Jacques MYARD
Député des Yvelines, Membre de la Commission des affaires étrangères, Membre de la Commission aux affaires européennes, Membre de la Délégation parlementaire au renseignement, Président du CNR.
RÉSUMÉ
Certes, les relations franco-orientales n’ont jamais été un long fleuve tranquille. Il y a eu des tensions, des incompréhensions douloureuses, des ruptures, mais toujours, la raison a repris le dessus pour panser les blessures, et poursuivre le nécessaire dialogue des civilisations.
Or, depuis les printemps arabes, imprévisibles tout aussi bien dans l’Orient que dans l’Occident, donc créditant la thèse de l’opportunisme spontané mais malheureusement armé et prédateur inspiré même trop partiellement du modèle iranien de 1979, et les bouleversements qu’ils engendrent à ce jour, la France peine à élaborer une nouvelle politique orientale et persane.
Si l’on peut regretter l’insuccès de la Conférence internationale de Paris sur le Proche-Orient, il n’existe pas d’autre solution pour une paix juste et durable que celle d’Etats vivant côte à côte. La volonté de paix c’est la volonté de vivre, option sur le dialogue pour prévoir et résoudre les problèmes.
Il est bien connu que le chemin de Damas est long, celui des autres capitales, aussi !
**********************
Député des Yvelines, Membre de la Commission des affaires étrangères, Membre de la Commission aux affaires européennes, Membre de la Délégation parlementaire au renseignement, Président du CNR.
La France entretient depuis des temps multiséculaires des relations étroites avec le Proche et Moyen-Orient.
Protectrice des chrétiens depuis les premières capitulations de 1535, la France s’est vue reconnaître par la Sublime Porte le droit de protection sur les étrangers de l’Empire et à partir de 1604 sur les religieux étrangers catholiques.
Elle a su aussi être à l’écoute du monde de l’Islam, qu’il soit sunnite ou chiite.
De très grands noms comme James Darmesteter, spécialiste de la Perse et successeur de Renan à la Société asiatique en 1882, ou Jacques Berque, professeur au Collège de France, traducteur du Coran, ont permis à la France de recueillir une forte connaissance de ces peuples et de gagner leur confiance.
Certes, les relations franco-orientales n’ont jamais été un long fleuve tranquille. Il y a eu des tensions, des incompréhensions, des ruptures, l’expédition hasardeuse de Suez en 1956 a marqué les mémoires, mais toujours, la raison a repris le dessus pour poursuivre le nécessaire dialogue des civilisations.
Toutefois, depuis les printemps arabes, qu’aucune diplomatie n’avait vu venir, et les bouleversements qu’ils ont engendrés, provoquant des guerres civiles aggravées par des interventions étrangères, la France peine à élaborer une nouvelle politique orientale et persane, se cantonnant dans des postures volontiers morales et s’alignant sur les positions de certains Etats de la Région pour des raisons commerciales.
L’Orient est compliqué, il n’existe pas une seule ligne de lecture, toutes doivent y être combinées pour tenter de le comprendre.
Aux antagonismes entre le monde chiite et le monde sunnite s’imbriquent les rivalités traditionnelles de puissance entre l’Iran, la Turquie et l’Arabie Saoudite. Parmi les Etats occidentaux, la France doit agir en puissance d’équilibre avec les pays qui composent cet ensemble complexe.
L’Iran est une Nation incontournable, elle bénéficie d’un Etat structuré avec une jeunesse, filles et garçons, de mieux en mieux formée. La conclusion de l’accord de Vienne sur le nucléaire du 14 juillet 2015 ouvre des perspectives de retour de la France à la condition toutefois que Paris n’entame un discours moralisateur permanent sur le régime de Téhéran.
De plus, la France doit clairement rappeler à Washington que l’attitude américaine qui consiste à jouer avec les sanctions contre l’Iran pour écarter les entreprises françaises et européennes n’est pas acceptable et est de nature à détériorer les relations franco-américaines ; les prétentions extraterritoriales des lois américaines sont contraires au droit international. L’Iran est, enfin, un partenaire dans la lutte anti-terroriste.
C’est d’ailleurs ce combat contre l’Etat islamique qui devrait faire passer au second plan les rivalités entre l’Arabie Saoudite, l’Iran et la Turquie.
La France, à ce titre, devrait en tirer toutes les conclusions et éviter de se tromper d’ennemi, en Syrie notamment.
Contrairement aux idées reçues, le régime de Damas n’est pas tombé « avant Noël » et sa résilience est certaine avec l’appui de ses alliés.
Entre deux maux, il faut choisir. Les barbares de l’Etat islamique représentent aujourd’hui la menace principale pour tous les peuples de la région et, au-delà, pour la France et l’Europe.
Il est regrettable que Paris ait coupé tous les ponts avec Damas. Le rétablissement des relations diplomatiques est une nécessité, ce qui ne signifie pas l’absolution pour le régime ; c’est aux Syriens de choisir, le temps est révolu où les pays occidentaux étaient faiseurs de rois.
La France se doit de dépasser les postures et cesser de fonder sa politique dans cette région sur un « droit-de-l’hommisme » primaire, coupé des réalités, et qui ne fait que cristalliser les antagonismes.
La France doit continuer à rechercher malgré les difficultés une solution de paix dans le conflit israélo-palestinien, aujourd’hui dans l’impasse, qui cristallise nombre d’affrontements dans la région. Si l’on peut regretter l’insuccès de la Conférence internationale de Paris sur le Proche-Orient, il n’existe pas d’autre solution pour une paix juste et durable que celle de deux Etats vivant côte à côte.
Seuls le dialogue, l’ouverture, peuvent faire évoluer la situation de ces peuples. Il est bien connu que le chemin de Damas est long, celui des autres capitales, aussi !