Dans le cadre de son cycle d’études diplomatiques, l’Académie Géopolitique de Paris organisait le 13 Mai 2022, à son siège situé au 5 rue Conté 75003 Paris, une conférence sur les relations franco-chinoises avec la présence exceptionnelle de S.E. l’Ambassadeur de la République populaire de Chine en France, Monsieur Lu Shaye.
Les relations franco-chinoises connaissent un développement croissant stratégique et incontournable. A l’occasion de cette conférence , Monsieur l’Ambassadeur de Chine en France se propose de nous livrer l’analyse et le point de vue chinois face aux enjeux politiques, stratégiques et économiques qui transforment le monde d’aujourd’hui et préparent celui de l’avenir.
S.E. M. Lu Shaye
Ambassadeur de la République populaire de Chine en France
M. le Président Ali Rastbeen,
Chers amis,
C’est un grand plaisir pour moi d’échanger avec vous sur invitation de l’Académie de Géopolitique de Paris (AGP).
Il y a quelques jours, dans son message de félicitations adressé au président Emmanuel Macron à l’occasion de sa réélection, le président chinois Xi Jinping a souligné l’importance stratégique accrue du développement sain et stable des relations sino-françaises, au moment où la situation internationale traverse des changements profonds et complexes. Par une heureuse coïncidence, le thème que l’AGP m’a proposé pour mon intervention aujourd’hui est précisément « les relations sino-françaises dans l’environnement international actuel ». En effet, alors que le monde connaît beaucoup de mutations et de bouleversements, il est bien nécessaire de discuter de la situation internationale et des relations sino-françaises. La Chine et la France sont deux grands pays de l’Orient et de l’Occident et membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies. Les relations sino-françaises revêtent une portée mondiale. L’évolution de la situation internationale influe sur les relations sino-françaises, et vice versa, l’interaction entre la Chine et la France peut avoir une influence importante sur la situation internationale. J’aimerais profiter de cette occasion pour partager avec vous mon point de vue sur cette question et échanger avec vous sur des sujets qui vous intéressent.
Pour ce qui est de la situation internationale, le sujet le plus brûlant en ce moment est sans aucun doute le conflit entre la Russie et l’Ukraine.
Le conflit russo-ukrainien dure depuis plus de deux mois et s’avère particulièrement inquiétant. Certains avertissent que le conflit pourrait devenir un déclencheur de la « troisième guerre mondiale ». D’autres s’alarment de l’effondrement en cours de l’ordre international actuel, construit sur les ruines de la Seconde Guerre mondiale. Ce ne sont pas des propos alarmistes. Avec l’engrenage de la guerre et des sanctions, ce conflit géopolitique se transforme progressivement en une crise mondiale, générant des crises secondaires politique, sécuritaire, économique, alimentaire, de réfugiés et autres, ce qui pose de nombreuses menaces pour la paix et le développement durables de l’Europe et du monde entier. Nous devons sérieusement réfléchir comment mettre fin au conflit le plus vite possible, comment évaluer l’impact de cette crise sur le monde ainsi que les changements qu’elle implique, et comment gérer le monde de l’après-crise. J’ai remarqué qu’après un raz-de-marée de condamnations et de critiques contre la Russie dans les premiers jours du conflit, les intellectuels et les médias français commencent récemment à faire entendre des voix différentes, avec des points de vue éclairants, qui se concentrent essentiellement sur les questions suivantes.
Première question : qui était à l’origine du conflit ?
L’Ambassadeur Maurice Gourdault-Montagne, ancien Secrétaire général du Ministère français des Affaires étrangères, n’est pas d’accord avec certains médias occidentaux qui exagèrent le rôle personnel de Poutine dans le conflit russo-ukrainien. D’après lui, Poutine n’est pas fou. Le conflit russo-ukrainien est le résultat de l’expansion continue de l’OTAN vers l’est, et l’Occident doit comprendre les préoccupations sécuritaires de la Russie dans une perspective historique et géographique. Le point de vue de l’Ambassadeur Gourdault-Montagne est objectif. Car tout conflit géopolitique a un contexte historique complexe. La recherche par un pays de sa propre sécurité au prix de l’insécurité d’autrui conduit inévitablement au conflit. D’autres experts pensent que la cause profonde du conflit est que les Etats-Unis, imprégnés de la mentalité de la guerre froide, ont poussé cinq cycles consécutifs d’expansion de l’OTAN vers l’est et incité l’Ukraine à adhérer à l’OTAN malgré l’opposition de la France, de l’Allemagne et d’autres puissances européennes, ce qui a réduit considérablement l’espace de sécurité de la Russie. Si des missiles balistiques étaient déployés en Ukraine, ils pourront atteindre Moscou en sept ou huit minutes. Et si c’était un missile hypersonique, il ne prendra que quatre ou cinq minutes. Cela revient à diriger le canon vers la porte de la maison de quelqu’un. Pour la Russie, l’expansion de l’OTAN vers l’est représente désormais un enjeu vital au sens littéral du terme. Alors que les Etats-Unis refusent de dialoguer, face à la loi de la jungle, la seule façon de réagir est la loi de la jungle.
Selon le géopolitologue français Pierre-Emmanuel Thomann, les Etats-Unis veulent créer un monde unipolaire et tentent d’enflammer la situation en Ukraine afin de faire durer la guerre aussi longtemps que possible pour affaiblir la Russie. Je suis d’accord avec lui pour dire que la guerre russo-ukrainienne est plutôt une « prophétie autoréalisatrice » des Etats-Unis. Rappelons ce que les Etats-Unis ont fait avant et après le déclenchement du conflit. En fin 2021, lorsque les tensions entre la Russie et l’Ukraine s’accentuaient à un rythme accéléré, contrairement à l’Europe qui cherchait à éteindre l’incendie, les Etats-Unis ont soufflé sur le feu, répondant négativement à la demande de garanties de sécurité de la Russie, exagérant la menace de guerre et poussant l’OTAN à augmenter ses troupes en Europe orientale. Certains pensent même que les Etats-Unis ont tenté d’« appâter » la Russie pour qu’elle fasse la guerre. Après l’éclatement du conflit, les Etats-Unis jettent de l’huile sur le feu et sont les plus mobilisés dans l’envoi d’armes à l’Ukraine, ce qui a conduit à l’escalade. Les Etats-Unis prétendent défendre la paix, mais ce qu’ils veulent et font en vrai, c’est se servir du conflit russo-ukrainien pour satisfaire leurs propres intérêts et garder leur hégémonie. La crise ukrainienne a une fois de plus montré que l’hégémonie américaine est le principal « détonateur » de guerres et la plus grande « source de troubles » dans le monde.
Deuxième question : qui a gagné et qui a perdu dans le conflit ?
Qui est le plus grand gagnant du conflit russo-ukrainien ? Examinons les conséquences objectives du conflit : l’OTAN en état de mort cérébrale est réactivée par la guerre, les relations entre l’Europe et la Russie sont complètement détruites, l’Europe en quête d’autonomie stratégique est plus dépendante des Etats-Unis en matière de sécurité et d’énergie, le complexe militaro-industriel américain fait fortune grâce à la guerre, les capitaux fuient en masse l’Europe pour les Etats-Unis, tandis que les « effets secondaires » causés par les flux de réfugiés et la prolongation des conflits géopolitiques restent sur le vieux continent. Je vous suggère de regarder une courte vidéo récemment mise en ligne par Le Figaro sur son site web. Elle a analysé comment les Etats-Unis profitent du conflit russo-ukrainien dans les secteurs d’industrie de l’armement, d’énergie et d’agriculture. Qui est le plus grand gagnant dans ce conflit et qui est le dernier à souhaiter que la guerre finisse ? La réponse est évidente.
