Par Hall Gardner.
Avril 2001
Les relations américano-chinoises sont de nouveau en chute libre après qu’un avion chinois F-8 a percuté un avion de surveillance américain de type EP-3E. L’avion chinois est alors entré en collision dans les eaux de l’île Hainan. L’avion de surveillance américain a atterri en toute sécurité sur l’île Hainan. Il volait dans des eaux internationales aux alentours de 62 miles de la voie extérieure aux 12 miles nautiques des limites territoriales établies selon l’ordonnance de l’ONU sur la Convention maritime que la Chine avait signée. Cependant l’accident s’est déroulé dans les limites des 200 miles « de la zone d’exclusivité économique » revendiquée par la Chine.
L’EP-3E cherchait des sous-marins » Kilo-class » de type silencieux ou des nouveaux sous-marins chinois 093 capables de déployer des missiles de croisière. En plus des vérifications des avancées navales chinoises, l’avion espion devait aussi vérifier le potentiel de défense aérienne ainsi que le déploiement des missiles de surface aériens russes SA-300 semblables au système de missile rudimentaire anti-balistique. Il verifiait egalement aussi bien les capacités de croissance des équipements chinois des programmes militaires spatiaux et les signaux d’intelligence de l’île Hainan où est basée la flotte chinoise (1).
24 membres d’équipage, dont 3 femmes, ont finalement été rendus sains et saufs une fois que les Etats-Unis « hégémoniques » ont fourni les excuses d’usage « pour sauver la face. » Les déclarations du Département d’Etat américaine indiquant déplorer la disparition du pilote ont été interprétées de nouveau par Pékin comme une stratégie domestique de communication. Il est bien évident que les Etats-Unis peuvent reconnaître sans toutefois » regretter » leurs actes d’espionnage.
Le 2 avril, le Président George W. Bush a exigé l’accès immédiat à l’avion et a demandé qu’il soit rendu » sans d’aucune autre inspection « . Washington a essayé de soutenir le fait que l’avion, d’une façon ou d’une autre, possédait « l’immunité territoriale ». Pékin a, pour sa part, soutenu que l’avion avait violé la souveraineté de la Chine et que le blâme « se trouvait entièrement du côté américain. » L’avion n’a donc pas été rendu, les deux côtés ont continué à exprimer des sentiments durs sur l’incident malgré le retour des équipiers américains.
Les ingénieurs chinois et les experts de micro-électronique ont, en conséquence, parcouru l’avion de la tête au pied et essayeront d’étudier par ingénierie inversée n’importe quel équipement qui aurait été détruit par son équipage américain. Comme ce fut le cas pour le bombardier leurre terrassé en Serbie durant la guerre du Kosovo, la perte de technologie du côté américain pourrait bien représenter un avantage significatif pour la Chine. La perte semble aussi indiquer que les avances militaro-technologiques américaines peuvent s’avérer être provisoires.
La dernière déclaration nous apparaît en particulier comme vraie en ce qui concerne les révélations que la Chine aurait gardées top-secret. Des informations qui sont liées à la radiation causée par la « bombe à neutrons » (que l’on a pratiquement nommée « la bombe
capitaliste », son but étant de tuer les gens, mais de laisser les biens matériels intacts!) ainsi que par les armes thermonucléaires comme cela fut annoncé dans le Rapport Cox Barreur publié le 3 janvier 1999 :
» La République Populaire de Chine (RPC) a volé des informations confidentielles de conception des armes thermonucléaires les plus avancées des Etats-Unis. Ces vols de secrets nucléaires dans nos laboratoires militaires nationaux ont permis à la Chine de concevoir, développer et évaluer avec succès des armes nucléaires modernes et stratégiques plus tôt que possible autrement. Les secrets nucléaires américains volés donnent à la Chine la possibilité d’avoir accès à l’information sur des armes thermonucléaires identiques aux nôtres. Les vols de la Chine dans nos laboratoires nationaux ont commencé à la fin des années 1970, et on sait que des secrets significatifs furent volés dans le milieu des années 1990. Ces vols continuent certainement de nos jours (2). »
Tandis que le vol des secrets nucléaires par Pékin est significatif, les Etats-Unis se doivent aussi de blâmer la diffusion des hautes capacités militaro-technologiques à Pékin. Dans ses efforts de jouer « la carte de la Chine » [China card] contre l’Union soviétique, et ceci depuis les années 1970, les Etats-Unis ont cassé les décisions du Comité de Coordination (COCOM) de restriction sur la vente de technologies sensibles aux pays du bloc communiste. En fait, les Etats-Unis ont été accusés pendant la Guerre froide d’au moins 80 % de toutes les violations du COCOM, et plusieurs d’entre elles, en ce qui concerne la Chine (2). La technologie sensible a aussi inclut la vente de super-ordinateurs en Chine, qui peuvent aider à concevoir et évaluer des armes nucléaires et des trajectoires de missiles balistiques.
