L’Iran et ses voisins du Golfe Persique

Le colloque a été organisé sous forme de deux tables rondes :

Première table ronde :Modérateur, Ali Rastbeen, Président de l’Académie de Géopolitique de Paris.
Partie 2; Actes du colloque : Où va l’Arabie saoudite?
Le 10 mars 2016
Assemblée nationale :
Académie de géopolitique de Paris

La situation de crise au Moyen-Orient, en particulier en Irak, en Syrie en Lybie et au Yémen ainsi que le blocage des élections présidentielles libanaises depuis mai 2014 et le grand  retour de l’Iran au sein de la communauté internationale, sont des évolutions qui nous incitent à nous interroger sur la nature des relations entre l’Iran et ses voisins du Golfe Persique.

Le Proche et Moyen-Orient sont entrés dans une phase de mutations et de recomposition profonde, qu’il serait superficiel et dangereux de réduire à un conflit entre sunnites et chiites.

L’animosité entre l’Arabie saoudite et l’Iran se traduit notamment en Syrie, au Yémen et en Irak, ces deux puissances s’accusent mutuellement en cherchant à élargir leur influence.

Une question se pose: la détérioration des relations entre l’Iran et les pays arabes est-elle le résultat de l’émergence de l’Iran comme puissance régionale ou puise-t-elle sa source ailleurs ?

Pour répondre à cette question, il faut tout d’abord se demander à quel point les pays arabes agissent-ils de manière indépendante ? Ensuite, il faut aussi se demander si leurs actions sont destinées à préserver leurs propres intérêts nationaux ou sont plutôt dictées par d’autres motifs.

Enfin, une dernière question, comment doit réagir l’Iran pour répondre à ses propres intérêts nationaux dans un monde caractérisé par des rivalités et par l’instabilité ?

La détérioration des relations entre le monde arabe et l’Iran est en grande partie due à la position géopolitique et géostratégique du Golfe Persique. Car le pays qui dominerait la région du Golfe Persique, aurait la possibilité et la capacité d’influencer le monde.

La question de la sécurité et de la paix durable dans la région du Golfe Persique et dans les Etats arabes, devient alors abordable.

Une autre considération est la diversité des acteurs, alors qu’il est clair qu’un vide au pouvoir permet à d’autres acteurs de s’imposer.

Ce phénomène n’est pas nouveau. Par le passé, les rivalités entre la Grande-Bretagne, l’Union soviétique et les États-Unis faisaient rage dans le Golfe Persique et lorsque la Grande-Bretagne instaura sa domination, les autres puissances se retirèrent.

Lorsqu’en 1968, le gouvernement britannique a évacué ses forces du Golfe Persique, de la mer d’Oman, de l’océan Indien et de la mer Rouge, une situation de vide a succédé et a conduit à l’apparition d’autres acteurs qui voulaient remplacer la Grande-Bretagne, ce qui a favorisé des rivalités de pouvoir . Pendant cette époque, l’Union soviétique et les États-Unis se présentaient comme acteurs puissants et déterminants au niveau international, tandis qu’au niveau régional l’Iran, l’Arabie saoudite et l’Irak assumaient leurs rôles, aussi bien directement qu’indirectement.

Dans le nouveau statut quo qui s’est établi à cette époque, l’Iran et l’Arabie saoudite, alliés de l’Occident, ont fait face à l’Irak qui a été soutenu par l’Union soviétique. Cette rivalité s’est  poursuivie jusqu’en 1975 jusqu’à ce que l’Iran devienne la première puissance régionale.

La révolution islamique en Iran a provoqué un nouveau vide dans la région, auquel sont venus s’ajouter d’autres événements : la guerre Iran-Irak, la bataille des tankers fut le prétexte pour la pénétration et la présence des forces étrangères dans la région afin d’y assurer la sécurité d’approvisionnement. L’occupation du Koweït par l’Irak et le changement de position des autres pays de la région à l’égard de l’Iran furent d’autres éléments qui peuvent nous aider à comprendre les raisons de la détérioration des relations entre l’Iran et le monde arabe.

L’Iran se trouve au centre de la plupart des évolutions survenues dans la région : le départ des forces britanniques en 1968, le traité de 1975 et le rôle joué par l’Iran au niveau régional et extrarégional, et ainsi de suite. Par ailleurs, l’occupation de l’Afghanistan par l’Union soviétique et la formation des Moudjahédines afghans sont d’autres événements clés qui continuent à préoccuper le monde.

Encore d’autres facteurs sont en cause de cette détérioration : l’occupation de l’ambassade des États-Unis, l’agression du régime baasiste irakien contre l’Iran, la présence des forces étrangères dans la région, l’acceptation de la résolution 598, l’agression de l’Irak contre le Koweït, la libération du Koweït par les forces de coalition jusqu’à la désintégration de l’Union soviétique en 1991 et la disparition du système bipolaire dans le monde.

Dans une étape avancée, la région été bouleversée par les événements du 11 septembre, l’attaque des forces de coalition sous l’égide des États-Unis contre l’Afghanistan , la chute des talibans, et l’apparition d’une nouvelle coalition mondiale contre le terrorisme, enfin, les soulèvements populaires arabes et l’émergence récente de l’extrémisme religieux .

Dans ces conditions-là, reprenons la question : est-ce que l’Iran peut établir des relations stables avec ses voisins arabes ?  Il existe plusieurs dimensions à notre question :

-La première considère que compte tenu de la dépendance des pays arabes, à l’exception de quelques-uns, à l’égard des États-Unis et de l’Occident, on ne pouvait espérer une amélioration des relations, tant que l’Iran ne réussissait pas à normaliser ses relations avec l’occident.

– La deuxième considère que l’Iran ne peut développer ses relations avec les Etats arabes sauf, si elle deviendra une réelle et grande puissance régionale dans les domaines politique, militaire et économique. Ce qui conduira les pays arabes, à améliorer de bon gré leurs relations avec l’Iran.

une troisième affirme que compte tenu de la permanence des tensions entre l’Iran et les pays arabes, l’établissement d’une relation stable devienne irréalisable.

enfin, la dernière position, qui semble plus acceptable réside dans le fait que, compte tenu du grand retour de l’Iran au sein de la communauté internationale, les pays arabes, par le biais de la détente et de la confiance, peuvent fonder de solides relations dans le respect mutuel, l’assurance des intérêts communs, l’entraide et la coopération, transformant les rivalités en amitié et concurrence positive.

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