Si les Etats-Unis sont le plus grand gagnant, alors qui est le plus grand perdant ? La quasi-totalité des intellectuels et des médias français s’accordent à dire que l’Europe est en train de devenir la première victime du conflit. Ils ont peut-être raison. D’un point de vue politique et sécuritaire, l’architecture de sécurité européenne et le paysage géopolitique européen, qui étaient dans les grandes lignes stables pendant les trente ans après la fin de la guerre froide, sont en train d’être modifiés. La guerre est de retour à la porte de l’Europe, la boîte de Pandore de la course aux armements est rouverte et le risque de la guerre nucléaire émerge. Dans l’optique économique, les retombées des sanctions massives contre la Russie ont touché l’Europe de manière disproportionnée : le prix du gaz a décuplé en glissement annuel, l’inflation dans la zone euro a atteint un nouveau record depuis la naissance de la monnaie unique, le marché financier européen a connu la plus grave fuite de capitaux de l’histoire en une semaine, et les entreprises de l’UE, qui sont les principaux investisseurs étrangers en Russie, ont subi des pertes énormes. Du point de vue social, l’Europe sera confrontée au plus grand afflux de réfugiés depuis la Seconde Guerre mondiale. Il y a sept ans, la crise syrienne a fait affluer deux millions de réfugiés en Europe. L’impact se fait toujours sentir aujourd’hui. Le conflit russo-ukrainien a déjà engendré au moins 10 millions de réfugiés, dont 5 millions fuyant vers l’Europe. L’Europe sera confrontée à des épreuves encore plus sérieuses, voire extrêmes, au niveau social et économique. L’Europe est durement touchée par le conflit russo-ukrainien alors qu’elle n’est pas encore complètement sortie de la pandémie, ce qui a renversé presque du jour au lendemain les prévisions de stabilité et de prospérité durables de l’Europe et augmenté sensiblement l’incertitude de ses perspectives de développement.
Troisième question : quelle évolution du conflit sera dans le plus grand intérêt de l’Europe ?
Pour l’Europe, il y a trois scénarios d’évolution du conflit russo-ukrainien. Premier scénario, intensifier les sanctions contre la Russie dans l’espoir que les sanctions et une guerre prolongée feront tomber la Russie ; deuxième scénario, augmenter l’aide en armement à l’Ukraine dans l’espoir de la déroute de la Russie sur le champ de bataille ukrainien ; et troisième scénario, chercher une solution pacifique par le dialogue et les négociations. Comment choisir ? Les intellectuels français ont trois points de vue qui donnent matière à réflexion. Le premier est qu’il est peu probable de faire tomber la Russie. Sans parler de la forte puissance militaire de la Russie, du seul point de vue du caractère national, l’Ambassadeur Gourdault-Montagne estime que « la population russe est résiliente et souvent plus habituée à survivre qu’à vivre » et qu’il ne faut pas avoir d’« illusions excessives sur l’efficacité des sanctions ». Le deuxième point de vue est que l’envoi d’armes à l’Ukraine constitue une démarche dangereuse au bord de la « participation directe à la guerre » et pourrait entraîner l’Europe dans une confrontation frontale avec la Russie, voire une guerre nucléaire. Récemment, les inquiétudes dans ce sens se sont fait de plus en plus entendre. Le troisième point de vue est celui d’un analyste politique français Philippe Gélie, qui relève que face à la Russie, « même la victoire serait périlleuse », voire plus périlleuse que la défaite. D’une part, l’histoire a déjà démontré à répétition qu’il n’est jamais sage d’acculer une grande puissance dans une situation désespérée. D’autre part, la victoire sur le champ de bataille n’apporte pas forcément la paix. Si, comme l’espère l’Occident, Poutine quittait le pouvoir en cas de défaite dans la guerre avec l’Ukraine, la Russie plongera certainement dans le chaos et deviendrait même une source de troubles régionale. Qui en pâtirait en premier ? Encore l’Europe. Les Etats-Unis peuvent regarder les bras croisés sur l’autre rive de l’Atlantique, mais où l’Europe pourrait-elle se cacher ? Après cette guerre, l’Europe et la Russie resteront toujours des voisins et devront de nouveau rechercher une architecture de sécurité commune. Alors, pourquoi ne pas commencer avant que le conflit ne s’envenime davantage ?
Nous notons que la position de la France sur cette question a toujours été très claire. Le président Macron n’a jamais renoncé à ses efforts pour résoudre pacifiquement les différends par le dialogue. Il s’est entretenu par téléphone avec le président Poutine à plusieurs reprises depuis le début du conflit. Récemment, le président Biden a accusé la Russie de « génocide » en Ukraine. Le président Macron a dit publiquement que « le mot de génocide doit être qualifié par des juristes, pas par des politiques » et qu’il n’était pas sûr que « l’escalade des mots serve la cause ». La Chine apprécie l’attitude rationnelle de la France et soutient son rôle positif dans la recherche du règlement pacifique du conflit russo-ukrainien. Nous sommes prêts à travailler avec la France pour favoriser le retour de la paix sur le continent européen le plus tôt possible.
Je voudrais également parler du rôle de la Chine dans le conflit russo-ukrainien. Quelques pays occidentaux, les Etats-Unis en tête, tentent de répercuter les coûts de la guerre sur la Chine. Au début du conflit, ils ont dénigré la Chine, affirmant qu’elle avait connaissance des opérations militaires russes et qu’elle était même « complice » de la Russie ; ensuite, ils ont exigé que la Chine prenne parti et se joigne à eux pour condamner la Russie ; ils ont même accusé la Chine d’avoir aidé la Russie à échapper aux sanctions, et ont menacé d’imposer des sanctions secondaires à la Chine. Je voudrais faire trois remarques. D’abord, le postulat de la « théorie de la responsabilité chinoise » dans le conflit russo-ukrainien n’est pas valable. La Russie et l’Ukraine sont toutes les deux pays amis de la Chine, et l’évolution actuelle de la question ukrainienne est ce que la Chine ne voulait pas voir. Mais la Chine n’est pas partie prenante. Elle peut participer à la recherche d’une solution à la crise, mais la clé pour résoudre le problème n’est pas entre les mains de la Chine. Deuxièmement, les critiques contre la Chine ne tiennent pas la route du tout. Dès l’éclatement du conflit, la Chine se démène pour rechercher une solution pacifique, jouant un rôle constructif. Ce que la Chine dit et fait est totalement transparent. On peut tirer ses conclusions de manière objective sur la base des faits. Troisièmement, la menace américaine d’imposer des « sanctions secondaires » à la Chine n’est ni raisonnable ni utile. La menace des Etats-Unis vise un autre but. Un rapport du groupe de réflexion américain la RAND Corporation indique clairement que créer des conflits en Europe et dans la région du Pacifique et entraîner la Chine dans la guerre est une stratégie établie des Etats-Unis pour contenir la montée en puissance de la Chine. Je tiens à souligner que la Chine n’a jamais provoqué les autres, mais elle n’a jamais peur des provocations non plus. Si les Etats-Unis veulent exploiter le moindre prétexte pour endiguer la Chine, nous y répondrons avec force et fermeté.