Dans le même temps, la presse américaine fut remplie des révélations des vols chinois des secrets nucléaires américains en 1999, les relations sino-américaines ont été plus que déchirées par le bombardement « accidentel » de l’ambassade chinoise à Belgrade, qui fournissait probablement des informations de signaux électroniques aux militaires serbes, ou même d’autres informations liées aux activités de l’OTAN. L’OTAN savait-il précisément ce qu’il y avait dans le bâtiment qu’il attaquait ? La question reste toujours sans réponse. Il est certain que la Chine pensait que l’attaque n’était pas « accidentelle », mais qu’elle a représenté une punition pour l’assistance en faveur des Serbes, ainsi que pour les vols de secrets nucléaires américains. Les protestations populaires en Chine contre l’OTAN bombardant l’ambassade et tuant du personnel diplomatique chinois étaient, en grande partie, spontanées et n’ont pas vraiment eu besoin de l’incitation du gouvernement.
Ayant appris la leçon du Kosovo, l’administration Bush a alors fait très attention quand elle a opté pour le bombardement des positions au sud de Bagdad, en janvier 2001, lors de la première action militaire de la nouvelle administration. Les attaques aériennes sur l’Irak avaient ainsi été prévues pour empêcher les ouvriers chinois d’installer des câbles de fibres optiques souterrains afin d’améliorer le potentiel de défense aérien de l’Irak. Ayant frappé l’ambassade chinoise à Belgrade pendant la guerre du Kosovo, Washington n’a pas voulu faire la même erreur en ce qui concerne le bombardement de Bagdad !
Ces incidents et ces actions militaires sont symptomatiques des nouveaux rapports tendus entre la Chine, puissance naissante, qui cherche à étendre son hégémonie sur le littoral asiatique et particulièrement sur Taiwan en réponse aux Etats-Unis, qui ont commencé d’étendre leur influence en Europe centrale et en Europe de l’Est, pour la première fois dans leur histoire, et ceci par le biais de l’agrandissement de l’OTAN après l’écroulement de l’Union
soviétique. L’agrandissement de l’OTAN en Europe centrale (et peut-être même au-delà) a lieu parallèlement aux essais de Washington de concurrencer, mais surtout de contenir l’Irak et l’Iran, aussi bien que de soutenir le statu quo après la deuxième guerre mondiale en encourant le risque réel de surexploiter les capacités de défense américaines. L’écroulement de l’Union soviétique, l’expansion de l’OTAN et la monté en puissance de la Chine, sont ainsi symptomatiques d’un radical changement déstabilisant l’équilibre mondial et régional avec des conséquences incertaines et potentiellement dangereuses.
Les questions futures qui peuvent, plus loin, renverser les relations sino-américaines incluent une décision, mise en suspens (attendue vers le 25 avril) par l’administration Bush, de vendre à Taiwan un nombre significatif d’armes incluant des sous-marins, des avions anti-sous-marins de patrouille, des armes et des destroyers de type Kidd-classe qui pourraient servir comme précurseurs au système Aegis de défense antimissile. L’administration Bush pourrait aussi décider d’accorder un visa de transit à Chen Shui-bian, le président de Taiwan, ce qui inquiète Pékin si jamais les Etats-Unis acceptaient Taiwan comme un pays indépendant. En juin, le Congrès américain décidera quels accords il pourrait attacher au renouvellement du statut de la normalisation des relations commerciales avec la Chine, qui pourrait affecter sa demande d’adhésion à l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC). Alors qu’en juillet, le comité des Jeux Olympiques Internationaux décidera si la Chine devra accueillir les Jeux Olympiques de 2008.
De plus, l’adhésion chinoise dans l’Organisation Mondiale du Commerce est toujours en attente. Les pourparlers de l’OMC avaient échoué (à nouveau) en février-janvier 2001, exactement au moment ou on s’attendait à ce que la Chine soit acceptée ! L’adhésion de la Chine avait calé sur les questions de subventions pour les produits agricoles Chinois et sur des questions, parmi d’autres, de mesures concernant l’ouverture de son secteur d’assurance protégé. En même temps, le fait que le chiffre du commerce annuel bilatéral sino-américain s’élève à plus de 115 milliards dollars peut signifier que les Etats-Unis pourraient restreindre n’importe quelle opposition potentielle à l’adhésion de la Chine à l’OMC.
La Guerre froide.
Les rapports de tension entre les Etats-Unis et la Chine font aussi éclater le mythe « des dividendes de la paix » que l’on a supposé voir venir à la fin de la Guerre froide. Le résultat de la fin de la Guerre froide était, à son tour, supposé nous mener « à la fin de l’Histoire ». La Guerre froide devait apparemment se terminer en Europe, mais les horreurs de purification ethnique en ex-Yougoslavie ont déjà indiqué que rien n’est aussi simple que de revendiquer. De plus, les nouveaux rapports tendus entre l’OTAN, L’UE et la Russie commencent à faire surface après la décision d’agrandir l’OTAN dans les anciennes sphères d’influence soviétiques/russes et de sécurité en Europe centrale ainsi qu’en Europe de l’Est. En même temps, malgré quelques succès de politique internationale, comme la transition du Cambodge à une indépendance relative après le déploiement de l’ONU et des forces de maintien de la paix au début des années 1990, la situation en Asie reste tendue.
