu à des infractions internationales, s’agissant de la corruption.
[59] Le droit international qui interdit, en règle générale, les représailles et l’intervention des Etats dans les affaires internes d’autres Etats ce qui a été notamment réaffirmé par la Cour Internationale de Justice à l’occasion de l’affaire des activités militaires et paramilitaires des Etats – Unis au Nicaragua en 1986, légitime néanmoins le recours à ces mesures si elles sont prises pour faire cesser un acte ou un fait illicite et obliger l’Etat auteur des contre – mesures initiales à réparer le dommage résultant de son action.
[60] Voir à ce sujet « Justice privée et ordre juridique internationale : étude théorique des contre-mesures en droit international public », Denis Alland, Paris, Pedone, 1994.
[61] Le jus cogens.
[62] Article 33 : « Les parties à tout différend dont la prolongation est susceptible de menacer le maintien de la paix et de la sécurité internationales doivent rechercher la solution, avant tout, par voie de négociation, d’enquête, de médiation, de conciliation, d’arbitrage, de règlement judiciaire, de recours aux organismes ou accords régionaux, ou par d’autres moyens pacifiques de leur choix.
Le Conseil de sécurité, s’il le juge nécessaire, invite les parties à régler leur différend par de tels moyens ».
[63] En 1959, la Commission de Droit International a établi un projet relatif à la responsabilité des Etats pour les actes qu’ils commettent et qui constituent des faits internationalement illicites. A cette occasion, elle a suggéré dans ce texte des conditions de forme et de fond concernant la prise de contre – mesures par les Etats afin de cadrer notamment le recours aux représailles et apaiser ainsi les surenchères de tensions internationales.
[64] Il s’agit d’un projet d’articles sur la responsabilité de l’Etat pour fait internationalement illicite, adoté par la Commission de Droit International des Nations Unies, lors de sa cinquante-troisième session, en 2001, et soumis à l’Assemblée générale dans le cadre du rapport de la Commission sur les travaux de ladite session. Ce rapport, qui contient en outre des commentaires sur les projets d’articles, est reproduit dans Documents officiels de l’Assemblée générale, cinquante – sixième session, Supplément n°10 (A/56/10).
[65] Notamment la violation d’une obligation internationale d’une manière continue mais aussi par un fait composite, à raison d’une série d’actions, l’exercice d’une contrainte sur un Etat, etc.
[66] Le comportement des organes d’un Etat, d’une personne ou d’une entité exerçant des prérogatives de puissance publique voire celui d’un organe mis à la dispositions d’un Etat par un autre Etat, etc.
[67] Voir les dispositions des articles 34 à 39 dudit texte. Ibid.
[68] Ibid.
[69] Ce rapport intitulé « Rétablir la souveraineté de la France et de l’Europe et protéger nos entreprises des lois à portée extraterritoriale » a été établi le 26 juin 2019 par Monsieur Raphaël GAUVAIN, Député à l’Assemblée Nationale, à la demande du Premier ministre, Monsieur Edouard PHILIPPE.
[70] Ibid.
[71] La Communauté Economique européenne.
[72] L’article 4 de ce règlement interdit la reconnaissance de ces décisions par les autorités nationales, y compris les juridictions et leur exequatur au sein de l’Union. De même, l’article 5 de ce règlement interdisait aux entreprises établies au sein de l’Union européenne et aux citoyens des Etats membres de l’Union de se conformer aux lois et décision judiciaires prononcées par les autorités américaines, en application de ces contre – mesures.
[73] Bon nombre de pays membres de l’Union s’est conformé à cette obligation en adoptant des lois internes sanctionnant la violation du « blocage » édicté par l’Union (la Grande – Bretagne, l’Irlande, la Suède, les Pays Bas, etc).
[74] « Special purpose vehicle » (SPV), permettant de faire des compensations avec la vente de pétrole dont le produit sera inscrit en euro, ouvrant le droit à l’achat de biens en provenance des pays qui participent à ce dispositif.