Le conflit russo-ukrainien montre une fois de plus que la communauté internationale est confrontée à de sérieux défis de sécurité. Dans ce contexte, le président Xi Jinping a avancé l’Initiative pour la sécurité mondiale lors de la Conférence annuelle 2022 du Forum de Boao pour l’Asie. Il a exposé systématiquement l’approche de la Chine pour résoudre les problèmes de sécurité épineux dans le monde et apporté des solutions pratiques pour relever les défis sécuritaires, y compris le conflit russo-ukrainien. Cette initiative comprend « six engagements », à savoir : s’engager à porter une vision de sécurité commune, intégrée, coopérative et durable ; s’engager à respecter la souveraineté et l’intégrité territoriale des pays ; s’engager à observer les buts et principes de la Charte des Nations Unies ; s’engager à prendre en compte les préoccupations sécuritaires légitimes de tous les pays ; s’engager à rechercher, par la voie du dialogue et de la concertation, des solutions pacifiques aux divergences et différends interétatiques ; et enfin, s’engager à adopter une approche globale pour préserver la sécurité traditionnelle et la sécurité non traditionnelle. Partant de la pratique diplomatique de la Chine, cette initiative répond au besoin urgent de la communauté internationale de sauvegarder la paix mondiale et de prévenir les conflits et les guerres, correspond à l’objectif commun de tous les pays de préserver le multilatéralisme et la solidarité internationale, et fait écho à l’aspiration générale des peuples à surmonter ensemble les difficultés pour créer un monde meilleur dans l’après-COVID. C’est l’illustration du sens de responsabilité de la Chine en tant que grand pays.
Les Etats-Unis, au contraire, ont des agendas cachés dans le conflit russo-ukrainien et ont tendu trois pièges à la communauté internationale. Premièrement, le piège du manichéisme. Les Etats-Unis cherchent à intensifier les conflits géopolitiques en prônant l’approche binaire « ami ou ennemi », « noir ou blanc ». Deuxièmement, la mentalité de la guerre froide. Les Etats-Unis tentent de provoquer une confrontation des blocs dans le monde en prêchant la « rivalité entre démocratie et dictature ». Troisièmement, le chantage. Les Etats-Unis cherchent à exploiter le conflit russo-ukrainien pour prendre en otage les relations sino-européennes et demandent aux pays du monde entier de choisir leur camp. Comme le dit un universitaire français José Garson, « ce qui se passe dans la guerre actuelle montre que les Etats-Unis ont décidé d’abandonner le multilatéralisme pour retourner aux politiques de rapports de force de l’ancien temps. »
Nous espérons que tous les pays du monde, y compris l’Europe, resteront vigilants à l’égard des conséquences dangereuses des actes hégémoniques des Etats-Unis, se placeront du bon côté de l’Histoire et travailleront ensemble pour sauvegarder le multilatéralisme ainsi que la paix et la stabilité mondiales.
Lorsque l’on parle de la situation internationale, la pandémie de la COVID-19 est un sujet incontournable.
A l’heure actuelle, l’épidémie continue à se propager dans le monde et pose toujours une grande menace pour la vie et la santé des peuples et un énorme défi pour la sécurité de la santé publique mondiale. L’humanité vit dans une communauté de destin. Aucun pays ne peut faire face seul à un défi mondial comme la pandémie de la COVID-19. Voilà l’enseignement le plus important que nous donne la crise sanitaire. La pandémie a diminué les interactions entre les pays, il est donc d’autant plus important que nous renforcions davantage la compréhension et le soutien mutuels et réduisions les barrières des cœurs. Ce n’est que de cette manière que les pays pourront surmonter les difficultés et travailler dans la solidarité pour sortir au plus vite de l’ombre de la pandémie. Mais malheureusement, certains médias et intellectuels français font le contraire. Par exemple, ces derniers temps, dans la presse française, certaines personnes ont accablé la Chine de la moquerie au sujet de la nouvelle vague de la COVID-19 en Chine et lancé des critiques gratuites contre la politique « zéro COVID dynamique ». Leurs prétendus « arguments » ne sont ni objectifs ni scientifiques. Cela est extrêmement irresponsable et fourvoie le public dans sa perception de la Chine. Nous avons réfuté ces divagations en détail dans des articles publiés sur le site Web de notre ambassade. Si vous êtes intéressés, vous pouvez y jeter un coup d’œil.
Depuis les dernières années, l’Europe accorde une attention croissante à la Chine. Mais en même temps, certains médias et chercheurs regardent la Chine sous un prisme de plus en plus négatif. En particulier, depuis le début de la pandémie, ils sont allés jusqu’à lancer une campagne de « China-bashing ». Certains d’entre eux le font par malentendu, parce qu’ils ne connaissent pas la situation réelle, tandis que d’autres sont mus par des préjugés idéologiques et critiquent pour le plaisir de critiquer. Par exemple, pour ceux qui prétendent que la Chine a perdu dans la lutte contre la COVID-19, lorsque nous avons apporté des éclaircissements, avec les chiffres du nombre d’infections et de décès à l’appui, ils esquivaient la question et nous parlaient des impacts économiques des politiques antiépidémiques de la Chine ; et lorsque nous avons présenté les résultats économiques, ils changeaient de sujet et parlaient du coût social. Si nous suivions vraiment les « conseils » de ces personnes et abandonnions la politique « zéro COVID dynamique », je crois que ces mêmes personnes accuseraient le gouvernement chinois de mépriser la vie du peuple. L’Europe et la Chine sont géographiquement éloignées et n’ont pas de conflits d’intérêts stratégiques majeurs. Si certains en Europe ont des préjugés aussi profonds à l’égard de la Chine, je crains que, dans une grande mesure, c’est parce qu’ils sont embrasés par l’idéologie, et sont intoxiqués et même manipulés par quelques-uns d’autres.
Chers amis, je vous remercie d’être venus prendre le temps d’échanger avec moi. Cela montre que vous vous intéressez aux relations sino-françaises et vous voulez connaître la vraie Chine. Alors, comment porter un jugement objectif sur la Chine au milieu des reportages médiatiques de tout acabit et souvent imbus de préjugés ? Je voudrais saisir cette occasion pour partager trois réflexions avec vous, en prenant l’exemple de l’épidémie en Chine.
Premièrement, il faudrait juger les choses sur la base des faits. Par exemple, pour ce qui est de savoir si la Chine a échoué dans sa lutte contre la COVID-19, aujourd’hui, je me garderai de tirer la conclusion, je vous donne seulement des chiffres. En termes de taux de mortalité, en Chine, environ 1 personne sur 92 000 est décédée de la COVID-19, contre 1 sur 333 aux Etats-Unis et 1 sur 462 en France. En termes de proportion de personnes infectées par rapport à la population totale, en Chine, c’est environ 1 personne sur 2230, contre 1 sur 4 et 1 sur 2,4 respectivement aux Etats-Unis et en France. D’ailleurs, en Chine, lorsque des cas confirmés sont signalés dans une région, plusieurs cycles de tests PCR y seront effectués à grande échelle, voire parmi tous les habitants. La majorité des cas confirmés sont en fait des porteurs asymptomatiques. Alors que dans la plupart des pays, les tests PCR ne sont effectués que chez les patients symptomatiques et selon leur volonté. Le taux d’infection réel y est donc plus important que les chiffres publiés. En termes économiques, la Chine a réalisé une croissance de 8,1 % en 2021 et de 4,8 % en glissement annuel au premier trimestre 2022. En revanche, l’économie américaine a enregistré un taux de croissance annualisé de moins 1,4 % au premier trimestre 2022, et la France a connu une croissance nulle pendant la même période. La simple comparaison des chiffres suffit à savoir si l’allégation selon laquelle la Chine a échoué dans sa lutte contre l’épidémie tient la route ou pas.