La Guerre froide ne s’est pas encore terminée en Asie : l’Inde et le Pakistan sont toujours en totale opposition, se menaçant publiquement avec des armes nucléaires. La Corée est divisée car le temps de » la politique d’ouverture » [ » sunshine policy « ] qu’on a eu l’intention d’apporter aux deux Corée semble désormais révolu. Les Japonais et les Russes n’ont pas encore trouvé de compromis sur les îles Kouriles (ou sur les territoires du Nord) ; et le schisme entre la République Populaire de Chine et Taiwan n’a pas été réparé. En fait, ce n’est
pas seulement le cas de la Guerre froide qui n’est pas terminée en Asie, mais aussi, c’est que la Deuxième Guerre mondiale n’est pas là, non plus, officiellement terminée. Il n’y a eu aucun traité de paix mettant fin à la guerre entre les trois antagonistes principaux : la Russie, le Japon et la Chine.
Pendant la Guerre froide, il y avait au moins trois crises principales dans les détroits du Taiwan (1949-50 ; 1954-55 ; 1958-59). Pendant les années 1970, la politique américaine vers la Chine a commencé à changer lorsque les administrations de Nixon-Carter-Reagan ont cherché à jouer « la carte de la Chine » [ » China card » contre l’Union Soviétique. Alors, vers la fin de la Guerre froide, Pékin a commencé à exercer une certain pression sur les îles Spratly, qui sont situées au sud de la mer de Chine, stratégiquement riches en pétrole, et disposées sur les lignes de communication maritime qui mènent au Golfe Persique. Lorsque la Guerre froide fut terminée, une nouvelle crise sino-américaine a éclaté après la répression de la place Tienanmen en 1989. En 1996, la Chine a tiré des missiles désarmés dans des eaux taiwanaises. En 1999, pendant la guerre au Kosovo, l’OTAN a accidentellement bombardé l’ambassade chinoise à Belgrade ; et puis est alors survenu cette année l’épisode « accidentel » entre un avion de combat polyvalent chinois et un avion de reconnaissance américain aérien.
Les racines profondes de la rivalité sino-américaine émanent évidemment des conséquences de l’appui américain pour Chiang Kai-Chek contre Mao Ze Dong, bien que l’intervention américaine militaire en 1900, lors de la rébellion « des Boxeurs » (« les Poings d’Harmonie Juste »), juste après l’annonce d’une politique Americaine de « porte ouverte » pour résister à la rivalité impérialiste en Chine, peuvent toujours continuer à peser sur les coeurs des pan-nationalistes chinois (4). Encore que la cause la plus immédiate des rapports de tensions contemporains peut être due à l’échec des Etats-Unis et de la Chine à résoudre le statut de Taiwan.
La première crise a commencé en 1949-50 après que Chiang Kai-Chek a mené un million de ses disciples à Taiwan. Chiang a de même déplacé le plus grand nombre de ses troupes sur les îles de Quemoy et Matsu pour garder une position, afin de pouvoir reconquérir le Continent. Au commencement les Etats-Unis ont soutenu Chiang contre Mao et ont même menacé l’utilisation d’armes nucléaires contre ce dernier. Mais en janvier 1950, le Président Harry Truman a déclaré que les Etats-Unis ne s’impliqueraient pas dans la discussion pour les détroits de Taiwan. Il est possible que les Etats-Unis, avant la guerre coréenne, aient pu bénéficier de plans d’urgence pour enlever Chiang du pouvoir et transformer Taiwan en un Etat neutre sous protectorat de l’ONU. Indépendamment de ces causes, l’apparition de la guerre coréenne a, cependant, efficacement bloqué n’importe quels mouvements potentiels américains contre Chiang (5). L’interposition de la 7ème flotte dans les détroits de Taiwan en 1950, après que la guerre coréenne a éclaté le 25 juin 1950, fut conçue pour empêcher Mao d’attaquer le KMT ; de même, la flotte américaine a retenu Chiang d’attaquer le continent communiste. Les détroits ont été efficacement neutralisés. Taiwan a été efficacement et « doublement contenu » sous le protectorat militaire américain.
Dans la deuxième crise des détroits de Taiwan (août 1954-Mai 1955), Mao a bombardé lourdement Quemoy après que le Président Eisenhower a soulevé le blocus naval de Taiwan, donnant ainsi la possibilité d’une attaque des nationalistes du Koumintang sur le continent après que Chiang eût déplacé 54 000 soldats à Quemoy et 15 000 soldats à Matsu. Malgré les avertissements américains, Mao a alors opté pour un bombardement d’artillerie de Quemoy. En septembre 1954, les chefs américains des opérations militaires ont proposé en commun l’option d’employer des armes nucléaires tactiques pour défendre Taiwan, une option qui fut rejetée par le Premier ministre Britannique Winston Churchill et les ministres des Affaires Etrangères de l’OTAN en février 1955. En avril 1955, en raison du manque d’appui soviétique pour ses actions (Moscou n’a pas voulu être entraîné dans une confrontation avec Washington), la Chine a arrêté ses bombardements. Onze aviateurs américains pris pendant la guerre coréenne ont été libérés (6).