[75] Les représailles, les actions pratiques et comptables entreprises en vue de contrecarrer les contre – mesures.
[76] Selon les dispositions de l’article 3 c de la résolution 3314 de l’Assemblée générale des Nations unies du 14 décembre 1974, les embargos constituent une agression, donc un acte internationalement illicite.
[77] Seuls les gouvernements et les territoires douaniers distincts qui sont membres de l’OMC peuvent participer directement au règlement des différends en tant que parties au différend ou en tant que tierces parties. En vertu des règles de l’OMC, un membre n’est pas tenu de démontrer qu’il a un intérêt juridique ou économique spécifique dans la question faisant l’objet de l’affaire. Par exemple, dans les différends “CE – Bananes” – les différends les plus longs de l’histoire de l’OMC – les États‑Unis se sont plaints que l’Union européenne (UE) accordait aux producteurs de bananes des pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP) un accès préférentiel aux marchés européens, en violation des règles de non‑discrimination établies dans le cadre de l’OMC, même si les États‑Unis n’exportaient pas eux‑mêmes de bananes vers l’UE. Cependant, dans la plupart des affaires, le membre qui présente la plainte est directement affecté par l’action du membre qui est contestée.
[78] L’Organe de règlement des différends (ORD), constitué de représentants de tous les membres de l’OMC.
[79] Les règles et procédures du système de règlement des différends de l’OMC sont énoncées par le Mémorandum d’accord sur le règlement des différends (Mémorandum d’accord), qui est administré par l’Organe de règlement des différends (ORD), constitué de représentants de tous les membres de l’OMC. Le Mémorandum d’accord offre la possibilité d’établir un seul groupe spécial dans les cas où plusieurs membres de l’OMC ont formulé des plaintes au sujet des mêmes questions. En effet, une fois saisi, l’Organe de règlement de l’OMC (l’ORD) doit automatiquement établir des groupes spéciaux chargés d’examiner les plaintes et adopter les constatations des groupes spéciaux et de l’Organe d’appel, à moins que les membres de l’OMC ne conviennent à l’unanimité, à la réunion de l’ORD, de ne pas le faire. C’est ce que l’on nomme la règle du “consensus inverse”, qui permet de veiller à ce que le poids politique des parties n’affecte pas l’issue des différends. Les groupes spéciaux et, si nécessaire, l’Organe d’appel examinent si les actions d’un membre enfreignent les dispositions spécifiques des Accords de l’OMC indiquées dans la plainte. Le membre plaignant n’est généralement pas tenu de prouver les effets négatifs sur le commerce résultant de la violation alléguée.
[80] Une plainte formelle d’un membre enclenche automatiquement la procédure de règlement des différends. Cette première étape est la “demande de consultations”, et les membres concernés vont d’abord essayer de régler le différend en se consultant mutuellement. Si cela échoue, un groupe spécial est établi et chargé d’examiner l’affaire. Ainsi donc, l’examen de la plainte est effectué d’abord par un groupe de trois personnes, qui constituent le groupe spécial et sont spécialement sélectionnées pour l’affaire. Leurs constatations sont publiées dans un rapport dont les membres concernés peuvent faire appel. Les appels sont examinés ensuite par l’Organe d’appel de l’OMC, constitué de sept membres élus pour quatre ans.
[81] Voir supra.
[82] La CEE avait fait prévaloir à ce sujet la violation du principe de l’élimination générale des restrictions quantitatives et de l’application non discriminatoire des restrictions quantitatives, la liberté de transit ainsi qu’avec les dispositions de l’Accord Général sur le Commerce des Services (AGCS) prévoyant qu’un membre de l’OMC n’appliquera pas de restrictions aux transferts et paiements internationaux concernant les transactions courantes ayant un rapport avec ses engagements spécifiques. Enfin la CEE s’est aussi faite prévaloir du principe de la nation la plus favorisée et au droit d’accès aux marchés ainsi qu’à la règle du « traitement national » de l’AGCS, dans son recours.