Deuxièmement, il est important de voir les choses dans une optique globale et évolutive. Dans leurs reportages sur la Chine, certains médias ont coutume de se focaliser sur une ou deux informations négatives et de les amplifier indéfiniment. Mais il est essentiel d’avoir une vue d’ensemble et globale. Pour apprécier les coûts et les résultats de la lutte contre l’épidémie, il est nécessaire d’évaluer à la fois sur le plan économique et au niveau du bien-être du peuple. La politique « zéro COVID dynamique » et les mesures antiépidémiques mises en place en Chine reviennent à acheter une police d’assurance pour les 1,4 milliard de Chinois contre des incertitudes de l’évolution de l’épidémie et de la propagation des virus mutants. C’est sacrifier temporairement le confort de vie d’une minorité de personnes pour maximiser le bien-être social global. Dans une mégalopole de 25 millions d’habitants comme Shanghai, la mise en œuvre des politiques antiépidémiques implique forcément des inconvénients dans la vie quotidienne. S’il existe inévitablement des problèmes isolés et des voix négatives, il y a beaucoup plus d’histoires positives et de gestes touchants. Simplement, les médias français en font abstraction. Il est aussi très important de considérer les choses dans leur évolution. Face à une épidémie qui évolue rapidement et à de nouveaux variants qui surgissent sans cesse, les politiques antiépidémiques d’aucun pays ne peuvent parer à toute éventualité et doivent être constamment améliorées et ajustées dans la pratique. La Chine ne fait pas exception. Au début de l’actuelle vague épidémique, il y a eu en effet des défaillances dans la gestion sanitaire à Shanghai. Mais on a rapidement fait des ajustements pour rendre les politiques antiépidémiques plus scientifiques, plus précises et plus humaines. Par exemple, l’installation des hôpitaux de fortune où les parents peuvent accompagner leurs enfants infectés, l’adoption des mesures innovantes pour assurer la livraison de fournitures chez les habitants, etc. Ces derniers jours, le nombre de nouveaux cas confirmés et de cas asymptomatiques à Shanghai a considérablement diminué. On peut espérer sous peu une « transmission collective zéro » à Shanghai. De Wuhan à Shanghai, la pratique a prouvé à plusieurs reprises que les mesures sanitaires mises en place en Chine sont pertinentes et efficaces et peuvent résister à l’épreuve de l’Histoire.
Troisièmement, il faut respecter les voies choisies par les différents pays en fonction de leurs conditions nationales. Les conditions nationales des pays présentent une grande diversité, et il est naturel que leurs choix en matière de voies de développement et de politiques ne soient pas identiques. La politique « zéro COVID dynamique » est le choix le plus adapté aux réalités de la Chine. Tout d’abord, la population de la Chine est 20 fois plus importante que celle de la France. Si la Chine adoptait l’approche française de lutte contre l’épidémie et si les contaminations et les décès survenaient à la même proportion qu’en France, il y aurait des conséquences inconcevables. Ensuite, les Chinois ont l’esprit de sacrifice au profit de l’intérêt commun de la nation. C’est dans nos gènes culturels. S’il est vrai que certains Chinois s’opposent à la politique « zéro COVID dynamique », l’immense majorité des Chinois sont prêts à respecter strictement le protocole sanitaire. Mais ils sont absents dans les reportages des médias occidentaux. En même temps, la vision d’ensemble de la Chine qui considère « le pays entier comme un seul échiquier » a fourni la garantie à la mise en œuvre de la politique « zéro COVID dynamique ». En moins de 10 jours après l’arrivée de l’actuelle vague épidémique à Shanghai, plus de 38 000 personnels soignants civils et 2 000 personnels soignants militaires y ont été envoyés en renfort. Tout le reste du pays vient en aide aux zones en difficulté. C’est grâce à cet esprit de solidarité que chaque fois qu’il y a eu une résurgence épidémique, nous avons toujours pu réaliser le « zéro COVID dynamique » en un temps assez court. La Chine n’a aucune intention de comparer son système avec celui d’un quelconque pays, et encore moins de le concurrencer. Nous n’avons jamais jasé sur les politiques antiépidémiques de l’Occident. Nous espérons simplement que les pays occidentaux considéreront les politiques antiépidémiques de la Chine avec la même mentalité et que nous nous soutiendrons et nous encouragerons mutuellement, au lieu de stigmatiser et de discréditer.
Enfin, je voudrais parler avec vous des relations sino-françaises.
Actuellement, les transformations de notre monde, de notre époque et de l’Histoire se déroulent d’une manière inédite. De nombreux intellectuels français estiment que quand la pandémie remodèle profondément le paysage international et le conflit russo-ukrainien fait renaître le spectre de la guerre froide, l’humanité se trouve à une nouvelle croisée des chemins. Dans un tel contexte, comment les relations sino-françaises peuvent-elles trouver leur place et quel rôle peuvent-elles jouer ? Je pense qu’il faut garder à cœur trois éléments, à savoir la confiance, l’ambition et l’engagement initial.
Tout d’abord, la confiance. Depuis l’établissement des rapports diplomatiques entre la Chine et la France il y a plus de 50 ans, les relations sino-françaises ont résisté aux aléas internationaux et forgé une grande résilience à travers un parcours marqué par des hauts et des bas. Les échanges et coopérations étroits ont permis de resserrer les liens politiques, économiques et culturels. Au cours des cinq dernières années, les relations sino-françaises ont globalement maintenu une dynamique de développement soutenu, ce qui en fait l’une des relations entre grands pays les plus stables. Nous avons confiance que le président Macron continuera d’attacher de l’importance aux relations avec la Chine et maintiendra la stabilité de la politique chinoise de la France dans son second mandat. Nous sommes également persuadés que les relations sino-françaises connaîtront un plus grand développement sous l’impulsion des deux Chefs d’Etat.
Deuxièmement, l’ambition. La Chine et la France sont toutes deux des pays grands et singuliers, et des nations dotées de la sagesse politique et d’une vision mondiale. Comme le président Xi Jinping l’a souligné, ensemble, la Chine et la France pourront apporter de grandes transformations au monde. Il y a plus de 50 ans, la Chine et la France ont établi des relations diplomatiques sur fond de la guerre froide. Cet événement, qualifié de « bombe nucléaire diplomatique brisant la glace de la guerre froide », a profondément changé le cours des relations internationales. Aujourd’hui, quand le spectre de la guerre froide plane à nouveau sur le monde, il est d’autant plus important pour la Chine et la France, deux grands pays et représentants par excellence des civilisations de l’Orient et de l’Occident, d’assumer les responsabilités qui leur incombent, d’œuvrer ensemble à la compréhension mutuelle entre l’Orient et l’Occident, et de contribuer, par leur rôle exemplaire, à la défense du multilatéralisme, de la paix et de la sécurité mondiales.
Enfin, l’engagement initial. Ces dernières années, l’échiquier international a connu de profonds changements et les relations sino-européennes sont entrées dans une période de remodelage historique. Dans ce contexte, comment tenir le cap des relations sino-françaises ? Dans son entretien téléphonique avec le président Macron il y a quelques jours, le président Xi Jinping a formulé la proposition de la Chine, à savoir poursuivre l’esprit d’indépendance, de compréhension mutuelle, de clairvoyance et de bénéfice partagé, qui avait présidé à l’établissement des relations diplomatiques sino-françaises. Nous sommes convaincus que, tant que les deux pays resteront attachés à cet engagement initial et prendront des décisions indépendantes et lucides en tenant compte des intérêts nationaux de chacun, leurs relations bilatérales pourront continuer d’avancer, et même si des remous et des écueils surviendraient, elles pourront toujours rectifier le cap à temps et aller de l’avant.