Entre 1956-57, les Etats-Unis ont commencé un déploiement de forces militaires taiwanaises, incluant des missiles Matador, avec une possibilité de portée allant jusqu’à 4 000 kilomètres, capables de déployer des ogives nucléaires ou conventionnelles. En 1958, Mao a de nouveau recommencé un bombardement lourd sur Quemoy en août-juillet 1958, juste après la visite de Khrouchtchev, très probablement pressé par l’avertissement (malgré la déclaration postérieure dans une lettre au Président Eisenhower que Moscou traiterait une attaque américaine sur la Chine comme une attaque sur l’Union soviétique). Car le bombardement de Mao sur Quemoy devait être, en fait, conçu pour prouver l’indépendance de Mao aux pressions soviétiques. Moscou a signalé qu’il soutiendrait probablement la Chine lors d’une attaque américano-taiwanaise, mais il ne soutiendrait pas le but de la Chine « de libérer » Taiwan si ce conflit était censé impliquer les Etats-Unis (7). Du fait que Moscou ne fut pas entièrement supporteur des objectifs chinois, la Chine a opté pour sa propre force de dissuasion nucléaire en 1964, après que Moscou ait unilatéralement abrogé, en octobre 1957, son accord pour fournir à la Chine ses capacités nucléaires ainsi que la décision de Khrouchtchev de retirer les conseillers techniques russes de Chine. La décision de Moscou de laisser tomber son appui pour Pékin fut destinée à envoyer un signal positif pour un rapprochement des relations avec les Etats-Unis, une opportunité non comprise par Washington.
En 1964 Mao déclarait son appui pour la révolution mondiale et cherchait à étendre ses revendications d’irrédentiste contre les deux superpuissances, les Etats-Unis et l’Union soviétique. En plus de la revendication de Taiwan contre les Etats-Unis, Mao a critiqué la répression soviétique en Europe de l’Est et en Pologne ; il a soutenu l’indépendance yougoslave et albanaise, aussi bien que les revendications de l’Allemagne de l’Ouest et du Japon contre Moscou. Il a aussi revendiqué non seulement les territoires d’Amour, mais aussi Vladivostok et l’île de Sakhaline. Et finalement il a commencé à soutenir des partis pro¬chinois communistes et d’autres mouvements révolutionnaires, comme des rivaux aux partis pro-soviétiques dans le Tiers-Monde en tant que mouvements « de libération ».
À la différence de la Grande-Bretagne et de la France, Washington avait évité la question de la reconnaissance diplomatique de Pékin dans les années 1949-50. Les Etats-Unis ont, en outre, refusé d’accepter Pékin au Conseil de Sécurité de l’ONU en 1950, comme cela fut exigé par Moscou. Cependant, ce n’était qu’en 1971 que Nixon et Kissinger ont simplement retiré leur support à Tapei au Conseil de Sécurité de l’ONU, et l’ont remplacé par Pékin. Non seulement Taiwan était balayé du Conseil de Sécurité de l’ONU, mais il fut aussi balayé de l’ONU, et ceci à la consternation des Etats-Unis. Ainsi l’ONU a accepté Pékin entant que gouvernement unique et légitime de la Chine. On peut argumenter que cette action, couplée avec l’échec américain de négocier sur la question taiwanaise, a représenté le premier apaisement de la Chine populaire qui a mené Pékin à croire qu’il serait en fin de compte possible d’absorber Taiwan a un long terme.
L’administration Nixon-Kissinger a secrètement ouvert la porte à la Chine par la Roumanie et le Pakistan en deux temps stratégiques : le premier but était de séparer la Chine et la Russie en ce qui concernait leur appui pour le Vietnam et fournir ainsi un moyen aux Etats-Unis pour qu’ils puissent sortir de l’Indochine après avoir bombardé Hanoï et l’Ho Chi Minh. Le
deuxième but était le développement de la Chine comme « un contrepoids actif stratégique » vis-à-vis de l’Union soviétique, dans ce qui est devenu « la Carte de la Chine » (Comme l’ambassadeur américain à l’ONU en ces temps était George Bush Sr, Pékin voyait toujours ce dernier d’une manière positive et a misé que le fils suivrait les pas illustres de son père).
Les pas de l’époque Nixon-Kissinger ont été alors suivis par la reconnaissance formelle de Pékin en 1978 par le Président Carter et son conseiller de sécurité nationale, Zbigniew Brzezinski. Ici, la hâte du dernier pour jouer « la Carte de la Chine » contre l’Union soviétique a ignoré les avertissements des conseillers de l’administration qui préconisaient à Pékin de renoncer à l’utilisation de la force dans le Détroit de Taiwan avant que les Etats-Unis n’accordent une identification diplomatique formelle (8). De nouveau, l’échec des pourparlers américains ont fortement pesé sur la question de Taiwan et ont été perçu par Pékin comme un apaisement tendant vers ses objectifs, bien que les Etats-Unis aient signé l’acte de relations avec Taiwan en 1979 qui a proclamé l’appui américain pour la réunification paisible de Taiwan et de la Chine, et a engagé les Etats-Unis à défendre le Taiwan en cas d’agression chinoise. D’autre part, juste une année après l’identification américaine, Pékin a commencé à flirter avec Moscou au début de 1979 dans un effort de réduire des rapports tendus, c’est-à-dire jusqu’à l’invasion soviétique de l’Afghanistan.