[83] Voir supra.
[84] Cet article dispose : « Aucune disposition du présent Accord ne sera interprétée a) comme imposant à une partie contractante l’obligation de fournir des renseignements dont la divulgation serait, à son avis, contraire aux intérêts essentiels de sa sécurité; b) ou comme empêchant une partie contractante de prendre toutes mesures qu’elle estimera nécessaires à la protection des intérêts essentiels de sa sécurité: i) se rapportant aux matières fissiles ou aux matières qui servent à leur fabrication; ii) se rapportant au trafic d’armes, de munitions et de matériel de guerre et à tout commerce d’autres articles et matériel destinés directement ou indirectement à assurer l’approvisionnement des forces armées; iii) appliquées en temps de guerre ou en cas de grave tension internationale; c) ou comme empêchant une partie contractante de prendre des mesures en application de ses engagements au titre de la Charte des Nations Unies ».
[85] Voir supra.
[86] L’article 96 de la Charte des Nations Unies prévoit cette possibilité :
« a. L’Assemblée générale ou le Conseil de sécurité peut demander à la Cour internationale de Justice un avis consultatif sur toute question juridique.
b. Tous autres organes de l’Organisation et institutions spécialisées qui peuvent, à un moment quelconque, recevoir de l’Assemblée générale une autorisation à cet effet ont également le droit de demander à la Cour des avis consultatifs sur des questions juridiques qui se poseraient dans le cadre de leur activité ».
[87] Cet article dispose :
« 1. Tout Etat partie au présent Pacte peut, en vertu du présent article, déclarer à tout moment qu’il reconnaît la compétence du Comité pour recevoir et examiner des communications dans lesquelles un Etat partie prétend qu’un autre Etat partie ne s’acquitte pas de ses obligations au titre du présent Pacte. Les communications présentées en vertu du présent article ne peuvent être reçues et examinées que si elles émanent d’un Etat partie qui a fait une déclaration reconnaissant, en ce qui le concerne, la compétence du Comité. Le Comité ne reçoit aucune communication intéressant un Etat partie qui n’a pas fait une telle déclaration. La procédure ci-après s’applique à l’égard des communications reçues conformément au présent article :
a) Si un Etat partie au présent Pacte estime qu’un autre Etat également partie à ce pacte n’en applique pas les dispositions, il peut appeler, par communication écrite, l’attention de cet Etat sur la question. Dans un délai de trois mois à compter de la réception de la communication, l’Etat destinataire fera tenir à l’Etat qui a adressé la communication des explications ou toutes autres déclarations écrites élucidant la question, qui devront comprendre, dans toute la mesure possible et utile, des indications sur ses règles de procédure et sur les moyens de recours soit déjà utilisés, soit en instance, soit encore ouverts.
b) Si, dans un délai de six mois à compter de la date de réception de la communication originale par l’Etat destinataire, la question n’est pas réglée à la satisfaction des deux Etats parties intéressés, l’un comme l’autre auront le droit de la soumettre au Comité, en adressant une notification au Comité ainsi qu’à l’autre Etat intéressé.
c) Le Comité ne peut connaître d’une affaire qui lui est soumise qu’après s’être assuré que tous les recours internes disponibles ont été utilisés et épuisés, conformément aux principes de droit international généralement reconnus. Cette règle ne s’applique pas dans les cas où les procédures de recours excèdent les délais raisonnables.
d) Le Comité tient ses séances à huis clos lorsqu’il examine les communications prévues au présent article.
e) Sous réserve des dispositions de l’alinéa c, le Comité met ses bons offices à la disposition des Etats parties intéressés, afin de parvenir à une solution amiable de la question fondée sur le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales, tels que les reconnaît le présent Pacte.