Je m’en arrête là pour mon intervention. Merci de votre attention et je suis maintenant disposé à échanger avec vous.
Echange avec la salle
Le Président M. Ali RASTBEEN
Merci beaucoup Votre Excellence pour une analyse pertinente pour la situation actuelle du monde notamment en ce qui concerne la politique chinoise envers la Russie et l’Ukraine, envers l’Europe et concernant la situation du Covid 19.
De plus, vous avez bien signalé la sécurité mondiale, les principes de respect de la souveraineté politique et de non-ingérence dans les affaires intérieures des autres pays.
Je donne à présent la parole à la salle
Frédéric SAILLOT
Journaliste et fondateur d’Eurasie Express
Début février, le 4 février, le président Poutine et le président Xhi Jinping ont signé un communiqué qui développe un accord stratégique entre la fédération de Russie et la Chine, entre l’Eurasie et la Chine qui se conclut par les relations entre la Russie et la Chine sont placées sous le signe d’une amitié sans limite.
M. L’Ambassadeur, vous n’êtes pas sans savoir qu’il y a quelques temps de cela, la fédération de Russie a lancé un missile stratégique Kalibr de la mer noire sur Kiev, le jour où s y trouvait le Secrétaire Général de l’ONU.
Vous avez rappelé l’importance des relations multilatérales. Est-ce que ce fait, est ce que cet acte de la fédération de Russie n’est pas une limite à cette amitié que le communiqué de début février rappelait entre la Russie et la Chine ?
Réponse de S.E. M. l’Ambassadeur de Chine en France
La Chine et la Russie sont des partenaires stratégiques depuis de longues années et cela tout le monde en a connaissance. Ces derniers temps, ces dernières années sous la direction des deux chefs d État, ce partenariat s’est très bien développé.
Et cela augmente dans tous les domaines et cela est dans l’intérêt de nos deux pays et dans le maintien de la paix et de la stabilité mondiale. La Chine et la Russie jouent un rôle de stabilisateurs du monde.
En ce qui concerne la crise actuelle russo-ukrainienne, j’ai exprimé tout à l’heure que la Chine respecte toujours le principe de la souveraineté et de l’intégrité de tous les pays. La Chine préconise aussi qu’il faut tenir compte des préoccupations sécuritaires légitimes de tous les pays. Il faut considérer que cette affaire ou bien cette crise en prenant en considération les tenants et aboutissants de l’affaire. Il faut s’attaquer à la cause profonde de cette crise là.
Je me rappelle au début de l’éclatement de la crise, il y a un écrivain américain, un chercheur américain qui a écrit un article dans lequel il exposait un point de vue. Il a dit que si on évalue ou si on considère la crise à partir du 24 février de cette année alors c’est la faute de la Russie car elle a déclenché la guerre. En revanche, si on considère cette crise là à partir des années 90, du dernier siècle alors l’OTAN doit assumer la responsabilité principale parce qu’après la désagrégation de l’union soviétique l’OTAN qui est un produit de la guerre froide dont le rival est l’organisation du pacte de Varsovie qui a été dissous mais n’a pas disparu. L’OTAN n’est pas en conséquence dissous mais s’est renforcé et à appliqué 5 cycles d’expansion à l’Est en avançant sa frontière jusqu’à la porte de la Russie. Ce qui a constitué une menace sécuritaire majeure pour la Russie.
La Russie a posé à plusieurs reprises leur inquiétude vis à vis de l’OTAN et elle a été refusé. C’est le parcours de cette histoire. Donc il faut considérer tous ces éléments historiques pour évaluer objectivement et justement cette crise là.
Et on peut aussi évaluer ce que s’est passé un peu avant l’éclatement de cette crise par exemple avant la fin de l’année dernière. Il existait des tensions autour de la frontière de la Russie, de l’Ukraine et en Europe de l’Est. il y avait des rassemblements des troupes de l’OTAN et des pays membres de l’OTAN. Bien sûr, il y a aussi les manœuvres militaires de la part de la Russie, mais il y a aussi des manœuvres de l’armée ukrainienne dans la région est du Donbass.
Et je me rappelle que la partie russe a avancé des propositions de négociations avec l’OTAN sur la sécurité en Europe sur la construction d’une nouvelle structure sécuritaire en Europe et la Russie a avancé trois propositions dont celle de la neutralité de l’Ukraine. Mais je n’ai pas vu l’OTAN réagir favorablement à ces propositions. Donc il faut être honnête, il faut être objectif, il faut voir considérer tous les éléments avant de tirer la conclusion.
Abdelafid OTMANI
Professeur d’économie
Je voudrais juste revenir sur la question de l’hégémonie américaine que vous avez évoqué tout à l’heure. La Russie a commencé la vente de pétrole en utilisant le rouble. Sachant la position actuelle du dollar , je voudrais savoir si vous pensé que la Chine peut jouer un rôle dans ce sens pour diminuer l’hégémonie américaine en diminuant la place du dollar dans le commerce international
Réponse de S.E. M. L’Ambassadeur de Chine en France
La Chine préconise la mondialisation économique du monde parce que ce qui est le plus dans l’intérêt des pays dans la « globalisation », on peut utiliser ce mot là, la « globalisation » économique.
Les pays peuvent économiser les coûts de la production mais maintenant on voit qu’avec des actes de la part des États-Unis la « globalisation » économique est un peu détruite. La Chine, par exemple, est la plus grande victime de ces actes là. Beaucoup d’entreprises chinoises de hautes technologies ont été blacklistées par les américains pour la coupure d’approvisionnement ce qui a énormément bouleversé la chaîne d’approvisionnement mondiale.
Le dollar est bien sur la première devise internationale utilisée dans le commerce international. On voit souvent que les américains ont instrumentalisé, « weaponalisé » le dollar pour punir ou bien sanctionner le autres pays. C’est vraiment une tendance qui n’est pas très bien accueillie ou bien qui est rejetée par la majorité des pays du monde. Tous les pays du monde ont la volonté de promouvoir la démocratisation des relations internationales.
La Chine et la France sont tous les deux pour le multilatéralisme dans la gouvernance mondiale. Et dans ce contexte là, la Chine est favorable à toutes les mesures qui favorisent le commerce libre du monde, qui est favorable à maintenir un ordre normal libre du commerce international surtout dans le cadre de l’OMC qui est d’ailleurs un peu paralysé par des actes américains. C’est malheureux.
Donc, si on rencontre des difficultés dans le commerce international avec le dollar bien sûr, on doit chercher d’autres moyens, n’est-ce pas ?
Jean-Luc PUJOT
Rédaction de politique-actu.com
Parce que nous avons lu Confucius M. L’Ambassadeur, il n’y a pas deux soleils dans le ciel, de même il ne peut y avoir deux empereurs sur terre. Nous savons que la confrontation entre la Chine (en passe de devenir la première puissance mondiale) et les états Unis est presque inéluctable. C’est ce qu’on annoncé dès 1996 le professeur Huntington, en 2014 le géostratège français que connaît bien l’académie le général Henri Paris et en 2019 le professeur Graham Allison.
Notre ambition doit être celle, ici, de chercher à éviter cette guerre. Comment sortir du piège de Thucydide ? Dans cet esprit, monsieur l’Ambassadeur, trois questions s’imposent à mon sens.