Bien que Ronald Reagan soit arrivé au pouvoir sur un politique pro-Taiwannaise, son administration a bientôt fait marche arrière sur la question. Comme Washington a continué de vendre pour 60 millions de dollars de matériels militaires partis à Taiwan en 1982, Pékin a menacé d’un rapport plus proche avec Moscou, après l’offensive de paix de 1981 de Leonid Brejnev et du discours de Tachkent en 1982. Le dernier a soutenu l’irrédentisme de la Chine sur Taiwan et a cherché à faire dévier la Chine loin de ses revendications sur Vladivostok et vers le littoral asiatique. La crainte d’appui soviétique pour les revendications chinoises et le refus de la Chine de jouer le jeu de contrepoids actif stratégique à l’URSS ainsi que les menaces de la Chine pour dévaloriser les relations avec Washington si les Etats-Unis continuaient la vente d’armes à Taiwan, ont mené l’administration de Reagan à signer le deuxième Accord de Shanghai en août 1982. Ce dernier s’est engagé à ce que les ventes militaires américaines à Taiwan n’excéderaient pas le niveau de 1979 en termes ou bien qualitatifs ou bien quantitatifs. Pour Pékin, cela a signifié que les ventes d’armes devaient baisser à zéro après trente ou quarante ans. Les Etats-Unis ont affirmé que les transferts privés d’armes étaient à l’extérieur des paramètres de l’accord.
Contrairement aux vues de l’époque, les deux pouvoirs communistes résoudraient en fin de compte les « trois obstacles » à la paix en réduisant le nombre des troupes et des armes le long de la frontière sino-soviétique, tirant les forces pro-soviétiques vietnamiennes du Cambodge et enlevant les troupes soviétiques de l’Afghanistan pendant la période 1982-89. Ces buts seraient réalisés par Mikhaïl Gorbatchev qui serrerait en effet les relations avec la Chine dans l’effort de couvrir le coté oriental très exposé de Moscou, en même temps que le retrait des forces soviétiques de l’Europe de l’Est, menant à la dissolution du pacte de Varsovie. À l’époque, Washington a faussement laissé comprendre à Gorbatchev que l’OTAN n’étendrait pas sa juridiction au-delà des frontières de l’Allemagne.
La Guerre post-guerre froide : reprise des confrontations.
Tandis que la période de 1969-1987 a représenté « un apaisement » américain sur les objectifs chinois, la période après 1987 représenterait une période de nouvelle confrontation. En 1988¬89 les Etats-Unis ont accusé la Chine de fournir des armes, des missiles, ou de la technologie
nucléaire à l’Iran, à l’Arabie Saoudite et au Pakistan (actions qui ont eu lieu avant la Place Tienanmen en 1989). La critique américaine de ces ventes d’armes a été vue comme hypocrite par Pékin car les ventes chinoises n’étaient pas de l’ampleur de celles des Etats-Unis, de l’Union soviétique ou même des ventes européennes. Les Etats-Unis, cependant, ont critiqué les ventes d’armes chinoises, les appuis en technologie nucléaire comme un potentiel de déstabilisation de l’équilibre régional du Sud de l’Asie et du Moyen-Orient. De plus, en 1988, les marines chinoises et vietnamiennes se sont heurtées dans les îles Spratly, après que la Chine eu envahit les îles Paracel en 1976. La Chine, le Vietnam et Taiwan ont tous revendiqué les îles Spratly : la consommation de pétrole continuant à monter en Extrême-Orient, la possibilité de conflit sur les îles Spratly devient de plus en plus possible.
En l’occurrence, le Congrès américain était fortement critique sur l’appui de la Chine au génocide Khmer Rouge ainsi que sur son programme de modernisation nucléaire, sa politique d’avortement obligatoire, son traitement et son état d’échec à la libération des prisonniers politiques, aussi bien que sur sa politique répressive au Tibet. Deux événements principaux dans la société chinoise dans la période 1988-89 (avant les événements de Tienanmen) ont alors signalé la transformation de la politique de Pékin « d’internationalisme » en « pan-nationalisme » cru. Le premier était en décembre 1988, les heurts entre des étudiants chinois et des étudiants africains à l’Université Hehei à Nanjing qui a apporté à la Chine la notoriété mondiale, dans la presse internationale, d’être un pays « raciste ». Le deuxième était le traitement brutal du mouvement d’autonomie tibétain, après que le Premier ministre chinois Li Peng a instauré la loi martiale déclarée au Tibet en mars 1989 suite au soulèvement tibétain. Le soulèvement tibétain a représenté une protestation contre le grand afflux de Chinois dans la région, l’exploitation à grande échelle par la Chine des ressources naturelles du Tibet et le dumping de déchets nucléaires dans la région, les restrictions de la liberté de parole, la persécution religieuse et la torture de dissidents au nom de sa mission civilisatrice (9).
En juin 1989, place Tienanmen, des mesures de répression qui étaient, en partie, basées sur des craintes que le mouvement d’étudiants chinois ; comme celui des ouvriers du mouvement de Solidarité en Pologne dont la croissance a aidé à ébranler la légitimité soviétique et a abouti à la désagrégation soviétique ; risquaient en fin de compte de scinder la Chine. La direction chinoise a craint que le Taiwan, le Tibet et probablement la province de Xinjiang puissent rechercher l’indépendance. Plutôt que de prendre les risques d’une réforme point par point, une faction minoritaire du Politburo de Deng Xiao Peng a décidé de prendre des risques de répression plus dangereux. Zhao Ziyang et Li Peng, tous les deux lieutenants de Deng, se sont mesurés dans un duel dangereux. L’intransigeant Li Peng a gagné, plaçant le partisan réformiste « du nouvel autoritarisme », Zhao Ziyang, sous assignation à domicile.
