L’Académie de Géopolitique de Paris a organisé le jeudi 27 février, à Paris, une conférence de presse sur la crise actuelle en Ukraine en invitant une délégation ukrainienne à s’exprimer sur le sujet.
La délégation ukrainienne était composée de :
- Madame VITRENKO NATALIA MIKHAILOVNA,docteur en économie, chef de la délégation députée (2ème et 3ème législatures), présidente du Parti socialiste progressiste d’Ukraine, opposé au président Ianoukovitch,
- Monsieur MARCHENKO VOLODYMYR ROMANOVICH, député (2ème et 3ème législatures), président de la « Confédération du travail Ukrainienne »
- Monsieur SERGACHOV VALERIY ALEXANDROVICH, député au Conseil régional d’Odessa (5ème législature), Président du Parti Rus de Kiev.
- Monsieur Andrei VOLODKO, interprète, journaliste d’Odessa, chaine TV « Académie ».
Après de brèves présentations d’usage, le président Ali Rastbeen a invité madame VITRINKO à prendre la parole afin qu’elle puisse exposer sur les évènements qui sont en train de se dérouler en Ukraine et leurs différents enjeux.
Madame Vitrenko principale oratrice de la conférence avait expliqué que son parti est antifasciste et anti raciste.
Elle a notamment abordé trois principaux volets de la question ukrainienne qui fait couler beaucoup d’encre aujourd’hui.Le premier volet concerne la question des manifestations de la place Maidan.Le deuxième concerne l’état de corruption de l’économie et de la politique oligarchique du pays.Le troisième concerne le danger du rapprochement de l’Ukraine vers l’UE
En s’appuyant sur de nombreuses photos prises sur le terrain, madame VITRENKO a expliqué que les manifestations qui ont eu lieu à la Place Maïdan ont été l’oeuvre de groupes nazis armés et formés à l’idéologie nazie affirmée. Tant sur la place Maïdan que dans la mairie de Kiev qu’ils avaient investie, on trouve des symboles typiques du nazisme ; croix gammée, croix celtique, les chiffres 88 qui veulent dire HH (huitième lettre de l’alphabet) pour Heil Hitler. Fin janvier, le ministre de l’Intérieur ukrainien avait dénombré 20 structures de ce genre d’extrémistes.
Madame VITRENKO a reproché aux délégations européennes, à Catherine Ashton et à la troïka des ministres des Affaires étrangères français, allemands et Polonais, d’avoir rapidement soutenu le mouvement des manifestants et de ne pas avoir vu cette frange réellement naziste qui s’est substituée à eux. Pire encore, elle leur reproche d’avoir estimé que ce mouvement des manifestants dans son ensemble allait dans le sens des valeurs européennes.
D’autres exemples illustrent encore cette montée du facisme. C’est ainsi que l’équipe de foot ukrainienne a brandit le drapeau rouge et noir et d’autres symboles du fascisme. La Fédération de foot les a sanctionnés. La délégation s’étonne que là aussi, les Européens n’aient rien vu.
Il est aussi reproché que les Européens aient dicté à Iaoukovitch des directives intenables, face à l’opposition nazie de la rue.
Madame VITRENKO, est soutenue par son collègue l’ancien député SERGACHOV. Ils insistent tous les deux sur le fait que la majorité des manifestants racistes de la place Maïdan ne sont pas représentatifs de l’ensemble des 45 millions d’ukrainiens.
Ils ont également abordé le rôle de la CIA dans la formation de ces groupements fascistes. Les miliciens percevaient une solde de 200 $ par semaine (alors que le salaire mensuel moyen est de 300$) ; les activistes percevaient jusqu’à 200 $ de l’heure. Un groupement pouvait ainsi percevoir 30.000 $ par jour.
Pour combattre tout cela, il a été créé, en septembre 2013 un « Front national de résistance à l’intégration » regroupant 40 organisations manifestant hostiles au rapprochement de l’Ukraine avec l’UE. Mais il y a eu « black out » de l’information sur leur activité. De même, le gouvernement Ianoukovitch a empêché le parti « Progressiste socialiste d’Ukraine » de se présenter aux élections par le moyen des droits à payer : 300.000 $ pour qu’un parti présente des candidats ; 100.000$ pour se présenter à la présidentielle. Madame VITRENKO en a ainsi été rayée de la compétition. Les cautions ne sont remboursées qu’en cas de succès.
Selon madame VITRENKO, les manifestations s’expliquent en raison de la politique économique désastreuse menée par le président déchu Ianoukovitch. En effet, en l’espace de 10 ans il a haussé les imports de 1000 %, reculé l’âge de la retraite de 5 ans pour les femmes… Il a donné de l’argent aux liquidateurs de Tchernobyl mais en a détourné à son profit.
Pire, l’Ukraine vit une situation d’oligarchie enracinée composée entre autre, par l’entourage de Ianoukovitch, notamment ses fils. Quelques petits groupes contrôlant les médias et tous les secteurs clés. Parmi ces derniers, un groupe très puissant tenu par Kolomoïsky : qui dit représenter la communauté juive au niveau européen, mais qui est fortement contesté.
Le dernier point à ne pas négliger et sur lequel madame VITRENKO a mis l’accent est le rapprochement entre l’Ukraine et l’Union européenne et l’OTAN et ses conséquences désastreuses.
En effet, les Européens ont une part de responsabilité dans la situation actuelle en Ukraine car ils ont fait miroiter aux Ukrainiens de l’ouest une situation économique meilleure, une augmentation de leur niveau de vie et la sécurité grâce au rapprochement avec l’OTAN.
Or, il ne faut pas oublier que la Russie est très présente en Ukraine de l’est et du sud, deux parties très importantes dans le secteur industriel du pays, ainsi qu’en Crimée. En dehors des intérêts économiques, la base militaire de Sébastopol est indispensable pour les Russes, car elle leur assure un accès à la Méditerranée.
Madame VITRENKO ne mâche pas ses mots et a même évoqué le danger d’une troisième guerre mondiale comme réaction russe face au ralliement éventuel de l’Ukraine à l’Union européenne et l’OTAN. Les Russes ne l’accepteront pas et envahiront l’Ukraine qui, étant membre de l’OTAN, devra automatiquement être défendue par l’OTAN. C’est donc un risque à ne pas négliger.
A la fin de l’exposé de madame VITRENKO, il y a eu un débat général avec la salle, lors duquel les trois députés ukrainiens présents ont répondu aux questions de la salle.
La conférence de presse a été clôturée par une brève intervention le président Rastbeen qui a rappelé le rôle de la diplomatie dans la résolution des conflits de toutes natures. Et dans le cas de l’Ukraine, il a souligné le souhait partagé que Paris, Berlin et Moscou s’entendent pour sortir de cette impasse, car l’avenri de l’Ukraine passe forcément par l’établissement de relations apaisées aussi bien avec la Russie qu’avec l’Union européenne.