Entre la Chine et le reste du monde, il existe cette inévitable méprise sur les intentions et méprise sur les arrières pensées. A votre avis, qu’est-ce qui fondent les méprises de la France, de l’Europe et des États-Unis sur les intentions de la Chine et comment dissiper ces méprises ? A contrario, vous qui connaissez très bien la France et l’Europe puisque vous avez été en poste à Paris dès 2001, existe t il des sources d’incompréhension de la part de Pékin vis à vis de la France, de l’Europe et des États-Unis ?
Deuxième question, pour éviter la guerre quels outils, quelles politiques mettre en place sur le terrain commercial. ? Par exemple, comment le projet des nouvelles routes de la soie puis le projet de la ceinture et de la route peuvent-ils profiter au commerce mondial, Favoriser l’esprit de coopération, l’esprit de gagnant-gagnant pour reprendre les termes du président Xhi Jinping. Quelles en seraient les conditions ? Sur le terrain stratégique quel mécanisme de désescalade des tensions faudrait-il mettre en place et notamment en cas d’incidence majeure militaire en mer de Chine ?
Et enfin troisième question en guise de conclusion : M. L’Ambassadeur êtes-vous confiant pour la paix ?
Réponse de S.E. M. L’Ambassadeur de Chine en France
Vous avez posé beaucoup de questions. La première sur la méprise de l’Occident sur la Chine, n’est-ce pas, sur les intentions réelles ou bien les arrières pensées. La deuxième question concerne l’initiative ceinture et route par la Chine les conséquences ou bien les résultats. La troisième question concerne les tensions en mer de Chine.
Tout d’abord concernant les méprises de l’Occident sur la Chine. Dans mon discours, j’ai déjà fait des propositions. Cela veut dire qu’il faut juger les choses sur la base des faits. Il faut voir de vos propres yeux, voir les réalités des faits de la Chine au lieu de croire des désinformations, des fake news et même des mensonges. Je vois que beaucoup de presses et de médias en Occident qui ne veulent pas présenter la Chine tel qu’elle est. Ils veulent toujours tordre le cou à la réalité, déformer un peu la réalité de la Chine ou bien ajouter un filtre, un prisme.
Les chinois relatent une anecdote sur la BBC de la Grande-Bretagne qui fait beaucoup de reportages sur la Chine. Les chinois disent que quand ils font des vidéos et des films avec des images et des photos ils ajoutent toujours un « filtre des enfers ». Cela signifie qu’ils font toujours usage de couleurs très sombres. Donc il faut avoir une optique très objective, voir la Chine telle qu’elle est, la présenter telle quelle est. Et d’ailleurs, il faut voir la Chine d’une optique globale. Cela veut dire qu’il ne faut pas s’attaquer à un aspect en ignorant les autres.
En Chine, il y a une fable très ancienne dans laquelle des aveugles qui touchent un éléphant. Une personne touche la trompe, il dit que l’éléphant est une corde. Une autre touche le corps, il dit que l’éléphant est un mur et le troisième touche la jambe et dit que l’éléphant est une colonne. Personne n’a obtenu la réalité n’est-ce pas ! C’est un exemple.
Par exemple sur la politique du « zéro Covid » dynamique de la Chine, il faut évaluer, juger cette politique d’un point de vue global. Évidemment, il y a des gens qui s’y opposent parce que le confinement à limiter leur liberté de déplacement mais dans l’intérêt général du pays, cette mesure est nécessaire. Ceux qui s’y opposent représentent peut-être 1% de la population tandis que ceux qui y sont favorables représentent 99%. Mais dans la presse, ici, on ne voit et on n’entend que la voix de ces 1% mais on n’entend pas la voix de ces 99% !
Par ailleurs, quand on parle de la politique ou bien du régime social de la Chine, il faut prendre en compte la situation des conditions de la Chine. La Chine est un pays en développement pas comme la France qui est un pays développé. Nous avons encore beaucoup de difficultés de développement, de disparités entre les villes et les zones rurales entre l’Est et l’Ouest, entre les différents secteurs industriels même et entre les riches et les pauvres.
Donc gouverner un grand pays comme la Chine qui a une population de 1,4 milliards, c’est beaucoup plus complexe et difficile que de gouverner n’importe quel autre pays. Il faut donc prendre en considération la situation et les conditions de la Chine et on peut dire que ce sont les chinois eux même qui connaissent le mieux la situation et les conditions de leur pays.
Pour la deuxième question, l’initiative ceinture et route, jusqu’à maintenant, selon moi, marche très bien. La Chine a fournit beaucoup d’occasions de développement aux différents pays surtout aux pays en développement sur le continent eurasiatique. Parce qu’au milieu du continent les pays en développement sont pour la plupart enclavés, ils n’ont pas de lien avec l’extérieur. On peut dire c’est un « bas fond » de développement, ils manquent d’investissements, ils manquent d’infrastructures et leur commerce ne sont pas fluides.
En appliquant cette initiative, la Chine les emmène ensemble à se développer. Nous investissons ensemble dans les infrastructures, dans le chemin de fer, dans les autoroutes, dans les barrages hydroélectriques. Et cette initiative a aussi permis l’expansion vers le continent africain. Cela a apporté beaucoup d’intérêts aux pays en développement même aux pays développés, aux pays européens. Entre la Chine et l’Europe nous avons des lignes de chemin de fer qui transportent des marchandises. Le volume augmente beaucoup chaque année.
Avant la crise russo-ukrainienne, les convois entre la Chine et l’Europe augmentent de 45% chaque année et à atteint l’année dernière 15 000 convois en une année. Donc c’est un exemple de résultats favorables de cette initiative ceinture et route et nous souhaitons continuer à développer cela car ce sont des mesures concrètes pour le développement ensemble du monde. Ce n’est pas seulement des paroles vides.
Je vois d’autres pays des Amériques ou en européens qui ont aussi lancé des initiatives que nous accueillons favorablement. Nous voulons faire de la coopération avec eux.
Pour la troisième question en effet pour la région Asie pacifique surtout dans la mer du sud de la Chine, la situation est stable et calme. Il n’y a aucun problème là bas. Mais pourquoi avez-vous l’impression que la situation est tendue là bas ? C’est parce que certains pays qui ne veulent pas que la situation soit calme dans cette zone-là. Ils envoient chaque jour des navires de guerre pour faire des navigations soit disant libres. En réalité c’est justement leur navigation libre qui a perturbé la situation sur place. Dans cette région là, dans cette région de la mer du Sud de la Chine il ne s’est jamais passé aucun incident de nature à perturber la navigation libre. La Chine et les 10 pays membres de l’ASEAN ont maintenu de très bonnes relations de coopération et ensemble nous sommes en train de négocier des codes de conduite sur la mer du Sud de la Chine et nous réussirons à terminer la négociation.
D’ailleurs, les 10 pays de l’ASEAN sont les premiers grands partenaires commerciaux de la Chine et vice versa. Maintenant l’ASEAN est le premier partenaire commercial de la Chine. L’Union Européenne devient le deuxième partenaire. Il y a un ou deux ans, l’union européenne était le premier partenaire commercial de la Chine et encore plus tôt c’était les États-Unis. Mais à cause de la guerre commerciale lancée par Donald Trump, le volume du commerce entre la Chine et les États-Unis a diminué. Mais ne vous en faites pas, la situation là-bas reste stable à moins que certains pays hors région ne fassent de sabotage.