Comme prévu par le Premier ministre chinois Li Peng, les capitales japonaise, européenne et américaine ont commencé à reculer devant la Chine malgré la répression du mouvement démocratique des étudiants. En même temps, Moscou a essayé de profiter des pauvres relations sino-américaines pour jouer sa propre version « de la Carte de la Chine ». Les ventes d’armes russes en Chine ont alors amené les Etats-Unis à justifier une vente d’armes principalement de F-16s à Taiwan en 1992. La France a aussi obtenu un contrat de vente d’armes important avec Taipei portant sur la vente des Mirages 2000-S, aboutissant à un scandale impliquant alors le Ministre des Affaires Etrangères Roland Dumas qui, depuis, tourmente la politique intérieure française.
Après quelques efforts d’réconciliation, des rapports tendus ont de nouveau éclaté entre Washington et Pékin en 1995-1996, quand la Chine a déployé 150 000 soldats dans la province du Fujian, à travers les détroits, et a fait tirer des missiles nucléaires désarmés, pendant des exercices militaires dans le voisinage des ports taiwanais, perturbant la ligne aérienne principale et les itinéraires d’expédition (causant la chute de l’Heng Seng, l’index de valeur tombant à 7.3%) dans un effort d’intimidation du mouvement pro-indépendantiste de Taiwan ainsi que d’influence sur les élections de mars 1996. Washington a interposé la 7ème flotte, envoyant deux groupes de porte-avions dans la région. La flotte américaine a ainsi patrouillé dans les détroits pour la première fois depuis 1976. Malgré les efforts chinois d’empêcher le parti pro-indépendantiste de gagner les élections, le Président Lee Teng-hui a été élu Président de Taiwan en mars 1996.
De nouveau, les Etats-Unis et la Chine ont essayé de réparer les pots cassés, mais ont échoué. Les Etats-Unis ont pris des mesures pour augmenter le commerce avec la Chine par l’Accord sino-américain de novembre 1999. En même temps, les Etats-Unis ont aussi commencé à critiquer Beijing pour ses mesures de répression sur le groupe religieux Falun Gong. De plus, le Congrès américain a accusé la Chine d’activités d’espionnage significatives et de vols de secrets nucléaires américains, comme précédemment exposé dans cet article. En 2001, la Chine a échoué dans son entrée dans l’OMC, la nouvelle administration Bush a demandé à Pékin, peu disposé à le faire, d’enquêter sur les sociétés chinoises qui avaient violé l’embargo commercial de l’ONU sur l’Irak, à la suite des bombardements d’installations militaires au sud de Bagdad.
Les efforts accomplis dans l’ère post-guerre froide par les Etats-Unis pour pousser la Chine et la Russie l’une contre l’autre a mené la Russie à prendre le contre-pied afin de jouer sur les craintes américano-européennes d’une alliance sino-russe pour leurs propres avantages mutuels. En même temps, Pékin et Moscou restent toujours soupçonneux des intentions de chacun. Dans cette perspective, depuis le discours de Brejnev à Tachkent, la Russie et la Chine semblent jouer leur propre jeu vis-à-vis des Américains : les efforts sino-russes de rechercher à contrer les Européens, afin d’organiser une association sino-russe stratégique, ainsi que des ventes d’armes russes de haute technologie à la Chine, avec des appels à l’établissement d’un monde « multipolaire », représentent les efforts considérables de résistance à l’unipolarité ou à l’hégémonie américaine.
La Chine a, en conséquence, cherché à pousser les Etats-Unis et l’UE (et le Japon) l’un contre l’autre en même temps qu’elle poussait la Russie contre les trois. En mai 2000, l’entente bilatérale EU-Chine, par exemple, a été suivie le 4 juillet 2000 par un nombre important d’accords sino-russes, qui incluent des contrats d’armement pour 2 à 3 milliards de dollars, concernant la co-conception de 200 Su-27s assemblés en Chine. La Chine pourrait aussi obtenir des nouveaux destroyers russes, des missiles anti-navires, des systèmes de défense aériens et ,en fin de compte, des Su-30s. Pendant les années 2000-2005, on s’attend à ce que la Chine achète pour 15 milliards de dollars des articles fabriqués en Russie, ainsi que des licences de production. Une deuxième phase de 2005-2015 représenterait des plans pour le développement commun et la fabrication de munitions et d’armes, incluant la recherche et le développement commun d’avions de nouvelle génération, des missiles, des systèmes d’armes laser basés sur de la haute technologie.
En attendant, la réaction inverse est que les Etats-Unis et le Japon ont renforcé leur alliance bilatérale (Tokyo s’est concentré sur ses capacités navales pour protéger ses voies de navigation jusqu’au Golfe Persique) ; Taiwan cherche des sous-marins, des avions anti-sous-marins de patrouille et des armes et les destroyers de type Kidd-classe, qui pourraient servir de précurseurs au système de défense antimissile Aegis.
L’idéologie et la transformation de l’image de la Chine.