f) Dans toute affaire qui lui est soumise, le Comité peut demander aux Etats parties intéressés visés à l’alinéa b de lui fournir tout renseignement pertinent.
g) Les Etats parties intéressés, visés à l’alinéa b, ont le droit de se faire représenter lors de l’examen de l’affaire par le Comité et de présenter des observations oralement ou par écrit, ou sous l’une et l’autre forme.
h) Le Comité doit présenter un rapport dans un délai de douze mois à compter du jour où il a reçu la notification visée à l’alinéa b :
I) Si une solution a pu être trouvée conformément aux dispositions de l’alinéa e, le Comité se borne, dans son rapport, à un bref exposé des faits et de la solution intervenue ;
II) Si une solution n’a pu être trouvée conformément aux dispositions de l’alinéa e, le Comité se borne, dans son rapport, à un bref exposé des faits; le texte des observations écrites et le procès-verbal des observations orales présentées par les Etats parties intéressés sont joints au rapport. Pour chaque affaire, le rapport est communiqué aux Etats parties intéressés.
2. Les dispositions du présent article entreront en vigueur lorsque dix Etats parties au présent Pacte auront fait la déclaration prévue au paragraphe 1 du présent article. Ladite déclaration est déposée par l’Etat partie auprès du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies, qui en communique copie aux autres Etats parties. Une déclaration peut être retirée à tout moment au moyen d’une notification adressée au Secrétaire Général. Ce retrait est sans préjudice de l’examen de toute question qui fait l’objet d’une communication déjà transmise en vertu du présent article; aucune autre communication d’un Etat partie ne sera reçue après que le Secrétaire général aura reçu notification du retrait de la déclaration, à moins que l’Etat partie intéressé n’ait fait une nouvelle déclaration ».
[88] Ces contre – mesures constituent de véritables actes de guerre à caractère économique (blocus contre l’Iran : s’agissant d’un véritable état de siège que les Etats – Unis ont entamé en ayant recours à l’arme des sanctions « secondaires »). Voir à cet égard la résolution 3314 de l’Assemblée générale des Nations unies, mais aussi la 2625 du 24 octobre 1970 relative aux relations amicales et la coopération entre les Etats qui dispose que les Etats ont le devoir de « s’abstenir, dans les relations internationales, d’user de contraintes d’ordre militaire, politique, économique ou autre, dirigées contre l’indépendance politique ou l’intégrité territoriale de tout Etat». Voir supra. Voir également la résolution de l’Assemblée générale des Nations unies 69/5 du 28 octobre 2014 relative à l’embargo contre Cuba.
[89] Le recours au dollar américain dans les transactions internationales, la mainmise sur Swift, etc…
[90] Voir notre introduction, supra.
[91] Certes, ces condamnations sont prononcées en toute légalité interne eu égard à la compétence extra-territoriale que les lois internes offrent à leurs juridictions. Néanmoins, le désordre vient de l’appareil législatif et exécutif des Etats qui permettent la prise de ces mesures qui sont illégales eu égard au droit international public.
[92] Il convient de réclamer le remboursement de toute somme versée en application des législations qui ont permis aux juridictions internes de condamner des acteurs en application des lois extra-territoriales internes, par devant les instances et les juridictions internationales. En l’état actuel des choses, les représailles ou le non – paiement des condamnations pécuniaires demeure l’unique moyen de lutter contre ces contre – mesures.
[93] Les sanctions contre l’Irak, sous l’impulsion des Etats – Unis et d’Israël, ont coûté le vie, entre 1991 à 2003, à plus d’un million de personnes.
[94] Boutros BOUTROS-GHALI avait pensé à une île au sein de la Méditerranée, lieu de convergence des trois principaux continents.
[95] Les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité.
[96] La lutte contre la corruption, le crime organisé, le trafic de drogue, la traite des êtes humains, etc…