Faycal JALLOUL
Écrivain
Merci Monsieur le Président. M. L’Ambassadeur, vous avez expliqué les raisons qui ont amené la Russie à faire une guerre préventive en Ukraine. Supposons que la même situation se trouve à Taïwan, seriez-vous prêt à faire la même chose ? Autrement dit : si Taïwan a pu acheter des fusées et les installer sur place ce qui pourrait menacer comme vous le disiez pour la Chine, est-ce que dans ces cas là vous êtes prêt à mener une guerre préventive à Taïwan ?
Réponse de S.E.M. l’Ambassadeur de Chine en France
Maintenant beaucoup de monde aime comparer le problème de Taïwan à la crise ukrainienne. Pourquoi avons-nous cette impression ? Cela signifie bien que les deux choses et les deux problèmes ont un point commun. C’est que quelques pays attisent toujours le feu dans les régions. Pour la Chine, le problème de Taïwan est incompatible à la crise ukrainienne parce que Taïwan fait partie intégrante de la Chine. C’est un fait juridique reconnu par toute la communauté internationale et défini par la résolution 2758 de l’Assemblée Générale des Nations Unies. C’est un fait juridique et diplomatique reconnu par l’immense majorité des pays du monde y compris la France, les États-Unis, la Grande-Bretagne.
Donc il n’y a pas de divergence parmi les pays du monde quand au fait que Taïwan fait partie intégrante de la Chine. Le problème est que les autorités actuelles à Taiwan font toujours des efforts pour se séparer de la Chine pour faire le séparatisme avec des appuis et des soutiens américains surtout. Cela va à l’encontre de l’intérêt vital de la Chine d’une part et d’autre part cela va à l’encontre des intérêts globaux de la Communauté Internationale car cela créera le désordre, le conflit et même la guerre dans la région.
Vous pouvez imaginer si les autorités de Taïwan déclarent l’indépendance un jour, quelle sera la réaction de la Chine ? Le gouvernement chinois ne permettra pas l’indépendance de Taïwan donc pour éviter cette situation tous les pays du monde doivent faire des efforts dans le sens de la paix au lieu de la guerre. Il ne faut pas attiser le feu comme le font les américains ces derniers temps. Par exemple vendre des armes à Taïwan ou bien envoyer des officiels de haut niveau pour visiter Taïwan. Cela ne rime à rien cela ne sert à rien pour la paix.
Amiral Jean DUFOURCQ
Directeur associé du cabinet de synthèse stratégique « La Vigie »
J’ai deux questions Mr l’Ambassadeur, la première est plutôt générale et de l’ordre des sciences politiques : on entend aujourd’hui beaucoup parler des occidentaux à nouveau, pouvez-vous nous dire si vous avez quelque peu de considération pour ce terme là ou bien si vous distinguez nettement les américains des européens ou plutôt, comment voyez-vous évoluer les relations entre les européens continentaux et les américains ?
J’ai également une question subsidiaire puisque je suis un marin : comment percevez-vous la présence militaire française dans ce que nous appelons l’indopacifique, qui est évidemment un concept un peu différent de celui que manipule les américains et en particulier ce que l’alliance Aukus a démontré ? Vous savez que nous avons une vision de l’indopacifique qui est plutôt tournée vers la réalité de la présence française dans l’indopacifique.
Réponse de S.E. M. l’Ambassadeur de Chine en France
L’occident vu par rapport à l’Orient n’est-ce pas ?
Au niveau politique ou bien au niveau idéologique, peut-être qu’il existe un bloc occidental, comme nous pouvons le voir au niveau des sanctions contre la Russie. La Chine veut depuis toujours maintenir de bonnes relations avec le monde occidental. Après la fondation de la république populaire de Chine en 1949, la Chine a été sanctionnée et bloquée par le monde occidental. Après la visite du président américain Nixon au début des années 70, les relations entre la Chine et les États-Unis se sont progressivement améliorées et à la fin des années 70, le gouvernement chinois dirigé par M Xiaoping a appliqué une politique de réformes et d’ouverture et à partir de ce moment je pense que les relations entre la chine et l’occident se sont considérablement améliorées malgré des hauts et des bas. Globalement, les relations entre les deux parties se sont très bien développées et cela dans l’intérêt de ces dernières.
La Chine a pu se développer économiquement et les pays occidentaux ont pu exploiter l’ouverture du marché gigantesque de la chine. C’est pourquoi nous n’avons jamais eu l’intention de détériorer nos relations avec les pays occidentaux et nous disons toujours que la chine a sa propre idéologie, son propre système social, différents de ceux des pays occidentaux. Nous n’interviendrons jamais dans votre système interne mais nous demandons que vous n’interveniez pas dans les affaires internes de la chine. On peut illustrer la différence entre les systèmes sociaux respectifs de la Chine et des États-Unis par un adage utilisé en chine qui dit que l’eau de pluie ne se mélange pas à l’eau de la rivière. Nous pouvons être en bons termes. Cela représente un monde harmonieux et en cela le président Xi Jinping a lancé l’initiative de construire la communauté d’avenir partagé pour l’humanité. Nous voulons construire avec les pays occidentaux un monde harmonieux et prospère au lieu de tomber dans le piège de Thucydide. Concernant la notion d’indopacifique, celle-ci a été créée par les américains pour contenir le développement de la Chine.
En effet, la Chine se trouve dans la région de l’Asie-Pacifique. Nous avons de très bonnes relations de coopération avec les pays de la zone Asie-Pacifique. La France prétend être un pays de la zone indopacifique car elle y possède des territoires, des zones économiques exclusives d’une superficie de plus d’un million de kilomètres carré. Vous avez raison d’avoir un regard sur cette région. Nous souhaitons cependant que la présence française dans cette région soit favorable au développement et à la coopération entre les différents pays de la région. La chine souhaite parvenir à une relation de coopération avec la France et nous ne voulons pas voir que les autres pays européens élaborent des programmes comme les États-Unis, leur stratégie dans la zone indo pacifique étant uniquement militaire et n’est pas favorable au maintien de la paix.
Comme je l’ai dit tout à l’heure, dans la région de la mer du sud de la Chine la situation est réellement calme et stable mais il y a certains pays qui veulent toujours saboter cette stabilité.
Madame Patricia LALONDE
Présidente de Geopragma
M. l’Ambassadeur, je voulais vous poser une question à propos des droits de l’homme : est-on réellement dans une guerre de civilisation ? Vous savez que l’occident accuse souvent la Chine de ne pas respecter les droits de l’Homme, et cela en ce qui concerne notamment la situation des Ouïghours.
Ma deuxième question concerne l’adhésion de la Finlande à l’Otan : la désescalade est-elle possible ou au contraire, allons-nous droit dans le mur ?
Réponse de S.E. M. l’Ambassadeur de Chine en France
Je vais tout d’abord répondre à votre deuxième question. J’ai dit tout à l’heure que l’expansion de l’Otan n’était pas favorable à la paix. Sur la question de si l’intégration de la Finlande à l’Otan est une bonne ou une mauvaise chose, je n’ai pas de commentaire car c’est une décision souveraine de la Finlande. Je n’ai pas de remarque à faire sur cette question.
En ce qui concerne les droits de l’homme, comment vous voyez la Chine ? Il faut partir de la situation réelle de la Chine pour évaluer les problèmes de ce pays-là. La Chine est un pays en voie de développement, dans lequel il existe bien sûr beaucoup de problèmes. Toutefois, la Chine a fait beaucoup d’efforts pour se développer, améliorer le bien-être du peuple, améliorer la situation des droits de l’homme et si on n’est pas partial, si l’on est objectif, tout le monde peut constater que depuis la fondation de la république populaire de chine il y a plus de 70 ans, la situation des droits de l’homme en chine s’est considérablement améliorée. Tant par rapport à son passé que par rapport à la majorité des autres pays du monde.