Pendant la période allant de Nixon à Reagan, la Chine a été soudainement transformée « du mauvais » communiste des jours sombres de la guerre coréenne et de la période Mc Carthy « en bon » communiste des années 1970. « La bonne » Chine des années 1970 a été dépeinte comme un Etat entêté qui avait autrefois perdu sa direction, mais était maintenant paisiblement à la recherche d’une économie orientée vers le marché et était sur la voie d’établir une société démocratique-libérale. (Cette théorie souvent répétée était la conception américaine de la Chine. Vision singulièrement américaine, un peu comme la conception marxiste du socialisme dans lequel les Etats socialistes se transformeraient en fin de compte en communisme pur sans Etat !)
Comme Nixon qui a joué au ping-pong diplomatique avec Mao à Pékin, des jeunes radicaux aux Etats-Unis et en Europe sont sortis dans les rues pour dire à leur façon comment ils détestaient le système bureaucratique soviétique du socialisme, mais en revanche comment ils soutenaient l’expérience maoïste chinoise. Cette image positive de la Chine parmi des intellectuels de gauche a eu tendance à être supportée avant que l’appui de la Chine pour le génocide Khmer Rouge ne soit connu. L’appui occidental idéologique (parmi des intellectuels) pour la Chine a, par la suite, décliné, encore que, le gouvernement américain essaye toujours de supporter l’image positive de la Chine en grande partie parce qu’il a voulu renforcer le régime Khmer Rouge pro-chinois comme un outil de résistance au Vietnam pro¬soviétique qui s’était déplacé au Cambodge. Au temps de Ronald Reagan, l’Union soviétique est devenue « l’Empire du mal » (d’après le film, de la Guerres des Étoiles), des anciens guérilleros maoïstes, un leader angolais d’UNITA, Jonas Savimbi, a été soudainement transformé en patriote tant que son mouvement demeurait anti-Castro ou anti-soviétique.
Washington a ainsi entretenu l’espoir que la Chine resterait « un contrepoids stratégique passif » contre Moscou, au moins jusqu’en 1988, même si Pékin ne s’opposait plus activement à l’Union soviétique. Dès 1988-89, les rapports tendus entre Moscou et Pékin étaient venus à son terme avec la résolution apparente des trois obstacles pour la paix sino-soviétique : des troupes soviétiques ont laissé l’Afghanistan, le Vietnam a laissé le Cambodge, et tous les deux ont réduit des troupes et des armes nucléaires le long de la frontière sino-soviétique, précédemment, sous l’effet de la tension, L’offensive de paix de Brejnev en 1981-82 avait réalisé ses objectifs. Parce que la menace soviétique a été réduite au minimum, la Chine était alors capable de se concentrer sur l’expansion de ses intérêts dans le littoral asiatique et à l’étranger, et était de plus en plus capable de menacer Taiwan, et même encore plus, après l’écroulement soviétique.
Depuis les années 1980, l’image de la Chine se déplacerait de l’alternative au communisme soviétique et à un libérateur « du Tiers-Monde » vers celle d’un Etat qui a été plus concerné par le soutien des mouvements pan-islamiques. Dans son livre « Le Choc des Civilisations » Samuel Huntington a soutenu que la formation d’alliance sino-islamique avait suivi un changement historique « du heurt entre des idéologies rivales » à « un heurt entre des civilisations ». Ici, cependant, il n’y avait aucune vérité réelle reconnue à l’un ou l’autre mythe. Il n’y avait rien « d’international » à l’écrasement du Tibet en 1950, ni de l’appui de la Chine pour le régime Khmer rouge ; il n’y a vraiment pas non plus un vrai rapport « sino-islamique ». Tandis que la Chine, dans le passé, a eu des relations fortes avec le Pakistan et l’Iran, par exemple, et a aidé le programme nucléaire du Pakistan, la Chine n’a pas été un partisan cohérent des Etats du monde prétendument « islamique ». Pékin a aussi eu des échanges
significatifs militaires et technologiques avec Israël, et a été engagé dans l’écrasement des mouvements Ouïgours dans la province de Xinjiang, actuellement soutenus par les Talibans d’Afghanistan. (les Ouïgours sont des musulmans sunnites).
Le repositionnement de la Chine dans les années 1990 et dans le nouveau millénaire, a fait que son image a, par conséquent, radicalement et dramatiquement changé, et est maintenant catégorisée comme un « pan-nationalisme » cru. Cette nouvelle image, cependant, est problématique. Le risque est qu’aujourd’hui la politique américaine pourrait de nouveau « rendre comme démoniaque » la politique chinoise (comme ce fut le cas pour l’Union soviétique en tant que « l’Empire du mal » avant Gorbatchev, malgré l’affectation de relations américaines avec les efforts de Gorbatchev de reformer la Chine). La fabrication de la Chine comme un ennemi potentiel rendra impossible toutes négociations avec la RPC de façon flexible. Un autre risque est une réaction exagérée possible dans l’affaire de l’avion espion qui pourrait chercher à couper la Chine de son statut de normalisation commerciale permanente avec les Etats-Unis ou ne pas permettre à Pékin d’intégrer l’Organisation Mondiale Commerciale (9). Cela pourrait accélérer une répercussion semblable à celle du Japon avant la Deuxième Guerre mondiale (10). Comme précédemment mentionné, le fait que le commerce annuel bilatéral sino-américain vaut plus de 115 milliards de dollars peut probablement signifier que les Etats-Unis pourraient modérer n’importe quelle opposition potentielle de l’adhésion de la Chine à l’OMC, ou au moins atténuer n’importe quelles lignes dures.