En ce qui concerne le soi-disant problème des Ouighours, de nombreux mensonges circulent. Est-ce que vous avez des preuves ? Il existe seulement quelques « racontars » de soi-disant chercheurs occidentaux mais à chaque fois le gouvernement de la région du Xinjiang apporte des éclaircissements, des preuves, des chiffres, des faits et des témoins même. Je vois souvent que les occidentaux invitent des soi-disant témoins pour raconter leur histoire, mais à chaque fois, le gouvernement chinois a apporté des preuves pour les démentir. De plus, l’ambassade de chine a posté de nombreuses vidéos ou des articles, des conférences de presse organisées par le gouvernement du Xinjiang, sur notre site web ou sur nos réseaux sociaux. Si vous êtes intéressés, vous pouvez les consulter.
En un mot, vous pouvez vous demander, si la situation des droits de l’homme en chine est si « méphitique » que le raconte certaines personnalités en occident, comment la chine peut si bien se développer, comment la chine peut devenir la deuxième économie du monde, comment le parti communiste chinois peut bénéficier du soutien de 90% de la population chinoise. Ce 90% n’est pas avancé par les chinois ou ses agences mais par les instituts de recherche occidentaux.
Patrick JOUAN
Vice-Président de la Fédération pour la paix universelle
Merci beaucoup Monsieur l’Ambassadeur de votre intervention et docteur Rastbeen de nous inviter à échanger. Je suis Patrick Jouan de la fédération pour la paix universelle, vice-président avec un statut ECOSOC général aux Nations-Unies. Ma question principale est : pourquoi ces cinq nations du conseil de sécurité dont la Chine, n’ont pas eu la sagesse, avant les événements tragiques qui sont intervenus, de prendre du temps pour discuter avec l’Otan ou de votre côté en Asie.
On connait la sagesse historique chinoise mais on ne voit pas pourquoi les représentants de vos pays, la Chine, l’Amérique, la Russie, la France et les autres ne viennent pas discuter pour prévenir la guerre. Quand vous vivez avec ces gens-là qui sont en Ukraine ou en Pologne, où j’ai vécu, c’est tragique. Donc je ne vois pas pourquoi vous n’avez pas la sagesse de proposer, comme nous l’avons fait par exemple, de faire des groupes de spécialistes et aussi des médias de faire des voyages « fact finding tour » comme on les appelait dans les années 80 pour prévenir la glasnost et ce qui pouvait arriver après, la guerre ou les conflits.
Je vous demande donc : est-ce que vous n’essayez pas de votre côté, avec votre voie au conseil de sécurité, d’essayer de prévenir la guerre, qui finalement condamne tout le monde ?
Réponse de S.E. M. l’Ambassadeur de Chine en France
C’est une question éternelle. Je pense que pour réaliser la paix ou bien prévenir la guerre il faut des efforts conjoints de tous les membres de la communauté internationale, et surtout de ceux du conseil de sécurité. On constate toutefois qu’il existe des divergences parmi ces membres-là, il y a des arrières pensés idéologiques ou stratégiques, il y a des pays qui veulent préserver leur hégémonie dans le monde et qui ne veulent pas voir la montée en puissance des autres pays. Ces pays-là gardent une mentalité du temps de la guerre froide qui mène in fine au jeu à somme nulle. Dans ce cas-là, il reste moins d’espace pour la consultation, la coopération, la concertation entre les différends pays. Il y aura donc plus de probabilités d’avoir des conflits, des confrontations et même la guerre. Bien sûr dans la guerre, ce sont les civils, les populations qui sont les premières victimes. L’on voit aujourd’hui des millions de réfugiés ukrainiens fuir le pays dans les pays européens. L’économie du pays a été totalement détruite.
Comme je l’ai dit tout à l’heure, pourquoi ne pouvons-nous pas agir avant, un peu plus tôt, avant la guerre ? La Russie a proposé de négocier avec l’Otan, avec les États-Unis mais ceci a été laissé sans suite. Même après l’éclatement de la guerre, les Russes et les Ukrainiens sont entré dans des phases de négociations, comme vous avez pu le constater. Mais pour une fois que les négociations auraient eu l’occasion d’aboutir, des incidents sont créés pour les saboter. Bien que nous ayons la sagesse, nous n’avons pas la puissance pour imposer la paix. C’est n’est pas le cœur qui manque, c’est la puissance.
Mohamed HAOUT
Professeur
Comme vous le savez, les études prospectives indiquent que la chine va bientôt devenir une grande puissance maritime. Donc, est-ce que la chine respectera le droit de la mer d’aujourd’hui (ou le futur droit de la mer, car il est toujours en gestation) ?
Réponse de S.E. M. l’Ambassadeur de Chine en France
La Chine est un parangon du respect du droit international. C’est un bon exemple, un bon étudiant, un bon élève du respect du droit international. Pourquoi posez-vous cette question ? Avez-vous un exemple de la chine qui a enfreint le droit de la mer ? Par rapport au litige en mer du sud de la Chine, beaucoup parlent de la convention des Nations-Unies sur le droit de la mer. On accuse la Chine de ne pas respecter cette convention sur le droit de la mer mais c’est faux, ça n’est pas la réalité. La Chine respecte strictement cette convention des Nations-Unis.
Dans la convention des Nations-Unies sur le droit de la mer il y a une clause qui dit que les pays peuvent émettre une réserve quand il s’agit d’un litige concernant des territoires, donc la chine peut d’après cette clause, déclarer que quand il s’agit d’un litige territorial avec les pays voisins, ils doivent être résolus par voie de négociations bilatérales, pas par un arbitrage international. Dans ce cas-là, la chine n’a aucunement enfreint le droit de la mer. D’ailleurs, quand la chine deviendra une puissance maritime, elle aura bien sur le besoin de développer sa puissance d’exploitation, de développement dans les océans, car la Chine est un grand pays. Dans ce cas-là, la Chine ne sera pas un pays agressif, elle reste toujours un élément de maintien de la paix dans le monde.
La Chine jouera un rôle de maintien de la paix dans la mer du sud de la Chine et nous tenterons toujours de résoudre nos litiges avec nos pays voisins, les pays de l’ASEAN, d’une manière pacifique. Si la Chine était un pays agressif et utilisait sa puissance militaire, elle pourrait reprendre les îles occupées par ces pays-là, mais ce n’est pas ce qu’elle a fait. Au contraire nous persistons à croire que la négociation, la voie pacifique, est le meilleur moyen. Le pays qui souhaite le plus ne plus voir le désordre, le conflit, la guerre dans cette région-là, c’est la Chine. Et je suis sûr que les 10 pays de l’ASEAN ne veulent pas non plus voir le conflit dans cette région car ces pays ont pour intérêt suprême le développement économique.
Tout le monde a vu l’exemple de l’Ukraine. Si la guerre se propage dans la région, aucun pays ne sera épargné. C’est pourquoi la chine a fait le plus d’efforts pour maintenir la paix et la stabilité dans cette région et même si les américains provoquent sans cesse la Chine sur le problème de Taiwan, nous gardons notre sang-froid. Nous n’avons pas eu de réaction excessive même si cela serait un droit légitime. Je voudrais donc vous rassurer, quelque que soit le niveau de développement de la Chine, elle restera un grand pays responsable et favorisant la paix.