D’autre part, l’adhésion à l’OMC ne peut pas nécessairement dissuader la Chine de rechercher à s’unifier avec Taiwan par la force. Pékin croit que ses demandes pour s’unifier avec Taiwan sont « justes » comme celles en parallèle des demandes de l’Allemagne de l’Ouest de se réunifier avec l’Allemagne de l’Est. Ainsi Pékin en veut fortement aux Etats-Unis et aux efforts de l’UE de bloquer ses objectifs ! Pékin soutient qu’il peut intervenir militairement à Taiwan si ce dernier: 1) développe des armes nucléaires; 2) forge une entente ou une alliance avec la Russie; 3) est confrontée à une révolte ou une insurrection ; 4) déclare l’indépendance ; 5) rejette l’idée de réunification pendant une longue période de temps. En essence, les buts pan-nationaux de la Chine vers l’unification avec Taiwan semblent être : 1) d’empêcher Taiwan de soutenir ou d’inciter les nouveaux mouvements de sécession sur le continent ; 2) d’éliminer la compétition taiwanaise sur l’exportation ; 3) d’affirmer le contrôle des îles Spratly et des autres réserves extraterritoriales pétrolières ; 4) d’éliminer une menace potentielle stratégique et être dans une meilleure position pour défendre la Chine contre des rivaux potentiels (12).
Comme préconisé dans mon article précédent dans » Géostratégiques » N°2 (13), les Etats-Unis doivent maintenant entraîner Moscou dans une entente Japon-Russie-UE au sein de l’OTAN ayant pour but majeur d’empêcher Moscou d’appuyer la levée militaro-technologique de la Chine, et ainsi faire pression sur la Chine pour accepter une résolution de la question taiwanaise sur une base confédérale « d’une Nation, deux Etats, plusieurs systèmes » comme une variante diplomatique à « une politique de la Chine. » Cette approche diplomatique doit fournir à Taiwan une autonomie significative politico-économique ainsi que l’indépendance militaire. Tandis que les deux côtés pourraient s’engager dans des joint-ventures de politique fiscale commune, par exemple, on ne permettrait pas à l’Armée Populaire de Libération de mettre le pied à Taiwan. Une telle approche peut s’obtenir des deux côtés à une table de négociation, mais pas sans difficultés réelles !
Un heurt entre les Etats-Unis et la Chine est une possibilité réelle. Ce ne sera pas cependant un heurt de civilisations, mais plutôt d’intérêts géopolitiques. Pour empêcher un tel heurt, les
deux côtés doivent réévaluer leur politique et définir « des intérêts essentiels » ainsi que s’engager ensuite dans un dialogue approfondi et dans un processus de négociation, afin d’empêcher « des accidents » futurs et des malentendus qui peuvent être employés comme un prétexte pour la guerre.
Notes.
1) Christopher Cox (R-CA); Rep. Norman Dicks (D-WA) « COX REPORT » House Select Committee ON U.S. Security & Military/Commercial Concerns (Declassified summary)
2) Edwin O. Reischauer Center, The United States and Japan (Washington, DC: 1989), 37
3) Pour une perspective à long terme des relations géostratégiques américaine, européenne et chinoise, Hall Gardner, « China and International Relations in the New Millennium » Journal of the Institute of Asian Studies, Chennai India Vol XVII , No 2 Special March 2000. http://hometown.aol.com/wignesh/3 gardner.htm
4) Bruce Cumings, Origins of the Korean War, Vol 2 (Princeton: Princeton University Press, 1990). Voir mon interprétation de l’apparition de la guerre coréenne dans Hall Gardner, Surviving the Millennium: American Global Strategy, the Collapse of the Soviet Empire and the Question of Peace (Westport, CT: Praeger, 1994).
5) « Taiwan Strait Crises » Federation of American Scientists www.fas.org
6) Ibid.
7) Leslie Gelb, « Interview » Arms Control Today 10,8 (September 1980): 6.
8) Hall Gardner, « China and the World After Tiananmen » SAIS Review, Winter-Spring 1990.
9) Voir mon argument dans, Hall Gardner, « Russia and China: The Risks of Uncoordinated Transatlantic Strategies » in The New Transatlantic Agenda, eds. Hall Gardner and Radoslava Stefanova (Ashgate July 2001 forthcoming).
10) Sur l’analogie a la pre-guerre mondiale II, voir Hall Gardner dans NATO Looks East ed. Robert J. Jackson and P. Dutkiewisc (Westport, CT: Preager, 2000).
11) Hall Gardner, « China and International Relations in the New Millennium » Journal of the Institute of Asian Studies,
http://hometown.aol.com/wignesh/3 gardner.htm
12) Voir Hall Gardner, » Une géostratégie pour paix mondiale « , Géostratégiques, N° 2
Février 2001.
13) Voir aussi mon argument dans Hall Gardner, « Russia and China: The Risks of
Uncoordinated Transatlantic Strategies » dans The New Transatlantic Agenda, eds. Hall
Gardner and Radoslava Stefanova (Ashgate juillet 2001 prochain).